Sonnets Chrétiens


Livre Second — Sonnet XXXV

Sur la Captivité de Babylone

Retire-toi, soleil, importune lumière !
Qu’en l’horreur de la nuit mes tristes yeux plongés,
En deux sources de pleurs soient pour jamais changés ;
Jérusalem n’est plus qu’un monceau de poussière !

Des cruels Chaldéens la bande meurtrière
A nos palais détruits, nos trésors saccagés,
Nos princes, nos enfants, nos prêtres égorgés,
Et rendu la Judée un affreux cimetière.

Dieu même à leur fureur a livré sa maison,
Et contre son saint peuple, en exil, en prison,
Déployé en leur faveur ses plus terribles peines.

Oui, Dieu combat pour eux, il marche au premier rang ;
Ah ! c’est peu que mes yeux se changent en fontaines ;
Exprime-toi, mon cœur, par des larmes de sang.


1 : Plutarque parle de certains peuples, qui, dans leurs grandes afflictions, avaient des caveaux de deuil, où ils descendaient pour ne point voir la lumière. 9 : C’est le premier temple de Jérusalem, qui avait duré 410 ou 415 ans. 13 : Les larmes nous manqueront plutôt, que la matière de la douleur, disaient des affligés fameux dans l’Histoire. Et quand nous aurions dans nos yeux une fontaine de larmes, cette fontaine ne suffirait pas. (St. Augustin)

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