Le Jour du Seigneur, étude sur le Sabbat

3.8 — Irénée.

D’abord disciple de Polycarpe, plus tard évêque de Lyon, il fut un lien vivant, saint et béni, entre les Églises de l’Orient et celles de l’Occident. Il vécut de 140 environ à 202. Nous l’avons déjà vu défendre sans fanatisme, au temps de Victor, le rite de la majorité des Églises pour la célébration de la Cène de Pâque, rite dont la présupposition fondamentale était l’existence et l’importance bien avérée de l’institution du dimanche comme jour commémoratif de la résurrection du Seigneur. Eusèbe, avant de citer quelques passages de la lettre d’Irénée à Victor au nom des Églises de Gaule, en résume ainsi le sens général : « Il reconnaît que c’est au seul jour du dimanche (ἐν μόνῃ τῇ τῆς κυριακῆς ἡμέρᾳ) qu’il faut célébrer le mystère de la résurrection du Seigneur » (c’est-à-dire la Cène de la fête de cette résurrection), mais il blâme énergiquement Victor pour ses procédés à l’égard des « Églises de Dieu qui conservent la tradition d’une ancienne coutume. »

Ailleurs nous avons vu que d’après l’auteur du petit ouvrage Quaest. et resp. ad orthodoxos faussement attribué à Justin, Irénée, dans un Traité sur la Pâque, faisait remonter jusqu’aux temps apostoliques l’usage de ne point s’agenouiller le dimanche et disait que cet usage n’avait pas moins lieu dans les jours de la Pentecôte, rappelant, comme le dimanche, la résurrection du Seigneur.

Dans ce passage, comme dans la citation précédente, apparaît la même expression assez étrange ἡ ἡμέρα τῆς κυριακῆς, comme qui dirait dans notre langue : le jour du dominical (sous-entendu : jour), ou : le jour du jour du dimanche (dies dominica), c’est-à-dire, au fond, le jour du Jour du Seigneur. Rien ne prouve mieux, nous semble-t-il, que ἡ κυριακή était tout à fait devenu un substantif, qui, pour être compris, n’avait besoin d’aucun sous-entendu et pouvait même avoir perdu son sens étymologique, précisément comme notre mot dimanche. Le sens concret, définitif, de celui-ci, pour désigner la fête du premier jour hebdomadaire, n’est-il pas en effet devenu tellement usuel que, nous aussi, nous disons couramment, sans nous douter du pléonasme : le jour du dimanche ? Une remarque analogue a déjà été faite à propos d’un passage de la Didachè.

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