Histoire de la Réformation du seizième siècle

10.3

Diète de Nuremberg – Invasion de Soliman – Le nonce demande la mort de Luther – Les prédicateurs de Nuremberg – Promesse de réforme – Griefs de la nation – Arrêté de la diète – Lettre foudroyante du pape – Avis de Luther

Le 25 mars 1522, avant l’arrivée d’Adrien à Rome, la diète s’était assemblée à Nuremberg. Déjà avant cette époque, les évêques de Mersbourg et de Misnie avaient demandé à l’électeur de Saxe la permission de faire, dans ses États, la visite des couvents et des églises. Frédéric, pensant que la vérité devait être assez forte pour résister à l’erreur, avait répondu favorablement à cette demande. La visite se fit. Les évêques et leurs docteurs prêchèrent avec violence contre la Réforme ; ils exhortèrent, ils menacèrent, ils supplièrent ; mais leurs argumentations paraissaient sans force ; et quand voulant recourir à des armes plus efficaces, ils demandèrent au bras séculier de faire exécuter leurs décrets, les ministres de l’électeur leur répondirent qu’il fallait examiner l’affaire d’après la Bible, et que l’électeur, dans son âge avancé, ne pouvait pas se mettre à étudier la théologie. Ces efforts des évêques ne ramenèrent pas une seule âme dans le bercail de Rome, et Luther, qui, peu de temps après, parcourut ces contrées et y fit entendre sa parole puissante, effaça les faibles impressions qu’ils avaient produites çà et là.

Ce que Frédéric avait refusé de faire, on pouvait craindre que le frère de l’Empereur, l’archiduc Ferdinand ne le fit. Ce jeune prince, qui présida une partie des séances de la diète, prenant peu à peu plus de fermeté, pouvait bien, dans son zèle, tirer témérairement l’épée, que son frère, plus prudent et plus politique, laissait sagement dans le fourreau. En effet, Ferdinand avait commencé à poursuivre avec cruauté, dans ses Etats héréditaires d’Autriche, les partisans de la Réformation. Mais Dieu employa à diverses reprises, pour délivrer le christianisme renaissant, le même instrument dont il s’était servi pour détruire le christianisme corrompu. Le croissant parut dans les provinces épouvantées de la Hongrie. Le 9 août, après six semaines de siège, Belgrade, le boulevard de ce royaume et de l’Empire, tomba sous les coups de Soliman. Les sectateurs de Mahomet, après avoir évacué l’Espagne, semblaient vouloir rentrer en Europe par l’Orient. La diète de Nuremberg oublia le moine de Worms, pour ne penser qu’au sultan de Constantinople. Mais Charles-Quint réunit dans son esprit ces deux adversaires. Il faut, écrivit-il au pape, de Valladolid, le 31 octobre, il faut arrêter les Turcs et punir par l’épée les partisans de la doctrine empoisonnée de Luthera. »

a – Das man die Nachfolger derselben vergiften Lehre, mit dem Schwert strafen mag. (L. Opp. XVII. 321.)

Bientôt l’orage, qui avait paru se détourner de la Réforme et se diriger vers l’Orient, s’amoncela de nouveau sur la tête du Réformateur. Son retour à Wittemberg et le zèle qu’il y déployait avaient réveillé toutes les haines. « Maintenant que l’on sait où le prendre, disait le duc George, qu’on exécute contre lui l’arrêt de Worms ! » On assurait même en Allemagne que Charles-Quint et Adrien se trouveraient ensemble à Nuremberg pour y aviserb. « Satan sent la blessure qui lui est faite, dit Luther ; c’est pourquoi il se met dans une telle fureur. Mais Christ a déjà étendu sa main, et il le foulera bientôt sous ses pieds, malgré les portes de l’enferc. »

b – Cum fama sit fortis et Cæsarem et papam Nurnbergam conventuros. (L. Epp. II. 214.)

c – Sed Christus qui cœpit conteret eum. (Ibid. 215.)

Au mois de décembre 1522, la diète s’assembla de nouveau à Nuremberg. Tout paraissait annoncer que, si Soliman avait été le grand ennemi dont elle s’était occupée dans sa session du printemps, Luther serait celui dont elle s’occuperait dans la session d’hiver. Adrien VI, d’origine allemande, se flattait de trouver auprès de sa nation un accueil dont un pape d’origine italienne n’eût jamais pu se flatterd. Il chargea en conséquence Chieregati, qu’il avait connu en Espagne, de se rendre à Nuremberg.

d – Quod ex ea regione venirent, unde nobis secundum carnem origo est. (Bref du pape. L. Opp. Lat. II. 352.)

A peine la diète fut-elle assemblée, que plusieurs princes parlèrent avec violence contre Luther. Le cardinal-archevêque de Salzbourg, qui jouissait de toute la confiance de l’Empereur, voulait que l’on prît des mesures promptes et décisives avant l’arrivée de l’électeur de Saxe. L’électeur Joachim de Brandebourg, toujours ferme dans sa marche, et le chancelier de Trêves, pressaient également l’exécution de l’édit de Worms. Les autres princes étaient en grande partie indécis, partagés. L’état de tourmente dans lequel se trouvait l’Église remplissait d’angoisse ses plus fidèles serviteurs. Je donnerais, s’écria en pleine diète l’évêque de Strasbourg, un de mes dix doigts pour n’être pas prêtree. »

e – Er wollte einen Finger drum geben… (Seck. p. 568.)

Chieregati, d’accord avec le cardinal de Salzbourg, demandait la mort de Luther. « Il faut, disait-il de la part du pape, et en tenant dans ses mains un bref du pontife, il faut séparer entièrement du corps ce membre gangrenéf. Vos pères ont fait périr à Constance Jean Huss et Jérôme de Prague ; mais ils revivent dans Luther. Suivez l’exemple glorieux de vos ancêtres, et remportez, avec le secours de Dieu et de saint Pierre, une victoire magnifique sur le dragon infernal. »

f – Resecandos uti membra jam putrida a sano corpore. (Pallavicini, I. 158.)

A l’ouïe du bref du pieux et modéré Adrien, la plupart des princes furent saisis d’effroig. Plusieurs commençaient à mieux comprendre les arguments de Luther, et ils avaient espéré autre chose du pape. Ainsi donc Rome, sous un Adrien, ne veut pas reconnaître ses fautes ; elle agite encore ses foudres, et les provinces germaniques vont être couvertes de désolation et de sang. Tandis que les princes gardaient tristement le silence, les prélats et les membres de la diète, dévoués à Rome, s’agitaient en tumulte. « Qu’on le mette à morth, » criaient-ils, au dire de l’envoyé de Saxe, qui assistait à la séance.

g – Einen grossen Schrecken eingejagt. (Seck. p. 552.)

h – Nicht anders geschrien denn: Crucifige! crucifige! (L. Opp. XVIII. 367.)

Des paroles bien différentes se faisaient entendre dans les temples de Nuremberg. La foule se précipitait dans la chapelle de l’hôpital et dans les églises des Augustins, de Saint-Sébald et de Saint-Laurent, pour y assister à la prédication de l’Évangile. André Osiandre prêchait dans ce dernier temple avec une grande force. Plusieurs princes, et en particulier Albert, margrave de Brandebourg, qui, en sa qualité de grand maître de l’ordre Teutonique, prenait rang immédiatement après les archevêques, s’y rendaient fréquemment. Des moines qui abandonnaient les couvents de la ville, apprenaient des métiers pour gagner leur vie par leur travail.

Chieregati ne pouvait tolérer tant d’audace. Il demanda qu’on fit jeter en prison les prêtres et les moines rebelles. La diète, malgré la vive opposition des envoyés de l’électeur de Saxe et du margrave Casimir, résolut de faire saisir les moines ; mais elle consentit à communiquer d’abord à Osiandre et à ses collègues les plaintes du nonce. Un comité, présidé par le fanatique cardinal de Salzbourg, fut chargé de l’exécution. Le péril était imminent ; la lutte allait commencer, et c’était le conseil même de la nation qui l’engageait.



Andreas Osiander

Toutefois, la bourgeoisie la prévint. Pendant que la diète délibérait sur ce qu’il fallait faire à l’égard de ces ministres, le conseil de la ville de Nuremberg délibérait sur ce qu’il devait faire à l’égard de la résolution de la diète. Il arrêta, sans outre-passer par là ses attributions, que si l’on voulait enlever de force les prédicateurs de la ville, on les mettrait de force en liberté. Une telle résolution était significative. La diète étonnée répondit au nonce, qu’il n’était pas permis de saisir les prédicateurs de la ville libre de Nuremberg, sans les avoir convaincus d’hérésie.

Chieregati fut vivement ému de ce nouvel outrage fait à la toute-puissance de la papauté. « Eh bien, dit-il fièrement à Ferdinand, ne faites rien, mais laissez-moi agir. Je ferai saisir ces prédicateurs hérétiques au nom du papei. » A peine le cardinal-archevêque Albert de Mayence et le margrave Casimir eurent-ils appris cette étrange résolution, qu’ils se rendirent en hâte auprès du légat et le supplièrent d’y renoncer. Le nonce se montrait inébranlable, soutenant qu’il fallait qu’on obéît au pape au sein de la chrétienté. Les deux princes quittèrent le légat en lui disant : « Si vous persistez dans votre dessein, nous vous sommons de nous le faire savoir ; car nous quitterons la ville avant que vous ayez osé mettre la main sur ces prédicateursj. » Le légat abandonna son projet.

i – Sese auctoritate pontifica curaturum ut isti caperentur. (Corp. Ref. I. 606.)

j – Priusquam illi caperentur, se urbe cessuros esse. (Ibid.)

Désespérant de réussir par la voie d’autorité, il résolut d’avoir recours à d’autres expédients, et fit dans ce but connaître à la diète les desseins et les mandats du pontife qu’il avait jusqu’alors tenus secrets.

Mais l’honnête Adrien, étranger au monde, nuisait par sa franchise même, à la cause qu’il avait tant à cœur de servir. « Nous savons bien, disait-il dans les résolutions remises à son légat, que depuis plusieurs années on voit dans la sainte cité beaucoup d’abus et d’abominationsk. La contagion a passé de la tête dans les membres ; elle est descendue des papes aux autres ecclésiastiques. Nous voulons réformer cette cour romaine de laquelle proviennent tant de maux ; le monde entier le désire, et c’est pour le faire, que nous nous sommes résigné à monter sur le trône des pontifes. »

k – In eam sedem aliquot jam annos quædam vitia irrepsisse, abusus in rebus sacris, in legibus violationes, in cunctis denique perversionem. (Pallav. I. 160. Voyez aussi Sarpi, p. 25 ; L. Opp. XVII, p. 329, etc.)

Les partisans de Rome rougirent de honte en entendant ces étranges paroles. Ils trouvaient, comme Pallavicini, ces aveux trop sincèresl. Les amis de la Réformation, au contraire, se réjouissaient de voir Rome elle-même proclamer sa corruption. On ne doutait plus que Luther n’eût raison, puisque le pape le déclarait.

l – Liberioris tamen, quam par erat, sinceritatis fuisse visum est, ea conventui patefacere. (Ibid. 162.)

La réponse de la diète fit voir combien l’autorité du souverain pontife avait baissé dans l’Empire. L’esprit de Luther semblait avoir passé dans le cœur des représentants de la nation. Le moment était favorable : l’oreille d’Adrien semblait ouverte ; l’Empereur était absent ; la diète résolut de rassembler en un corps tous les griefs que, depuis des siècles, l’Allemagne avait contre Rome, et de les envoyer au pape.

Le légat fut effrayé d’une telle détermination. Il supplia et menaça tour à tour, mais en vain. Les états séculiers étaient décidés, et les états ecclésiastiques ne s’opposaient pas à leur dessein. Quatre-vingts griefs furent signalés. Les abus et les ruses des papes et de la cour romaine pour pressurer l’Allemagne, les scandales et les profanations du clergé, les désordres et les simonies des tribunaux ecclésiastiques, les empiétements sur le pouvoir séculier pour l’asservissement des consciences, étaient exposés avec autant de franchise que de force. Les états donnaient à entendre que c’étaient des traditions d’hommes qui étaient la source de toute cette corruption, et ils terminaient en disant : Si ces griefs ne sont pas redressés en un temps déterminé, nous aviserons à d’autres moyens, pour échapper à tant d’oppressions et de souffrancesm. » Chieregati, prévoyant le terrible recezn que la diète ferait rédiger, quitta en hâte Nuremberg, afin de ne pas être porteur d’un si triste et si insolent message.

m – Wie sie solcher Beschwerung und Drangsaal entladen werden. L. Opp. XVIII. 354.

n – Nom donné aux procès-verbaux des anciennes diète germaniques.

Cependant n’était-il pas à craindre que la diète cherchât à racheter sa hardiesse en sacrifiant Luther ? On le pensa d’abord ; mais un esprit de justice et de vérité avait soufflé sur cette assemblée. Elle demanda, comme Luther, la convocation dans l’Empire d’un concile libre, et ajouta qu’en attendant qu’il eût lieu, on ne prêcherait que le pur Évangile et l’on n’imprimerait rien sans l’approbation d’un certain nombre de gens de bien et de savoiro. Ces résolutions nous permettent d’apprécier les pas immenses que la Réformation avait faits depuis Worms ; et cependant l’envoyé saxon, le chevalier de Feilitsch, protesta solennellement contre la censure, quelque modérée qu’elle fût, que la diète prescrivait. On vit dans l’arrêté de la diète une première victoire de la Réformation, à laquelle de plus décisives encore allaient succéder. Les Suisses eux-mêmes en tressaillirent dans leurs montagnes. « Le pontife romain est vaincu en Allemagne, dit Zwingle. Il n’y a plus qu’à lui arracher ses armes. Voilà la bataille qu’il nous reste à livrer, et ce sera la plus furieuse ; mais nous avons Christ pour témoin du combatp. » Luther dit hautement que c’était Dieu même qui avait inspiré un tel édit aux princesq.

o – Ut pie placideque purum Evangelium prædicaretur. Pall. I. 166; Sleidan, I. 135.

p – Victus est ac ferme profligatus e Germania Romanus pontifex. (Zw. Epp. 313. 11 Octobre 1523.)

q – Gott habe solenes E.G. eingeben. (L. Opp. XVIII. 476.)

La colère fut grande au Vatican, parmi les ministres de la papauté. Quoi ! ce n’est pas assez d’avoir un pape qui trompe toutes les espérances des Romains, et dans le palais duquel on ne chante, ni ne joue ; il faut encore voir des princes séculiers tenir un langage que Rome déteste, et refuser la mort de l’hérétique de Wittemberg.

Adrien lui-même fut rempli d’indignation de ce qui se passait en Allemagne, et ce fut sur l’électeur de Saxe qu’il déchargea sa colère. Jamais les pontifes de Rome ne firent entendre un cri d’alarme plus énergique, plus sincère et peut-être plus touchant.

« Nous avons attendu longtemps et peut-être trop longtemps, dit le pieux Adrien, dans le bref qu’il adressa à l’électeur ; nous voulions voir si Dieu ne visiterait pas ton âme, et si tu n’échapperais pas enfin aux embûches de Satan. Mais là où nous espérions cueillir des raisins, il ne s’est trouvé que du verjus. Le souffleur a soufflé en vain ; tes méchancetés ne se sont point fondues. Ouvre donc les yeux pour voir la grandeur de ta chute !

Si l’unité de l’Église a cessé, si les simples ont été détournés de la foi qu’ils avaient puisée aux mamelles de leur mère, si les temples sont déserts, si les peuples sont sans prêtres, si les prêtres ne reçoivent plus l’honneur qui leur est dû, si les chrétiens sont sans Christ, à qui le devons-nous, si ce n’est à toir ?… Si la paix chrétienne s’est enfuie de la terre, s’il n’y a plus dans le monde que discorde, rébellion, brigandage, assassinat, incendie ; si le cri de guerre retentit de l’Orient à l’Occident, si une bataille universelle se prépare, c’est toi, c’est encore toi qui en es l’auteur ! Ne vois-tu pas cet homme sacrilège (Luther), déchirer de ses mains coupables et fouler de ses pieds impurs les images des saints, et même la croix sacrée de Jésus-Christ ?… Ne le vois-tu pas, dans sa colère impie, exciter des laïques à laver leurs mains dans le sang des prêtres et à renverser les églises du Seigneur ?

r – Dass die Kirchen ohne Volk sind, dass die Völker ohne Priester sind, dass die Priester ohne Ehre sind, und dass die Christen ohne Christo sind. (Ibid. 371.)

De quelle peine, de quel martyre penses-tu donc que nous te jugerons digne ?… Aie pitié de toi-même, aie pitié de tes misérables Saxons ; car si vous ne vous convertissez bientôt, Dieu fera fondre sur vous ses vengeances. Au nom du Dieu Tout-Puissant et de notre Seigneur Jésus-Christ, dont je suis le représentant sur la terre, je te déclare que tu seras puni dans ce monde, et que tu seras plongé au feu éternel dans celui qui est à venir. Repens-toi et te convertis !… Les deux glaives sont suspendus sur ta tête, le glaive de l’Empire et le glaive de la papauté… » Le pieux Frédéric frémit en lisant ce bref menaçant. Il avait écrit peu auparavant à l’Empereur, pour lui dire que la vieillesse et la maladie le rendaient incapable de s’occuper de ces affaires ; et on lui répondait par la lettre la plus audacieuse que jamais prince souverain eût reçue. Affaibli par l’âge, il jeta les yeux sur cette épée qu’il avait portée au saint sépulcre, dans les jours de sa force. Il commença à croire qu’il faudrait la tirer du fourreau pour protéger la conscience de ses sujets, et que, déjà sur le bord de la tombe, il ne pourrait y descendre en paix. Il écrivit aussitôt à Wittemberg pour avoir l’avis des pères de la Réformation.

Là aussi l’on prévoyait des troubles et des persécutions. « Que dirai-je ! s’écriait le doux Mélanchthon, de quel côté me tournerai-je ! La haine nous accable, et le monde est transporté de rage contre nouss. » Luther, Linck, Mélanchthon, Bugenhagen et Amsdorff consultèrent ensemble sur ce qu’il fallait répondre à l’électeur. Ils le firent tous à peu près dans le même sens, et les avis qu’ils lui donnèrent sont bien remarquables :

s – Quid dicam? quo me vertam? (Corp. Ref. I. 627.)

« Nul prince, dirent-ils, ne peut entreprendre une guerre sans le consentement du peuple, des mains duquel il a reçu l’Empiret. Or le peuple ne veut pas que l’on se batte pour l’Évangile, car il ne croit pas. Que les princes ne prennent donc pas les armes : ils sont princes des nations, c’est-à-dire des infidèles. » Ainsi, c’était l’impétueux Luther qui demandait au sage Frédéric de remettre l’épée dans le fourreau. Il ne pouvait mieux répondre au reproche que le pape venait de lui faire, d’exciter les laïques à laver leurs mains dans le sang du clergé. Peu de caractères ont été moins compris que le sien. Cet avis est du 8 février 1523. Frédéric se contint.

t – Principi nullum licet suscipere bellum, nisi consentiente populo, a quo accepit imperium. (Ibid. 601.)

La colère du pape porta bientôt ses fruits. Les princes qui avaient exposé leurs griefs contre Rome, effrayés de leur hardiesse, voulurent l’expier par leurs complaisances. Plusieurs se disaient d’ailleurs que la victoire demeurerait au pontife de Rome, puisqu’il paraissait le plus fort. « De nos jours, dit Luther, les princes se contentent de dire : trois fois trois font neuf ; ou bien, deux fois sept font quatorze : le compte est juste ; l’affaire réussira. Alors notre Seigneur Dieu se lève et dit : « Pour combien donc me comptez-vous, moi ?… Pour un zéro peut-être ?… Puis il tourne sens dessus dessous leurs supputations, et leurs comptes se trouvent fauxu. »

u – So kehrt er ihnen auch die Rechnung gar um. (L. Opp. XXII. 1831.)

chapitre précédent retour à la page d'index chapitre suivant