Ayant ainsi touché la question de la source du ministère, qui se lie au premier principe même, à l’existence du Christianisme, et qui a son être dans l’activité de l’amour de Dieu, examinons quelle est la puissance qui agit dans ce ministère, et sous quelle responsabilité ceux qui en sont chargés l’exercent.
Le IIIme chapitre de la seconde Épître aux Corinthiens désigne en général son caractère : c’est le ministère de l’Esprit.
Deux grands traits caractérisent l’œuvre de Christ dans le monde. Il est l’Agneau de Dieu qui ôte le péché et Il baptise du Saint-Esprit. Je laisse de côté le premier point, tout plein d’intérêt qu’il soit, comme ne faisant pas partie de notre sujet, sauf comme objet dont s’occupe le ministère. Je m’arrête à la seconde des choses par laquelle Jean Baptiste désigne l’œuvre et la gloire de Christ : « Il baptise du Saint-Esprit. » Point évidemment de toute importance, source de toute la puissance, de toute l’énergie spirituelle qui se trouvent dans l’Église. Et il faut de l’énergie spirituelle pour que Satan soit combattu avec succès, et que ces pauvres corps, la chair étant mortifiée, deviennent des vases du témoignage et de la puissance de Dieu. Ceci, pour le fond de la chose, a eu lieu pour le Seigneur Jésus Lui-même. Aussi, est-ce une vérité de toute importance, que cette puissance du Saint-Esprit dans l’humanité. Jésus était oint du Saint-Esprit et de puissance. « Comment », dit Saint-Pierre à Corneille, « Dieu a oint du Saint-Esprit et de force Jésus le Nazarien, qui a passé de lieu en lieu faisant du bien et guérissant tous ceux qui étaient sous la puissance du Démon, car Dieu était avec lui. » Il ne s’agissait pas ici de sa divinité, car Il était Dieu avant la fondation du monde ; ni de la perfection de son humanité, car c’était déjà une chair sainte qui était née de la vierge Marie. Il était Fils de Dieu, non seulement quand Il a créé le monde, mais aussi dans le monde, homme né de cette Marie par la puissance du Saint-Esprit. Il en avait la conscience quand Il répondait à sa mère qui le cherchait dans le temple : « Ne saviez-vous pas qu’il me faut être occupé aux affaires de mon Père ? » Il ne s’agissait pas d’amour : sa présence dans le monde, c’était l’amour même. – Mais, outre tout cela, Jean Baptiste voit le Saint-Esprit descendre comme une colombe et demeurer sur Lui. « Dieu a oint Jésus le Nazarien du Saint-Esprit et de force. C’est alors seulement que, rempli du Saint-Esprit, Il commence son ministère, agit officiellement comme Fils de l’homme dans le monde, et subit les tentations par lesquelles le second Adam devait être éprouvé, pour pouvoir revendiquer des droits au-dessus de la puissance de Satan, tandis que le premier Adam était tombé sous cette puissance. C’est alors qu’Il chasse les démons par l’Esprit de Dieu, et dit à sa mère : « qu’y a-t-il entre moi et toi ? » Sa vie était toute de la puissance du Saint-Esprit en ministère. Par le Saint-Esprit, il s’est offert sans taches à Dieu. C’était bien plus qu’un homme ; et c’était pourtant un homme, ce « Jésus le Nazarien, que Dieu avait oint du Saint-Esprit et de force. »
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Notre part en tout cela a encore un autre élément. Ici, c’était l’homme, le second Adam sur la terre, accomplissant Lui-même, en présence de Satan, tout ce que l’homme spirituel pouvait offrir à Dieu dans sa vie. Il ne faisait pas du bruit dans la rue. Il a dû être parfait et, comme homme, vaincre Satan dans le monde où l’homme avait manqué, et dans les circonstances mêmes où l’homme se trouvait par sa chute. C’est ce que ce précieux Sauveur a parfaitement accompli.
Toutefois, jusque-là, Il n’était pas encore la source d’un nouvel ordre de choses.
Le premier Adam a manqué dans le jardin d’Éden, là où il était entouré de bénédictions. C’est quand il en a été chassé, que, déjà déchu, il est devenu le chef d’une race déchue, dans ce monde de péché et de ruine. Jésus, le second Adam, a dû être premièrement parfait ; et, dans sa personne, remporter la victoire sur Satan au milieu de la ruine ; victoire si complète et si parfaite qu’il pouvait, ayant lié l’homme fort, piller ses biens, et que, dans la bouche de ceux qu’Il envoyait, son nom suffisait pour chasser les démons. Mais, pour commencer un nouveau monde de gloire et de bénédiction, pour racheter son Église et la rendre semblable à Lui-même, selon la puissance par laquelle il peut s’assujettir toutes choses, Il a dû remporter la victoire sur Satan dans la dernière forteresse où il tenait l’homme captif, par le jugement et sous la sentence de Dieu Lui-même, c’est-à-dire, dans la mort. Il a dû subir en plein la dernière conséquence du péché, comme résultat de la colère de Dieu, de la puissance de Satan ainsi que de la faiblesse de l’homme. C’est ce qu’Il a fait.
Ainsi, la foudre de la colère de Dieu étant passée, sauf pour ceux qui rejettent Jésus ; toute la puissance de Satan détruite dans le siège de cette puissance par rapport à l’homme ; la mort vaincue, ses portes d’airain brisées ;… Jésus second Adam vainqueur de Satan et de la mort, Héritier, comme Fils de l’Homme et par la justice de Dieu, de tous les droits d’Adam et de beaucoup plus qu’Adam n’avait perdu ; tandis que, comme Fils de Dieu, soutenant toutes choses par la parole de la puissance ; – image du Dieu invisible et expression de sa gloire, Jésus, selon les conseils de Dieu quant à l’homme, commence à agir comme Chef d’un nouveau monde, d’une nouvelle création. Cependant quoiqu’Il eût aboli tout ce qui était contre nous ; quoiqu’Il eût triomphé de Satan sur la croix et amené Captivité captive, le temps de la délivrance de la création n’était pas encore venu. Il n’était venu que pour un témoignage de la puissance de Jésus au milieu de la création encore déchue et dont Satan n’était pas encore chassé ; pour le rassemblement de l’Église de ses élus en dehors du monde, pour les nourrir et les chérir jusqu’à ce qu’ils fussent présentés à Lui en gloire ; enfin, pour faire sur la terre, de cette Église, le siège de cette puissance dans laquelle le Fils de l’Homme se trouvait à la droite de Dieu. Lui qui remplissait maintenant toutes choses, étant descendu premièrement du plus haut des cieux dans les parties les plus basses de la terre, et remonté de nouveau où Il était auparavant, Il avait reçu des dons pour les hommes. Éph. IV, 8 – 10.
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La Pentecôte n’a été ni un changement moral des affections, ni un souffle de vie de Jésus ressuscité ; tout cela avait déjà eu lieu. Les disciples attendaient à Jérusalem qu’ils fussent doués de puissance d’en Haut. Et, en ayant été doués, nul doute que cela n’agit puissamment sur leurs affections, parce que cela révélait puissamment Jésus ; mais la vie et les affections étaient déjà là, de même que, dans un sens encore plus élevé, la vie et les affections du Fils de Dieu étaient en Jésus avant que le Saint-Esprit descendît sur Lui comme une colombe. Jésus prit place, selon les conseils de Dieu, avec les fidèles d’Israël dans le baptême de Jean, accomplissant toute justice ; et alors Il a été oint pour source au milieu d’eux. Par l’efficace de sa mort et de sa résurrection, il place ses disciples dans la relation avec Dieu où il est Lui-même, s’en allant vers son Père et leur Père, son Dieu et leur Dieu ; et Il les baptise du Saint-Esprit, témoin de sa gloire dans les lieux Très-Hauts, et puissance qui identifie ses disciples avec Lui-même dans cette gloire. Il est très-certain, par les paroles de Jésus Lui-même (Act. I), que le don du Saint-Esprit le jour de la Pentecôte a été ce baptême du Saint-Esprit, et que rien de ce que les Apôtres avaient reçu auparavant n’était l’accomplissement de cette promesse ; car Il leur dit : « Vous « serez baptisés du Saint-Esprit dans peu de jours. »
L’Évangile de Saint-Luc, dont les Actes des Apôtres ne sont qu’une continuation (les Actes reprenant ce sujet en des termes qui sont presque les mêmes que ceux de cet Évangile), nous présente le Seigneur Jésus particulièrement comme Fils de l’Homme, Chef d’un nouveau système. Cet Évangile présente cela moralement ; les Actes en puissance.
L’Évangile selon Saint-Jean, quoique touchant le même sujet, le présente sous une autre forme. Le Saint-Esprit est Esprit de vérité, Avocat ou Consolateur, envoyé du Père en son nom ou de Jésus Lui-même de la part du Père ; Il conduit en toute vérité, montre les choses à venir et fait connaître que Jésus est dans le Père, les disciples en Jésus, et Lui en eux. Si je traitais le sujet du Saint-Esprit, il me faudrait parler de la fin de cet Évangile, où Il est présenté comme Esprit de vérité au milieu de l’Église, témoignant contre le monde par sa présence, et conduisant les fidèles en toute vérité ; il faudrait considérer tous ces passages où Il est présenté comme sceau de rédemption, arrhes de l’héritage et Esprit d’adoption, tels que 2 Cor. I, Éph. I, Gal. IV, Rom. VIII et beaucoup d’autres ; mais il faut se rappeler, si la pensée de la présence du Saint-Esprit, de ce Puissant Consolateur nous entraîne, que notre sujet est le ministère, sujet assez important pour glorifier l’Esprit en en parlant.
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Pour en revenir à notre sujet, c’est à cause de ces vérités, dont nous venons de parler, que nous trouvons en Saint-Jean que le Saint-Esprit n’avait pas encore été donné parce que Jésus n’était pas encore glorifié ; car la présence du Saint-Esprit ici-bas était la conséquence de la glorification de Celui qui ici-bas avait tout accompli.
Ici, je voudrais, en rapport avec le point qui nous a occupé, dire un mot sur les chap. III, IV et VII de Saint-Jean. Au chap. III, Il régénère ; au chap. IV, Il est puissance de communion, de vraie communion ; au chap. VII, le Fils de l’Homme, ne pouvant pas encore se montrer au monde, déclare que des fleuves d’eaux vives découleront du ventre de ceux qui croiraient, car le Saint-Esprit n’était pas encore, parce que Jésus n’était pas encore glorifié ; c’est qu’alors Il devait être témoin de la gloire du Fils de l’Homme, et rendre sur la terre témoignage à cette gloire.
Quelle source du ministère nous avons maintenant ! L’amour de Dieu en Christ envers les pauvres pécheurs, mais cet amour accompli dans la gloire qui a suivi la mort du Fils de l’Homme qui était entré dans le plus profond de la misère de l’homme, y avait glorifié Dieu et était maintenant glorifié Lui-même, comme homme après cela. Dans quelle position le ministère est-il placé ! Quelle fonction glorieuse, et que l’homme s’efface devant elle ! C’est en effet le ministère de l’Esprit et de la justice ; car si c’est l’amour de Dieu qui en est la source et le sujet, la justice de Dieu s’y trouve aussi dans la glorification du Fils de l’Homme qui l’avait glorifié sur la terre et qui avait plus que rétabli toute sa gloire faussée et démentie en apparence par la victoire de Satan et la ruine qu’il avait introduite dans la création de Dieu ; et c’est pourquoi il y avait aussi des guérisons, des miracles attachés à ce ministère. Du moins en est-ce une des raisons ; [Mais ici aussi, en général, c’étaient des manifestations de la puissance bienfaisante, qui, portant remède aux maux dont les sentiments naturels prenaient connaissance, attiraient l’attention sur ce qui, dans la puissance de la résurrection de Jésus, ce grand miracle de l’intervention Divine dans la misère humaine, portait remède à la racine du mal, au péché. J’ai dit : en général ; parce que nous avons des exemples du jugement du Saint-Esprit au-dedans de l’Église, comme dans le cas d’Ananias et de Saphira, et sur le Judaïsme apostat, comme dans le cas d’Élymas le sorcier.] car les miracles étaient aussi une confirmation de sa partie la plus importante, savoir de la parole vivifiante. Mais ils étaient un témoignage rendu à la victoire du Fils de l’Homme sur Satan et à ses droits de bénédiction sur la création malgré tout le mal qui s’y trouvait. Plus tard ce mal serait ôté, la saison s’en était pas encore arrivée ; mais Celui qui devait l’accomplir était exalté et manifestait au milieu du mal cette puissance dans l’homme. Ainsi, le Prince de ce monde, celui qui était la puissance de tout le mal qui s’y trouve, était en partie jugé ; et c’est pourquoi aussi les miracles sont appelés les puissances ou les miracles du siècle à venir ; parce qu’alors, par la présence du Fils de l’Homme, tout ce mal sera dominé et arrêté ; et ces miracles étaient un échantillon de ce bienheureux résultat, échantillon opéré par le Saint-Esprit venu d’En-Haut. De ce côté, c’est un triste spectacle que nous présentons actuellement quant à la manifestation de la gloire du Fils de l’Homme. Que nous ayons au moins la sagesse de le reconnaître et de le confesser !
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Mais ces choses étaient il est vrai des accessoires. La chose principale était le témoignage rendu à l’amour de Dieu, à la victoire du second Adam et à l’œuvre qu’il avait accomplie comme homme ; témoignage rendu par la Parole, par cette Parole qui a créé, qui soutient, qui engendre pour la vie éternelle, qui nourrit l’âme renouvelée et qui révèle toute la gloire de Dieu ; Parole dont Jésus est la plénitude vivante.
Considéré comme ministère de la Parole, le ministère, qui manifestait la présence du Saint-Esprit, manifestait en même temps la souveraineté de Dieu, la miraculeuse puissance de Celai qui était envoyé, l’étendue et l’activité de la grâce.
Ce ministère s’exerce soit parmi les Juifs, soit, dans le cas de Corneille, parmi les Gentils, par le don des langues. Des Galiléens, des Romains parlent toutes sortes de langues. L’homme n’est qu’un instrument dans la main de Dieu, du Saint-Esprit envoyé d’En-Haut. C’est Lui qui gouverne, qui domine, qui agit ; mais Il le fait afin d’adresser le témoignage de la gloire du Fils de l’Homme à tous les hommes, et afin, en leur parlant des œuvres merveilleuses de Dieu dans la langue dans laquelle ils étaient nés, d’attirer, par une grâce qui descendait jusqu’à eux, leurs cœurs vers la puissance qui s’y, manifestait, et en même temps de revendiquer les droits du second Adam en grâce sur tous les hommes. Ceci évidemment, tout en commençant par les Juifs, s’adressait à toute l’Économie de la Gentilité. Le jugement de Dieu avait séparé les nations en confondant leurs langues, de sorte qu’elles étaient comptées par langues, familles et nations (Gen. X et XI) ; et, en les séparant, Il avait établi les bornes des peuples selon le nombre des enfants d’Israël (Deut. XXXII, 8). Il n’était pas temps de mettre fin à tout cela ; mais la grâce s’introduit et domine dans cet état de choses au milieu des Juifs, de toutes les nations la plus méchante, après tout ; il paraît un témoignage qui se sert du fruit du péché pour démontrer que la grâce atteignait les hommes là où le jugement de ce péché les avait placés. Le Saint-Esprit fait parler aux Juifs toutes les langues par lesquelles les hommes et les cours étaient divisés en vertu du jugement de Dieu sur l’orgueil du monde renaissant.
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Le sujet de ce ministère, bien que les circonstances qui accompagnaient son exercice manifestassent à l’œil exercé la souveraineté de Dieu, les droits du Fils de l’Homme sur les nations, ainsi que sa grâce envers les Juifs qui l’avaient rejeté, le sujet de ce ministère était au commencement uniquement la gloire de l’homme Jésus ressuscité ; gloire qui devait être le point de ralliement des âmes sauvées sous l’influence de la grâce et formées en corps d’Église, Église, qui a dû alors être instruite et gouvernée par ce même Esprit.
Jérusalem ne s’étant pas soumise à ce témoignage de la gloire de Christ, cela ôtait à cette ville, si longtemps chérie, la gloire d’être plus longtemps le centre et la source féconde d’administration évangélique. Ses citoyens ont envoyé un message après le Roi qui était allé recevoir son royaume, disant qu’ils ne voulaient point qu’il régnât sur eux ; et, à l’occasion de la mort de Saint-Étienne, toute l’Église est dispersée, sauf les Apôtres. Là-dessus, Dieu, qui trouve toujours dans le mal l’occasion de quelque grâce plus magnifique que ce qui a été gâté, Dieu suscite, indépendamment de l’œuvre à Jérusalem, un Apôtre né avant le temps, qui n’était « ni de l’homme ni par l’homme, » et révèle en même temps cette vérité infiniment précieuse, dont l’Apôtre ainsi appelé devient le grand témoin, que l’Église est une avec Christ glorifié dans le ciel, qu’elle est son corps qu’Il nourrit et chérit comme sa propre chair. Ainsi s’efface ce que Pierre annonçait aux Juifs, c’est-à-dire, que Christ devait revenir à eux en grâce comme à un peuple subsistant devant Lui ; et il s’agit dès-lors des espérances qui s’attachent à Christ dans le ciel, aux noces de l’Agneau, à l’union de l’Épouse avec l’Époux dans le ciel. Le retour de Christ ici-bas est entièrement en jugement, quoique pour la délivrance d’un résidu. Ceci est, dans le ministère et l’administration de l’Église, un point de progrès dont les conséquences sont très-sensibles pour nous.
À la suite de la pleine révélation de l’union de Christ et de l’Église, nous trouvons dans les écrits de l’apôtre Paul un développement beaucoup plus grand des dons du Saint-Esprit, en rapport avec la position de celui qui en possédait tel ou tel comme membre de ce corps ; toutefois les mêmes principes se trouvent, pour la pratique, dans les écrits de Saint-Pierre.
Nous avons déjà vu, et nous en avons en Saint-Paul un exemple très-frappant, que la souveraineté de Dieu se manifeste dans le ministère comme dans le salut. « Vous ne m’avez pas choisi, dit le Seigneur, mais je vous ai choisis et envoyés afin que vous portiez du fruit et que votre fruit demeure. » « C’est un vaisseau choisi, dit le Seigneur à Ananias, pour porter mon nom aux Gentils. » De sorte que, comme cette souveraineté de Dieu exclut le choix de l’homme, celui qui nie l’existence d’un ministère ayant une diversité de dons, se trouve en opposition contre cette souveraineté. Mais ici, en examinant la Parole, nous trouverons cette souveraineté exercée par le Saint-Esprit au milieu de l’Église. Aussi trouverons-nous que c’est Christ qui donne et que c’est Dieu qui opère tout en tous.
La première chose sur laquelle l’Apôtre insiste quant à son ministère, à la suite de sa position remarquable, c’est qu’il n’était ni de l’homme ni par le moyen de l’homme, mais par Jésus-Christ et Dieu le Père.
Souvent on lui faisait l’objection qu’il n’était pas des douze, qu’il n’était pas un Apôtre en règle ; cela se retrouve discuté plusieurs fois dans les épîtres aux Corinthiens et aux Galates. L’Apôtre prend soin de les assurer qu’en effet son ministère était indépendant de tout homme, qu’il n’avait pas consulté le sang et la chair, mais prêché Christ aussitôt que Dieu l’avait révélé en Lui dans ce but. Il base son autorité sur les preuves de puissance spirituelle qu’il avait données. Plus tard, il a des conférences avec les autres Apôtres ; il leur communique son Évangile, mais il ne reçoit rien. Dieu prend soin qu’il y ait unité entre Antioche, alors, centre d’évangélisation pour les Gentils, et Jérusalem, anciennement le seul siège, on peut dire, de l’Église ; nous voyons une coopération [L’œuvre spéciale de Pierre et de Paul a été mutuellement reconnue, aussi selon la volonté de Dieu, comme apôtre, l’un des Juifs, l’autre des Gentils. Ici remarquez que la mission générale des Apôtres aux nations, Matth. XXVIII, n’entre pas en compte du tout.] selon les besoins ; Barnabas cherche Saul qui s’était retiré à Tarse ; et Silas se décide à rester à Antioche, trouvant une œuvre à y faire. Paul s’associe plus lard plusieurs ouvriers et engage Apollos à aller à Corinthe ; Apollos ne le veut pas. Mais, au milieu de toutes ces circonstances variées, Paul répudie d’une manière positive toutes les prétentions du Judaïsme qui réclamaient, en même temps que d’autres principes judaïques ou pour les faire valoir plus facilement, une mission humaine qui autorisât son ministère. En effet, ce n’a été ni la sagesse, ni l’arrangement des hommes qui a transporté l’Évangile loin de Jérusalem ; ça été la dispersion de l’Eglise tout entière à l’exception des Apôtres. Tous ceux qui étaient dispersés, allant partout prêchant l’Évangile, la main du Seigneur fut avec eux et plusieurs crurent ; leur mission était celle que leur donnaient la persécution et leur propre zèle.
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En effet, l’Église ne peut pas être une source de ministère ; car cette expression de la puissance du Saint-Esprit, et c’est là le ministère, précède nécessairement, sous plusieurs rapports, l’existence de l’Église ; elle la crée, elle l’appelle, elle la forme. Le ministère apostolique, ou au moins celui d’évangéliste, précède nécessairement, par la nature même des choses, l’existence de l’Église (quoique l’Église étant une fois formée, ses membres puissent devenir des évangélistes) ; et la mission de ces Apôtres ou Évangélistes doit être directement de la part de Christ et du Saint-Esprit ; sans cela leur mission est absolument nulle. Les douze Apôtres avaient déjà mission de la part de Christ pendant sa vie, quoique, après sa résurrection ils aient été spécialement doués. Saint-Paul, quant à son appel, avait mission de Christ en gloire, ayant vu ce Juste et entendu la voix de sa bouche ; quant à sa séparation à une œuvre spéciale, il avait reçu la direction immédiate du Saint-Esprit à Antioche. Ils partaient quelquefois du sein d’une Église, comme Paul d’Antioche ; ils rapportaient à l’Église avec joie ce que Dieu avait fait par leur moyen ; mais ils relevaient de Dieu et de Jésus-Christ ; c’était au nom, et par l’autorité de Dieu et du Seigneur Jésus, qu’ils agissaient ; et ils n’en reconnaissaient aucune autre. Ils ne pouvaient plaire aux hommes et être les serviteurs de Jésus-Christ. C’était, et Paul ne le cachait pas, peu de chose pour eux d’être jugés d’un jugement d’homme ; celui qui les jugeait était le Seigneur. Les Pharisiens, il est vrai, mettent en question la conduite de Saint-Pierre dans le cas de Corneille ; mais le Dieu de toute grâce n’avait pas attendu leur décision. La présence du Saint-Esprit sur les Gentils avait justifié les fruits de grâce et d’obéissance dans l’Apôtre accusé, et fermait la bouche à ceux qui se plaignaient de l’étendue et de la puissance de cette grâce.
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Je vois deux choses dans l’exercice de ce ministère dans le corps de l’Église : 1° L’ensemble de ce corps dont Christ, homme glorifié est le Chef et la tête, et ainsi la position de ce corps comme de la part de Dieu dans le monde, pour y représenter la gloire de son Chef : et 2° ce corps considéré comme le Corps de Christ lui-même, objet chéri de ses affections, l’épouse qu’Il a aimée, pour laquelle Il s’est donné, qu’Il nourrit de sa propre chair. – L’Église, instrument de la gloire et de la puissance de Dieu dans le monde, et l’Église objet chéri des affections de Christ.
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Les dons se caractérisent, il me semble par ces deux relations. L’une de ces positions est beaucoup plus générale, et en même temps, elle tient plus à la responsabilité de l’Église ; l’autre tient à ce que Christ fait et au fond ne peut pas manquer de faire pour son Église, son Épouse. Dans les deux cas, l’unité du corps uni à Christ est toujours en vue. Dans l’un, nous avons le Seigneur Jésus, Chef dans le ciel, mais qui nourrit son corps jusqu’à ce que tous viennent à sa stature parfaite. Dans l’autre, quoique personnellement Jésus soit nécessairement exclu du ministère, Lui et l’Église sont néanmoins vus comme un ensemble où Dieu agit devant le monde en son nom, comme il est dit : 1 Cor. XII, 12, « ainsi est Christ. » Aussi dans ce cas (voir le même chap.), la puissance spirituelle du Christianisme est mise en contraste avec l’idolâtrie. Premièrement, nous avons ce qui distinguait le Saint-Esprit des démons, (car il s’agit de puissance spirituelle) ; c’est que le Saint-Esprit seul, disait : Seigneur Jésus : et au contraire, parlant par le Saint-Esprit, personne ne disait : anathème Jésus. Secondement, il y avait divers dons, mais un même Esprit ; divers services, mais un même Seigneur ; diverses opérations, mais un même Dieu qui opérait. Ainsi l’Esprit, le Seigneur et Dieu sont mis en avant en rapport avec les dons, et il est ajouté, pour que nous voyions la source immédiate de ces choses dans l’Église, « l’Esprit distribue à chacun selon qu’il lui plaît. »
La puissance du don venait du Saint-Esprit (par la comparaison des versets 6 et 11, nous voyons la divinité du Saint-Esprit) ; mais l’Esprit agissant en même temps en chacun en vue de la gloire du Fils, comme le Fils le fait en vue de celle du Père, chacun devenait serviteur de Christ, par son don, comme Christ était devenu lui-même serviteur dans son ministère. Le Saint-Esprit agit souverainement, mais toujours dans l’accomplissement des conseils de Dieu, (ainsi que Christ vivifie ceux qu’Il veut) ; et étant témoin de la gloire de Jésus, Fils de l’Homme, Seigneur, chacun de ceux en qui Il agit devient l’instrument dévoué de ce Seigneur. Ces opérations ne sont pas en même temps secondaires, ni de quelque Esprit inférieur, ni de quelque Ange ; elles sont de Dieu Lui-même, et les serviteurs se rapportent à Lui. Ainsi l’Apôtre, doué de l’apostolat par le Saint-Esprit, s’appelle Apôtre non des hommes, ni par l’homme, mais par Jésus-Christ et Dieu le Père, et s’appelle Apôtre de Jésus-Christ, et aussi serviteur de Dieu, et, en général : par la volonté de Dieu.
Dans la liste qui nous est donnée dans ce XIIe chap. de la 1re aux Cor., nous avons en général tous les dons qui sont, pour l’établissement du Christianisme, des signes pour le monde et des preuves de la gloire, de la victoire de Christ homme et de ses droits de gouvernement dans l’Église. Les évangélistes et les pasteurs, ce qui s’appellerait maintenant ministère, ne s’y trouve pas. C’est l’ensemble d’opération et de capacité dans le corps, plutôt que les soins que Christ prenait du corps comme étant sien. Ainsi, sauf le don de docteur qui s’attache à celui de pasteur, tous les dons qui se trouvent ici sont perdus, au moins dans leur forme et dans leur caractère primitifs. Je parle seulement du fait ; je laisse à d’autres la tâche de dire pourquoi cela est arrivé et jusqu’à quel point cela peut se justifier ou devrait l’être.
C’est un sujet très-sérieux pour les âmes qui aiment la gloire de Christ et de son Église et reconnaissent la puissance du Saint-Esprit.
Toutes ces choses, quoiqu’elles fussent dans un certain sens un témoignage de l’amour de Dieu, pouvaient s’exercer sans amour ; il s’agissait plutôt ici de puissance. Aussi l’Apôtre présente-t-il ici une plus excellente voie. L’amour ou l’édification auraient dû en diriger l’exercice ; et là ce n’était pas le cas ; la discipline devait intervenir, comme l’Apôtre nous l’enseigne dans ces chapitres. Les dons en eux-mêmes étaient plutôt l’expression de la puissance ; c’est pourquoi l’Esprit, en tant qu’Il exerce l’autorité de Christ dans l’Église, règle et contrôle l’exercice des dons qu’Il avait confiés à tel ou tel individu, et le réprime même quand il ne s’en sert pas dans le but de l’amour pour l’édification du corps. Voilà ce qui se trouve dans l’Épître aux Corinthiens.
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Dans l’Épître aux Éphésiens, ce n’est pas autant Dieu qui opère dans l’ensemble du corps, et qui en emploie les membres pour son service pour manifester sa puissance, que Christ descendu une fois jusque dans les parties les plus basses de la terre et remonté ensuite, afin qu’il remplit toutes choses, ayant emmené Captivité captive et reçu des dons pour les hommes, par lesquels Il forme et nourrit son Corps sur la terre pour se le présenter parfait à la fin. Ainsi l’unité, quoique au fond la même, est ici le résultat de la grâce qui appelle ceux de loin et ceux de près afin, que Dieu y habite par l’Esprit : elle est une unité de relation et de bénédiction, un Corps, un Esprit, un Dieu et Père de tous, etc. Tandis que, dans l’Épître aux Corinthiens, l’attention des Chrétiens est dirigée sur le contraste avec leur état dans l’idolâtrie, où il y avait plusieurs dieux et plusieurs seigneurs et en réa lité plusieurs démons, c’était un Esprit qui faisait tout, un Seigneur et un Dieu qui opérait tout en tous, et non pas des idoles muettes.
L’Épître aux Éphésiens nous donne spécialement les privilèges de l’Église unie à Christ. Dieu est le Dieu de notre Seigneur Jésus-Christ, et aussi le Père de notre Seigneur Jésus-Christ. À la fin du chapitre premier, il cherche les bénédictions qui découlaient de ce titre de Dieu de Jésus-Christ. Au chapitre IIIe, ayant développé le mystère qui lui avait été confié, savoir l’union des Juifs et des Gentils en un corps en Christ, pour être la demeure de Dieu par l’Esprit, étant sauvés et lavés par Christ et unis à Lui dans la gloire, il demande les bénédictions qui découlent du titre de Père de Jésus-Christ, savoir : la connaissance de l’amour de Christ par la puissance du Saint-Esprit fortifiant l’homme intérieur, pour le rendre capable de jouir de telles choses, afin d’être rempli de toute la plénitude de Dieu ; voilà les sources infinies et fécondes de la bénédiction de l’Église, et cela même à la gloire de Celui qui agit en nous dans l’Église pour toutes les générations du siècle des siècles. Mais, jusqu’à ce que nous soyons amenés à la perfection, ces bénédictions s’accomplissent par le Saint-Esprit agissant en nous dans l’unité du corps, selon ce que Christ a reçu pour les membres de ce corps. Ayant tout accompli, Il est monté en haut et Il a reçu des dons pour les hommes ; et Il a donné les uns pour être Apôtres, les autres pour être Prophètes. On voit que les dons, ici présentés comme le fruit de l’ascension de Christ, ne sont pas la puissance agissant dans le corps au-dedans et au-dehors pour manifester la gloire de Dieu ; mais ce qui servait à l’établissement et à l’édification de l’Église, comme demeure de Dieu et objet de l’amour de Christ, afin que tous parvinssent à la mesure de sa stature.
L’humilité, l’amour, les liens de la paix, voilà ce qui est présenté tout premièrement comme la marche digne de notre vocation d’être la demeure de Dieu dans l’unité. Puis les dons individuels : « à chacun est donné » selon la mesure du don de Christ chef exalté de ce Corps.
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Les dons sont proprement ce qui est appelé le ministère. Il ne s’agit pas de miracles, de guérisons, de langues ; ces choses, signes de la puissance devant le monde, n’étaient pas des instruments directs de son amour pour l’Église. Tout don est un ministère ; car, comme il y a diversité de dons, mais un seul Esprit, aussi il y a diversité de ministères, mais un seul Seigneur. Par la possession d’un don, je deviens le serviteur de Christ, de qui, par l’Esprit, je tiens le don, et que l’Esprit révèle comme Seigneur.
Ainsi, tout don en exercice est un ministère, un service accompli sous une responsabilité en vers Christ. Mais ces dons, mentionnés au IVe chap. aux Éphésiens, sont spécialement du ministère, du service rendu à Christ dans son corps, « pour le perfectionnement des saints, pour l’œuvre du ministère, pour l’édification du Corps de Christ. » C’était une œuvre, et non pas simplement des signes de puissance.
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Nous avons : Apôtres ; Prophètes ; Pasteurs et Docteurs ; Évangélistes. Les deux premiers, dans leurs fonctions les plus élevées, ont posé les fondements de l’Église, soit par des révélations, soit par l’autorité de Christ qui leur était confiée ; car c’est ainsi que les Apôtres se distinguaient des Prophètes. Un Prophète révélait la pensée de Dieu, et son œuvre, à cet égard, était accomplie. Un Apôtre était envoyé directement, comme un architecte autorisé par Christ à bâtir son Église. Ils ordonnaient, exécutaient, surveillaient, gouvernaient, établissaient des autorités dans les Églises et prenaient connaissance avec autorité, de ce qui s’y passait pour y mettre ordre. En un mot, ils étaient autorisés, de la part de Christ, à fonder et à bâtir son Église, à y établir des ordonnances. Dans ce sens, il n’y en a plus. Saint-Paul savait qu’après son départ, il surviendrait des loups ravissants. Saint-Pierre a soin, par son épître, de leur rappeler ce qu’il leur avait dit.
Mais il me parait que dans un sens inférieur, il peut y avoir des Apôtres et des Prophètes dans tous les temps. Barnabas est appelé apôtre ; Junias et Andronique sont appelés apôtres ; et il est dit d’eux qu’ils étaient remarquables parmi les Apôtres, (Rom. XVI, 7-8) ; de sorte qu’il y en avait d’autres qui ne sont pas nommés.
Quant à la révélation de Dieu elle est complète ; quant à l’autorité de fonder l’Église elle n’existe plus ; ni les douze, ni Paul n’ont eu des successeurs ; on ne peut pas fonder deux fois : mais on peut agir dans une responsabilité extraordinaire comme envoyé de Dieu, et par une foi qui tient à des communications données à celui-là seul qui en jouit (quoiqu’il n’y ait point de nouvelle vérité qui ne se trouverait pas dans la parole). Une conduite qui ne se justifie aux autres que par les fruits dont les enfants de Dieu jouissent, voilà ce qui peut se trouver. On peut citer, par exemple, mais sans prétendre justifier tout ce qu’ils ont fait, un Luther, un Calvin, un Zwingli, et d’autres peut-être. Comme pour les Prophètes, quoiqu’il n’y ait point de nouvelles révélations de vérité, il peut y avoir, comme provenant du don de Dieu Lui-même, une application, aux circonstances de l’Église ou du monde, de vérités cachées dans la Parole ; de sorte qu’en pratique, ce ministère devient prophétique ; d’ailleurs, tous ceux qui exprimaient la pensée de Dieu en édification étaient appelés Prophètes ou au moins prophétisaient. Du reste, les Apôtres ne parlent jamais comme si l’Église devait subsister longtemps ou comme si les fidèles devaient avoir longtemps à attendre la venue de Christ.
Les Docteurs et Pasteurs, pour conduire les brebis et les instruire, sont réunis dans un seul don ici (car le Saint-Esprit parle de l’édification) quoique le don de Docteur soit présenté séparément ailleurs. C’est par ces dons que Christ nourrit, soigne et fait croître les brebis, comme c’est par les Évangélistes qu’Il les attire et les appelle. On conçoit facilement la différence entre Docteur et Pasteur, tout en étant réunis ; car l’un s’occupe de la doctrine, l’autre des brebis ; observation très-simple mais de toute force, parce qu’il y a un intérêt d’affection dans le progrès des brebis, un exercice de cour dans le don de Pasteur, un soin des brebis que le simple fait d’enseigner né suppose pas. C’est ainsi que ce don devient l’occasion des plus douces affections et des plus forts liens, comme celui d’Apôtre l’était aussi, et comme l’est encore celui d’Évangéliste quant à ceux qui sont convertis par son moyen.
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J’ajoute ici que l’Apôtre ne parle pas des dons, mais des personnes qui les possèdent. Il a donné des Pasteurs, des Docteurs ; le don, sans doute, était dans le vaisseau. Mais Dieu l’avait attaché à la personne, et cette personne, connue par son don, était donnée à l’Église. On ne peut pas être lié à un don, mais à une personne. Dieu a donné non pas seulement un apostolat mais un Apôtre. On peut sans doute supposer de l’infidélité en celui qui le possède ; peut-être même supposer, que le don soit retiré, ou que du moins il ne soit pas exercé ; mais en général, il est question d’une personne jouissant d’une manière permanente d’une certaine fonction, d’une jointure dans le Corps, et cette jointure est constamment cette jointure-là.
De plus, l’exercice du don, quoiqu’assujetti aux règles de la Parole, ne dépend nullement de la volonté du corps, mais du Chef. Il a donné, Il a placé une telle jointure dans le corps ; et elle est responsable au Chef de l’accomplissement de cette fonction. On conteste la sagesse du chef, si l’on conteste l’emploi du don. Cette responsabilité s’exerce en charité, et pour l’édification ; – non autrement ; mais on ne peut pas ôter la responsabilité envers Christ ni toucher aux droits de Christ au service de son serviteur.
Les circonstances de l’Église peuvent produire des difficultés à cet égard ; mais l’humilité et la fidélité au Seigneur sauront toujours que faire. L’amour et l’obéissance trouvent toujours un chemin. L’Esprit sera toujours avec celui qui obéit à Christ en charité. Celle responsabilité individuelle à Christ est de toute importance ; aussi importante dans sa place, quant au service par des dons, que quant à la conduite morale. Tout ce qui porte atteinte à cela, porte atteinte aux droits de Christ et à la responsabilité à laquelle personne ne peut se soustraire. On voit quelquefois les deux choses détruites ensemble par l’esprit du christianisme corrompu, On soustrait les hommes à leur responsabilité individuelle en fait de morale ; mais Dieu n’abandonne pas ses droits.
Empêcher ce service, n’empêche pas les hérétiques ni les faux docteurs. La chair dans le plus vrai chrétien doit être réprimée partout ; elle doit l’être dans l’emploi ou l’abus des dons réels ou supposés aussi bien qu’ailleurs. La chair n’est jamais un don de Dieu. Je doute qu’en augmentant le sentiment de responsabilité individuelle, l’on tende à ouvrir la porte à la chair,
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Ces dons placés dans l’Église entière, dans le Corps de Christ, deviennent des jointures et des instruments de liaison ; et c’est dans l’Église, dans le corps, qu’ils sont placés. Un don est un don dans le corps et pour tout le corps, comme un membre du corps humain fonctionne pour l’ensemble ; mon vil voit pour tout mon corps ; mon pied marche pour tout mon corps. Les placer comme charge dans ce qui n’est pas le corps, c’est les disloquer. Ils peuvent, de fait, être exercés dans une localité, mais c’est l’expression de la grâce et des droits de Christ ; et cette grâce et ces droits de Christ s’étendent à tout le corps. Souvenons-nous qu’ils ne s’exercent jamais par la volonté de l’homme. Où cette volonté entre, le péché entre aussi. Cela peut arriver comme tout autre péché, mais c’est un sujet de discipline comme tout autre ; c’était le cas des langues à Corinthe. De l’autre côté, l’esprit étroit de l’homme est jugé souvent par les droits universels et inaliénables de l’Esprit de Dieu seul et un dans tout le Corps. Nul arrangement d’homme n’a droit contre Lui ; mais Lui, comme nous l’avons vu, a droit de diriger l’exercice de tout don individuel. Il exerce le gouvernement de Dieu dans l’Église.
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Il y a d’autres passages pratiques très-précieux, outre ces deux que nous venons de considérer, qui traitent le sujet du ministère dans ses rapports les plus élevés avec la gloire de Christ et de Dieu. Nous ne voulons pas les négliger.
Le premier de ces passages, Rom. XII, insiste particulièrement sur la modestie qui renferme le serviteur de Dieu dans l’emploi assidu et fidèle du don qui lui a été confié.
Le second demande que, si l’on parle, l’on parle comme de la part de Dieu, afin que la gloire revienne à Dieu.
« Que chacun, dit l’apôtre Paul, pense modestement » (que la Parole de Dieu est douce et bonne, encourageante et saine pour le cour en même temps !) « que chacun pense modestement de soi-même selon que Dieu a départi à chacun la mesure de la foi. Ayant des dons différents selon la mesure de la grâce qui nous est donnée, soit de prophétie selon la proportion de la foi ; soit de ministère, appliquons-nous au ministère ; soit que quelqu’un soit appelé à enseigner, qu’il enseigne ; à exhorter, qu’il exhorte. » Ici remarquons aussi que nous trouvons, non seulement des dons spéciaux comme jointures de fournissement au corps, mais en général l’emploi humble et fidèle du talent confié au serviteur, talent avec lequel il trafique selon sa responsabilité envers le maître qui le lui avait donné.
Dans la 1e Ép. de Saint-Pierre, IV, 10, même responsabilité agissant en amour envers les autres. « Que chacun, selon le don qu’il a reçu, l’emploie pour le service des autres comme bons dispensateurs de la différente grâce de Dieu. Si quelqu’un parle qu’il parle comme annonçant les paroles de Dieu. » – Je sais que bien des personnes craignent un tel principe ; mais cela ne change pas la vérité ; si quelqu’un ne me parle pas comme annonçant les paroles de Dieu, je ne sais pas du tout, pourquoi il me parle ; c’est du reste ce que l’Apôtre dit : non pas selon la parole de Dieu, comme quelques-uns traduisent, mais, comme les oracles, comme annonçant les paroles de Dieu. C’est ce que fait tout homme qui prêche l’Évangile ; il ne doute pas de la certitude de ce qu’il dit ; autrement on ne doit pas enseigner.
Cette responsabilité, empêcherait souvent de parler quand on n’est pas enseigné de Dieu ; et si, comme les Béréens on juge par la Parole ce qu’un Apôtre même dit, il n’y a point de danger. Il ne s’agit pas de nouvelles révélations ; il ne s’agit pas de faire recevoir ; sans examen, mais d’avoir l’assurance que ce que nous disons vient de Dieu et que ce ne sont pas seulement nos propres pensées. Si quelqu’un entreprend de m’enseigner et que je lui demande : êtes-vous sûr que cela vient de Dieu, que c’est la vérité de Dieu, et que Dieu veut que vous me l’enseigniez ? et qu’il me dise qu’il n’en est pas sûr, quelle confiance puis-je avoir en lui ? et quand il me dit que oui, je l’examine toujours par la Parole. Plus on place celui qui parle sous une telle responsabilité, plus il y aura de sérieux dans sa doctrine ; et, s’il y a de l’amour et un vrai don, il ne manquera pas à cette responsabilité. S’il y manque, il y a toujours devant ses yeux la parabole du serviteur qui ensevelit son talent : s’il n’y a pas assez d’amour pour trafiquer à cause de la responsabilité, il est exactement dans le cas de ce méchant serviteur ; il n’agit pas selon la grâce. Ceci nous rappelle ce grand principe : responsabilité directe à Christ qui a confié le talent ; responsabilité à laquelle nulle relation humaine ne peut nous soustraire. Les droits de Christ, son jugement sont toujours là.
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Responsabilité, puissance, liberté selon l’Esprit et discipline de la chair, voilà les grands principes de la marche chrétienne à cet égard, son marche dont l’amour sera toujours le ressort, le mobile et le but. – Un service qui se rapporte à Christ au-dessus de tout homme, sans quoi, la responsabilité à Christ est détruite, – son action sur l’unité du corps entier, autrement l’unité d’un seul Esprit est niée, – voilà l’ordre que le Saint-Esprit seul peut produire, parce que Lui seul sait effacer l’homme et l’assujettir en lui donnant une liberté qui n’est pas de Lui-même mais de l’Esprit de Dieu ; liberté qui reconnaît toujours avec joie, et comme son bien, l’autorité du Seigneur et le principe d’une soumission entière à sa volonté ; liberté qui ne vit que pour le servir et considère l’indépendance comme la misère et l’orgueil du péché.
Celui qui parle des droits des hommes, soit d’un seul soit de tous, ne parle que du péché ; celui qui n’admet pas les droits du Saint-Esprit fait la guerre à la souveraineté de Dieu qui, par le moyens de ces dons, exalte sur la terre ce Jésus qui y a été autrefois humilié. L’Église, demeure du Saint-Esprit Lui-même sur la terre, voilà la grande vérité du ministère et de la gloire de Christ et de son service sur la terre. La présence de Dieu donne la joie, la liberté, la responsabilité et le sérieux. L’homme, dans la présence de Dieu, est effacé quant à sa vanité et à son orgueil, et fortifié dans son service et sa fidélité.