D'une manière générale, l'homme n'aime pas qu'on lui parle de la mort.
Cette antipathie innée pour un tel sujet indique à elle seule que la mort n'est pas, comme plusieurs le prétendent, une chose purement naturelle, un événement parfaitement normal.
On ne saurait donc réduire la mort à un simple phénomène chimique par lequel les êtres organisés restitueraient leurs éléments à la matière inerte, à la poussière.
Dès lors, comment pourrions-nous éviter d'aborder un problème qui concerne tous les hommes, qui assombrit toutes les joies de ta terre et qui a toujours préoccupé païens, juifs et chrétiens ?
Il ne s'agit pas ici de plaire à nos auditeurs, mais de rechercher d'une manière sereine, en dehors des préjugés de l'incroyance d'une part, et des disputes religieuses d'autre part, une réponse aux questions qui se sont toujours posées et imposées à l'esprit et au coeur de l'homme.
Qui parmi nous n'a pas été déchiré et meurtri par le deuil ? Qui n'a pas connu en sa chair cette sourde angoisse qu'à certaines heures la mort fait peser sur nous-mêmes ? Qui ne s'est pas senti mordu aux entrailles par la peur, non pas de mourir, mais de voir là mort lui ravir pour toujours les êtres qui lui sont les plus chers ?
Certes, nous n'avons aucun goût pour les choses macabres, mais nous ne sommes pas non plus de ceux qui écartent systématiquement la pensée de la mort.
Nous croyons que toute vérité est bonne à connaître et à contempler en face, persuadés que l'homme ne gagne rien à se cacher hypocritement à lui-même les conditions de sa propre existence.
Moïse l'avait compris. C'est pourquoi il pouvait dire dans sa remarquable prière : « Seigneur, ...enseigne-nous à bien compter nos jours, afin que nous appliquions notre coeur à la sagesse ». (Psaume 90.12).
C'est donc pour mieux vivre que nous parlerons de la mort, c'est pour ne plus être préoccupés par elle que nous y penserons sérieusement aujourd'hui afin d'être prêts, et de vivre pleinement et en paix le temps qu'il nous reste à passer ici-bas.
Il n'est pas dans notre intention de définir ici en termes pompeux ou lugubres la mort et ce qui peut la suivre.
Nous ne chercherons pas non plus à exalter les illusions des uns ou à attiser les craintes des autres :
ILLUSIONS de ceux qui, s'appuyant sur leur propre justice et leurs bonnes oeuvres, se promettent un au-delà de félicités ineffables.
CRAINTES de ceux qui, écrasés sous le poids de leurs péchés, tremblent et pressentent déjà dans leur vie les flammes d'un éternel remords.
Nous voudrions simplement prendre conscience d'un fait, de regarder en face à la lumière de la Bible et de l'Histoire, et voir quelle attitude nous pouvons adopter devant la mort.
Bien avant Jésus-Christ, Étân, l'Ezrahite, s'était écrié : « y a-t-il un homme qui puisse vivre et ne pas voir la mort, qui puisse sauver son âme du séjour des morts ? » (Psaume 89.49).
Au siècle dernier, le Français Laténa devait aussi écrire : « il n'y a dans l'avenir de l'homme qu'un événement dont il ne puisse douter, c'est la mort. »
Quels que soient leurs avantages de santé, de talent, de beauté, de puissance, de génie ou de coeur, les hommes meurent ! Ils passent.
Vérité toute simple, toute nue, mais il suffit de l'évoquer... et la vie perd sa saveur habituelle.
« Nos jours sont comme l'ombre, sur la terre, et il n'y a pas d'espérance de demeurer ici-bas », s'écriait autrefois le pieux roi David. (1 Chroniques 29.15).
Plus près de nous, Albert Camus, l'existentialiste athée, décédé accidentellement en 1960, écrivait cette phrase amère : « les hommes meurent et ne sont pas heureux. »
Quelles que soient nos opinions, nos convictions, notre âge ou notre situation, quelles que soient la route suivie, la direction prise, il faudra, à plus ou moins bref délai, rencontrer l'infatigable moissonneuse. Pour tous, la mort est inévitable et son ombre plane sur chacune de nos vies. Ni l'excellente santé, ni la jeunesse dont nous jouissons aujourd'hui encore, ne nous promettent un lendemain sous le soleil, rien ne nous assure que l'heure dernière ne va pas sonner pour nous, et qu'à côté de notre date de naissance ne s'ajoutera pas une seconde et dernière date, celle de notre mort. Sans nous consulter, désirée ou haïe, la mort accomplit sa mission.
Depuis que l'homme existe, la mort, toujours à la page, a suivi les progrès de la civilisation.
Elle ne marche plus seulement au pas du laboureur, mais roule sur nos routes aux vitesses du jour. Des chaumières, des palais, des gratte-ciel qu'elle vient de quitter, elle sait aussi descendre dans les noires profondeurs où travaille le mineur. Passagère clandestine des navires des hommes, elle besogne en surface, comme elle préside sous les eaux à la lente agonie de l'équipage d'un sous-marin touché. La mort n'est pas moins active dans les airs. Dans l'avion le plus moderne qui fonce à travers l'espace, seule à ne pas avoir attaché sa ceinture, silencieuse et implacable elle lit une dernière fois la liste des passagers. Survivante de toutes les catastrophes elle n'aidera personne à identifier les corps mutilés ou calcinés de ses victimes, n'ayant aucun égard sur le plus humble ou le plus prestigieux des voyageurs.
Amoureuse de toutes les races, de toutes les vies, de tous les âges, de tous les sexes de toutes les professions, elle étreint dans ses bras riches et pauvres, savants et ignorants, malades et bien portants.
Pour être nés dans un milieu aisé, certains jouissent plus que d'autres ici-bas d'une nourriture raffinée, de beaux habits, d'une situation particulièrement en vue. Il semble que pour ces favorisés, le voyage de la vie s'effectue en wagons-lits ou en première classe, alors que d'autres ne paraissent connaître, dans leur triste existence, que la deuxième classe ou l'inconfort des wagons à bestiaux. Toutefois, le train entier roule fatalement vers la mort.
Que le trajet s'accomplisse à la vitesse d'un omnibus ou d'un rapide, que nous vivions quelques heures, quelques années ou quatre-vingt-dix ans, la station d'arrivée sera la même pour tous : la mort.
C'est pourquoi la mort semble être le seul dénominateur commun entre tous les hommes, la seule fraternité possible... puisque la vie n'offre pas à tous les mêmes privilèges.
Quelle étrange et tragique destinée que celle de tous les êtres.
Des entrailles d'une mère aux entrailles de la terre et bien souvent par de sombres et nombreux tunnels. Une existence monotone, un peu de lumière, un peu de bonheur, beaucoup de souffrances, puis la mort... Né de la chair, chacun ne fait que passer ici-bas et n'a qu'un temps à accomplir. Nul n'en recommence un autre.
« On entre, on crie,
Et c'est la vie.
On crie, on sort,
Et c'est la mort », a dit Tessier.
Pas besoin de grandes phrases pour mesurer ce destin, dont le terme, sinon le contenu, est le même pour tous.
Dès l'apparition de la vie, commence la peur de la mort.
L'homme sait qu'il doit mourir, mais ignorant le jour et l'heure de ce terrible rendez-vous, sa mort, la mort des autres, il les vit à l'avance. Nous mourons en vivant, nous vivons en mourant. Nous n'allons pas lentement ou rapidement vers l'éternité, comme un navire parti d'un port s'avancerait sur l'océan. Dès notre premier souffle nous sommes déjà sur la ligne d'horizon et nous longeons à tout instant les rives de l'Éternité.
Jeunes ou âgés, malades ou bien portants tous peuvent dire avec le roi David : « en vérité il n'y a qu'un pas entre moi et la mort. » (1 Samuel 20.3).
Vérité atroce ! Thème poignant ! Lieu commun sans doute, mais qui nous atteint tous au vif de l'âme.
On voudrait oublier ce destin tragique pour ne plus penser qu'à la vie ! Et c'est justement la vie qui chaque jour ramène à la mort !
Dès le matin, en ouvrant son journal, criminelle, accidentelle, naturelle ou sénile, la mort s'étale sous nos yeux.
On sort alors pour se rendre à ses affaires pour se laisser entièrement absorber par les choses de la vie, et, dans la rue, on croise un convoi funèbre. Sans paroles, il rappelle à l'âme ce que jadis proclamait Job au sujet de la destinée de l'homme :
« Qui lui dira en face sa voie ?... Il sera conduit dans un sépulcre... et après lui tout homme suit à la file, et ceux qui l'ont précédé sont sans nombre ». (Job 21.31-33).
Où donc trouver un lieu où l'on puisse échapper à la pensée de la mort ?
Le soir, pour se détendre, on va au cinéma. Hélas, là encore la mort est sur l'écran, car dans les salles obscures, le péché et la mort donnent aux films l'assaisonnement indispensable.
Mais ici, l'Ennemie semble se faire amie. Illusion ! Illusion ! Car si la mort, en noir ou en couleurs, évolue sous nos yeux au son d'une musique qui n'a rien de funèbre, si l'on s'évade enfin de la réalité, quelque part dans la ville et à tout instant dans le monde, sur d'autres scènes et dans d'autres décors, la mort véritable tourne sans se lasser la dernière séquence du film de la vie. Là, personne ne joue le rôle d'un autre. Aucun trucage, aucune musique, sinon les soupirs, les sanglots douloureux d'hommes, de femmes, d'enfants qui ne sont pas de simples figurants. Groupés autour d'un être cher, père, mère, enfant, ami, fiancée, fiancé, sans défense ils voient la mort arracher cruellement de leur chair celle ou celui qu'ils ont aimé.
C'est ainsi qu'à l'heure où l'on veut se distraire, oublier et ne plus souffrir, grandit autour de soi te cortège des veuves, des orphelins, des solitaires, de tous ceux qui se croient plus malheureux que d'autres et qui optent pour la révolte ou pour le désespoir.
Et que dire aujourd'hui, en cette fin de siècle où la Télévision trône comme un autel dans presque tous les foyers déversant des images de tous les continents ?...
En un instant, de son fauteuil, chacun peut contempler la mort aux cent visages, du Sida à l'avortement en passant par les guerres qui ne finissent pas, les assassinats, les viols, les enlèvements, les révolutions successives, les suicides... C'est ainsi que la mort installe le règne de la peur jusque dans nos demeures.
Et tout cela, parce que la multitude des hommes ne connaissent pas Jésus-Christ, qui, par Sa mort, a anéanti celui qui a la puissance de la mort, c'est-à-dire le diable.
Seul le Christ, nous dit l'Écriture, délivre tous ceux qui par crainte de la mort, sont toute leur vie retenus dans la servitude. (Heb 2.5).
Après avoir constaté le fait de la mort, nous ne saurions ici étudier longuement la manière dont les peuples l'ont envisagée. Ce serait tenter de brosser un tableau de la philosophie universelle et des religions de l'univers.
En dehors de la Révélation biblique, quelques indications suffiront.
Pour les Sages et les penseurs de L'INDE, l'âme serait dans le corps comme l'oiseau dans sa cage. De même que l'homme entretient la maison qu'il possède, en répare les dommages, ainsi l'âme logée dans le corps s'étudie à en réparer les forces. Le séjour devient-il inhabitable, l'âme s'en échappe pour en chercher un autre. D'où le dogme de la métempsycose, cette transmigration des âmes d'un corps dans un autre, dont nous avons déjà parlé dans une précédente conférence. (« Peut-on naître de nouveau ») ?
Chez les ÉGYPTIENS, grands spécialistes de l'embaumement et de la sépulture, la mort avait une physionomie spéciale. La vie, pour eux, est éternelle, la mort temporaire : ou, plutôt, la mort n'existe pas. Par leurs embaumements et tous leurs rites qui accompagnaient la sépulture des défunts, ils croyaient lutter victorieusement contre la corruption même du tombeau.
Hélas, leurs vivants endormis dans leurs sarcophages, attendant à l'ombre du tombeau le jour du réveil général, n'étaient que des momies, fruits d'une lutte insensée contre la nature, protestations vaines et impies contre la mort.
L'Égypte voulait, dans une tentative sacrilège, supprimer la mort... et la mort a envahi l'Égypte, faisant de ce pays une vaste nécropole, un cimetière géant — preuve manifeste de la puissance souveraine de la mort.
Chez les GRECS, à la pensée nuancée et mouvante, la mort était envisagée avec une sorte de timidité grave, mêlée de quelque espoir ou de quelque regret.
Ici, il faudrait s'arrêter et méditer dans « Les Dialogues » de Platon, les paroles d'un Socrate, ce philosophe qui personnifie peut-être l'idéal le plus haut de ceux qui n'avaient pas encore reçu la Révélation.
Qu'elles sont extraordinaires les paroles de ce sage qui préféra mourir avec une simplicité stoïque, plutôt que de renoncer à son idéal de justice en flattant les tyrans.
À ceux qui lui demandent pourquoi il apprend un nouvel air de flûte puisqu'il va mourir, Socrate répond simplement : « pour le savoir ». Et à Criton qui s'enquiert de la manière dont il veut être enseveli, il dit : « tout comme il vous plaira, si toutefois vous pouvez me saisir et que je ne vous échappe pas ».
Puis, regardant ses amis avec un sourire plein de douceur, ce condamné à boire la cigüe s'écrie : « dès que j'aurai avalé le poison, je ne demeurerai plus avec vous, mais je vous quitterai, et irai jouir de félicités ineffables ».
Chez les ROMAINS, peuple d'action, on haïssait la mort, tout en la craignant moins que le déshonneur. Si Sénèque et quelques autres présentent la mort comme une chose naturelle et exhortent l'homme à accepter sa condition mortelle, la majorité des Romains cherchent pourtant à écarter systématiquement l'idée de la mort ou, ne pouvant y réussir, s'efforcent de la déguiser et de l'embellir. D'où le columbarium, la chambre aux murs percés de niches où reposent, comme des colombes, des petites urnes cinéraires. Se croirait-on dans un lieu funèbre ? Le bûcher, en brûlant les corps, a supprimé d'avance le hideux et lent travail de la mort.
Ce sont aussi ces tombeaux, perdus dans des bouquets d'arbres et de fleurs, bien peu faits pour troubler les regards des vivants.
Une étude plus poussée de la conception de la mort au cours des âges nous conduirait à reconnaître que l'angoisse de la mort a pu et peut être dépassée.
Nous constaterions que de nombreux hommes parmi les païens n'ont pas vu uniquement dans la mort la source de toutes les terreurs, bien qu'elle le demeure, car devant elle la sensibilité se hérisse et s'affole. Plusieurs songeant à la mort trouvèrent en elle un moyen de discerner l'absolu du relatif.
La pensée de la mort a donc eu cet effet salutaire de corriger les appréciations humaines sur les choses de la vie et de verser dans le coeur du sage des trésors d'indulgence.
Cependant, un examen sérieux nous ferait remarquer qu'en dehors de la Révélation biblique, la mort n'a pas été comprise et est restée une inconnue.
C'est pourquoi, jamais peut-être nous ne pouvons mieux apprécier la Révélation divine que lorsque nous entendons Dieu Lui-même nous expliquer ce redoutable mystère dans Sa Parole.
Amis incroyants, laissez-là vos préjugés, vos a priori, et, avec nous, retournez à la Bible, car il en vaut la peine.
Ce n'est pas dans le récit de la création que nous voyons apparaître la mort. Là, tout est harmonie, fraîcheur, vie et beauté.
L'histoire de la mort ne commence qu'avec celle de l'homme.
La mort apparaît, en effet, à partir du moment où Dieu, ayant instruit Ses créatures, les laisse à leur initiative et se retire en Son repos.
L'homme, par sa désobéissance, se révolte contre Dieu et se voit soudain séparé de la source de la vie. (Gen 3:22).
Dès lors, la nature de l'homme se modifie profondément :
La vie spirituelle est enrayée, la vie physique est limitée.
Le contact rompu entre Dieu et Sa créature ne saurait donc être rétabli par l'effort de l'homme.
En conséquence, la vie s'épuisera dans l'homme et il perdra jusqu'à la connaissance de Dieu. C'est la mort spirituelle.
Par contrecoup, la vie animale envahira l'homme. Et, tant par les excès et les passions de cette vie même, que par l'usure produite par le travail, la maladie et la souffrance, la vitalité de l'organisme s'épuisera à son tour. C'est la mort physique.
Quatre mots suffisent à saint Paul pour définir la mort : « LE SALAIRE DU PÉCHÉ ». (Romains 6.23). Ailleurs, il résumera en ces termes tout l'enseignement biblique sur ce sujet : « par un seul homme, le péché est entré dans le monde, et par le péché, la mort. Ainsi, la mort s'est étendue à tous les hommes, parce que tous ont péché »... (Romains 5.12).
Si l'Ancien Testament nous apporte déjà une grande lumière sur la mort, et si les croyants HÉBREUX descendaient au séjour des morts avec l'espoir d'en remonter, il faut cependant attendre la venue de Jésus-Christ pour voir des hommes considérer la mort comme vaincue.
Par l'Évangile et le témoignage des apôtres, nous savons en effet qu'un Être ineffable, Jésus-Christ, a vaincu la mort parce qu’Il était la vie impérissable.
En venant ici-bas, Il n'a pas cherché à nous expliquer le phénomène de la mort. Il fit mieux et plus. Il vint pour « détruire la mort et faire luire la Vie et l'incorruptibilité par l'Évangile ». (1 Tim 1.10).
Il ne parla pas seulement de la mort, Il voulut la vivre, l'expérimenter aux yeux des hommes, dans la pleine possession de Ses moyens.
Il ne choisit pas la mort la plus douce, la plus belle, mais la plus cruelle, la plus atroce, la plus ignominieuse, celle de la Croix. Ayant « tout accompli », dans un grand cri Il rendit l'esprit. (Matthieu 27.50\\). Son corps couvert de blessures et de meurtrissures fut déposé dans un sépulcre. Tout semblait bien fini, quand, au matin de Pâques, la nouvelle fulgurante de Sa résurrection courut de bouche en bouche dans le cercle des disciples. Le tombeau était vide et Jésus réellement ressuscité apparut aux siens, permettant à Thomas de mettre son doigt dans les plaies de Ses mains et sa main dans Son côté percé ! (Jean 20.27).
Cette mort de Jésus-Christ et Sa résurrection, voilà LES FAITS qui modifient totalement le problème qui nous occupe.
L'homme qui, comme Thomas, a vu fondre son scepticisme, le chrétien qui, cessant de lutter, s'abandonne dans une foi totale à son Seigneur et à son Dieu, savent désormais qu'au moment de la mort, douce ou violente, accidentelle ou naturelle, ils ne seront pas seuls, mais accompagnés, soutenus, fortifiés par Celui qui a mis en évidence la vie et l'incorruptibilité en sortant du tombeau. Désormais la mort peut effrayer encore leur sensibilité : elle ne saurait plus terrasser leur âme, ni troubler leur coeur. Ils savent que la mort n'est pas la fin de tout, qu'elle n'est pas toute puissante, et ne saurait garder à toujours ses captifs.
À l'inquiétude humaine Jésus vient répondre en ces termes ineffables : « je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra, quand même il serait mort ; et quiconque vit et croit en moi ne mourra point à jamais ». (Jean 11.25-26).
« Que votre coeur ne se trouble point. Vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi. Dans la Maison de mon Père, il y a plusieurs demeures, et je vais vous préparer une place. S'il en était autrement, je vous l'aurais dit. Et lorsque je m'en serai allé et que je vous aurai préparé une place, je reviendrai et je vous prendrai avec moi, afin que là où je suis, vous y soyez aussi ». (Jean 14.1-3). Et encore : « ne crains point ! Je suis le premier et le dernier, et le vivant. J'étais mort ; et voici je suis vivant aux siècles des siècles. Je tiens les clefs de la mort et du séjour des morts » ! (Apocalypse 1.17-18).
Comme l'a dit Ch. Favez : « il n'existe que deux attitudes raisonnées face à la mort : ou celle des païens d'autrefois et des incroyants de notre siècle, ou celle des chrétiens de tous les temps. Les premiers vont au-devant de cette formidable inconnue avec le seul et fragile flambeau de la raison humaine. Mais cette raison, si admirables que soient ses conquêtes dans le domaine des choses terrestres, est douloureusement incapable de projeter la moindre lumière dans les ténèbres de la tombe, incapable de donner la moindre assurance à ce terrible moment ».
Sans révélation, l'homme est seul. Cette solitude morale, le chrétien ne la connaît pas. Il a Jésus, Le Vainqueur de la mort, qui l’entoure de Son ineffable présence. Conscient des limites de sa raison humaine, en même temps que de son intime misère et de son péché, il a mis chaque jour son espérance en Jésus-Christ. C'est pourquoi, à l'heure d'expirer, il peut répéter avec assurance : « le Seigneur est mon berger, je ne manquerai de rien... Quand je marche dans la vallée de l'ombre de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi »... (Psaume 23).
Vous me direz peut-être : « je suis un incrédule, et pourtant la mort ne m'effraie point » !
En êtes-vous si sûr ? De loin, il est toujours facile d'auréoler la mort, mais, comme l'a dit G. Frommel : « quand l'heure est venue de mourir, quand les terreurs et les hoquets de l'agonie vous prennent à la gorge, toutes les chimères et toutes les résolutions s'enfuient. La mort n'est plus à ce moment le repos final que l'on croyait, mais une lutte redoutable... et la révolte du coeur qui se débat contre cette dissolution fait oublier l'acquiescement qu'y avait donné la raison ».
« Et cette lutte, fait remarquer le professeur Favez, n'est pas seulement physique : elle se complique d'une lutte morale : il arrive souvent que la conscience s'éveille alors et que, recouvrant le sentiment d'une responsabilité trop longtemps oubliée, la créature redoute de rencontrer le Créateur en qui elle pressent un juge. Où trouver quelque assurance ? Hélas ! Ni dans les raisonnements de l’intelligence, ni même dans l'affection des êtres chers assis, impuissants au chevet du mourant : il faut sans appui extérieur, descendre seul, dans le gouffre qui s'ouvre, inexorable ».
Oui, contrairement à ce qu'a dit Montaigne, ce n'est pas seulement « le mourir » qui est la cause de toutes les craintes, mais bien la mort elle-même, et plus encore ce qui peut la suivre.
Si tout était fini à la mort, pourquoi ne pas mettre fin tout de suite par euthanasie ou suicide, à une existence qui ne paraît plus à certains « qu'une sécrétion inhumaine et absurde » ?
Malgré le sentiment de Marie Curie qui, à la mort de son mari, notait ces paroles déchirantes : « nous te voyons descendre dans le grand trou profond. On comble la fosse. On jette des fleurs. Pierre dort de son dernier sommeil. C'est la fin de tout, de tout, de tout... », nous savons bien que tout n'est pas fini à la mort.
Les paroles de l'Écriture Sainte confirment avec force ce que nous dit notre conscience intime : « après la mort, vient le jugement ». (Heb 9.27).
Quoi qu'on en dise, ce que l'homme redoute dans la mort, ce n'est pas « le mourir », c'est le fait d'être définitivement jugé.
Et si l'homme craint le jugement, c'est bien parce qu'il se sait pécheur ; ni ses titres, ni ses bonnes oeuvres ne lui donnent de l'assurance pour paraître devant Dieu.
LE PÉCHÉ, voilà bien, en définitive, « l'aiguillon de la mort ». (1 Corinthiens 15.56).
S'il en est ainsi, pourquoi donc refuser obstinément le seul remède efficace contre les terreurs de la mort : la foi en l'Évangile, la réconciliation de l'homme avec Dieu, accomplie par Jésus-Christ dans l'oeuvre rédemptrice de la Croix ?
Tout dans la Personne et l'oeuvre du Rédempteur répond aux besoins de notre conscience et de notre coeur.
Jésus-Christ est « l'Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde » ! (Jean 1.29). En Lui, dans Sa vie et dans Sa mort, fut manifestée la justice d'un Dieu Saint et l'Amour infini d'un Père qui veut faire grâce et pardonner à Ses créatures.
Les péchés qui m'accablent, Jésus les prend sur Lui.
La loi qui me condamne, Jésus la subit pour moi.
Le jugement qui devait m'atteindre, Il le souffre à ma place.
La mort qui m'effraie, Il la goûte avant moi, pour expier mes fautes et me frayer un chemin par delà le tombeau.
En mourant pour le péché du monde, Jésus a ôté à la mort son terrible aiguillon.
En sortant victorieux du sépulcre, Il nous a délivrés des terreurs de la fosse, si bien que saint Paul s'écrie, anticipant notre propre résurrection, dont celle de Christ est le gage :
« La mort a été engloutie en victoire. O mort, où est ta victoire ? O mort, où est ton aiguillon » ? (1 Corinthiens 15.54-55).
Pourquoi donc persister à refuser l'invitation toujours actuelle du Sauveur ? Pourquoi ne pas croire Ses paroles infaillibles :
« Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos. Prenez mon joug sur vous et recevez mes instructions, car je suis doux et humble de coeur ; et vous trouverez du repos pour vos âmes, car mon joug est doux et mon fardeau léger ». (Matthieu 11.28-30).
« En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui écoute ma parole et qui croit à Celui qui m'a envoyé, a la vie éternelle et ne vient point en jugement mais il est passé de la mort à la vie ». (Jean 5.24).
Celui qui croit au Christ et obéit à Ses commandements, fait alors l'expérience merveilleuse de saint Paul. La mort ne le préoccupe plus. Il ne la redoute plus. Il appartient à Dieu et, dès ici-bas, il vit pour Dieu. Doit-il désirer prolonger son séjour sur la terre, doit-il souhaiter la mort ? Il n'en sait rien. Il ne choisit pas, mais s'en remet à Dieu, pouvant dire à son tour : « pour moi vivre, c'est Christ ; et mourir, un gain. Mais s'il est utile pour mon oeuvre que je vive dans la chair, je ne saurais dire ce que je dois préférer. Je suis pressé des deux côtés : j'ai le désir de m'en aller et d'être avec Christ, ce qui dé beaucoup est le meilleur ; mais à cause de vous, il est plus nécessaire que je demeure dans la chair ». (Philippiens 1.21-24).
Pour le chrétien, la vie n'est pas absurde et la mort n'est point le gouffre inconnu et redouté, la gueule affreuse d'un monstre vorace, mais la voie la plus courte, la monture la plus sûre qui mène aux réalités invisibles et éternelles, aux aimables demeures de la Maison du Père.
Et ce dernier voyage, il ne le fait pas seul. Ayant dans sa vie marché avec le Christ, lorsqu'il arrive sur les bords du grand fleuve il entend le Maître lui dire doucement : « passons à l'autre rive ». Et quand ils abordent, les portails éternels s'ouvrent pour laisser entrer le Christ vainqueur avec l'âme qu'il a rachetée.
Pour lui s'est pleinement réalisée la promesse de Jésus : « si quelqu'un garde ma parole, il ne goûtera point la mort ». (Jean 8.51).
Il n'en est pas ainsi de l'incrédule qui meurt dans son péché. Lui voit la mort le dépouiller de son corps, de ses membres qu'il employait à satisfaire ses désirs et ses passions. Il voit la mort le conduire dans un lieu où nul n’obéit plus à ses volontés.
Amis, quelle sera votre mort ? Il ne suffit pas seulement de mourir courageusement à la manière d'un Socrate, d'un Sénèque, d'un Pétrone ou même d'un Robespierre. Il s'agit de mourir dans la joie et le repos du coeur, dans la paix d'une conscience pardonnée.
C'est dans notre vie, c'est maintenant qu'il faut choisir.
L'attitude de l'homme en face de là mort dépendra donc, en dernière analyse, de sa position à l'égard de Jésus-Christ.
Acceptons-nous pour mourir dans la certitude du pardon et de la vie éternelle, la Révélation que le Christ « Lumière du monde », apporte au brigand repenti ou, refusant de reconnaître notre misère et nos péchés, mourrons-nous dans le doute, la révolte et la haine ?
« Toutes choses sont à vous, s'écrie saint Paul, soit le monde, soit la vie, soit la mort, soit les choses présentes, soit les choses à venir : toutes choses sont à vous, et vous à Christ et Christ a Dieu ». (1 Corinthiens 3.22-23).
La mort, acceptée dans les ténèbres de la foi du Vendredi-Saint et dans la clarté du matin de Pâques, voilà ce qui libère l'homme de toutes les craintes, voilà ce qui le fait vivre et proclamer que la mort est vaincue.