Dans le conseil divin, les dons spirituels sont destinés à servir de fondement aux ministères chrétiens. Le Nouveau Testament met cette vérité clairement en lumière (I Cor. 12, Romains 12.3-8, I Pierre 4.10-11).
Les divers ministères énumérés dans I Corinthiens 12.28 et Ephésiens 4.11, sont fondés sur le ou les dons accordés au croyant. Dans le chapitre 12 de I Corinthiens, Paul passe tout naturellement de la description des dons (premiers versets du chapitre) à celle des ministères qui découlent de ces dons (fin du même chapitre). Il n'y a peut-être pas un parallélisme absolu entre la liste des dons et celle des ministères, mais cela n'enlève rien au principe. L'Eglise primitive, ayant reconnu que le Saint-Esprit avait départi ses dons avec une souveraineté absolue (« comme il le veut », I Cor. 12.11), reconnut aussi que, de cette manière, Dieu avait donné à l'Eglise les divers ministères nécessaires à son témoignage envers ceux du dehors, et à l'édification de ses membres au-dedans. Sans aucun doute, c'est à cause des dons reçus du Seigneur par le croyant, que celui-ci était reconnu comme exerçant un des ministères chrétiens, et qu'il était par suite traité dans le corps de Christ, comme étant lui-même un don du Chef ressuscité. Toute la Trinité sainte est en oeuvre dans l'octroi des dons spirituels, comme le montre l'étude des versets I Corinthiens 12.5-6.
Nous avons posé le principe selon lequel tout ministère chrétien a pour origine un don de Dieu. Arrêtons-nous un instant pour considérer à quel point nous nous sommes écartés de ce principe aujourd'hui. On accepte dans le corps pastoral des hommes qui ne sont même pas réellement convertis, à plus forte raison des, hommes qui n'ont pas reçu le baptême du Saint-Esprit, condition essentielle d'un ministère efficace. De plus, la formation des pasteurs est en général une simple érudition, accumulant des connaissances purement naturelles, ou le perfectionnement de talents naturels, sans qu'on prête pratiquement aucune attention aux dons spirituels.
La pratique constante des dons spirituels ne fournit pas seulement à l'Eglise les ministères dont elle a besoin. Etant surnaturels et divins dans leur origine, il en résulte qu'ils sont une continuelle manifestation de l'Esprit, un témoignage réel et fort rendu à la présence et à la puissance du Saint-Esprit.
Le ministère fondé sur les talents naturels donne rarement cette impression. Le plus souvent, il attire l'attention sur les qualités brillantes du pasteur et glorifie en lui l'homme. Le vrai ministère fondé sur les dons spirituels laisse l'homme à l'arrière-plan et glorifie Dieu. Tel était le vrai ministère apostolique. (voyez le ch. 2 de I Corinthiens).
Le plan tracé par le Seigneur en vue des ministères dans son Eglise, est dévoilé d'une manière splendide dans I Cor. 12.12-27 ; et il y a une part pour chaque croyant, Tous peuvent avoir part au ministère spirituel. Si l'on étudie le Nouveau Testament de bonne foi, on est contraint d'admettre que le ministère d'un seul homme, qui prévaut d'une manière si générale dans les églises de nos jours, n'est pas conforme à l'ordre divin révélé dans les Ecritures.
Précisons bien la portée de cette affirmation, de peur qu'on ne nous accuse de favoriser la tendance ultra-démocratique et anarchique, préconisée par ceux qui ne veulent reconnaître ni charge ni gouvernement, et qui voudraient donner à tous la même autorité et la même position dans l'Eglise. Souvent on se porte par réaction à cette extrémité, comme le pendule qui oscille d'un extrême à l'autre. Le modèle idéal donné dans l'Ecriture présente une union parfaite de la liberté qui est reconnue à tous de participer au ministère spirituel, avec l'autorité reconnue à quelques-uns, qui reçoivent de Dieu des charges de gouvernement, et qui ont des dons surnaturels pour exercer des ministères spéciaux, comme apôtres, prophètes, évangélistes, pasteurs et docteurs.
Mais comme est beau que le plus humble croyant, ayant reçu un don spirituel, puisse apporter une force au corps de Christ tout entier, et que, d'autre part, le corps entier soit frustré si ce ministère en apparence insignifiant est empêché ! Ainsi Paul décrivant une réunion de l'église de Corinthe, écrit : « Lorsque vous vous assemblez, les uns ou les autres, parmi vous, ont-ils un cantique, une instruction, une révélation, une langue, une interprétation, que tout se fasse pour l'édification. » (I Cor. 14.26). Dans le même chapitre il se représente l'assemblée entière parlant en langues ou prophétisant (v. 5), et il attend de ce dernier don des résultats fort précieux (v. 24 et 31).
Les dons spirituels correctement pratiqués, ont pour fin, dans la pensée divine, des bénédictions toutes particulières pour les incroyants et pour l'Eglise de Dieu. L'exercice de ces dons pratiqué avec ordre, est indispensable pour l'édification de l'Eglise : c'est ce que nous étudierons dans un prochain chapitre.
Il ne faut pas négliger cet aspect quand on étudie le but des dons spirituels. Chose étrange, l'enseignement et le témoignage de Paul dans I Cor. 14, montrent clairement que le don auquel quelques-uns ont attribué un peu hâtivement un usage public, le don des langues, a en réalité un usage privé des plus importants.
Paul remercie Dieu de ce qu'il parle en langue plus qu'eux tous (v. 18) ; cependant, de toute évidence, il emploie ce don très rarement dans les réunions (v. 19). La seule explication possible de cette contradiction apparente est que Paul pratiquait ce don en privé. La clé est dans les versets 2 et 28, où il expose avec netteté que celui qui parle en langues parle à Dieu et non aux hommes. De plus, Paul ajoute qu'à l'occasion, il priera par l'Esprit seulement, c'est-à-dire en langues. Il n'avait pas peur d'exercer ce don ; et qui peut dire à quel point les bénédictions reçues par autrui dépendaient de ses intercessions par l'Esprit, ou à quel point son puissant ministère se fortifiait par la plénitude divine jaillissant dans son âme par le moyen de cette forme si précieuse de communion avec Dieu ?
Prier dans une langue inconnue est une pratique conforme aux Ecritures. Il n'y a rien de malsain ou de mystérieux dans ce moyen de communion entre Dieu et l'homme. « Dieu est Esprit, et ceux qui l'adorent doivent l'adorer en Esprit et en vérité. » (Jean 4.24) ; il est dit clairement que le don des langues fournit à l'esprit humain un moyen de s'exprimer (I Cor. 14.14) ; il fournit par conséquent un moyen légitime de communion entre le racheté et son Rédempteur. Pourquoi l'intelligence serait-elle toujours active dans la prière, spécialement dans l'adoration secrète ? Les soupirs de l'Esprit peuvent fort bien s'exprimer en dehors d'elle.
Les conséquences de l'expérience et du ministère surnaturels dans l'Eglise primitive furent très importantes ; elles constituent un des traits distinctifs de cette Eglise. Heureusement, nous l'avons vu, il y a tout lieu de croire que les mêmes choses peuvent se répéter aujourd'hui.
Pourvue des dons de sagesse et de connaissance, l'Eglise était en mesure d'exercer un ministère qui répandait la lumière divine, tout en remplissant d'étonnement ceux qui avaient été accoutumés aux subtilités d'une orgueilleuse philosophie, où il n'y avait point de place pour des « folies ». 'Cependant, Dieu choisissait maintenant de faibles instruments (I Cor. 1.27) pour confondre la sagesse du monde, et ils mirent le monde sens dessus dessous en une génération.
Pourvue des dons de guérison et de miracle, l'Eglise avait une grande puissance dans le combat contre le paganisme : Paul frappant Elymas de cécité (Actes 13), guérissant les malades à Ephèse (Actes 19), et guérissant le père de Publius (Actes 28), voilà, entre autres, quelques illustrations de cette puissance.
Pourvue des dons de foi et de discernement des esprits, l'Eglise se fortifiait contre la plus dure des persécutions, supportait les rigueurs de la guerre, car elle avait des prises surnaturelles sur l'invisible et l'éternel. Les pièges les plus subtils de l'Ennemi, voulût-il même se déguiser en ange de lumière, étaient déjoués à l'instant.
Pourvue des dons d'expression surnaturelle, l'Eglise entendait continuellement dans son sein des révélations qui enflammaient d'un feu divin orateurs et auditeurs, et qui procuraient un ministère que ne peuvent égaler ni les dons oratoires les plus brillants, ni la logique la plus persuasive. Elle en tirait un profit inappréciable d'« exhortation, d'édification, de consolation. » (I Cor. 14.3) ; elle avait un pouvoir extraordinaire pour convaincre l'incroyant. (v. 24).
Le but des dons spirituels, correctement pratiqués dans les assemblées de l'Eglise, est résumé de la manière la plus forte et la plus précise dans les mots du verset 25 : « Dieu est réellement au milieu de vous. ».
Tel était le témoignage, non d'un enthousiaste, disposé à l'avance à tout accepter comme venant de Dieu, mais d'un incroyant, entrant sceptique dans l'assemblée, peut-être même hostile : cependant les manifestations de l'Esprit de Dieu lui faisaient une telle impression que le sentiment de la présence de Dieu s'imposait à lui, et lui restait ensuite comme le souvenir dominant de sa visite à une assemblée chrétienne.
Tel est, pleinement révélé, le but dernier des dons spirituels. Ils servent à mettre l'homme en contact avec la réalité du Dieu invisible ; ils obligent l'Eglise à comprendre que le Saint-Esprit est toujours présent, et que tout vrai ministère vient de lui, car il est pour elle la seule source de vie et de puissance ; ils servent enfin à donner à l'incroyant la conscience que Dieu ne doit pas être oublié et que le péché ne peut pas être traité à la légère.
Quand l'Eglise rentrera en possession de ses pouvoirs divins, quand elle possèdera par pure grâce tous les dons spirituels, elle sera réellement « belle comme la lune, pure comme le soleil, mais terrible comme des troupes sous leurs bannières. ».