[1] Alors, pour la première fois, la famille étrangère d'Hérode reçut la royauté du peuple juif, et la prophétie rapportée par Moïse eut son accomplissement : « Il ne manquera point de prince ni de chef du sang de Juda, dit-elle, jusqu'à ce que vienne celui à qui il est réservé, » celui qu'il déclare devoir être l'attente des nations.
[2] Cette prédiction resta stérile, tant qu'il fut permis aux juifs de vivre sous des chefs de leur race, descendant depuis Moïse lui-même et en allant jusqu'au règne d'Auguste. A cette époque seulement pour la première fois, Hérode, un étranger, obtint des Romains le pouvoir sur les Juifs. Josèphe, du reste, nous apprend qu'il était Iduméen par son père et arabe par sa mère. D'après Africain, qui fut lui aussi un écrivain et non le premier venu, ceux qui ont raconté sa vie avec exactitude disent qu'il était fils d'Antipater et que celui-ci était né lui-même d'un Hérode d'Ascalon, hiêrodule du temple d'Apollon. [3] Cet Antipater, fait prisonnier tout enfant par des brigands Iduméens, demeura avec eux, parce que son père, un mendiant, ne pouvait payer sa rançon ; il fut élevé dans leur genre de vie. Plus tard, il obtint l'amitié du grand prêtre des Juifs, Hyrcan. De lui naquit Hérode, le contemporain de notre Sauveur. [4] Lorsque le sceptre des Juifs vint en ses mains, celui que la prophétie appelle, l'attente des nations était aux portes ; car à compter de cette heure, les chefs et les princes qui depuis Moïse s'étaient succédés au gouvernement d'Israël firent défaut.
[5] Avant la captivité et l'exil à Babylone, les Juifs avaient vécu sous le pouvoir des rois, à commencer par Saül, qui fut le premier, et par David. Antérieurement, ils avaient obéi à des gouverneurs appelés Juges, après Moïse et son successeur Josué. [6] Après le retour de Babylone, ils ne cessèrent d'avoir un régime aristocratique et oligarchique : les prêtres présidaient aux affaires. Cet état de choses dura jusqu'à ce que Pompée, général des Romains, vint assiéger et prendre lieu : il souilla les choses saintes après avoir pénétré jusque dans les lieux interdits du temple, Aristobule, qui avait été jusqu'à ce jour grand prêtre et roi par succession de ses ancêtres, fut envoyé par lui à Rome comme captif avec ses enfants. Pompée donna le pontificat suprême à Hyrcan son frère, et depuis ce moment toute la nation juive fut tributaire des Romains. [7] Hyrcan, le dernier successeur des souverains pontifes, fut fait prisonnier par les Parthes. Alors pour la première fois, ainsi que je l'ai dit, ce fut un étranger, Hérode, qui prit en mains le gouvernement du peuple juif de par le sénat de Rome et l'empereur Auguste. [8] Ce fut en ce temps que parut manifestement le Christ et on vit dès lors se réaliser sans retard le salut attendu des Gentils, et leur vocation prédite par la prophétie. A partir de ce moment, il n'y eut plus de princes ni de chefs de Juda, je veux dire d'origine juive, et comme de juste la succession normale du souverain pontificat, qui échéait par descendance aux plus proches héritiers, fut aussitôt troublée.
[9] De tout cela nous avons, comme garant digne de créance, l'historien Josèphe. Il nous raconte qu'Hérode, après avoir reçu le trône des Romains, n'établit plus de pontifes de l'ancienne race ; il départit cet honneur à des gens obscurs. Son fils Archélaüs en usa pareillement dans la désignation des prêtres, et, après lui, les Romains, lorsqu'ils recueillirent la domination de la Judée. [10] Le même auteur raconte que, le premier, Hérode garda, placée sous clef et sous son propre sceau, la robe sacrée du pontife, et ne permit plus qu'elle fût à la disposition des grands prêtres. Après lui, Archélaüs et ensuite les Romains firent de même. [11] Je rapporte ces détails pour mettre en lumière une autre prophétie qui s'est réalisée lors de l'apparition de notre Sauveur Jésus-Christ. Au livre de Daniel, après avoir très clairement fixé le nombre exact des semaines qui devaient s'écouler jusqu'au Christ roi et dont j'ai parlé ailleurs, l'Écriture annonce qu'après leur accomplissement, l'onction disparaîtra de chez les Juifs. Cela s'est manifestement réalisé lors de la naissance de notre Sauveur Jésus-Christ. Voilà ce qu'il était nécessaire de dire pour établir la vérité en ce qui concerne l'époque de sa venue.