Ainsi, cher lecteur, nous avons essayé, dans l’infirmité, de faire ressortir les fondements de la confiance de l’Apôtre : et quoique nous n’ayons qu’effleuré le sujet, cependant nous en avons dit assez pour montrer que c’est avec justice que le croyant peut défier toutes les créatures qui sont dans les cieux et sur la terre, de pouvoir, non pas sans doute l’accuser, mais l’accuser de manière à le faire condamner. Car si Dieu le justifie, qui le condamnera ? Et si à cause de la mort et de la résurrection de Christ, Dieu demeure juste en prononçant la justification du pécheur croyant, qui oserait en appeler de cet arrêt ? Êtes-vous une de ces âmes craintives et délicates que la moindre accusation contre elles-mêmes met en émotion et en doute, de quelque part qu’elle vienne ; voyez combien vos craintes sont mal fondées ; voyez ce qu’est Christ auprès du Père, ce qu’il a fait, ce qu’il fait encore : et puisqu’un regard de foi porté sur ce gracieux Rédempteur vous unit à lui, vous approprie son œuvre, vous fait participer à son sang, à sa vie, à ses prières, donnez gloire à Dieu et jouissez des biens que la munificence du Seigneur a mis devant vous. Mais, direz-vous, mon peu de foi, ma faiblesse naturelle, mes chutes fréquentes, je ne sais quelle crainte indéfinissable causée par la vue de ce que je suis, ou peut-être la superlative grandeur des privilèges du croyant, comparée à ma petitesse, tout cela m’empêche de triompher avec l’Apôtre Paul. Eh bien ! écoutez les quelques paroles que nous désirons, avant de quitter la plume, vous adresser encore pour votre encouragement, paroles que nous tirerons en substance de cette précieuse et fortifiante déclaration du Saint-Esprit, sur laquelle nous avons déjà dit quelque chose, mais qui est susceptible de développements plus riches que nous ne sommes capables d’en donner : C’est pourquoi il peut sauver parfaitement cœur qui s’approchent de Dieu par lui ; étant toujours vivant afin d’intercéder pour eux, (Hébreux 7.25). Que Celui qui a inspiré ces paroles nous donne de recueillir avec empressement le précieux fruit de consolation suspendu à cette branche de l’arbre de vie !
Vous trouverez, d’abord, ici une définition de la foi qui doit éloigner les craintes que vous ressentez à la vue de la faiblesse de la vôtre. — Quoique vous ne soyez pas un croyant affermi, n’êtes-vous pas un de ceux qui s’approchent de Dieu par Christ pour être sauvés ? Oui ; vous êtes du nombre de ces heureux pécheurs, quelque petite que soit votre foi. — Vous venez pour être sauvé. Peut-être n’êtes-vous pas encore sûr de l’être, peut-être êtes-vous dans l’incertitude sur la question de savoir si Dieu vous recevra ou non : mais au moins vous savez que c’est Dieu qui sauve, et vous souhaitez qu’il vous sauve. Vous venez à lui par Christ ; vous n’avez pas l’orgueilleuse prétention de vous présenter devant Dieu sans être accompagné de son Benjamin ; vous avez compris que c’est l’œuvre de Christ qui justifie, et que votre affaire ici n’est pas d’apporter mais de recevoir. Ainsi vous avez la foi de ceux qui doivent être sauvés. Quoique timide et tremblante, c’est celle-là même que le Saint-Esprit a décrite dans le verset que nous méditons. Lors même que vous venez à Christ en clochant et avec une hésitation causée par le sentiment de votre petitesse, vous vous approchez pour trouver en lui le repos de votre âme. Or c’est là précisément ce qu’il demande de vous ; premier sujet d’affermissement.
Maintenant, lors même que vous n’êtes pas parvenu à la pleine assurance de la justification, considérez combien de sujets vous avez de ne pas vous laisser abattre, et de raffermir au contraire votre cœur chancelant.
D’abord, Christ vous est représenté comme intercédant pour celui qui vient : n’est-ce pas là ce qu’il vous faut ? Il est possible que quelque consolantes que soient sa mort et sa résurrection passées, vous fussiez repoussés loin de lui, si vous ne le voyiez dans le ciel que simplement glorifié. Mais vous l’y trouvez accomplissant continuellement une œuvre qui atteste son amour et sollicitant la grâce du Père en faveur de pauvres pécheurs qui obéissent à son commandement : Si quelqu’un a soif qu’il vienne à moi (Jean 7.37).
Ne comprissiez-vous pas qu’il est mort afin de montrer tout son amour envers les hommes, il y aurait déjà de quoi apaiser un peu la conscience, dans cette idée que le Fils de Dieu intercède sur le trône pour le salut des misérables qui s’approchent de ce trône. Si la foi aime à se reposer sur ce qu’il a fait, elle trouve aussi un appui dans ce qu’il fait maintenant, c’est-à-dire dans son intercession qui dure toujours. Quoique l’assurance du salut se fonde sur la présence actuelle de Christ dans les cieux comme Souverain Sacrificateur de la nouvelle alliance, elle a pourtant égard aux choses déjà passées, comme à l’élection de Dieu, au sacrifice du Seigneur, à sa résurrection et à son exaltation. La foi forte saisit ces choses comme Paul (Galates 2.20), et se glorifie dans l’espérance de la gloire de Dieu (Romains 5.2) ; ce que la foi faible ne peut faire encore. Mais l’assurance n’est pas la foi ; vous le voyez par les expressions mêmes du Saint-Esprit, que nous venons de relever. Ainsi prenez courage et venez à Dieu par Christ, afin qu’il vous apprenne lui-même que vous avez une part à ce qui a été accompli sur la croix et ratifié par le retour à la vie du Grand Pasteur des brebis. Vous donner l’assurance est une œuvre que le Père a laissée au Fils le soin de faire en vous. Croyez que Jésus s’acquittera de sa tâche puisqu’il est vivant pour cela ; et remettez-vous entre ses mains divines, avec tout espoir qu’aucune parole venue du ciel ne peut tomber en terre.
Mais demanderez-vous encore, puis-je être bien sûr qu’en cherchant le salut en Christ, ce puissant Sauveur intercédera pour moi, et prendra en main la cause de mon âme ? Il est toujours vivant afin d’intercéder pour ceux qui s’approchent de Dieu par lui. Voilà la réponse de Dieu même à votre question. Sa vie est consacrée à cela ; c’en est le but et l’occupation. Comme il a reçu du Père l’ordre de donner sa vie sur la terre, c’est aussi d’après le même ordre qu’il s’est assis dans le ciel, comme notre grand souverain sacrificateur. Sous la loi, toute victime de propitiation qu’on amenait au sacrificateur, quand on voulait s’approcher de Dieu par lui, était offerte sans difficulté : ainsi Christ a pour charge de recevoir tous les pécheurs qui viennent à Dieu par lui, et de recueillir les veux, les prières, les soupirs qu’ils sont monter de la terre vers le trône de grâce. Autrement il faudrait qu’il cessât d’être Sacrificateur.
Et si l’Adversaire, ramassant tous les péchés de votre vie avec leurs circonstances aggravantes, vous les présentait comme un sujet de craindre que Jésus ne s’intéresse pas à vous ; ou s’il prenait occasion de la puissance que l’habitude du péché exerce encore sur votre âme pour vous faire désespérer d’une guérison, souvenez-vous que Jésus peut sauver en plein ou parfaitement ceux qui s’approchent de Dieu par lui, Médecin venu du ciel et retourné dans le ciel, il ne connaît point d’insuccès dans les maladies de l’âme. Il peut guérir et délivrer les consciences les plus chargées, et ramener des portes de la mort les plus misérables (Psaumes 107.10-21). Voyez ce qu’étaient les Éphésiens et les Corinthiens (Éphésiens 2.1-3 ; 1 Corinthiens 6.10-11) ; leur misérable état les avait-il empêchés d’être parfaitement sauvés ? Ainsi donc lors même que Satan vous conduirait sur la montagne d’où vous pouvez découvrir l’étendue de son royaume dans votre cœur et la honte qui vous en revient, en levant les yeux en haut, vous pouvez voir en même temps que la puissance de Christ pour sauver est mille fois, que dis-je ? infiniment plus grande que ce monde d’iniquité (Ésaïe 55.7-9). La terre est de toute part couverte du ciel ; ainsi en est-il de la grâce de Christ par rapport au péché. L’œil ne saurait trouver de bornes à l’horizon céleste, ni l’âme au pouvoir que Christ possède de délivrer et de purifier de tout péché. — Voulez-vous une délivrance ? Lors même que vous trouveriez dans votre vie tout ce qui peut imprimer au péché un caractère odieux, je dirai même atroce, attendez cette délivrance de Christ : Il peut sauver pleinement.
Supposez un instant que Jésus fût simplement mort, ressuscité, et élevé dans la gloire et qu’il n’intercédât pas maintenant pour vous auprès du Père, ne serait-ce pas un rafraîchissement pour votre âme que d’apprendre que tous les enfants de Dieu sur la terre, et tous les bienheureux esprits des lieux célestes, assiègent nuit et jour pour vous le trône de la grâce ? Eh bien ! un seul mot de Christ vaut mieux que tout un pareil concert de prières. Et puisqu’il est toujours vivant afin d’intercéder, quel sujet de plus d’être fortifié dans votre foi, et de ne pas douter qu’il ne vous puisse sauver ?
Je le crois, ajouterez-vous enfin, mais je redoute que mon incrédulité ne me prive de ces doux privilèges. — Il est vrai que l’incrédule n’y a point de part. Mais l’incrédule ne se soucie pas de Christ ; l’incrédule ne voit ni ne connaît l’excellence du salut ; pour lui, tout ce qui regarde Dieu et sa gloire, l’âme et sa délivrance, le ciel et ses joies, la paix des justifiés, la mort et la vie de Christ, sont des faits que sa bouche peut confesser, mais que son cœur ne croit pas ; des doctrines apprises par cœur, mais non des réalités ; des matières de science religieuse, mais non des objets qui excitent chez lui des affections de joie ou de tristesse, de repentance ou d’espérance, de haine de soi-même ou d’amour de Dieu ; des soupirs, des prières, des actions de grâces ou des ravissements d’esprit. Est-ce-là votre cas, cher lecteur ? Venez-vous à Christ pour la forme, ou plutôt n’y venez-vous pas réellement ? Christ n’est-il qu’un mot pour vous et non un être réel, un Sauveur qui a porté le péché et qui est vivant auprès du Père ? Non, encore une fois ce n’est pas votre cas. Vous ne pouvez pas vous réjouir, triompher avec Paul ; mais vous sentez que votre bonheur est attaché à la possession de la grâce de Dieu et à une part avec ceux que la foi a sanctifiés. Vous connaissez par expérience ces soupirs dont parle Paul, ces gémissements muets de l’âme qui a soif du Dieu vivant. Qu’est-ce donc là, sinon une preuve que Jésus a déjà prié pour vous ? Sont-ce les membres qui commandent à la tête d’agir ; ou bien si le siège de tout mouvement est dans la tête, et de là se communique aux membres ?
Et vous, chers lecteurs, qui avez trouvé une pleine paix dans le Seigneur Jésus et qui pouvez adopter le langage de Paul, langage dont nous n’avons pu, malgré nos efforts, faire ressortir toute l’énergie, souffrez qu’avant de poser la plume nous vous donnions, en quelques mots, une parole d’exhortation. Le but de ce traité a été d’affermir votre foi, de la rendre aussi triomphante que possible ; mais c’est afin qu’elle vous fasse triompher elle-même du péché, du monde et du Diable. Vos privilèges en Christ ont été placés devant vous ; et cette abondance de grâce et de justice que vous possédez dans le second Adam, vient d’être en partie, et surtout en faiblesse, exposée de nouveau à vos regards. Mais souvenez-vous que c’est pour exciter l’amour en nous que l’Esprit du Seigneur fait passer l’amour de Christ devant nous. Si la grâce surabonde par-dessus le péché, et si la miséricorde se glorifie par-dessus la condamnation, c’est afin de vous rappeler sans cesse que vous êtes maintenant esclaves de Dieu, et rachetés d’une cruelle servitude, celle du péché, servitude sous laquelle vous ne devez plus rentrer. Si vous êtes ressuscités et assis avec Christ et en Christ dans les lieux célestes, c’est afin que vous marchiez en nouveauté de vie sur la terre, animés du même esprit, remplis des mêmes sentiments, que votre Seigneur et Sauveur dans sa vie actuelle : c’est afin que vous cherchiez les choses qui sont en haut, où Jésus est assis à la droite de Dieu, et que, vous considérant comme bourgeois des cieux, vous laissiez le monde en arrière, et vous tendiez à arriver, comme Paul, à la perfection, c’est-à-dire à la résurrection d’entre les morts, qui est le prix de la céleste vocation de Dieu en Jésus-Christ (Philippiens 3.8-20). Si Christ prie pour vous, c’est afin que vous priiez avec lui pour son Église et pour tous vos frères en particulier, et que vous serviez les saints comme Jésus les sert lui-même, vous employant à cela avec le même amour et la même persévérance (Jean 12.1-17). Et vous ne sauriez conserver et entretenir la joie résultant des fruits qui vous reviennent de l’œuvre de Christ, sans donner vos soins à toutes ces choses et y abonder ; car elles sont les conséquences d’une sainte contemplation de la gloire de Christ que le Saint-Esprit vous a découverte (2 Corinthiens 3.18). Puissiez-vous donc vous conduire d’une manière digne de la vocation à laquelle vous êtes appelés, et vivre pour Christ dans l’attente de régner avec lui ! Souvenez-vous de sa prière continuelle ; et prévalez-vous-en pour obtenir que Dieu accomplisse puissamment en vous le bon plaisir de sa bonté et l’œuvre de la foi ; afin que le nom de notre Seigneur Jésus-Christ soit glorifié en vous et vous en lui ! (2 Thessaloniciens 1.11-12)
Or à ce grand Dieu qui nous a aimés, et qui nous a donné une consolation éternelle et une bonne espérance par grâce, à Lui soit, par Jésus-Christ, la gloire et la force aux siècles des siècles. Amen !