Explosion de vie

La septième opération progressive :

LES DONS DE L’ESPRIT

Ce n’est pas pour rien que j’ai gardé ce sujet merveilleux pour la fin de mon livre. Après avoir contemplé la vaste gamme d’opérations qui constituent la plénitude du Saint-Esprit, tu sauras mieux apprécier la place qu’occupent ses « dons » dans l’ensemble de son ministère.

Il est évident que les dons spirituels ne sont qu’une partie de son œuvre. C’est sans doute par ignorance qu’on en parle parfois comme s’il n’y avait pas d’autres manifestations de la plénitude de l’Esprit. C’est très dommage. Une vue d’ensemble, au contraire, te permettra de tout voir en perspective et de garder un équilibre sain et biblique.

L’Esprit, par sa plénitude, crée en toi un témoignage puissant, un amour irrésistible, une communion et une vie de prière pures et intenses ; il t’enseigne et te dirige jusque dans les domaines les plus élevés du royaume de Dieu... Pourtant, il ne t’accorde pas tout cela afin que tu le gardes pour toi-même ! Maintenant que tu es devenu riche en esprit, il faut que tu partages tes richesses avec ceux qui t’entourent.

Toute l’œuvre du Saint-Esprit en nous est orientée vers un objectif : la communication de la connaissance et de la vie de Christ au monde perdu. Or, les dons de l’Esprit nous sont accordés dans ce but précis.

Dieu veut se servir de toi. Il se révèle à toi, il te fait grandir, il te bénit, il te remplit... afin que cette abondance déborde, afin que tu partages son Esprit avec ceux qui t’entourent et surtout avec ceux qui ne le connaissent pas encore. C’est dans ce but que l’Esprit t’accorde un don.

1

LA NATURE DU DON CORRESPOND AU CARACTÈRE DE CELUI QUI DONNE

L’Esprit de Dieu est intelligent !

Pour beaucoup, les dons de l’Esprit demeurent un sujet assez mystérieux ; pour d’autres, il est simplifié jusqu’à l’infantilisme. La vérité est pourtant claire et complexe à la fois. Quand on considère qui est le Saint-Esprit et quel est son caractère tel qu’il le révèle dans les Écritures et tel que nous le voyons dans la nature qu’il a créée, on est mieux placé pour apprécier le sens de ses dons.

Nous savons pertinemment qu’il est l’intelligence même. Il faut donc nous attendre à ce que son œuvre exprime le comble de l’intelligence. La science en découvre chaque année mille aspects nouveaux ; plus on sonde le macrocosme et le microcosme, plus on est émerveillé par la complexité et la pureté de la pensée de Dieu.

Dans la Bible aussi, le Saint-Esprit se présente comme étant celui qui donne à la sagesse divine son expression : cela est évident dans l’appel d’Abraham et la création du peuple d’Israël ; dans la communication de la loi à Moïse ; dans l’inspiration de la prophétie qui germe dans le jardin d’Éden et qui se développe par une progression éblouissante d’idées, de visions, de certitudes jusqu’à son incarnation dans la personne de Jésus. Cette sagesse est exprimée par excellence dans la vie de Jésus, dans ses paroles, dans sa mort et sa résurrection ; nous en voyons également la profondeur dans les raisonnements et l’intuition lumineuse des écrits apostoliques et dans la vision extraordinaire de l’Apocalypse. Dans toute la révélation écrite de Dieu, qui est manifestement l’ouvrage du Saint-Esprit, nous sommes conscients du plus haut degré d’intelligence divine.

L’Esprit de Dieu ne mystifie pas !

L’action de l’Esprit est non seulement chaque fois infiniment intelligente, mais elle est lucide ; elle est claire, transparente. Il n’y a rien d’inintelligible dans ses démarches ; sa pensée n’est pas ambiguë. Il parle toujours avec un langage précis et convaincant. Même quand il dépasse l’intelligence de l’homme naturel, il ne la mystifie pourtant pas. Il respecte la raison puisque c’est lui qui l’a créée et qui la maintient.

Les révélations qu’il accorda à Abraham, Moïse, Samuel, David, Élie, Ésaïe, Jérémie, Daniel, furent puissantes au point de les mettre souvent par terre devant la majesté divine ; mais ces hommes n’étaient pas, comme les médiums spirites, « hors d’eux-mêmes » : ils restaient absolument conscients et maîtres de leur volonté. Nous ne voyons nulle part dans la Bible l’exemple d’un homme de Dieu qui ait « abdiqué sa raison » ou qui soit incertain de la voix qui lui parle. D’ailleurs, toutes les fois que Dieu s’adresse aux hommes, c’est avec clarté et précision qu’il le fait (Proverbes 8.9-10).

Même le symbolisme biblique devient clair lorsqu’on l’interprète à la lumière de l’Écriture tout entière. Par exemple, le sens de la parabole de l’arbre sortant du grain de sénevé (Matthieu 13.31-32) devient évident lorsqu’on la compare avec la prophétie de Daniel (Daniel 4voir surtout Daniel 4.20-22, 28-30) où Jésus a puisé ce symbolisme. Certes, ces choses sont incompréhensibles aux incrédules, mais non aux vrais disciples de Jésus (Matthieu 13.10-17). Le Saint-Esprit les leur enseigne, « employant un langage spirituel pour les choses spirituelles » (1 Corinthiens 2.13).

Dans la nature aussi, le Saint-Esprit s’exprime avec clarté. Les lois de la physique et de la chimie ne sont pas ambiguës. Parce que l’œuvre de l’Esprit est faite avec la plus grande précision, la connaissance scientifique permet d’envoyer un homme sur la lune et de le récupérer ensuite à l’endroit et au moment voulus. Les savants, même athées, ont appris à compter sur l’immuabilité des lois que l’Esprit de Dieu a établies ! Quel dommage qu’ils ne comptent presque jamais sur l’Esprit lui-même.

Quand nous considérons l’œuvre du Saint-Esprit, nous nous attendons à ce qu’il communique ses dons aux hommes par une action intelligente et lucide. C’est une grave erreur que de supposer qu’il se plaise à mystifier. Il ne bafoue pas l’intelligence de l’homme à qui il s’adresse. Tout ce qu’il fait est transparent, sans équivoque, clair, lumineux, pur. Nous pouvons être certains qu’un esprit qui se présente sous une autre forme n’est pas celui qui vient de Dieu. La Parole de Dieu nous met bien en garde : elle exige que nous éprouvions les esprits (1 Jean 4.1). C’est une chose terrible que d’attribuer au Saint-Esprit une action venant des ténèbres, et l’inverse l’est tout autant.

2

LA NATURE DES DONS

Tu ne peux pas servir Dieu !

Dieu t’a sauvé pour que tu le serves dans ce monde hostile, mais tu ne le peux pas avec tes forces et ton intelligence naturelles. Si tu t’engages dans une activité chrétienne en comptant sur tes capacités humaines, tu feras certainement faillite. J’ai connu des chrétiens (comme tu en as sans doute connu, toi aussi) qui étaient remplis de zèle et très actifs pour le Seigneur, mais qui faisaient tant de dégâts autour d’eux que l’actio du Saint- Esprit était plutôt arrêtée par leurs efforts. Plus d’une fois j’ai vu des églises divisées et même détruites par le zèle charnel d’une ou de plusieurs personnes. L’une des leçons les plus importantes à maîtriser, c’est que de nous-mêmes nous ne pouvons pas faire la volonté de Dieu : seul l’Esprit de Dieu peut la faire.

C’est l’Esprit qui te rend capable

Comment donc pouvons-nous espérer travailler pour le Seigneur ? La réponse est directe : il faut être constamment rempli du Saint- Esprit ; c’est alors lui qui agit en nous et par nous. En comptant sur son intelligence et sur ses forces infinies nous disposons de moyens surnaturels ; il commence à utiliser notre cerveau, notre bouche, nos mains, en les dirigeant dans le sens voulu par Dieu.

Nous découvrons alors une nouvelle dimension dans nos relations avec les hommes ; nous constatons avec joie que Dieu honore notre désir de lui obéir, car il bénit notre témoignage ; il se sert de nous — quelle merveille ! — pour amener d’autres âmes à lui, pour encourager nos frères, pour venir en aide à ceux qui sont désemparés et pouf édifier son église.

L’Esprit indique le chemin du service

Nous découvrons aussi que l’Esprit de Dieu nous oriente de plus en plus dans un sens précis. À mesure que nous lui obéissons, il nous fait comprendre qu’il désire nous utiliser chacun d’une façon particulière. Certains d’entre nous trouvent qu’il les qualifie pour toucher le cœur des enfants ; d’autres, qu’ils sont spécialement bénis auprès des adolescents ou des personnes âgées. D’autres encore reçoivent des facultés exceptionnelles de discernement, ou sont doués pour entraîner les autres à l’action, ou bien aptes à leur enseigner les choses de Dieu. D’une manière ou d’une autre, le Saint-Esprit développe en chacun des capacités lui permettant de servir son Maître avec efficacité.

Comment découvrir son don ? (J’ai puisé ce paragraphe dans mon livre Si tu veux aller loin, chapitre 10.)

Il faut d’abord tout essayer, être prêt à faire n’importe quoi pour Dieu : balayer la salle de prédication, distribuer des Évangiles et des traités, faire du porte à porte, faire du « plein-air », se joindre aux cercles de prière et d’étude biblique, visiter les malades et, si possible, les prisonniers, aider les pauvres, les veuves et les personnes âgées, entourer les timides et les nouveaux venus, intéresser les enfants, accrocher les jeunes. Enfin, il faut apporter ton aide désintéressée et faire le bien partout où tu le peux.

Bientôt, d’une manière ou d’une autre, l’Esprit de Dieu t’indiquera la façon dont il veut se servir de toi, là où tu peux lui être le plus utile. Il emploiera certainement tes capacités naturelles. Tu es poète ? Guitariste ? Bricoleur ? Tu sais bien accrocher les voyous ? Ton Créateur sait cela depuis la fondation du monde ce n’est pas pour rien qu’il t’a fait comme tu es. Dieu a besoin d’artisans, de linguistes, de techniciens... à condition qu’ils soient remplis du Saint-Esprit ! Les communistes utilisent tout leur potentiel pour faire avancer leur cause et ils gagnent partout. Pourquoi les enfants de Dieu sont-ils si lents à contribuer à l’évangélisation du monde ?

Rapport entre le physique et le spirituel

Dieu veut développer ton être tout entier. Il ne faut pas confondre le physique avec le spirituel : le spirituel est évidemment le plus important ; mais il ne faut pas supposer que pour Dieu le physique ne compte pas. Il a créé ton corps comme véhicule de ton esprit... et de son Esprit. Le Nouveau Testament dit qu’il faut glorifier Dieu dans notre esprit mais aussi dans notre corps, car tous les deux lui appartiennent (1 Corinthiens 6.20).

Il y a donc souvent une relation entre le don spirituel et les facultés physiques d’un homme. Si, par exemple, Dieu te donne une très belle voix, ou le sens des affaires, ou une facilité pour le dessin, il est fort possible (mais non obligatoire) que ton don spirituel soit en rapport avec ces capacités. Dieu a besoin dans son œuvre de toutes sortes de personnes : des secrétaires, des comptables, des rédacteurs, des maçons, des électroniciens, des médecins, aussi bien que des orateurs. Dans les pays sous-développés, cela est très évident, mais c’est tout aussi vrai en Europe. L’œuvre de Dieu est souvent paralysée faute d’une secrétaire ou d’un mécanicien compétent.

Même les dons que l’on considère comme les plus « spirituels » ne sont pas forcément dissociés du physique ou de l’humain. Les styles littéraires des apôtres Paul et Jean sont totalement différents : le Saint-Esprit n’a pas effacé les personnalités de ces deux hommes ; au contraire, il les a sanctifiées, développées et utilisées, chacune à sa façon. Ce qui fait de la Bible un si grand miracle, c’est la grande diversité d’auteurs, chacun unique en son genre, mais dont la cohésion et la complémentarité créent une richesse extraordinaire, à la fois spirituelle et humaine.

De même, l’Esprit de Dieu, en t’accordant un don spirituel, tient compte de ta personnalité, de tes capacités, de tout ce que tu es, de ton vrai « moi » tel que Dieu l’a conçu et tel qu’il le veut. À travers cette personnalité, il communique au monde une expression lumineuse du Christ.

Le don de l’Esprit est pourtant surnaturel (J’ai puisé ce paragraphe dans mon livre Si tu veut aller loin, chapitre 10).

Seulement, ne commets pas l’erreur de confondre « capacité naturelle » avec « don spirituel ». Comme je l’ai déjà dit, il y a souvent un rapport entre les deux, car Dieu utilise l’être humain tout entier. Le don spirituel est pourtant autre chose. Paul, avant sa conversion, avait un magnifique cerveau et il possédait une connaissance très étendue de l’Ancien Testament, pourtant il démolissait l’Église de Dieu ! Lorsqu’il rencontra le Christ sur la route de Damas, il rompit avec le péché, avec le passé, avec le monde — même avec le monde religieux. Sa personnalité, avec ses capacités naturelles, mourut avec Christ, fut baptisée, enterrée avec lui dans ce baptême spirituel. Dieu, par la suite, reconstitua sa raison, son intuition, sa personnalité. L’argumentation de l’épître aux Romains est sans pareille dans la littérature du monde ; c’est un raisonnement manifestement inspiré par le Saint-Esprit. Le cerveau de Paul, purifié par Dieu, devint l’instrument de la sagesse de Dieu. Et pourtant, c’était toujours le cerveau de l’homme Paul. On ne peut confondre ses écrits avec ceux de Jacques ou de Pierre.

Toi, mon frère, tu es un être unique que Dieu intègre dans le corps de Christ selon son intelligence insondable. Il conçoit pour toi un rôle, une fonction qui te permettront de le servir et de le glorifier de la manière la plus efficace possible. Mets-toi d’accord avec lui concernant ton avenir. Il ne te trompera pas. Il t’épatera ! Mais compte sur un apprentissage dur.

À quel moment recevons-nous un don ?

Dans certains cas, la révélation de cette capacité spirituelle arrive subitement, comme un orage ou un éclair, à travers une crise ou au moment d’une consécration entière ; chez d’autres, la réalisation de ces choses vient progressivement ou même lentement. Dieu est souverain et il se révèle à qui il veut, comme il veut : ce n’est pas à nous de lui dicter ses méthodes ou son horaire. Il sait mieux que nous comment éduquer ses enfants et à quel moment leur confier les moyens de sa grâce. Mais tu peux être certain d’une chose : ce qu’il veut te communiquer est fantastique ; ce don te permettra de vivre heureux dans l’accomplissement de sa volonté, en récoltant un véritable fruit spirituel pour sa gloire.

3

LES TEXTES BIBLIQUES SUR LES DONS SPIRITUELS

Qu’est-ce qu’un don spirituel ?

Pour répondre à cette question nous ne pouvons que nous en référer à la Parole de Dieu. Il y a dans le Nouveau Testament quatre passages principaux sur les dons spirituels :

Pour avoir une compréhension juste et équilibrée du sujet, il est nécessaire de lire et de connaître tous ces passages en entier. Pourquoi donc ne pas le faire maintenant, avant de lire mes arguments ! Ainsi, tu seras en mesure de mieux comprendre la conception divine des « dons » et tu sauras mieux évaluer mes propos.

Une lecture attentive de ces quatre passages relève en tout quatre « listes » de dons spirituels (Ne pas confondre ces « listes » avec les passages entiers.)  : Romains 12.6-8 ; 1 Corinthiens 12.8-10, 28 ; Éphésiens 4.11. Ces listes sont toutes différentes et il existe incontestablement bien des dons qui n’y sont pas mentionnés. Il n’y a dans la liste de Paul aucune indication d’un don semblable à celui du chanteur Ira Sankey qui, par sa collaboration dans l’évangélisation avec le prédicateur Moody, a contribué à la conversion de deux millions de personnes en Amérique et en Angleterre.

Ces quatre listes de Paul ne sont pas exhaustives, mais plutôt représentatives.

L’enseignement apostolique sur les dons

La pensée de Dieu exprimée par l’apôtre Paul est très claire. Pour bien la saisir, il faut étudier en premier lieu et en entier 1 Corinthiens 12, que nous avons déjà effleuré. Il faut le voir dans son contexte (1 Corinthiens 12-14) et le mettre en parallèle avec les passages de Romains 12.3-8, d’Éphésiens 4.1-16 et de 1 Pierre 4.10-11. Tu auras ainsi une vue d’ensemble du sujet.

Voici comment Paul, en se basant sur l’analogie du corps et de ses membres, conçoit la nature des dons de l’Esprit :

I

_ « Il y a diversité de dons, dit-il, mais le même Esprit » (1 Corinthiens 12.4). Cela est évident, car qui a jamais vu un corps composé d’un seul organe ou de deux : d’une oreille et d’un pied uniquement, ou d’une seule grosse langue ! Ce serait monstrueux. Dans l’église, comme dans le corps humain, une variété de dons est nécessaire.

— « Tous les membres n’ont pas la même fonction, dit Paul... Nous avons des dons différents » (Romains 12.4-6). Quoi de plus clair ?

Je trouve infiniment regrettable la tendance actuelle à limiter l’action de l’Esprit, en réduisant à un ou deux seulement, ou peut-être à trois, les dons accessibles à l’église, au lieu de reconnaître la grande envergure de l’expression divine. Dans beaucoup d’églises le seul don reconnu est celui du pasteur qui fait tout, alors que les autres membres de l’église restent pratiquement inactifs, sans aucune possibilité de développer leur don particulier, qui leur permettrait de grandir spirituellement tout en contribuant à l’enrichissement de la communauté. Dans d’autres milieux, on veut bien que tout le monde participe, mais en insistant a priori sur la forme du don à exploiter : elle est généralement limitée à la « prophétie » et aux « langues », avec parfois « les guérisons » et c’est à peu près tout. Je trouve les deux points de vue tragiquement insuffisants. Pourquoi ne pas rechercher l’infinie richesse que nous présente le Nouveau Testament ? Pourquoi limiter le Saint-Esprit en lui imposant à l’avance les termes de son action ? Quel réveil pour l’église qui accepte de suivre les conseils de Dieu !

II

« L’Esprit les distribue (c’est-à-dire, il distribue les dons) à chacun en particulier comme il veut » (1 Corinthiens 12.11). Il est souverain ; il sait mieux que nous ce qu’il faut à l’église. Comme nous l’avons dit, ce n’est pas à nous de lui dicter notre volonté à ce sujet. Son choix doit être le nôtre, c’est ainsi que nous trouverons la véritable bénédiction de Dieu.

III

« À chacun la manifestation de l’Esprit est donnée pour l’utilité commune » (1 Corinthiens 12.7). Voilà le but du don : l’Esprit te l’accorde pour que tu puisses servir l’église, gagner des âmes, faire connaître Christ au monde. Le don est pour le bien de tout le monde, non pour ta satisfaction personnelle. La main, l’œil, le pied n’existent pas pour eux-mêmes mais pour servir le corps entier.

Qui a jamais vu un doigt planer tout seul en l’air comme s’il n’existait que pour lui ? Une oreille détachée du reste du corps, à quoi peut-elle servir ? Les différents organes perdent toute leur signification dès qu’on les considère en dehors de leur rapport avec l’ensemble du corps. Ne pense donc pas que le don que l’Esprit voudra t’accorder soit destiné en premier lieu à te « faire du bien » ; ce n’est pas vrai. Il t’est confié pour te permettre de servir tes frères et d’apporter la vérité aux perdus. Il t’est donné, comme le dit Paul, « pour l’utilité commune », pour déverser sur les autres les biens que tu as déjà reçus de Dieu.

Alors, tu recherches un don spirituel ? Dans quel but : pour toi- même, pour améliorer ta propre vie spirituelle ? Si oui, je crains que tu ne sois sur une mauvaise piste. Relis la Bible et pose à nouveau la question à Dieu, pour que le Saint-Esprit remette toute chose en place.

4

LE CORPS DE CHRIST

« Comme le corps est un et a plusieurs membres, et comme tous les membres du corps, malgré leur nombre, ne forment qu’un seul corps, ainsi en est-il de Christ. Nous avons tous, en effet, été baptisés d’un même Esprit, pour former un seul corps, soit Juifs, soit Crées, soit esclaves, soit libres, et nous avons tous été abreuvés d’un seul Esprit.

Ainsi le corps n’est pas un seul membre, mais il est formé de plusieurs membres. Si le pied disait : Parce que je ne suis pas une main, je ne suis pas du corps, — ne serait-il pas du corps pour cela ? Et si l’oreille disait ; Parce que je ne suis pas un œil, je ne suis pas du corps, — ne serait-elle pas du corps pour cela ? Si tout le corps était œil, où serait l’ouïe ? S’il était tout ouïe, où serait l’odorat ? Maintenant Dieu a placé chacun des membres dans le corps comme il a voulu. Si tous étaient un seul membre, où serait le corps ? Maintenant donc il y a plusieurs membres, et un seul corps. L’œil ne peut dire à la main : Je n’ai pas besoin de toi ; ni la tête dire aux pieds : Je n’ai pas besoin de vous. Mais bien plutôt, les membres du corps qui paraissent être les plus faibles sont nécessaires ; et ceux que nous estimons les moins honorables du corps, nous les entourons d’un plus grand honneur. Ainsi nos membres les moins honnêtes reçoivent le plus d’honneur, tandis que ceux qui sont honnêtes n’en ont pas besoin. Dieu a disposé le corps de manière à donner plus d’honneur à ce qui en manquait, afin qu’il n’y ait pas de division dans le corps, mais que les membres aient également soin les uns des autres. Et si un membre souffre, tous les membres souffrent avec lui ; si un membre est honoré, tous les membres se réjouissent avec lui.

Vous êtes le corps de Christ et vous êtes ses membres, chacun pour sa part. » (1 Corinthiens 12.12-27. Le lire dans le contexte de ce chapitre entier de Paul.)

C’est l’apôtre Paul qui nous explique le vrai sens des dons spirituels. Il compare l’ensemble des croyants à un corps, à un organisme vivant. Il l’appelle le corps de Christ, la véritable Église.

Dans un corps humain il y a à la fois une parfaite unité et une étonnante complexité. Tout le corps est dirigé par une seule intelligence et contrôlé par un système nerveux centralisé. Il est pourtant composé d’une très grande variété de membres et d’organes avec des fonctions tout aussi variées.

Il en est de même pour l’Église. Christ en est le chef, la tête. Il est le cerveau, le centre du système nerveux de son corps (Éphésiens 1.21-23 ; Colossiens 1.18). Nous, le peuple de Dieu, nous en sommes les membres. Là aussi nous retrouvons une grande complexité dans une parfaite unité ; le corps de Christ possède dans ses membres une merveilleuse variété de fonctions. Cette vérité est mise en relief par les citations suivantes :

« Le corps est un et a plusieurs membres » (verset 12).

« Vous êtes le corps de Christ et vous êtes ses membres, chacun pour sa part » (verset 27).

« Nous avons tous été intégrés littéralement : « baptisés », le mot grec voulant dire « plongés ») par un seul Esprit dans un seul corps » (verset 13 correctement traduit selon l’original (Segond et TOB traduisent malheureusement « dans un seul Esprit »).

Il y a ici l’idée d’une greffe, comme dans Jean 15.5, de la branche sur l’arbre. Jésus est l’arbre de vie, le vrai cep, et nous en sommes les branches, de même que les pieds, les jambes, les bras, les oreilles et tous les organes sont les « branches » du corps.

Tu es indispensable !

Comme toutes les branches d’un arbre sont rattachées les unes aux autres par l’arbre lui-même, ainsi nous sommes tous rattachés les uns aux autres parce que nous sommes individuellement rattachés au Christ. Aucun vrai chrétien ne peut prétendre vivre indépendamment de ses frères ; nous faisons tous partie du seul organisme spirituel et vivant qu’est la vraie Église de Jésus- Christ.

Tu es un individu unique et précieux aux yeux de Dieu, mais tu es aussi intégré par son Esprit dans le « corps » de son Fils. Tu en es un élément nécessaire et authentique ; tes frères ont besoin de toi, comme tu as aussi besoin d’eux.

L’Esprit sait ce qu’il fait

Or, Dieu dit que nous avons tous été intégrés dans ce corps « par un seul Esprit ». Il va sans dire que l’Esprit de Dieu agit selon l’intelligence qui lui est propre et c’est à nous d’accepter ses décisions. Il est l’architecte de l’univers, non seulement des nébuleuses mais aussi de la cellule biologique. C’est lui qui conçoit et qui construit le « corps » d’un cerisier et le corps d’un homme ou d’une femme ; c’est également lui qui construit l’Église, qui est le « corps » de Christ. C’est lui qui taille et qui place les « pierres vivantes » que nous sommes (1 Pierre 2.4-5), chacune à l’endroit voulu, pour en former un « temple saint, une habitation de Dieu dans (ou : par) l’Esprit » (2 Éphésiens 2.20-22). Ce « corps » est un « édifice » animé, vivant, organique, qui croît, qui s’adapte, qui mûrit et qui réalise la volonté de Dieu sur la terre.

Le corps humain ne se développe pas au hasard : l’Église non plus — à moins que l’adversaire n’y introduise des éléments étrangers, des cellules « cancéreuses », ce qui peut arriver, hélas ! sur le plan terrestre. L’Esprit de Dieu, étant l’architecte, le maître d’œuvre du corps spirituel que nous sommes, sait infiniment mieux que nous comment l’édifier. La tragédie des tragédies, c’est que nous l’empêchons si souvent de réaliser son dessein.

C’est Dieu qui choisit ton don

C’est le Saint-Esprit qui décide du nombre d’yeux, de doigts, de poumons que doit avoir le corps humain ; c’est lui aussi qui les situe dans le corps selon sa sagesse. De même, puisque lui seul sait construire l’Église, c’est inévitablement lui qui désigne la place et le rôle de chacun dans son œuvre.

« Dieu a placé chacun des membres dans le corps comme Il a voulu » (1 Corinthiens 12.18). Il faut que tu saisisses l’extrême importance de cette vérité. En cherchant ton don spirituel, demande à ton Père céleste de te révéler sa volonté. Ne commets pas l’erreur de vouloir lui imposer tes préférences à l’avance. Certes, tu peux lui exprimer tes désirs à ce sujet et il en tient sûrement compte. Pourtant, il a sa façon de voir les choses : « Mes pensées ne sont pas vos pensées », dit- il. Il t’ordonne même de chercher ce qu’il appelle les dons « les meilleurs » et non les autres (Ésaïe 55.8-9 ; 1 Corinthiens 12.31). Garde-toi donc de lui dicter ta volonté, ou d’admettre que d’autres chrétiens te dictent et lui dictent la leur. C’est une tendance très répandue aujourd’hui dans le monde chrétien et elle suscite beaucoup de confusion. Fais confiance à Dieu pour que son Esprit te place dans le corps de Christ « comme il veut ». C’est lui seul qui décide de la nature de ton don spirituel.

5

QU’EST-CE EN FAIT QU’UN DON SPIRITUEL ?

L’analogie du corps

Chaque croyant est donc un membre, un « organe » dans le corps de Christ. Comme un corps humain comprend une grande variété d’organes, chacun étant conçu pour accomplir une fonction particulière, ainsi en est-il du corps de Christ. Le corps, en tant qu’organisme vivant, est caractérisé par son équilibre, par la coordination extraordinaire de ses fonctions organiques tellement variées. Il en est de même dans l’église : les fonctions que les différents membres doivent exercer varient grandement, mais elles sont toutes conçues pour contribuer au fonctionnement efficace de l’église dans son ensemble.

Une telle variété de fonctions ne peut contribuer à la marche du corps sans qu’il y ait la coordination d’un seul système nerveux dirigé par un même cerveau. Or, comme nous l’avons dit, Christ est la tête, le « cerveau » de son église et il la dirige par son Esprit. Nous pourrions — presque ! — comparer l’action de l’Esprit à celle du système nerveux, qui communique aux différents organes les impulsions provenant du cerveau. Chaque croyant, étant dirigé par la même intelligence et la même puissance divines, réagit néanmoins de façon particulière, selon les normes de son « don », de son rôle dans l’organisme ; et, de cette manière, il contribue à l’édification et au fonctionnement du corps dans son ensemble.

Dieu accorde donc à chacun une faculté spirituelle qui lui est propre et qu’il appelle son « don ». Or, ce don entraîne non seulement des privilèges, mais aussi de lourdes responsabilités.

Dans la mesure où le croyant individuel « exerce » son don en remplissant la fonction pour laquelle il est désigné, il accomplit un « ministère » (en grec : diakonia = service). Ainsi, chacun est appelé à servir Dieu, à servir ses frères et ses sœurs avec les capacités que Dieu lui accorde. Un « ministère » est en somme l’exercice d’un don ; c’est une manière de servir. La forme de ce service varie selon l’individu, mais l’important, c’est de servir... comme le Fils de l’homme est venu pour servir.

C’est l’esprit qui anime le corps

Ainsi, un don spirituel est une fonction dans le corps de Christ. Comme l’œil, la colonne vertébrale, le poumon ont chacun une fonction irremplaçable dans le corps d’un homme, de même les différentes fonctions, les dons individuels des membres du corps de Christ contribuent ensemble au fonctionnement de l’église entière. Chaque croyant a sa part dans l’action de l’Esprit de Dieu. Si l’Esprit est libre d’agir et si on lui accorde l’autorité qui lui revient, il coordonne les efforts de tous de manière à présenter au monde un corps cohérent, digne de son appellation, un portrait convaincant de Christ. Une telle église parle d’une voix unie, mais son message est infiniment riche et profond, elle traduit la sagesse de Dieu en termes compréhensibles aux hommes, car l’Esprit ajoute son témoignage à celui de l’église. Christ est là et le monde doit reconnaître son autorité, même s’il réagit avec haine et méchanceté contre le message.

L’Esprit te fait un don pour que tu donnes

Le Saint-Esprit (je le répète, puisqu’il le faut !) veut par-dessus toute chose faire connaître le Christ jusqu’aux extrémités de la terre, jusqu’au dernier groupe ethnique et linguistique. C’est pourquoi les dons qu’il cherche à conférer au peuple de Dieu ont essentiellement en vue l’évangélisation du monde. Certains dons, comme celui d’évangéliste, sont conçus pour toucher directement les incrédules ; d’autres sont plutôt orientés vers l’édification de l’église ; mais cette édification a toujours en vue le but essentiel, l’évangélisation et le salut des perdus. Une église qui se contente de s’édifier, sans s’adonner à une évangélisation sérieuse, finit par s’étouffer spirituellement — comme un homme qui ne fait que manger sans jamais travailler ni prendre de l’exercice. J’en ai connu, de ces églises suralimentées, devenues spirituellement « cardiaques » et « obèses » ! J’en ai connu également d’autres où tout l’accent était mis sur l’activité extérieure, sans que les membres reçoivent une véritable nourriture spirituelle : ce sont des églises « squelettiques », où les croyants finissent par sombrer dans le découragement, ne voyant pas de résultats durables à leurs efforts.

Il faut un équilibre dans la répartition des dons. Mais nous ne devons pas oublier que toute action véritable de l’Esprit, même l’édification de l’église, est orientée vers un but précis, vers l’évangélisation du monde entier et surtout des nations défavorisées. Heureuse est l’église que Dieu comble de dons spirituels dans ce sens-là !

La raison du don spirituel

Par le don spirituel de son choix, le Saint-Esprit te qualifie pour le service de Dieu : en voilà le but. Il te l’accorde pour que tu serves Dieu efficacement. Le don n’est pas conçu, nous l’avons dit, pour ta satisfaction personnelle. Celle-ci vient de Dieu, non pas du don. Le fait d’obéir à ton Maître, de gagner des âmes, de faire le bien, d’apporter aux hommes la révélation de Christ, cela permet à Dieu de te regarder avec approbation. La désobéissance crée un brouillard d’incompréhension entre toi et lui : une fois cet obstacle enlevé, tu vois le soleil de sa face, tu jouis de son sourire. C’est de là que vient ta satisfaction, ton bonheur.

Tu es un être unique

Dieu ne fabrique pas les hommes en série. Ce sont les hommes qui inventent les machines ; Dieu fait mieux que cela ! C’est pourquoi il ne conçoit pas le même don pour tous ses enfants. Tu es une âme unique, créée par lui comme un trésor pour lui seul ; ta personnalité, une fois sanctifiée et transformée, devient un miroir qui reflète un aspect particulier de la beauté de Christ, que personne d’autre ne peut transmettre de la même manière. Alors que Satan essaie par les systèmes totalitaires de faire de l’être humain un robot incapable d’agir en tant qu’individu, l’Esprit de Dieu libère ta personnalité par l’épanouissement du Christ qui habite en toi, « afin que les dominations et les autorités dans les lieux célestes connaissent aujourd’hui par l’Église la sagesse infiniment variée de Dieu... » (Éphésiens 3.10).

Selon les normes néo-testamentaires, une église véritable ressemble à une équipe, bien « soudée », où chaque membre a sa place et joue un rôle unique mais pleinement en accord avec celui de ses coéquipiers. Une telle équipe, une telle église fonctionne comme un seul homme — non comme une machine ou un régiment de robots, mais comme un organisme, un corps vivant, parfaitement coordonné dans ses réflexes. Voilà ce que Jésus entendait par « église » !

L’équipe de Jésus

Dans une équipe de football, les joueurs ne peuvent pas tous être avant-centre ni gardien. D’ailleurs, si le gardien ne reste pas à sa place, le match sera vite perdu. C’est par l’action collective et coordonnée des individus formant l’équipe que celle-ci peut remporter la victoire.

Une équipe complète de football contient cinq avants, trois demis, deux arrières et un seul gardien. Ainsi, dans une église équilibrée il y a normalement un certain « regroupement » des dons. Il peut y avoir, par exemple, cinq évangélistes, trois prophètes, deux pasteurs (ou plutôt : bergers) et un docteur ! Quelle église formidable !

Je suis intrigué par le fait que Jésus, au moment de quitter ce monde, a justement laissé sur le mont des Oliviers, onze jeunes gens, ses apôtres, auxquels il a confié la tâche gigantesque de l’évangélisation du monde. Je les appelle parfois : l’équipe de foot de Jésus ! Que Dieu remplisse notre pays d’équipes semblables, où chaque homme, chaque femme est spécialement doué par le Saint-Esprit et où chacun contribue au maximum de son potentiel spirituel !

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LES DONS, EXPRESSION DE LA GRÀCE

Comme presque tout le vocabulaire biblique, le terme « dons de l’Esprit » a souffert des abus. On s’en sert à tort et à travers et souvent dans un sens trop limité. Le remède à cela, c’est de se donner la peine de réexaminer la terminologie selon le texte original dans toutes ses mentions. C’est ce que j’ai fait. Le sujet m’a paru alors beaucoup plus clair — et riche ! (Le lecteur désireux d’approfondir ce sujet trouvera, dans les appendices VII et VIII, toutes les références bibliques ayant un rapport avec les « dons », avec une appréciation des différents termes grecs employés dans le Nouveau Testament.)

Dans le Nouveau Testament, le mot grec le plus souvent employé pour don (mais non le seul) est charisma. Il se trouve dix-sept fois dans le texte original, et se traduit de plusieurs manières. Sept, ou peut-être dix fois, il signifie « don spirituel » ou « vocation » ; au moins trois fois il signifie « vie éternelle » ou « salut » ; dans deux autres endroits, il signifie plutôt une bénédiction générale ; puis, une fois, le mot se rapporte à l’état soit du marié soit du célibataire !

L’étude est un peu compliquée du fait que Paul utilise, dans un même passage et presque indifféremment, les mots dôrea et dôrêma côte à côte avec charisma (Romains 5.15-17 Pour une liste complète des références mentionnant ces trois mots, voir l’appendice VIII.). Les trois mots signifient également « don ».

Charisma, expression de charis

Le sens du mot charisma est pourtant clarifié quand on considère son étymologie. De la même racine viennent le verbe charizomai, qui signifie à la fois « donner » (Luc 7.21 ; Actes 3.14 ; 25.11, 16 ; 27.24 ; Romains 8.32 ; 1 Corinthiens 2.12 ; Galates 3.18 ; Philippiens 1.29 ; 2.9 ; Philémon 22) et « pardonner » (Luc 7.42-43 ; 2 Corinthiens 2.7,10 (deux fois) et 12.13 ; Éphésiens 4.32 (deux fois) ; Colossiens 2.13 et 3.13 (deux fois)), ainsi que le verbe charitoô, qui signifie « favoriser » (Seulement dans Luc 1.28 et Éphésiens 1.6). De cette origine viennent également chara, « joie », et chairô, « se réjouir ».

Mais le mot le plus important dérivé de cette même racine est charis, que presque tous les traducteurs rendent par « grâce ». Malheureusement le mot français « grâce » a perdu en grande partie sa signification ; pour beaucoup, il n’est qu’un terme théologique, à peine compréhensible. Il signifie, en grec, comme nous l’avons dit, à la fois « beauté » et « générosité », comble de la beauté, que Dieu définit en Christ et dont la croix est l’expression ultime. La grâce de Dieu n’est autre chose que son amour traduit en générosité.

Charis signifie également « gratitude », « reconnaissance », « action de grâces ». C’est à la fois la générosité de celui qui donne et la gratitude de celui qui reçoit.

La signification de charisma

Cette analyse nous permet de saisir le vrai sens du mot charisma. Comme charis est l’acte de donner, l’amour qui s’exprime par la générosité, par le don, ainsi charisma signifie « la chose donnée ». Dieu nous aime, il nous aime généreusement, c’est pourquoi il donne : le charisma est l’aboutissement de la charis.

Ainsi Paul dit que « le charisma (Segond : le don) de Dieu est la vie éternelle » (Romains 6.23). et que « le charisma (Segond : le don gratuit) devient justification après plusieurs offenses » (Romains 5.16). Il dit que « la grâce (charis) de Dieu et le don de la grâce (hê dôrea en chariti = littéralement : le don « en » grâce, ou plutôt : le don (qui vient) par le moyen de la grâce) venant d’un seul homme, Jésus-Christ, ont été abondamment répandus sur beaucoup » (Romains 5.15) . Il parle aussi de « l’abondance de la grâce » (charis) et du don (dôrea) de la justice... » (Romains 5.17).

Il est évident que le don de Dieu est infiniment plus grand que ne le laissent croire certaines conceptions courantes. Le don de Dieu est en fait l’expression de la grâce, de la générosité de Dieu, de sa beauté éternelle incarnée en Christ et déversée par son Esprit sur tous ceux qui acceptent et aiment Christ. Dans le Nouveau Testament le don de Dieu est essentiellement la totalité de ce que Dieu nous donne.

C’est pourquoi :

Le Seigneur Jésus lui-même est appelé le don (dôrea) de Dieu (2 Corinthiens 9.15 ; 8.9).

Le Saint-Esprit est appelé le don (dôrea) de Dieu (Actes 2.38 ; 8.20).

La vie éternelle est appelée le don (charisma) de Dieu (Romains 6.23).

Tout cela peut se résumer en une seule expression de l’apôtre Paul : « L’Esprit de vie en Jésus-Christ » (Romains 8.2). Il n’est possible de dissocier le Saint-Esprit, ni de Jésus ni de la vie éternelle. Les trois vont ensemble.

La grâce de Dieu s’exprime donc pour le croyant par le don de son Fils et de son Esprit accompagné inévitablement du don de la vie éternelle.

Dieu veut se donner à travers ta personne

« Les dons » (grec : charismata, pluriel de charisma) ne sont qu’une expression de la grâce (charis) de Dieu. Paul rappelle sans cesse dans ses écrits « la grâce du Seigneur Jésus-Christ » ; pour lui, la grâce est l’attribut essentiel de Jésus. Il va sans dire que les dons du Saint-Esprit sont l’expression du caractère de Jésus.

As-tu reçu un don spirituel ? Je le saurai si tu ressembles à Jésus et si son Esprit est en train de me communiquer, à travers tes paroles, tes actions et tes prières, la vie de Jésus. La grâce de Dieu me parviendra à travers ton ministère, ton service. Ta façon de servir Dieu m’apportera une bénédiction. Par-delà tes actes et tes paroles humaines, je m’apercevrai de la main et de la voix de mon Sauveur. Quand tu ouvriras la bouche, j’entendrai le cœur de Dieu ; quand tu me toucheras, je serai en contact avec le Très-Haut.

Annoncer parmi les nations les richesses insondables du Christ (Éphésiens 3.8 (Darby)).

Parce que nous sommes tous différents (aussi différents que le sont tous les arbres du monde !), cette grâce divine s’exprime à travers chacun et atteint les autres de façon unique. Ce n’est pas une action monotone, stéréotypée. Dieu me parle avec toute la fraîcheur et la richesse d’une belle matinée du mois d’avril, ou avec celle des couleurs de l’automne. La part qui m’atteint par toi personnellement m’apporte un aspect original et précieux de la vérité qu’est Christ. Tu m’enrichis comme personne d’autre ne peut le faire. Si tous les croyants en font autant, l’église de Christ sera une force incalculable dans la main de Dieu.

Un « don spirituel » n’est donc autre chose que la grâce de Dieu manifestée au travers de ta personne sanctifiée, par l’action de son Esprit qui te remplit. Il se sert de ton cerveau, de ta langue, de tes yeux, de tes mains pour communiquer le Christ à son église et au monde perdu.

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LA PREMIÈRE LISTE DE DONS SPIRITUELS

Romains 12.1-8

« Je vous exhorte donc, frères, par les compassions de Dieu, à offrir vos corps comme un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui sera de votre part un culte raisonnable. Ne vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. Par la grâce qui m’a été donnée, je dis à chacun de vous de n’avoir pas de lui-même une trop haute opinion, mais de revêtir des sentiments modestes, selon la mesure de foi que Dieu a départie à chacun. Car, comme nous avons plusieurs membres dans un seul corps, et que tous les membres n’ont pas la même fonction, ainsi, nous qui sommes plusieurs, nous formons un seul corps en Christ, et nous sommes tous membres les uns des autres. Puisque nous avons des dons différents, selon la grâce qui nous a été accordée, que celui qui a le don de prophétie l’exerce selon l’analogie de la foi ; que celui qui est appelé au ministère s’attache à son ministère ; que celui qui enseigne s’attache à son enseignement, et celui qui exhorte à l’exhortation. Que celui qui donne le fasse avec libéralité ; que celui qui préside le fasse avec zèle ; que celui qui pratique la miséricorde le fasse avec joie. »

Dans les deux premiers versets de ce chapitre, Paul nous exhorte à offrir nos corps à Dieu : notre cerveau, nos yeux, nos oreilles, notre bouche, nos mains, nos pieds... afin de le servir. Puis il exige le renouvellement de notre intelligence, de notre pensée (cela s’acquiert surtout par l’étude de la Parole de Dieu !), afin que nous discernions sa volonté à notre égard. Autrement dit, Dieu veut nous utiliser pour son service et pour cela il a besoin de notre corps physique ! Il nous est pourtant nécessaire d’apprendre comment il veut s’en servir, de savoir quel est notre don spirituel, notre fonction dans le corps de Christ. Avec cela en vue, Paul nous transmet un enseignement précieux sur « les dons ».

« Par la grâce (charis) qui m’a été donnée », dit-il, en pensant sans doute à son propre don d’apôtre, « je dis à chacun de vous de n’avoir pas de lui-même une trop haute opinion, mais de revêtir des sentiments modestes, selon la mesure de foi que Dieu a départie à chacun. » (verset 3)

Ainsi, au début de son enseignement, Paul nous met en garde contre l’orgueil. Crois-tu que ton don soit meilleur que celui de ton frère ? Dans ce cas, tu es sur un terrain dangereux, car Dieu départit la grâce à chacun comme il veut (1 Corinthiens 12.11). Jésus dit que celui qui veut être grand dans son royaume doit se considérer comme étant un enfant et l’esclave de tous (Marc 9.35 ; Luc 22.26). Voilà l’esprit qui anime le véritable don spirituel.

Je ne crois pas à cet esprit criard, vantard, qui se met au-dessus des autres et qui accuse ses frères d’infériorité. Ce n’est pas l’Esprit de Jésus. La puissance du Saint-Esprit ne dépend pas des forces de la chair ; elle se manifeste même à travers la faiblesse ; c’est ce que Paul lui-même dut apprendre quand Dieu lui dit : « Ma grâce te suffit... ma puissance s’accomplit dans la faiblesse » (2 Corinthiens 12.9-10). Mais quelle puissance, quand on considère la vie de Paul !

« Car, continue l’apôtre, comme nous avons plusieurs membres dans un seul corps et que tous les membres n’ont pas la même fonction, ainsi, nous qui sommes plusieurs, nous formons un seul corps en Christ et nous sommes tous membres les uns des autres. Puisque nous avons des dons (charismata, pluriel de charisma) différents, selon la grâce (charis) qui nous a été accordée... » (versets 4-6).

Ce qui suit est difficile à traduire exactement, car Paul emploie ici des formes grammaticales assez confuses. Je l’imagine en train d’écrire ou de dicter ce passage au milieu des interruptions ; il se peut que sa lampe à huile se soit éteinte à ce moment-là, ou bien qu’une foule en émeute se soit trouvée à la porte, ou bien que quelques hommes se soient présentés pour demander le salut ; peut-être même que Paul était malade ou qu’il n’avait que quelques petits bouts de parchemin ou de papyrus entre les mains ! Les anomalies, dans ses lettres, les phrases coupées et inachevées sont tout le charme de son style et n’empêchent en rien qu’elles respirent l’authenticité du Saint-Esprit. Mais elles rendent la traduction parfois difficile !

Je pense que nous pouvons traduire ce passage de la manière suivante :

« Nous avons des dons différents selon la grâce qui nous est donnée : soit la prophétie (donnée) selon l’analogie (ou : la proportion, la mesure) de la foi ; soit le service (grec : diakonia, qui a donné le mot français « diaconat » ! — que Segond traduit par « ministère »), (qui nous est donné) au fur et à mesure que nous servons ; soit celui qui enseigne, (qui s’acquitte de son don) en enseignant ; soit celui qui exhorte (ou : qui encourage) (qui s’acquitte) en exhortant ; (soit) celui qui donne, en le faisant franchement ; (soit) celui qui dirige, (en le faisant) avec empressement ; (soit) celui qui pratique la miséricorde, (en le faisant) avec joie. » (versets 6-8).

Paul ajoute : « Que l’amour soit sans hypocrisie ! » Puis, dans le reste de ce chapitre et dans le chapitre suivant, il insiste beaucoup sur les différents aspects de l’amour. Pour lui, un don spirituel est inévitablement une expression de l’amour de Dieu et ne peut s’exercer que dans l’amour. Par là nous pouvons distinguer le vrai don spirituel du faux, de la contrefaçon. Le Saint-Esprit est l’Esprit de Jésus ; dans tout ce qu’il fait il exprime le caractère de Jésus. Si l’empreinte de sa main crucifiée n’apparaît pas sur ce qui est dit et fait, nous pouvons savoir que cette chose ne vient pas de lui.

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LA DEUXIÈME LISTE DE DONS SPIRITUELS

1 Corinthiens 12.1-11

« Pour ce qui concerne les dons spirituels, je ne veux pas, frères que vous soyez dans l’ignorance. Vous savez que, lorsque vous étiez païens, vous vous laissiez entraîner vers les idoles muettes, selon que vous étiez conduits. C’est pourquoi je vous déclare que nul, s’il parle par l’Esprit de Dieu, ne dit : Jésus est anathème ! et que nul ne peut dire : Jésus est le Seigneur ! si ce n’est par le Saint-Esprit.

Il y a diversité de dons, mais le même Esprit ; diversité de ministères, mais le même Seigneur ; diversité d’opérations, mais le même Dieu qui opère tout en tous. Or, à chacun la manifestation de l’Esprit est donnée pour l’utilité commune. En effet, à l’un est donnée par l’Esprit une parole de sagesse ; à un autre, une parole de connaissance, selon le même Esprit ; à un autre, la foi, par le même Esprit ; à un autre, le don des guérisons, par le même Esprit ; a un autre, le don d’opérer des miracles ; à un autre, la prophétie ; à un autre, le discernement des esprits ; à un autre, la diversité des langues ; à un autre, l’interprétation des langues. Un seul et même Esprit opère toutes ces choses, les distribuant à chacun en particulier comme il veut. »

Paul n’approuve pas les Corinthiens

On suppose parfois que l’église de Corinthe était spirituellement avancée du fait que Paul lui consacre tellement d’enseignements sur les dons de l’Esprit, ou parce qu’il affirme qu’ils ont été comblés... « de sorte qu’il ne leur manque aucun don... » (1 Corinthiens 1.4-7)  ; mais cela n’est pas vrai du tout. Toute l’épître de Paul n’a pour but que de mettre de l’ordre et de rectifier les graves abus de cette église.

Dans les chapitres 1 à 4, il condamne ses divisions et l’importance accordée aux philosophies mondaines ; dans les chapitres 5 et 6, il condamne sa lâcheté d’avoir toléré un cas inouï d’immoralité, ainsi que des procès entre frères devant les tribunaux civils ; dans les chapitres 7 à 11, il apporte de l’ordre à la confusion qui existait sur les questions du mariage, des rapports avec l’idolâtrie, de la tenue et du rôle de la femme dans l’église et d’un désordre lamentable pendant la Sainte-Cène. Ensuite, dans les chapitres 12 à 14, il met de l’ordre à la confusion qui régnait au sujet des dons spirituels ; puis, au chapitre 15, il condamne leur incrédulité face à la résurrection. La deuxième épître aux Corinthiens révèle encore d’autres aspects désagréables de l’état spirituel de cette église et surtout la présence de faux docteurs et apôtres que Paul traite d’émissaires de Satan (2 Corinthiens 11.4-5, 13-14, 19-20).

De toute évidence, Paul ne flatte pas ces chrétiens ; il ne les encourage pas non plus à continuer d’agir dans le même sens. Il exige un changement radical d’attitude et de comportement. De toutes les églises fondées par Paul, celle de Corinthe présente le spectacle le plus troublant.

Pourquoi donc lui dit-il : « En Christ vous avez été comblés de toutes les richesses qui concernent la Parole et la connaissance... de sorte qu’il ne vous manque aucun don... » (2 Corinthiens. 1.5-7)  ? Paul rappelle sans doute le fait qu’ils ont été extraordinairement privilégiés. Alors que les habitants de Philippes et de Thessalonique n’ont bénéficié de sa présence que pendant quelques courtes semaines, les Corinthiens, au contraire, l’ont vu séjourner non moins de deux ans parmi eux, la plupart du temps accompagné de Silas et d’autres membres de son équipe. Cette église a donc eu la possibilité d’entendre la totalité de son enseignement, d’observer son comportement, sa vie de prière, sa méditation, son témoignage et sa puissance spirituelle. Même les expressions de son visage leur étaient familières. Une église possédant de telles richesses aurait dû être la plus pure, la plus réjouissante. Mais avec quelles douleurs Paul écrit-il maintenant au sujet des dons du Saint- Esprit qu’ils comprennent si mal ! Non, il ne les approuve pas ; il cherche plutôt à régler un tas de problèmes qu’il juge très graves.

Une fausse conception

Avant d’entrer dans le détail, Paul commence son enseignement sur les « dons » en avertissant les chrétiens de Corinthe d’un danger particulier, celui d’une fausse conception de l’action du Saint- Esprit (versets 1-4), car il constate qu’ils sont assez ignorants des réalités spirituelles. Il ne parle pas uniquement des dons, car le terme qu’il emploie (verset 1) est pneumatika, pluriel neutre de l’adjectif pneumatikos qui signifie « spirituel ». Pneumatika signifie donc « les ou des choses spirituelles ». Parce qu’il traite des dons de l’Esprit à partir du verset 5, la plupart des traducteurs ont rendu ce mot par « dons spirituels » ; mais le mot « don » ne se trouve pas dans l’original. Paul est ici aux prises non seulement avec la question des « dons », mais avec « les choses, les questions spirituelles » en général. Dans ces trois chapitres 12, 13 et 14, il analyse les questions concernant l’action du Saint-Esprit dans l’assemblée.

Paul rappelle à ses frères de Corinthe la différence entre l’action de l’Esprit de Dieu et celle des puissances démoniaques auxquelles ils avaient été soumis avant leur conversion lorsqu’ils se laissaient entraîner par ces esprits-là. Je me souviens d’avoir entendu, au cours de ma vie, le « témoignage » de plusieurs personnes affirmant qu’une puissance, qu’elles attribuaient au Saint- Esprit, les avait entraînées sans qu’elles puissent s’y opposer. Or, l’Esprit de Dieu ne fait pas ainsi violence à l’homme. Même quand il fait une forte pression sur lui, il lui laisse toujours la possibilité de lui dire « non » et de reprendre son indépendance. Il le pousse, mais avec son consentement ; alors qu’une caractéristique connue des esprits démoniaques est d’exercer une emprise totale sur la personne qui se laisse dominer ; elle n’a plus aucun choix et, très souvent, elle devient inconsciente pendant que l’esprit se sert de ses facultés. Les médiums, après de telles expériences, ne se souviennent généralement pas de ce qu’ils ont fait et ils restent épuisés et démoralisés. L’Esprit de Dieu, au contraire, rend extrêmement lucide la conscience de celui qu’il remplit. Comme le dit Jésus, « il vous rappellera tout ce que je vous ai dit » (Jean 14.26).

Un cas aberrant

Je me souviens du « témoignage » d’un homme qui me racontait comment il « avait reçu le Saint-Esprit ». Après des semaines de recherche, il priait une nuit chez lui lorsqu’une puissance surnaturelle le saisit, utilisant sa bouche pour proférer un torrent de langage inintelligible ; puis il perdit conscience. Vingt minutes plus tard, il reprit connaissance : il était de l’autre côté de la pièce, par terre, la chemise ouverte et ses cheveux totalement désordonnés. Pour lui, c’était le « Saint-Esprit » qui avait agi sur sa personne et il en était même fier. Quant à moi, je ne pouvais croire que l’Esprit de Dieu se manifestât d’une façon aussi peu louable. Je remarquai aussi chez cet homme un esprit d’accusation, une attitude amère envers ceux qui ne se laissaient pas convaincre par son témoignage, une intolérance qui seyait mal à quelqu’un qui prétendait avoir la plénitude du Saint-Esprit de Dieu. Son témoignage (comme d’autres semblables que j’ai entendus) ne correspondait en rien à l’action de l’Esprit telle que nous la voyons dans la Bible, » que ce soit dans l’Ancien ou dans le Nouveau Testament. Ce même homme m’a dit aussi qu’un jour « l’esprit » l’avait « enfoncé dans un fauteuil » ! Les méchants esprits se plaisent à agir de cette façon, il y a d’innombrables témoignages de ce genre ; mais l’Esprit de Dieu ne s’abaisse pas à ce niveau-là, il garde sa dignité, il agit toujours d’une manière intelligente et lucide. « La sagesse est justifiée par ses enfants » (Luc 7.35).

Nous avons tous besoin de faire attention à l’avertissement de Paul ; mais les Corinthiens, vu leur arrière-plan de superstition païenne, en avaient d’autant plus besoin : ils étaient particulièrement exposés à une action démoniaque.

Le vrai Jésus... ou un autre ?

Paul ajoute que personne ne peut dire que Jésus est Seigneur (ce qui signifie « maître absolu ») si ce n’est par l’Esprit de Dieu. Il est vrai qu’un peu partout dans la chrétienté, on prononce trop facilement les mots « Seigneur Jésus » ; mais quand ils sont proférés du bout des lèvres seulement (Matthieu 6.6-8), ils n’ont évidemment aucune valeur. Dire consciemment que « Jésus est Seigneur » signifie qu’on lui accorde la place souveraine dans l’univers et dans la vie de l’individu ; il va sans dire que sa Parole devient alors l’autorité suprême. Or, c’est le Saint-Esprit qui crée cette attitude.

J’avoue que je suis profondément troublé quand j’entends prononcer souvent le nom « Jésus » sans lui donner son titre de « Seigneur ». J’ai rencontré cette tendance, hélas ! particulièrement dans les milieux où l’on parle beaucoup du Saint-Esprit, tout comme dans les milieux dits « libéraux » ou « modernistes », où l’on nie pratiquement l’existence de l’Esprit. D’ailleurs, on entend parfois répéter le nom de Jésus au point d’en faire une vaine redite, ce qui nous est expressément interdit par le Seigneur lui-même. Certes, nous avons le droit, comme l’apôtre Paul, d’employer le mot « Jésus », mais Paul, lui, le fait généralement accompagner soit du mot « Seigneur », soit du mot « Christ ».

Paul nous rappelle qu’il y a en fait « un autre Jésus » et « un autre esprit », comme il y a aussi « un autre évangile » (2 Corinthiens 11.4). En fait, les démons n’ont pas tellement peur de parler de « Jésus », mais ils n’aiment pas l’expression « Seigneur Jésus ». Cela n’est pas étonnant, car ils ne veulent pas admettre sa seigneurie. Que Dieu te donne de voir très clair ! Jean dit dans son épître (1 Jean 4.1-3) qu’il faut éprouver les esprits et que tout esprit qui n’admet pas que Jésus-Christ est venu en chair n’est pas de Dieu. Je pourrais citer plusieurs exemples (Par exemple, on m’a raconté le cas d’un homme qui croyait avoir reçu l’Esprit de Dieu et qui parlait en une langue inintelligible. Un chrétien qui était présent lui posa la question : « Est-ce que Jésus-Christ est venu en chair ? » Le flot de langage s’arrêta deux secondes avant de reprendre ; mais, pendant ce bref intervalle, cet homme prononça en français les « cinq lettres ». Plus tard, quand on le questionna, il ne savait rien de ce qui s’était passé. C’est contre ce genre d’expérience que Paul veut mettre les Corinthiens en garde.) pour illustrer le danger que représente la recherche d’une action spirituelle non conforme à l’Écriture ; mais je trouve plus profitable de continuer l’étude du texte biblique en question. Il est pourtant évident que Paul avait des craintes au sujet de l’église de Corinthe ; il avait des raisons de croire que tout ce qu’ils appelaient « don spirituel » ne venait pas forcément de Dieu. C’est pourquoi il consacre non moins de trois chapitres à cette question dans son épître (1 Corinthiens 12-14).

Analyse de la deuxième liste de dons

« Il y a diversité de dons (charisma, au pluriel), mais le même Esprit. » (verset 4)

C’est donc une grave erreur que de vouloir couler tous les membres de l’église dans un seul moule, d’insister pour que tous s’expriment par le même don. Paul reconnaît que l’Esprit de Dieu se manifeste de bien des façons différentes.

« Il y a diversité de ministères, mais le même Seigneur. » (verset 5) Ministère = service (grec : diakoma). Il y a beaucoup de manières de servir le Seigneur Jésus, mais nous avons tous le même Maître et nous oeuvrons tous dans le seul but d’avancer la venue de son royaume. Un « ministère », comme nous l’avons dit, c’est l’exercice d’un « don ». Le don est la qualification spirituelle, le ministère est le service qui en découle.

« Il y a diversité d’opérations (grec : energuêma au pluriel), mais le même Dieu qui opère (grec : energoô) tout en tous. » (verset 6) C’est le même Dieu qui fournit l’énergie divine qui permet la réalisation de sa volonté par chaque membre de l’église. L’Esprit de Dieu est la source de cette énergie par laquelle le corps de Christ fonctionne.

« Or, â chacun, dit Paul, la manifestation (grec : phanérôsis) de l’Esprit est donnée pour l’utilité commune. » (verset 7) On parle souvent des « manifestations » de l’Esprit, mais le mot est employé par Dieu au singulier. Le grec phanérôsis, traduit dans ce contexte par « manifestation », signifie « évidence ». Il s’agit de l’expression audible, visible, tangible de la présence de l’Esprit en nous. Celle- ci se traduit de beaucoup de manières bien distinctes, car elle est accordée à chacun et nous sommes tous différents. La « manifestation » de l’Esprit devient le « don » particulier de l’individu. C’est l’évidence, la « preuve » que Dieu est à l’œuvre.

Remarquons à nouveau que cela est donné, non pour l’avantage de l’individu, mais pour l’utilité commune. Dans la mesure où l’action de l’Esprit (qui est essentiellement l’amour) mûrit chez toi, elle s’exprime au travers de toi pour la bénédiction des autres. Un « don » qui n’apporte rien aux autres est un non-sens terminologique, une conception non biblique.

Une énumération des dons

Paul, ensuite (versets 8-10), nous fournit sa deuxième « liste » de dons. Il en cite plusieurs, mais son but consiste ici à démontrer que, tout en étant très variés, ils proviennent tous du même Esprit. Il y a forcément une concordance entre les différents ministères. Paul insiste sur le fait que l’Esprit ne divise pas l’Église et qu’il ne provoque pas non plus la confusion. Les dons des uns et des autres contribuent à l’action concertée de l’ensemble des croyants. C’est encore la conception de l’équipe, où chacun a sa part et où, malgré la diversité des personnalités, le Saint-Esprit coordonne les efforts apparemment « disparates » de manière à créer un témoignage collectif convaincant.

On entend souvent parler des « neuf dons » de l’Esprit comme s’il n’y en avait pas d’autres, car Paul n’en mentionne que neuf dans cette liste. Nous ferions peut-être mieux de parler des quatre- vingt-dix-neuf dons de l’Esprit ! Si nous mettons ensemble les quatre listes complètes de Paul, nous comptons au moins une vingtaine de dons mentionnés... et il y en a certainement d’autres qui ne le sont pas.

D’ailleurs, il n’est pas toujours facile de définir avec précision ce que Paul entend par chacun d’eux. Comment faire, par exemple, une distinction absolue entre le don de prophétie (1 Corinthiens 12.10) et celui d’exhortation (Romains 12.6-8) ... ou entre le don de présider (Romains 12.8) et celui de gouverner (1 Corinthiens 12.28)  ? Le tableau que Paul nous présente n’est pas rigidement conçu ; il ne fournit pas une liste de dons « standardisée », comparable, par exemple, à la liste des qualifications des anciens dans 2 Timothée 3 et Tite 1. Il me semble qu’il essaie, dans ces quelques passages, d’ouvrir nos yeux sur les immenses possibilités de la vie en Christ Il nous indique chaque fois une certaine gamme de dons qui éveillent notre « appétit » spirituel afin de mieux servir Dieu.

Regardons un instant les neuf dons énumérés ici :

Sagesse et connaissance

Parole de sagesse et parole de connaissance. La crainte de l’Éternel est le commencement à la fois de la connaissance et de la sagesse (Proverbes 1.7 ; Psaumes 111.10). Quand l’Esprit remplit un homme et que sa parole est profondément enracinée dans son cœur, celle-ci agit à travers sa vie selon les facultés que Dieu lui donne. À certains, l’Esprit peut accorder le pouvoir de systématiser les vérités bibliques de manière à communiquer un enseignement équilibré et échelonné ; à d’autres, cette même connaissance intime de Dieu et de sa Parole se traduit moins systématiquement mais plus intuitivement ; ceux-ci peuvent apporter les lumières et les connaissances nécessaires au moment voulu, mais ils seraient peut-être incapables de présenter méthodiquement une doctrine biblique. Voilà, peut- être, la différence entre « sagesse » et « connaissance ».

Foi

Nous avons tous la foi, car, sans elle, nous ne pourrions pas être sauvés ; mais à certains, Dieu fait don d’une foi exceptionnelle. Il l’a fait pour George Müller, cet homme qui a reçu deux millions de livres sterling (une immense somme à l’époque) pour les milliers d’orphelins et les centaines de missionnaires qui dépendaient de lui et cela uniquement par la foi, par la prière, sans jamais demander un centime aux hommes. Lis le récit de la vie des grands missionnaires si tu cherches des exemples du don de la foi ! Lis la vie du Sadhou Sundar Singh qui a eu le courage de prendre à la lettre les enseignements de Jésus et de les vivre ! Je pourrais remplir un gros volume des récits d’exploits invraisemblables accomplis au nom de Christ à travers les générations.

De nos jours, le don de la foi n’a pas disparu. Je connais de nombreuses personnes, jeunes et moins jeunes, qui ont mis Dieu à l’épreuve et ont obtenu des promesses. Je pense, parmi d’autres, à ce jeune « fou de Dieu », George Verwer, qui a reçu de Dieu une vision et un impératif qui ont mobilisé des milliers de jeunes pour l’œuvre de Dieu ces dernières années. Par cette action Dieu a su maintenir chaque année à travers le monde des centaines de jeunes missionnaires sans la moindre mention d’argent dans leur propagande. Par la prière, par la seule foi, ils ont obtenu de Dieu, non seulement deux gros bateaux mais, ce qui est infiniment plus difficile, les équipages consacrés et qualifiés pour les utiliser. Tout cela parce que leur objectif a été celui du Christ lui-même : l’évangélisation du monde entier. Prions pour eux et pour tous ceux qui « foncent » pour Dieu par la foi. Et toi, pourquoi n’irais-tu pas faire un stage avec des hommes de la sorte ?

Guérisons

Paul signale également ici le don des guérisons. Dans tous les siècles et dans tous les pays, Dieu a accordé des guérisons à son peuple. Pense à Charles Studd, moribond en Afrique Centrale, loin de toute aide médicale. Il a demandé à sa femme de l’oindre d’huile au nom du Seigneur. La seule « huile » dont ils disposaient était du pétrole, mais le Seigneur honora leur foi et il fut guéri ! J’ai connu au cours de ma vie un assez grand nombre de guérisons remarquables et je crois que beaucoup de chrétiens peuvent en dire autant.

Ces dernières années ont vu paraître une multitude de livres (surtout en anglais) sur le thème de la guérison ; je ne vois donc pas la nécessité de le traiter longuement ici. Tu trouveras certaines de mes réflexions à ce sujet dans mon livre Le Miracle de l’Esprit (Pages 120 à 122 (1ère édition)).

J’aimerais cependant attirer ton attention sur un commandement de Dieu, accompagné d’une promesse, qui concerne particulièrement le chrétien.

« Quelqu’un parmi vous est-il malade ? Qu’il appelle les anciens de l’église et que les anciens prient pour lui, en l’oignant au nom du Seigneur : la prière de la foi sauvera la malade et le Seigneur le relèvera ; et s’il a commis des péchés, il lui sera pardonné » (Jacques 5.14-15).

Il n’est pas question ici d’un rite « magique » ni d’une formule « infaillible ». Dieu, pourtant, nous donne une promesse formelle et je ne connais personnellement aucun cas où ce passage a été appliqué fidèlement sans que Dieu réponde ! Seulement, il faut noter que c’est « la prière de la foi » qui sauve le malade et non pas la « cérémonie ». Sans la foi, inutile d’espérer, d’un acte quelconque, une intervention de la part de l’Esprit de Dieu. « Sans la foi il est impossible de lui être agréable » (Hébreux 11.6).

Il faut donc que cet acte soit le fruit d’une conviction. D’ailleurs, c’est le malade lui-même qui doit demander l’onction de la part des anciens. Si Dieu donne au frère malade cette conviction, il me semble que c’est aux anciens d’obéir. Je pense que, si la chose vient de Dieu, les anciens auront, eux aussi, la conviction de la faire. Dieu demande, sans doute, de part et d’autre une foi en sa Parole.

Hélas ! nombreuses sont les églises qui ne sauraient pas répondre à cet appel. D’autres, par contre, exigent à tout prix la guérison et jettent l’opprobre d’une faillite sur le pauvre malade. Si pourtant l’Esprit de Dieu est à l’œuvre, la conviction sera donnée là où Dieu a l’intention d’agir.

Faisons confiance à Dieu

Tôt ou tard (à moins que le Seigneur ne revienne avant) nous devons tous quitter ce corps pour être « avec lui ». Il est évident que nous ne pouvons pas, sur cette terre, nous attendre à des guérisons « systématiques » de la part du Saint-Esprit. Il guérit quand il le veut, et c’est à nous de discerner sa volonté. Utiliser l’onction d’huile machinalement ou imposer les mains à quelqu’un sans que Dieu nous appelle à le faire, cela ne peut que déshonorer Christ et provoquer des déceptions.

Il y a quelques années, j’ai reçu une lettre qui m’a déchiré le cœur. Elle provenait d’une sœur en Christ très âgée que je ne connaissais pas, mais qui devenait aveugle. Elle me suppliait de lui faire connaître le péché dont elle était coupable, car les chrétiens de sa localité (faut-il les appeler ainsi ?) lui disaient que, si elle ne guérissait pas, c’était de sa faute, parce qu’elle était trop incrédule, ou parce qu’elle devait avoir un péché secret... Elle, la pauvre, était écrasée, non seulement par son affliction physique, mais bien plus encore par un sentiment de culpabilité. Hélas ! Elle habitait très loin et je n’ai pas pu lui rendre visite ; elle m’a écrit deux ou trois fois, puis elle n’a plus écrit, car elle ne voyait plus et sa famille, hostile à sa foi évangélique, refusait de s’occuper de son courrier. De telles tragédies me remplissent d’une sainte colère contre une doctrine aussi fausse, aussi cruelle... et pourtant, des cas analogues sont loin d’être rares.

Je me souviens d’une grande réunion dite « de guérison », présidée par un orateur mondialement connu, dans une très grande salle d’une ville importante. Plusieurs choses m’ont pourtant troublé et choqué : il y avait beaucoup d’excitation, un long appel d’une vingtaine de minutes pour avoir de l’argent, alors que la lecture de la Bible n’a occupé qu’une petite minute ou deux au plus... J’étais assis vers l’arrière de la salle, entouré de toutes sortes de malades qui attendaient, tout anxieux, le moment où l’orateur prierait pour eux. Au moment voulu, environ soixante-dix personnes se sont avancées vers l’estrade pour être guéries, y compris une personne âgée, paralysée, sur un lit roulant. Elle n’avait pas quitté l’orateur de ses yeux de toute la soirée. Celui-ci, sur l’estrade, sautait de joie à cause de cinq ou six personnes qu’il déclarait être guéries ; mais du fond de la salle il nous était impossible de vérifier quoi que ce soit. La seule chose dont j’étais conscient c’était la foule de ceux qui s’étaient avancés, qui regagnaient maintenant leurs places avec un regard que je n’oublierai jamais. Surtout le visage de cette pauvre paralytique reste gravé dans mon souvenir. On ne faisait aucun cas d’elle. Elle n’était pas guérie, son expression était complètement altérée... Quelle énorme chagrin ! Allait-elle emporter dès lors, avec son affliction, le fardeau de ce qu’elle croyait être une faillite spirituelle ?

La Bible n’enseigne nulle part ce genre de « guérisons en série » qui entraînent de multiples déceptions et qui discréditent le témoignage de Christ. Les apôtres de Jésus-Christ ne guérissaient pas tout le monde, mais, quand ils offraient la guérison, les gens étaient guéris... et même instantanément. Il n’y avait de faillite ni physique, ni spirituelle ; alors que, de nos jours, une grande partie de ce qui passe pour « guérison divine » n’est que déception.

Dieu guérit, c’est un fait. Mais Dieu est aussi lumière et il n’aime pas l’hypocrisie ni la malhonnêteté. Dire aux gens que la guérison physique est inévitable et même obligatoire, c’est aller au-delà de ce que Dieu dit lui-même dans sa Parole. Nous avons besoin de marcher dans la lumière, de rester en très proche communion avec Dieu afin de discerner chaque fois sa pensée. L’apôtre Paul a guéri beaucoup de malades surtout pendant son long séjour à Éphèse (Actes 19.11-12). Plus tard, cependant, quand il a envoyé Timothée à Éphèse pour continuer l’œuvre, il ne l’a pas guéri de ses maux d’estomac, malgré ses grandes responsabilités (1 Timothée 5.23). Il n’a pas guéri Trophime non plus lors de son dernier voyage à Rome (2 Timothée 4.20). Pourquoi ? Nous ne le savons pas. Paul semble avoir souffert lui-même d’une affliction des yeux qu’il a dû apprendre à supporter par la grâce de Dieu (Galates 4.13-15 ; 2 Corinthiens 12.7-10).

Satan cherche sans cesse à nous jeter dans le déséquilibre, à fausser l’évangile d’une manière ou d’une autre. L’homme lui-même a un penchant naturel pour l’extrémisme, alors que, auprès de Christ, les choses sont simples et lumineuses.

Dieu ne désire certainement pas la maladie ni la douleur ; Christ est venu et il est mort et ressuscité pour abolir le mal dans toutes ses formes. Pourtant, le jour de la rédemption de notre corps n’est toujours pas venu ; Paul dit que cela aura lieu au retour du Seigneur Jésus et que nous, qui avons les prémices de l’Esprit, nous soupirons en nous-mêmes, « en attendant l’adoption, la rédemption de notre corps ». La création tout entière attend ce jour avec un ardent désir (Romains 8.18-23).

Soyons honnêtes

Si la maladie était un péché, ou si la guérison devait s’opérer obligatoirement, les chrétiens ne devraient jamais mourir. Aucun chrétien ne porterait de lunettes non plus ! Soyons honnêtes ! Reconnaissons ces deux vérités enseignées par l’Écriture :

Deux exemples concrets

Pour illustrer ces deux vérités, je prends deux exemples concrets :

Le don de guérir

Bien que la guérison soit accessible à tout enfant de Dieu, le Saint-Esprit accorde à certains croyants un don particulier de guérison. Malheureusement, cela est ignoré dans bien des milieux chrétiens et, au contraire, exagéré dans d’autres.

Notre génération souffre, non seulement de la pollution de la nature et d’une altération des aliments, mais aussi des folies et des péchés accumulés de toutes les générations qui nous ont précédés. Plus que jamais, nous avons besoin d’interventions divines en notre faveur, sur les plans physiques et psychologiques comme sur le plan spirituel. Que Dieu suscite, parmi son peuple, des hommes et des femmes capables d’apporter la guérison et sachant soulager la misère humaine, en attendant la grande aurore de Dieu où le soleil de la justice se lèvera avec la guérison dans ses rayons (Malachie 4.2).

N’oublions pas non plus de prier pour nos médecins-missionnaires qui font tant de bien aux peuples défavorisés !

Œuvres de puissance

« Le don d’opérer des miracles » dit Paul. Ou plutôt : « le don de faire des oeuvres de puissance ». Le mot dynamis, qui a donné le mot français « dynamique » et que Segond et d’autres traduisent ici par « miracles », signifie essentiellement « puissance » ou « pouvoir ». C’est le mot employé régulièrement dans les Évangiles synoptiques pour décrire les miracles de Jésus. Le verbe correspondant, dynamai, signifie tout simplement « pouvoir, être capable ». Dynamis est l’un des trois mots grecs utilisés dans le Nouveau Testament pour décrire les miracles opérés par les apôtres. Les deux autres sont :

Paul, cependant, n’utilise que le mot dynamis (= œuvre de puissance) quand il parle des dons spirituels accordés à l’Église en général (1 Corinthiens 12.10, 28). Il nous incombe de comprendre le sens de cette expression dans la pensée de Paul, car c’est un fait qu’on n’a pas vu depuis l’époque apostolique, et que l’on ne voit pas aujourd’hui (cela malgré certaines prétentions) un déploiement de forces miraculeuses comparables à celui que nous voyons dans les Évangiles et dans le récit néo-testamentaire.

L’emploi du terme téras (miracle) est limité dans le Nouveau Testament aux actes des apôtres et de leurs associés de descendance juive, ainsi qu’aux actes des faux christs. Il n’est pas attribué à l’Église en général : il n’est pas inclus parmi les dons spirituels.

En outre, à part la mention qui en est faite dans Marc 16.17, le mot sêmeion n’est jamais employé pour décrire les œuvres de l’Église en général. De toute manière, ce passage de Marc est douteux, ne se trouvant pas dans certains manuscrits de la Bible. Il semblerait, d’ailleurs, voir son accomplissement surtout dans les événements de l’époque apostolique ; car, combien de chrétiens, au cours du siècle présent, ont pris dans leurs mains des serpents ou bu du cyanure ? Certes, Dieu sait immuniser un Paul contre le venin de la vipère (Actes 28.4-6) ; il sait également délivrer un.Sundar Singh du puits fermé à clef ; il soutient encore aujourd’hui ses enfants dans l’épreuve du camp de concentration et face à la torture. Mais ce serait tenter Dieu que de vouloir exiger de lui des signes comparables simplement pour « voir un signe », ce qui fut l’erreur des pharisiens. C’est une génération méchante et adultère qui recherche un signe, dit le Seigneur (Matthieu 16.4 (Darby)).

Le seul mot grec employé par le Saint-Esprit dans les épîtres pour décrire les œuvres de puissance de l’Église, à l’exception des apôtres et des « sept », y compris Étienne et Philippe, est dynamis. Or, ce mot dans le Nouveau Testament signifie surtout : « la puissance de Dieu » manifestée, certes, par les miracles de Jésus, mais aussi à travers la prédication et la vie des apôtres. C’est ce même mot, je le répète, et non les autres, que Paul utilise quand il parle des « dons » spirituels accordés à l’Église. Il s’agit du déploiement de la toute-puissance de Dieu, celle même par laquelle il a ressuscité Christ d’entre les morts (Éphésiens 1.17-20) , et cela dans la vie de tout croyant. C’est une conception impressionnante, à peine croyable.

Cependant, le mot dynamis ne signifie pas nécessairement ce qu’on entend en général par « miracle ». La puissance de Dieu se traduit sur plusieurs niveaux et le Nouveau Testament l’utilise dans des sens bien distincts. Dans les Actes et les épîtres, il s’applique le plus souvent à la parole, par laquelle l’Esprit convainc les hommes de la vérité de Christ, et à l’action par laquelle il les régénère.

En fait, le plus grand de tous les miracles est incontestablement la régénération d’un être humain. La guérison du corps physique est certainement merveilleuse ; un acte de Dieu qui demeure scientifiquement inexplicable ne manque pas d’impressionner. Mais une action semblable ne peut servir que de façon momentanée, alors que le salut d’une âme, la transformation d’un cœur humain, durent jusque dans l’éternité et représentent le comble de la puissance de Dieu, en attendant que Christ vienne ressusciter notre corps.

Un fait assez remarquable

C’est un fait, difficile peut-être à expliquer mais tout de même évident, que les vrais « miracles » mentionnés dans le Nouveau Testament furent exécutés uniquement par des personnes de descendance israélite ! Autant que je le sache, le texte sacré ne parle nulle part d’un miracle accompli par un chrétien non juif, si ce n’est le miracle suprême du salut des âmes ! Le « miraculeux » semble concerner de façon très particulière le peuple d’Israël ; les prophètes de l’Ancien Testament prévoyaient d’ailleurs une action surnaturelle d’une envergure exceptionnelle qui accompagnerait la conversion de leur nation à l’avènement du Messie. Dans ce contexte, il va sans dire que je parle du surnaturel d’origine divine, car le surnaturel satanique se manifeste indifféremment parmi toutes les nations de la terre. Il me semble que Dieu demande à son Église, rachetée de toutes les nations de la terre, de rechercher la puissance de son Esprit surtout dans le domaine de la parole, afin d’amener le plus grand nombre possible d’êtres humains à la foi en Christ avant son retour. Il est évident que cette parole est normalement accompagnée d’une action divine capable de répondre aux exigences de la situation dans laquelle la parole est prêchée ; mais c’est « par la folie de la prédication » que Dieu a choisi de sauver les croyants (1 Corinthiens 1.21). Ce ne sont pas les miracles qui produisent la vraie foi, car « plusieurs crurent en Jésus voyant les miracles qu’il faisait », nous dit Jean ; « mais Jésus ne sé fiait pas à eux... car il savait lui-même ce qui était dans l’homme » (Jean 2.23-25). La puissance de Dieu, au cours de ce siècle, consiste essentiellement dans la prédication de la croix (1 Corinthiens 1.18 ; Romains 1.16).

Équilibre : entre deux erreurs

Cela n’empêche pas que Dieu exerce son pouvoir en faveur des croyants de toutes sortes de manières quand il le juge nécessaire ;mais nous faisons bien de garder la perspective que sa Parole nous enseigne. Il est évident que nous sommes ici — comme si souvent d’ailleurs — entre deux dangers, deux extrêmes. D’une part, nous n’avons aucun droit de limiter le pouvoir de Dieu, car il est aussi puissant que jamais, cela va sans dire, et il désire que nous nous appuyions sur sa fidélité pour répondre à la prière de la foi chaque fois que son honneur l’exige. Mais, d’autre part, nous n’avons pas le droit de lui dicter les termes de son intervention dans nos affaires. C’est en respectant sa Parole que nous trouverons le juste équilibre entre ces deux erreurs. Dieu est toujours prêt à faire des œuvres de puissance pour son peuple et il en a fait d’innombrables fois au cours des siècles, comme il en fait aujourd’hui. Mais le Nouveau Testament ne nous encourage nulle part à rechercher le spectaculaire, même pour impressionner le public dans le but de le convertir. « Si vous ne croyez pas aux écrits de Moïse, comment croirez-vous à mes paroles ? » dit le Seigneur Jésus (Jean 5.47). Si un homme rejette la Parole de Christ, aucun miracle ne le convaincra.

Que Dieu agisse !

Par contre, Dieu désire que nous fassions des œuvres de puissance. Je crois que toute église fidèle peut compter sur Dieu pour les lui accorder. Les biographies des grands hommes de Dieu, des grands missionnaires et réformateurs, fournissent d’innombrables exemples d’interventions divines. La Réforme elle-même fut une œuvre de puissance extraordinaire, où la moitié de l’Europe fut libérée de la superstition du Moyen Age. La traduction de la Bible en anglais, en allemand, en français, en espagnol pendant les XVe et XVIe siècles, face à l’opposition acharnée des autorités ecclésiastiques et séculières, fut elle-même une œuvre d’une puissance incalculable. L’ouverture de l’intérieur de la Chine à l’évangile par Hudson Taylor et les hommes de son époque fut encore une œuvre de puissance que nous aimerions voir répétée de nos jours. Nous avons besoin aujourd’hui de nous emparer de la toute-puissance de Dieu pour faire connaître la vérité partout. Combien faibles sont nos efforts quand nous considérons la puissance et l’autorité de Dieu !

Le don de faire des œuvres de puissance

L’histoire même démontre de façon évidente que l’Esprit de Dieu communique à certaines personnes un véritable don pour effectuer des œuvres de puissance. Sans le moindre doute, Dieu cherche de tels hommes aujourd’hui. Où est l’homme dont Dieu pourrait se servir pour faire comprendre au monde arabe la vérité éblouissante sur Jésus, le vrai Jésus dont il n’a encore aucune idée ? Où est l’homme qui saurait unir la vraie Église de Christ, guérir ses innombrables blessures, faire tomber les parois sectaires, faire disparaître les jalousies dans un flot d’amour divin ? Qui voudra s’emparer de Dieu de manière à ouvrir les frontières fermées à l’Évangile ? Quel est l’homme que Dieu utiliserait pour transformer la corruption de notre civilisation occidentale en droiture et pureté, afin que le nom de Christ ne soit plus déshonoré par la chrétienté aux yeux des autres nations ?

Voilà le genre de miracles que Dieu veut opérer aujourd’hui, sans minimiser l’action de son Esprit sur une échelle bien plus particulière.

Encore trois dons

Paul parle ensuite dans ce passage des dons de prophétie, de la diversité des langues et de l’interprétation des langues. Avec l’aide de Dieu, je compte traiter ces dons-là ailleurs ; je ne les commente donc pas ici.

Le don de discernement des esprits

Si l’Église de Christ avait compris et mis en vigueur ce don précieux, elle ne se serait pas laissé égarer. Par les écrits des apôtres, nous savons que déjà au premier siècle des esprits séducteurs introduisaient dans les églises un faux évangile et un faux Jésus. À partir du IIIe siècle, la théologie chrétienne commença à être fortement influencée par la philosophie grecque. Puis, au IVe siècle, dès Constantin et surtout à l’époque de Théodose le Grand qui acheva par force la conversion en masse de l’empire romain au christianisme, l’Église se laissa envahir par le paganisme : les superstitions et l’idolâtrie, revêtues d’une terminologie « évangélique », pénétrèrent jusqu’au fond de la pensée et de la pratique chrétiennes.

Où était, alors, le don du discernement des esprits dans l’Église ? Il y eut, c’est vrai, quelques chrétiens authentiques, fondés sur la Parole et qui luttaient contre ces courants destructeurs. Pourtant même Saint-Ambroix de Milan ordonnait, dans l’une de ses lettres à un responsable ecclésiastique en Sicile, qu’on « laissât faire » car, disait-il, les gens comprendraient, avec le temps, la différence entre leurs conceptions païennes et le christianisme. L’histoire, hélas ! ne lui donne pas raison.

Et encore !... Pourquoi le don du discernement des esprits ne s’est-il pas manifesté au moment où les écoles de théologie commencèrent, d’abord en Allemagne et ensuite partout, à mettre en doute l’inspiration et l’autorité divines de la Bible ? Ces tendances anti chrétiennes ont été, certes, contestées à l’époque, surtout en Angleterre, par des chrétiens érudits, remplis de foi et de forces spirituelles ; eux voyaient très clair, le don du discernement n’était pas mort. Et cependant, l’Église en général a terriblement manqué de discernement spirituel, à son grand malheur. Le public, en fait, ne se dérange pas pour aller le dimanche écouter la prédication d’un homme qui ne croit pas à ce qu’il dit. En effet, les églises se sont de plus en plus vidées, leur message n’est plus pris au sérieux par nos contemporains. Nous avons besoin que Dieu suscite une nouvelle génération d’hommes de foi, ayant une connaissance intime de Dieu, remplis de son Esprit et de sa Parole. Et toi, n’en serais-tu pas un ? Ah ! c’est là ma prière... La récompense en sera d’une valeur incalculable, un trésor qui ne périra jamais.

Aujourd’hui, le peuple de Dieu a plus que jamais besoin du don de discernement. Comme, dans le passé, l’Église de Christ a été égarée par les superstitions et les traditions qui mettaient en oubli l’Écriture sainte ; comme elle s’est laissé séduire par les philosophies grecques, hégélienne, humaniste, existentialiste et même marxiste, de même aujourd’hui encore elle se laisse imprégner et souvent aveugler par le nouvel empirisme qui met l’autorité de l’expérience personnelle au-dessus de celle de l’Écriture divine. Les milieux chrétiens sont de nouveau envahis par des puissances venant de l’extérieur, dont l’inspiration est de souche non chrétienne. Le culte de l’irrationnel, tellement répandu à présent, ouvre la porte aux intelligences occultes qui savent trop bien s’en servir.

L’action de l’Esprit de Dieu n’a rien d’irrationnel, la Parole de Dieu non plus : comme nous l’avons dit, l’œuvre de Dieu est essentiellement lucide, droite, exacte ; elle ne trompe pas, elle ne bafoue pas l’intelligence de l’homme qu’elle a créé. La foi dépasse, certes, la raison, mais elle ne l’outrage pas, elle l’éclaire. Dieu désire transformer et utiliser toutes les facultés de l’homme. « Dieu est lumière et en lui il n’y a point de ténèbres. » (1 Jean 1.5) .Nous avons besoin de prophètes, de docteurs, d’hommes sages qui nous le rappellent tout à nouveau, à mesure que les ténèbres des temps de la fin s’approchent.

Il y aurait d’autres aspects de ce don de discernement des esprits à étudier ; mais, Dieu m’aidant, je le ferai autre part.

L’Esprit est maître de son œuvre

L’Esprit agit comme il le veut et non comme nous le voulons ! À l’égard des dons spirituels, Paul déclare : « Un seul et même Esprit opère toutes ces choses, les distribuant à chacun en particulier, comme il veut » (1 Corinthiens 12.11).

Il est donc évident — Paul nous le dit à plusieurs reprises — que ce n’est pas nous qui choisissons notre don spirituel, c’est à Dieu que nous devons remettre le choix. Certes, nous sommes exhortés à rechercher les dons supérieurs (et non les inférieurs) ; pourtant, c’est l’Esprit lui-même qui décide de notre don. C’est lui qui nous a créés, qui nous a régénérés et qui, inévitablement, nous qualifie pour le service de son choix. Il sait, depuis avant la fondation du monde, ce qu’il veut faire de nous. Il désire à tout prix révéler le Christ à travers notre personnalité transformée ; il cherche à le glorifier de la manière la plus efficace en se servant de toutes nos facultés. À celles-ci il ajoute un élément mystérieux en fait, mais parfaitement évident, venant de lui-même, une action purement spirituelle qui atteint la conscience morale des hommes. La voix de Dieu se fait entendre par nos paroles et nos gestes d’une façon inexplicable mais indéniable.

L’homme qui cherche à « canaliser » l’action de l’Esprit dans un sens prédéterminé conteste en fait son autorité et se prive lui- même de la bénédiction suprême d’être l’instrument de son choix ; il efface l’empreinte du doigt de Dieu sur son ouvrage. Heureux l’homme qui croit, qui sait faire entièrement confiance à son maître divin, de manière à se laisser utiliser selon les directives de l’intelligence supérieure du Saint-Esprit ! Dieu n’abusera pas de sa confiance.

Quelle audace que de vouloir enfermer l’Esprit de Dieu dans une « boîte » de notre fabrication, lui qui dépasse tout ce que nous pouvons imaginer ! Il est trop grand, trop sage, trop puissant... et trop pur pour que nous lui dictions sa façon de travailler.

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LA TROISIÈME LISTE DE DONS

1 Corinthiens 12.28

« Dieu a établi dans l’Église premièrement des apôtres, secondement des prophètes, troisièmement des docteurs ; ensuite, ceux qui ont le don des miracles (littéralement : ensuite des puissances —grec : dynamis au pluriel) ; puis les dons de guérir (littéralement : des dons —charisma au pluriel —de guérisons) ; de secourir (littéralement ; des aides, ou : des moyens d’assistance) ; de gouverner (littéralement : des gouvernements, ou : des présidences) ; de parler diverses langues (littéralement, des « espèces » ou « nationalités » de langues — en grec : guénê glôssôn). »

Nous avons déjà examiné certains des dons mentionnés ici. Je pense commenter les autres ailleurs. Je voudrais cependant remarquer en passant un point intéressant, concernant l’expression : « diverses langues ».

Par cette expression l’apôtre semble entendre (comme dans sa deuxième liste au verset 8 où il emploie exactement la même expression) de véritables langues humaines, car le mot guénos (pluriel : guénê) se réfère à des nationalités au moins 7 fois (En voici les mentions : Marc 7.26 ; Actes 4.36 ; 18.2, 24 ; 2 Corinthiens 11.26 ; Galates 1.14 ; Philippiens 3.5. 1 Corinthiens 12.29, 30.) sur un total de 21 mentions dans le Nouveau Testament. Dans tous les autres il signifie soit « famille », soit « espèce ou genre ». Paul se sert exactement de la même expression, guénê glôssôn, dans sa deuxième « liste », au verset 8.

Tous n’ont pas le même don

Tout de suite après cette liste de dons, Paul continue : « Tous sont-ils apôtres ? Tous sont-ils prophètes ? Tous sont-ils docteurs ? Tous ont-ils le don des miracles ? Tous ont-ils le don des guérisons ? Tous parlent-ils en langues ? Tous interprètent-ils ? » (1 Corinthiens 12.29-30)

Après tout ce que Paul a dit sur le corps de Christ et le fonctionnement des différents organes ou membres, il est plus qu’évident que les croyants ne peuvent ni ne doivent avoir tous le même ou les mêmes dons. Ce serait une monstruosité. Le corps est un organisme vivant qui ne peut exister ni croître s’il ne possède pas suffisamment de muscles, de nerfs, d’artères, de membres chacun à sa place et capable de servir l’organisme dans son ensemble.

La forme grammaticale que Paul emploie dans ce passage en rend le sens parfaitement clair : il introduit ses questions par le mot grec me, qui exige chaque fois une réponse négative. Il aurait pu tout aussi bien écrire :

« Tous ne sont pas apôtres, tous ne sont pas prophètes... Tous ne parlent pas en langues. »

C’est ce que Paul fait également comprendre dans son épître aux Romains (Romains 12.6) : « Nous avons des dons différents. »

Pourquoi donc insister pour que tous aient le même ou les mêmes dons ?

Aspirez aux dons supérieurs (1 Corinthiens 12.31)

Un fait très important ressort de notre examen de cette troisième liste de dons :

« Dieu a établi dans l’Église premièrement des apôtres, secondement des prophètes, troisièmement des docteurs, ensuite ceux qui ont le don des miracles, puis ceux qui ont les dons de guérir, de secourir, de gouverner, de parler diverses langues. » (1 Corinthiens 12.28)

Non seulement c’est Dieu qui décide de nos fonctions dans l’Église, mais c’est lui aussi qui décide de leur importance relative. Le texte que nous venons de lire démontre que, pour l’apôtre Paul, il y a une gradation dans l’importance des dons. Certains sont plus nécessaires que d’autres et il les met en tête de liste.

En nous référant à cette brève liste de dons, nous remarquons tout de suite que Paul considère les dons d’apôtre, de prophète et de docteur comme étant au-dessus des dons des miracles et de guérison. Car, non seulement il les met au début de la série en spécifiant : premièrement... secondement... troisièmement... mais il fait précéder les dons qui suivent par les mots : ensuite et puis... (grec : epeita), ce qui ne laisse aucun doute quant à leur ordre d’importance à ses yeux. Or, Dieu désire que tu le serves de la meilleure façon possible, il veut que tu lui sois utile et que ton don « rapporte » au maximum. Celui qui vise bas n’atteindra pas les choses supérieures.

Vise donc le plus haut possible. Si Dieu ne te donne que quelque chose de modeste, accepte-le avec grâce ; mais il est sans cesse à la recherche d’hommes et de femmes à qui il puisse donner des responsabilités dans son œuvre. C’est pourquoi il désire te conférer un don « extra ».

Élisée comprit cela. Alors que son maître allait le quitter pour le ciel, le jeune homme lui demanda « une double portion de son Esprit ». Élie avoua qu’il demandait quelque chose de difficile ; pourtant, Élisée sut l’obtenir. Job, également, reçut, à travers un « apprentissage » excessivement douloureux, une vision de Dieu face à face et une double bénédiction dans tous les domaines de sa vie. Et toi ?

« Aspirez aux dons supérieurs » (grec : meidzôn = plus grand). Ce n’est pas une option : c’est un commandement.

Vise haut, mon frère ! C’est Dieu qui te le dit.

La voie par excellence

Paul en arrive maintenant au cœur de son enseignement sur les dons.

« Aspirez aux dons supérieurs, dit-il, et d’ailleurs, je vous montre la voie par excellence » (c’est-à-dire, de le faire, d’y aspirer... ou : d’obtenir les dons, de les faire valoir)... (1 Corinthiens 12.31).

C’est ainsi que Paul conclut son enseignement sur les dons spirituels en général. Il indique les priorités, il fixe nos yeux sur l’objectif essentiel... et ensuite il nous montre comment y parvenir.

L’amour, le vrai, qui vient de Dieu, est le fruit essentiel de l’Esprit. L’amour n’est pas, comme on le dit parfois, l’un des dons de l’Esprit, il est plutôt le mobile de tous les dons. On a également tort de vouloir mettre l’amour en opposition avec les dons. Si les dons correspondent aux organes du corps, l’amour est plutôt comme le sang qui les alimente tous à chaque instant. Sans la circulation du sang, le cerveau le plus génial, la main la plus puissante sont inutiles et morts. De même, l’exercice d’un don quelconque, s’il n’est pas l’expression de l’amour incalculable de Christ, n’est que du vent, c’est le néant, cela sent la mort.

La plus grande puissance qui soit

La plupart des versions courantes ne font pas ressortir tout le sens de ce verset (12.31) ; elles laissent croire que l’amour est en quelque sorte une qualité que Paul met en parallèle avec les dons ou même qu’il leur oppose. Je l’ai donc retraduit ci-dessus directement du grec original, dans l’espoir de mieux faire comprendre ainsi la pensée de Paul. Pour lui, l’amour est le moyen, la méthode, la condition de la recherche du don et de son utilisation.

Quand tu es rempli de l’Esprit, tu es rempli d’amour et cet amour cherche à tout prix à s’exprimer. Il se manifeste chez les uns et les autres de façon différente selon le don de l’individu ; mais le but du don est chaque fois le même : l’amour du prochain, l’amour de son frère. L’Esprit de Dieu cherche à communiquer l’amour de Dieu à travers ton don particulier ; il se sert de toi par ce moyen pour faire le plus de bien possible à ceux qui t’entourent. Par l’existence de ton don, il révèle le Christ aux hommes.

Le chapitre 13 de 1 Corinthiens est peut-être le plus merveilleux de tous les écrits de Paul. Il n’y a pas de doute que l’amour de Dieu est la force la plus irrésistible à la portée de l’homme. C’est la plus grande puissance du monde.

Note sur la traduction de 1 Corinthiens 12.31

Peu de traducteurs semblent avoir attaché suffisamment d’importance à la locution adverbiale grecque : kai éti que j’ai traduite : « et d’ailleurs ». Pourtant c’est exactement le sens de l’original et cela nous montre clairement le lien qui existe dans la pensée de Paul entre les deux parties du verset. Je crois que c’est une erreur de les séparer par un point, comme le font certaines versions (Rappelons-nous que le grec ancien n’avait pas de ponctuation.). Dans le chapitre 12 de 1 Corinthiens, Paul parle des dons spirituels ; dans le chapitre 13 il parle de l’amour. Mais dans son argument, la transition n’est pas aussi abrupte que dans la plupart des traductions (La division en chapitres ne date que du Moyen Age et ne fait nullement partie du texte original). Il y a un enchaînement d’idées. Pour Paul, les deux conceptions sont inséparables : les dons et l’amour. Il dit en somme qu’on ne peut ni chercher ni exercer un véritable don spirituel sans amour (versets 1-3) et c’est alors qu’il ajoute cette définition minutieuse et divinement parfaite de l’amour que nous avons déjà étudiée (versets 4-8). Pour lui, le vrai amour est l’évidence suprême de l’action de l’Esprit. Tout ministère, tout don qui n’exprime pas l’amour que Christ a révélé à la croix est faux ; il n’a aucune valeur.

J’avoue que la traduction de ce verset présente des difficultés du fait que l’expression kath’ hyperbole (= par excellence, outre mesure), qui est strictement adverbiale, devrait normalement se rattacher à un verbe, soit à : « Aspirez », soit à : « Je vous montre ». Tous les traducteurs la rattachent au substantif « voie ». Ils ont peut-être raison, mais ce serait alors le seul cas dans le Nouveau Testament où cette expression aurait valeur d’adjectif (Comparer Romains 7.13 ; 2 Corinthiens 1.8 ; 2 Corinthiens 4.17 ; Galates 1.13.) . Cette construction grammaticale est difficile à rendre en français. Faute de mieux, je la traduis : « Recherchez les dons supérieurs et, d’ailleurs, je vous montre la manière de le faire à outrance par la puissance de l’amour ! »

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LA QUATRIÈME LISTE DE DONS

Éphésiens 4.1-16

Les dons spirituels véritables unissent le corps de Christ

Paul écrit sa lettre aux chrétiens d’Éphèse dans le but de les unir. « Je vous exhorte donc, dit-il... à marcher... en tout humilité et douceur, avec patience, vous supportant les uns les autres avec amour, vous efforçant de conserver l’unité de l’Esprit par le lien de la paix. » (versets 1-3).

Avant de donner des précisions sur les dons spirituels, il insiste sur l’unité de l’Esprit. Celui-ci ne divise pas le corps de Christ, il le bâtit, il l’édifie. Tout ce qu’il fait est orienté dans ce sens. Les dons, les fonctions qu’il accorde aux uns et aux autres sont, nous l’avons remarqué, pour l’utilité commune, pour tout le monde, pour autrui et non pour soi-même. Il est impossible qu’une action provenant du Saint-Esprit déchire le corps de Christ ; les éléments qui provoquent des divisions ne viennent pas de Dieu. Dieu nous ordonne même de nous en éloigner (Romains 16.17).

Paul récapitule ensuite les sept grandes unités divines : « Il y a un seul corps (une seule Église) ; un seul Esprit ; une seule espérance (le royaume de Dieu) ; un seul Seigneur (Jésus-Christ) ; une seule foi ; un seul baptême ; un seul Dieu et Père de tous... » (versets 4-6).

Il est évident que l’action du Saint-Esprit est caractérisée par l’unité qui existe dans la personne de Dieu et dans toute son œuvre. Lorsque l’Esprit s’exprime à travers les dons individuels des croyants, le résultat est inévitablement le renforcement de leur unité spirituelle. Si cette unité manque, il faut se demander quel est l’esprit qui agit.

Les dons véritables coûtent

« À chacun de nous, dit Paul, la grâce (charis) a été donnée selon la mesure du don (dôrea.) de Christ. » (verset 7) Notre don est un aspect de la grâce, de la générosité de Dieu, générosité qu’il mesure par le don ineffable et infiniment coûteux de son Fils, fait en notre faveur. Comme le Père a donné son Fils pour le salut du monde, ainsi le Fils nous donne son Esprit pour que nous communiquions ce trésor à notre frère et à notre prochain. Le trésor que nous avons reçu, nous devons le dépenser, le donner : voilà le sens du don spirituel !

Mon frère, tu cherches un don spirituel ? Tu crois l’avoir reçu ? Dis-toi bien que son utilisation te coûtera. Il s’agit du don de toi- même, de ton temps, de tes forces, de tes loisirs, de ton argent, de ta maison, de ton amour... le don de Dieu se mesure à la croix de son Fils. L’exercice de ton don spirituel exigera également un sacrifice. Si tu vas servir les autres, si tu acceptes d’être disponible, accessible à tous ceux qui ont besoin de ton aide, tu vas certainement sacrifier beaucoup de choses qui te sont chères...

La possession d’un don spirituel implique une très grande responsabilité : tu es atteint par la souffrance du monde, par celle de Christ, par celle de tes frères. Un vrai ministère spirituel est inséparable de la croix. Cela est difficile à comprendre si tu vis un christianisme embourgeoisé ; mais tu commences à en mesurer la profondeur quand tu sers Dieu à fond « dans la bagarre », ou sur un « chantier spirituel », dans une œuvre pionnière. Tu en saisis toute la portée quand tu vis au sein de la persécution. Comment ! Servir Dieu dans un camp de concentration ? Pourquoi pas ? C’est ainsi que nous pouvons apprécier les réalités de la foi...

Tu es toi-même le don !

Paul dit que le Christ a donné aux hommes des dons (grec : dôma, pluriel : dômata — verset 8). « Il a donné les uns comme apôtres, les autres comme prophètes, les autres comme évangélistes, les autres comme pasteurs et docteurs... » (verset 11) Quel cadeau précieux pour le monde qu’un homme de cette taille ! Que Dieu nous en donne des milliers ! Qu’il te forge à cette image ! Un point à remarquer dans ce passage, c’est que l’homme lui-même est un don ! Non seulement l’action de l’Esprit qui le qualifie pour un service spirituel est un don, mais le serviteur est lui-même donné. Comme le Père a donné son Fils pour le monde, ainsi il nous donne, nous qui voulons le servir. Désires-tu en réalité que Dieu te donne aux autres ?... qu’il donne ce que tu possèdes à qui il veut ?... qu’il te donne en sacrifice ? Je pense aux dernières paroles de Paul : « Je sers déjà de libation et le moment de mon départ approche. » (2 Timothée 4.6).Peu de jours après, il se trouvait devant Néron et ensuite, face au bourreau. C’était son sacrifice suprême, le comble de son ministère, de son service ; son don fut exercé jusqu’au dernier degré.

Tout donner

Tout ce « boucan » que j’entends aujourd’hui un peu partout autour des « dons » me fait souffrir. J’ai parfois l’impression d’assister à un jeu d’enfants excités, en train de se disputer un objet trouvé. On dirait que le « don » est un gâteau plutôt qu’une croix ! Le gâteau viendra après ; en attendant, nous vivons, œuvrons, luttons sur une planète hostile à Jésus-Christ. « C’est par beaucoup de tribulations qu’il nous faut entrer dans le royaume de Dieu », dit Paul (Actes 14.22 ; 2 Timothée 3.12). « Tous ceux qui veulent vivre pieusement seront persécutés. » Et le Maître lui-même affirme : « Si le monde vous hait, sachez qu’il m’a haï avant vous... S’ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront aussi » (2 Jean 15.18-20).

Je dirai même que celui qui exerce un don spirituel authentique se prépare au martyre. Si tu ne me crois pas, va dans les pays où il n’existe pas de liberté pour l’évangile et vois dans quelles conditions vivent ceux qui œuvrent pour Christ ! Notre vie facile en Occident nous enlève le sens des réalités spirituelles.

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LES DONS LES PLUS IMPORTANTS

Il y a certains dons que Paul estime essentiels, auxquels il accorde la première place : « premièrement, des apôtres, secondement des prophètes, troisièmement des docteurs, ensuite... » les autres (1 Corinthiens 12.28).

À l’église d’Éphèse, dans sa quatrième « liste », Paul énumère les dons qui sont incontestablement les plus nécessaires à l’œuvre de Dieu :

« Il a donné les uns comme apôtres, les autres comme prophètes, les autres comme évangélistes, les autres comme pasteurs (grec : bergers) et docteurs en vue de l’édification du corps de Christ... » (Éphésiens 4.11). L’église a besoin de toutes sortes de dons, mais aucune église ne peut réussir, ni même subsister longtemps, sans les cinq fonctions que Paul indique ici. Elles sont indispensables. Sans ces dons, l’église ressemble à un corps dépourvu de ses organes vitaux. Un corps peut — même si c’est plus difficile — subsister sans bras, sans pieds, sans oreilles, ou même avec un seul poumon ; mais il ne peut plus fonctionner si le cœur, la gorge ou les reins ne sont plus à leur place respective. De même, l’église n’est guère plus l’église si elle n’est pas enseignée, si elle ne se reproduit plus, si elle n’a plus de vision. Que Dieu ajoute autant d’autres dons qu’il voudra, supplions-le cependant de pourvoir en abondance à ces cinq fonctions essentielles.

L’APÔTRE

Y a-t-il encore aujourd’hui des apôtres ? (Voir aussi la Remarque sur le témoignage des douze apôtres, à la fin du chapitre sur le témoignage de l’Esprit.)

Le Nouveau Testament se sert du terme « apôtre » de deux façons bien distinctes. En grec classique, dans le dialecte ionien, le mot apostolos signifie : « messager, ambassadeur », et c’est dans ce sens qu’il est employé dans le Nouveau Testament, comme partout dans le monde hellénique de l’époque. (En grec attique, il signifie : « navire » et même « flotte », ou « expédition navale » ! Mais cela ne nous concerne pas.)

Le Seigneur Jésus avait beaucoup de disciples, mais il n’en choisit que douze auxquels il donna le titre d’apostolos ou « apôtre ».

Après le suicide de Judas, Pierre indiqua les conditions essentielles de son remplacement : « Il faut donc, dit-il, que parmi ceux qui nous ont accompagnés tout le temps que le Seigneur Jésus a vécu avec nous, depuis le baptême de Jean jusqu’au jour où il a été enlevé du milieu de nous, il y en ait un qui nous soit associé comme témoin de sa résurrection » (Actes 1.21-22).

Les douze étaient donc les témoins officiels et oculaires du ministère, de la mort et de la résurrection du Seigneur Jésus. Aucun homme sur la terre ne peut prétendre aujourd’hui à ces qualifications ; il est donc évident qu’il n’y a plus d’apôtres parmi nous dans ce sens-là. Leur témoignage a été mis par écrit et, pour nous, les livres que nous appelons le Nouveau Testament, contenant les quatre Évangiles et les écrits apostoliques, remplacent leur présence physique sur la terre.

Presque chaque fois que l’on rencontre le mot apostolos dans le Nouveau Testament, il désigne « les douze ». Il y a pourtant plusieurs exceptions dont la plus frappante concerne Paul, qui n’a pas honte de s’appeler, avec beaucoup d’insistance, « apôtre de Jésus-Christ ». Il est donc possible d’être un apôtre sans avoir vécu, comme les douze, côte à côte avec le Seigneur sur la terre ; car Paul, semble-t-il, ne l’a jamais vu sauf en vision. Quelles sont les qualifications d’un apôtre selon Paul lui-même ?

L’apostolat défini par Paul

Si tu n’as pas peur d’être ébranlé, je te conseille la lecture des passages suivants : Actes 9.15-16 ; 20.18-21, 33-35 ; 22.14-15 ; 26.16-21 ; Romains 15.16-24 ; 1 Corinthiens 4.9-13 ; 9.1-23 ; 2 Corinthiens 4.8-12 ; 10.3-16 ; 11.7-10,23-30 ; 12.1-13 ; 10.3-16 ; 11.7-10, 23-30 ; 12.1-13 ; Galates 1.11-17 ; Éphésiens 3.1-13 ; 1 Thessaloniciens 1.4-5 ; 2.1-12. Cela te donnera une idée formidable de l’apostolat !

On peut résumer la conception de Paul en trois points :

I

« N’ai-je pas vu jésus notre Seigneur ? » dit-il (1 Corinthiens 9.1). L’homme qui n’a jamais eu une vision bouleversante de Christ ne peut être apôtre, car il n’aurait pas de message à transmettre au monde. L’envoyé ne peut transmettre que les connaissances qu’il a reçues. Il doit parler de l’abondance de son cœur, de son expérience intime de Jésus.

II

« N’êtes-vous pas mon œuvre dans le Seigneur ? dit Paul. Si pour d’autres je ne suis pas apôtre, je le suis au moins pour vous ; car vous êtes le sceau de mon apostolat dans le Seigneur » (1 Corinthiens 9.1-2). L’homme qui ne sait pas ouvrir les portes du royaume des ténèbres et implanter une église là où il n’y en a pas n’est certainement pas apôtre.

III

« Sont-ils ministres de Christ ? » dit Paul en parlant des faux apôtres qui détruisaient son œuvre... « je le suis plus encore : par les travaux... les coups... les emprisonnements... souvent en danger de mort... j’ai été battu... lapidé... j’ai fait naufrage... fréquemment en voyage, j’ai été en péril... j’ai été dans le travail et dans la peine, exposé à de nombreuses veilles, à la faim et à la soif, à des jeûnes multiples, au froid et à la nudité. Et, sans parler d’autres choses, je suis assiégé chaque jour par les soucis que me donnent les églises » (2 Corinthiens 11.23-28).

Veux-tu devenir apôtre ? Dieu ne demande pas mieux ! Mais il fixe trois règles :

O mon frère ! Comme je souhaite que Dieu fasse de toi un apôtre ! L’éternité ne te suffira pas pour l’en remercier.

L’apôtre Paul était tout de même dans une catégorie spéciale, car il n’avait pas peur de parler avec une autorité comparable à celle des douze. Paul reçut de Dieu une vision extraordinaire du Seigneur Jésus ; on peut même dire qu’elle est unique, car elle dépasse certainement ce que les chrétiens ont connu depuis lors. Et pourtant, il est incontestable que Dieu appelle son peuple encore aujourd’hui à un véritable apostolat.

Latin ou grec ?

On parle couramment dans les milieux chrétiens de « missionnaires ». Or le mot « missionnaire » vient du latin et signifie : un envoyé... exactement comme le mot « apôtre » qui vient (et c’est la seule différence) du grec. Si nous parlons de missionnaires, parlons également d’apôtres : l’Église en a besoin plus que jamais ; sans cela, elle est vouée au dépérissement.

Il ne faut cependant pas supposer que tous ceux qu’on appelle « missionnaires » aujourd’hui le sont dans le sens néo-testamentaire. Le fonctionnaire ecclésiastique, l’administrateur et l’enseignant ont chacun leur place ; mais la vocation apostolique est tout de même autre chose... et nous en avons terriblement besoin. Des hommes comme Paul, Raymond Lull, William Carey, le Sadhou Sundar Singh, que Dieu nous en suscite par milliers et par dizaines de milliers !

« Les envoyés » de l’Église primitive

Il reste à considérer quatre passages intéressants où le mot apostolos s’applique à d’autres personnes que Paul ou les douze apôtres. Il est évident, par ces textes, que le terme était employé par les apôtres eux-mêmes dans un sens plus large que celui que la tradition ecclésiastique lui accorde.

— Dans Actes 14.4, 14, Barnabas est considéré comme apôtre au même titre que Paul.

— Dans 2 Corinthiens 8.23, Paul appelle les deux frères qu’il envoie à Corinthe avec Tite « les envoyés (en grec : les apôtres) des églises, la gloire de Christ ».

— Dans Philippiens 2.25 (selon le texte grec) Paul appelle Épaphrodite, qui lui était envoyé par les chrétiens de Philippes avec un don d’argent pour soulager ses souffrances en prison, « votre apôtre » (apostolos).

— Andronicus et Junias (une femme !) « jouissaient d’une grande considération parmi (grec : en) les apôtres ». Cela signifie-t-il qu’ils étaient considérés comme étant eux-mêmes apôtres ? Le texte ne nous permet pas de dogmatiser à ce sujet, mais c’est très possible et même probable, d’autant plus qu’ils étaient compagnons de captivité de Paul (Romains 16.7).

Le verbe apostellô (envoyer) ainsi que le verbe pempô, qui a la même signification, sont employés dans ce sens assez souvent dans le Nouveau Testament et confirment notre besoin d’un apostolat de nos jours. Paul envoyait souvent ses jeunes coéquipiers en mission.

Il est donc évident que le terme « apôtre » n’est pas limité aux douze, mais comprend des ministères qui sont non seulement admissibles mais extrêmement souhaitables et même plus que nécessaires aujourd’hui. Le plus grand besoin de l’œuvre de Dieu, c’est d’avancer, de gagner des âmes, des populations, des régions pour le Christ. Oui, Seigneur, envoie-nous des apôtres ! « Me voici, envoie-moi ! » (Ésaïe 6.8).

Le caractère du don apostolique

Quel est le don spécifique de l’apôtre ? Il doit souvent, sinon toujours réunir en sa personne plusieurs dons. D’abord, il est pionnier, c’est un évangéliste de première ligne : il doit prêcher Christ avec puissance de manière à amener les âmes à la nouvelle naissance et cela, en maîtrisant souvent une langue ou des langues étrangères. Il doit également fonder une ou plusieurs églises, ce qui implique la capacité de faire, au moins provisoirement pendant l’enfance de l’œuvre, un travail de berger (ou « pasteur ») et d’enseignant (ou « docteur »), jusqu’à ce que d’autres hommes plus spécialisés viennent prendre le relais ou, mieux encore, que Dieu en suscite sur place. Il doit guérir en cas de besoin, chasser les démons quand ils s’opposent à la vérité, déceler les erreurs et les dangers qui guettent la jeune église, l’exhorter et lui apporter une parole prophétique. Pourtant sa véritable vocation consiste essentiellement à faire connaître le Christ là où il ne l’est pas. Il défriche un nouveau champ. Il ouvre le chemin (Romains 15.20-21 ; Éphésiens 3.8).

Idéalement, l’apôtre travaille en équipe, ce qui permet aux membres de se compléter. De cette manière, un seul homme n’a pas à faire tant de choses à la fois et il y a moins de risques que l’œuvre soit trop marquée par les particularités ou les limitations d’une personnalité individuelle.

Hélas ! Dieu est si pauvre en ouvriers qu’il est souvent contraint de les économiser, de les utiliser de façon solitaire. J’ai connu, dans différents pays où j’ai habité, des hommes — et encore plus souvent des femmes — qui, n’ayant personne pour les aider, devaient affronter des tâches surhumaines. J’ai remarqué, émerveillé, la manière dont Dieu se servait d’eux, sans qu’ils soient, en général, très qualifiés pour les aspects si variés du travail ; ils arrivaient tout de même à fonder des églises qu’ils instruisaient, en formant même de nouveaux ouvriers parmi leurs enfants spirituels. Dieu est confronté aujourd’hui, comme dans le passé, au problème tragique de la carence d’hommes capables et prêts à occuper les positions de première ligne dans son œuvre. Cela l’amène à faire des miracles spirituels avec la poignée qui répond à son appel. Mais quelle ne serait pas l’action de l’Esprit de Dieu si toute l’Église prenait au sérieux l’évangélisation du monde ! Les nations seraient sillonnées dans tous les sens d’équipes apostoliques. Un homme de Dieu est une puissance remarquable ; mais une équipe apostolique est une force presque irrésistible, une véritable « pile » spirituelle d’un potentiel illimité.

L’ÉVANGÉLISTE

(Nota : Paul met ce don à la troisième place dans sa liste, après celui de prophète. Néanmoins, je le traite ici en second, à cause de son-affinité avec le don d’apôtre, alors qu’il me semble préférable de traiter le don de prophète ultérieurement avec celui de docteur.)

Celui qui apporte de bonnes nouvelles ! C’est la signification du mot grec euanguelistês. Notre pauvre monde a tellement besoin d’entendre une bonne nouvelle ! La radio, la presse, la télévision nous en racontent de si mauvaises ! Les hommes vivent inquiets, dans l’incertitude, et notre message est le seul qui apporte un véritable espoir.

Tous les chrétiens sont appelés à évangéliser, mais tous n’ont pas le don d’évangéliste. À certains, Dieu confie une grâce spéciale, un savoir-faire, une facilité pour atteindre les gens, une autorité particulière leur permettant « de récolter le blé », « d’enfanter les âmes ». Quand ils parlent, les hommes sont placés devant le choix entre le ciel et l’enfer.

Ce don est à convoiter ! Je ne puis imaginer une plus grande joie pour toi, au moment d’arriver au ciel, que d’y rencontrer une foule de personnes qui sont là grâce à ton témoignage !

Une évangélisation vivante

Depuis une centaine d’années, Dieu a suscité de très grands évangélistes, surtout dans le monde anglophone, qui ont amené au Seigneur des millions d’âmes. Ils étaient — et sont — des orateurs capables d’attirer l’attention d’immenses auditoires. Mais cette méthode d’évangélisation n’est praticable que dans des pays où l’effort est appuyé et soutenu par un grand nombre de chrétiens et par des églises en mesure d’assimiler les nouveau-nés en Christ. Ce genre d’évangéliste n’est en somme que la bouche d’une multitude de frères qui œuvrent et prient tous pour des conversions. L’histoire de l’Église ne fournit rien de plus émouvant ni de plus exaltant qu’une action semblable. J’aimerais voir le monde entier entendre le message de cette façon.

Mais peu nombreux sont les pays ainsi favorisés. Trop souvent, les chrétiens évangéliques sont en petite minorité et l’évangélisation prend alors des formes très variées et souvent très ardues. Pour se faire écouter et comprendre, il faut beaucoup de persévérance et de foi. Là où la population est lettrée, la page imprimée est d’une valeur inestimable ; elle est sans doute l’une des méthodes les plus efficaces, car la parole reste ainsi entre les mains des auditeurs. Dans les pays sous-développés où l’analphabétisme est encore courant, il faut avoir recours à d’autres méthodes : la radio, les disques et les cassettes ont tous leur place, parmi beaucoup d’autres moyens. Dans tous les pays nous avons besoin d’expérimenter et de découvrir les voies les mieux adaptées à la présentation du message essentiel du Christ. Il y a mille façons différentes d’évangéliser et, par conséquent, l’évangéliste peut se présenter sous des aspects très variés. Mais n’oublions jamais la « méthode » la plus puissante de toutes, celle d’une vie transformée par l’Esprit de Christ. Dieu cherche des hommes consacrés bien plus que des moyens techniques. Rien ne remplace l’homme de Dieu. Le « un à un » est en fin de compte la méthode la plus rapide et la plus solide.

Toi aussi, tu peux faire quelque chose

Il y a quelques années, un ami m’a raconté l’histoire d’un vieux petit bonhomme en Australie qui, arrivé à l’âge de la retraite, s’était rendu compte que, pendant toute sa vie professionnelle, il n’avait pratiquement rien fait pour évangéliser ses compatriotes. Et il a fait le vœu de témoigner de Jésus au moins à une personne par jour.

Sa méthode n’était pas très recherchée : il se sentait faible et peu qualifié pour annoncer l’évangile. Mais chaque jour, il priait dans la rue, puis, quand il croyait être dirigé par l’Esprit, il accostait un passant. Celui-ci entendait, stupéfait, ces paroles : « Veuillez excuser, cher Monsieur, ma maladresse, mais je dois vous dire que, si vous ne croyez pas au Seigneur Jésus-Christ comme votre Sauveur personnel, vous irez en enfer. Au revoir, Monsieur ! » Mon ami m’a dit qu’il connaissait trois hommes qui avaient été convertis par ce témoignage inouï et je pense que beaucoup d’autres ont également trouvé le salut grâce aux avertissements de cet homme timide mais fidèle. Il est certain que nous pouvons tous annoncer le Christ d’une manière ou d’une autre !

Amener les païens à l’obéissance par la puissance de l’Esprit (Romains 15.18-19)

Cependant, le vrai don d’évangéliste est une action surnaturelle de Dieu. Les paroles, les méthodes qu’il emploie sont évidemment humaines ; mais elles sont renforcées par une autorité et une puissance exceptionnelles venant directement de Dieu, car le Saint-Esprit appuie le témoignage de l’homme qu’il remplit. Au véritable évangéliste il accorde la grâce, non seulement d’avertir les âmes, mais de les convaincre et de les faire naître de nouveau, parfois même en grand nombre. Il fait « pousser » l’Église ! Nous n’avons pas tous ce don merveilleux, hélas !

La différence entre l’apôtre et l’évangéliste

La distinction réside dans le fait que l’apôtre fait normalement une œuvre pionnière dans une région où il n’y a aucune église, alors que l’évangéliste travaille plutôt en collaboration avec une ou des églises locales. Je ne veux pas dire qu’il évangélise dans l’église ! Je sais que cela se fait, même trop souvent ; c’est une conception particulière et peu biblique de l’évangélisation. Pour attraper des poissons, il faut aller à la rivière — non pas à la baignoire !

Non, le véritable évangéliste ne cherche pas à convertir les bons chrétiens ! Il est à la recherche des perdus. Mais toute l’église devrait avoir ce même souci. C’est lorsque l’église est d’accord avec l’évangéliste pour chercher et sauver les perdus qu’il en résulte une bénédiction. Si l’évangéliste est seul, il aura beaucoup de peine à toucher la foule et à s’occuper de toutes les âmes ; mais si l’église fait équipe avec lui, ils sont ensemble un instrument puissant que la main de Dieu peut utiliser fructueusement.

Trop souvent, les églises laissent le travail d’évangélisation au « spécialiste », au pauvre évangéliste qui, tout seul, doit se débrouiller comme il peut. Est-ce étonnant si l’église voit peu de conversions ? Et pourtant ! L’église a terriblement besoin de l’évangéliste. L’évangéliste est « la main » de l’église qui accroche les hommes et les arrache au monde. Mais si la main n’a pas l’appui du corps tout entier par derrière, elle ne peut pas faire grand-chose. Heureuse l’église qui ressemble à une équipe de football et qui a cinq évangélistes qu’elle utilise à fond !

LE PROPHÈTE

Dans l’esprit d’un grand nombre de chrétiens, l’idée du prophète demeure assez confuse, faute d’un enseignement biblique suffisamment approfondi. Pour comprendre le rôle du véritable prophète et le sens de la prophétie, comme pour toute autre doctrine, tu as besoin de te familiariser avec le contenu de la Bible entière : celle-ci n’est en somme qu’une vaste prophétie divine qui se développe progressivement de la Genèse à l’Apocalypse. Dans mon ouvrage, je ne peux en indiquer que les points essentiels.

Disons d’abord que le rôle du prophète ne consiste pas nécessairement, ni même en premier lieu, à prédire l’avenir. La prédiction est accessoire à son message essentiel. En quoi consiste donc ce ministère ?

Le mot « prophète » (en grec : prophêtês, traduction de l’hébreu nabi) signifie : « porte-parole ». On pourrait presque le traduire par le mot français « représentant » ; mais l’expression « porte-parole » nous suffit pour exprimer le caractère véritable du prophète. Comme Aaron était le porte-parole de Moïse devant Pharaon et devant le peuple (Exode 4.15-16), ainsi le disciple de Christ est appelé à parler au nom de son Maître et à le représenter. Mais il est évident qu’un tel privilège comporte une responsabilité très grave.

Les origines du ministère prophétique

Moïse, en instituant la loi, confia à la tribu de Lévi la responsabilité de l’enseigner au peuple de Dieu. Les prêtres et les Lévites devinrent ainsi les enseignants ou les docteurs de la loi, officiellement reconnus comme tels et tenus de l’interpréter à tout le monde fidèlement. Ils devaient être soutenus matériellement par les dîmes et les offrandes du peuple, afin d’être libres pour étudier sérieusement la loi et pour l’enseigner dans toutes les villes et les villages. Josué, à la conquête du pays, désigna quarante-huit villes « lévitiques » éparpillées à travers les autres tribus ; les enseignants pouvaient ainsi atteindre jusqu’au plus petit village en communiquant leurs connaissances (Josué 21.1-42). La loi devait être enseignée au moins une fois tous les sept ans dans sa totalité (Deutéronome 31.9-13).

Après la mort de Josué, le peuple commença à délaisser la loi de Moïse et cessa d’apporter le soutien matériel nécessaire aux enseignants, qui reprirent alors leurs activités profanes. Il s’ensuivit une ignorance et une apostasie affreuses comme en témoignent les derniers chapitres du livre des Juges.

C’est à ce moment-là que Dieu commença à susciter des prophètes (Pour le récit des premiers prophètes, voir Juges 2.1-4, 20 ; 4.4 ; 6.7-8, 9.7-21 ; 1 Samuel 2.27-36 ; 3.1-4, 11-14, 19-21). Ceux-ci, issus de n’importe quelle tribu, ne se considéraient pas comme « enseignants » ; ils ne remplaçaient pas les Lévites, docteurs établis par Dieu. Leur prédication ne consistait pas en un étalage ou un exposé systématique de la loi de Moïse mais plutôt en un appel à la conscience morale et spirituelle de la nation et même des Lévites.

Moïse lui-même, enseignant par excellence d’Israël, lui avait laissé, avant de mourir, une prophétie extraordinaire. Ce fut un avertissement solennel adressé au peuple qui venait de s’engager vis-à-vis de son Créateur. Cette prophétie devait servir aussi longtemps qu’lsraël existerait sur la terre. Par elle, Moïse énonçait les trois principes fondamentaux qui ont régi toute son histoire jusqu’à nos jours. Les voici :

  1. L’obéissance à la Parole de Dieu amène la bénédiction (Deutéronome 28.1-14) ; Lévitique 26.3-11) ;
  2. La désobéissance amène le châtiment (Deutéronome 28.15-68 ; Lévitique 26.14-39) ;
  3. La repentance amène le rétablissement (Deutéronome 30 :1-10 ; Lévitique 26.40-45).

Le développement de la notion prophétique

Tout le message prophétique de l’Ancien Testament est fondé sur ces trois grands principes spirituels. Les prophètes qui ont suivi Moïse n’ont fait qu’appliquer les promesses et les avertissements qu’il avait prononcés, selon la situation où se trouvait leur génération.

Toutes les fois qu’Israël a su obéir à la loi, Dieu l’a béni. Mais lorsque les enseignants n’ont plus fait leur travail, la foi a disparu, faute de connaissance de la Parole de Dieu, et le peuple est tombé dans l’idolâtrie et l’immoralité.

C’est alors que Dieu a parlé par les prophètes. Face à l’apostasie générale, le prophète reprochait chaque fois au peuple son péché en l’avertissant solennellement des châtiments prédits par Moïse. Il l’appelait à la repentance. Autrement dit, il exigeait un retour sincère à la loi, à la Parole de Dieu.

Si le peuple se repentait, le prophète l’encourageait alors à s’appuyer sur l’Éternel et à compter sur ses promesses, sur la réponse à ses cris, même lorsque la situation paraissait inextricable. Le prophète appelait le peuple à la foi comme il l’avait appelé auparavant à la repentance, en fondant chaque fois son message sur la loi, sur la Parole de Dieu.

À travers toute l’histoire de l’Ancien Testament, ces deux aspects du ministère du prophète sont évidents. À partir du livre des Juges et depuis Samuel jusqu’à l’époque de Jérémie et d’Ézéchiel et ensuite après le retour de l’exil, le message du prophète n’a pas changé. Il avertissait, face au péché, et il encourageait ou exhortait face au danger et au désespoir. Mais il fondait son message sur la Parole que Dieu avait déjà révélée à Moïse et même à Abraham. Il parlait « Bible en main » (2 Rois 17.12, 13, 23 ; 2 Chroniques 36.15-16).

Parce qu’il vivait près de Dieu et parce qu’il connaissait les Écritures, le prophète prévoyait de façon claire ce qui était caché aux yeux de la multitude. Il prédisait soit la catastrophe, soit la bénédiction parce qu’il comptait sur les avertissements et les promesses de Dieu. Ses prédictions n’étaient pas un « hasard », ni une idée qui lui venait d’un au-delà plus ou moins vague ; elles étaient solidement fondées sur la Parole de Dieu.

Le prophète dans le Nouveau Testament

Quand nous considérons le rôle du prophète dans l’assemblée néo-testamentaire, nous voyons tout de suite l’utilité d’un ministère comparable à celui du prophète en Israël.

Dieu avait dit à Ézéchiel : « Je t’ai établi comme sentinelle » (Ézéchiel 3.17). Tous les prophètes de l’Ancien Testament se considéraient comme des sentinelles ; tous voyaient le danger et prévenaient la nation ; tous discernaient également la voie d’issue et proclamaient avec certitude la délivrance de Dieu, si le peuple prenait à cœur sa Parole. Si la sentinelle ne voit pas le danger, ne sonne pas de la trompette, n’avertit pas ses frères, elle devient coupable de leur sang. Il est certain que le don de prophétie comprend une lourde responsabilité. Le prophète est, de toute évidence, l’œil et l’oreille de l’église. Il en est la « boussole », le « thermomètre spirituel », la conscience morale. Dieu lui accorde ce don afin qu’il établisse le diagnostic de la situation ; il doit mettre le doigt sur la plaie et indiquer le remède. Il n’a pas (ou pas souvent) le don de présenter une étude systématique du problème ; cette tâche revient plutôt au docteur. Mais Dieu lui donne d’être perspicace, de discerner « la direction du vent », de comprendre les « signes des temps ». Il sait orienter l’église dans la direction voulue par Dieu.

Tous des prophètes ?

Dans un certain sens, tous les enfants de Dieu sont prophètes. « Puisse tout le peuple être composé de prophètes, s’exclama Moïse, et veuille l’Éternel mettre son Esprit sur eux ! » (Nombres 11.29). Paul dit : « Vous pouvez tous prophétiser successivement, afin que tous soient instruits et que tous soient exhortés. » (1 Corinthiens 14.31).

Nous sommes tous appelés à être les porte-parole de Dieu ; tous nous devons parler comme annonçant les oracles de Dieu. Chaque croyant devrait pouvoir exhorter ses frères lorsque l’occasion l’exige ; les assemblées seraient infiniment plus riches, les rencontres plus bénies si elles comprenaient cela.

Il ne faut cependant pas confondre ce ministère universel avec celui du prophète proprement dit, car il reçoit un don qui lui permet d’assumer sa tâche avec des qualités spécifiques. Paul dit : « Vous pouvez tous prophétiser... » Mais il ne dit pas : « Vous êtes tous des prophètes » (1 Corinthiens 14.32 ; 12.29). Il y a une distinction. De même, nous sommes tous appelés à évangéliser (2 Timothée 4.5), mais nous n’avons pas tous le don d’évangéliste.

Une fausse conception du prophète

Le monde grec connaissait deux termes pour désigner le prophète : prophêtês et mantis ; mais les deux conceptions étaient bien distinctes. Le Nouveau Testament n’utilise que le mot prophêtês et refuse de se servir de l’autre terme, mantis (Voir Appendice IX).

La seule exception se trouve dans Actes 16.16 où nous lisons l’histoire de la jeune esclave « qui avait un esprit de Python (c’est-à- dire d’Apollon) et qui, en devinant, procurait un grand profit à ses maîtres » (le verbe grec est manteuomai = agir en mantis). L’aspect le plus remarquable de cet incident, c’est que le démon « prêchait » la vérité ; car la jeune fille criait d’une voix forte : « Ces hommes sont les serviteurs du Dieu Très-Haut et ils vous annoncent la voie du salut ! » Paul cependant a refusé d’admettre ce témoignage ; il a traité l’esprit en ennemi et l’a chassé de la jeune fille.

Le terme mantis n’est jamais employé dans la Bible pour un prophète de Dieu et ceci pour de bonnes raisons.

Il y avait à Delphes, dans l’Antiquité, un oracle d’Apollon (appelé également Python) qui était servi par une prêtresse ou prophétesse qui recevait les messages du « dieu ». Il est utile de se rappeler que les Grecs appelaient leurs dieux indifféremment theos (que la Bible traduit généralement par « dieu ») et daimôn. Ce dernier donne le mot français « démon » ; mais chez les auteurs classiques de l’Antiquité païenne, il n’avait aucun sens péjoratif.

Cette prophétesse était en fait un médium ; mais il est particulièrement intéressant de noter qu’on ne lui donnait pas le titre de prophêtis (forme féminine de prophêtês),mais au contraire celui de mantis. Elle tombait en extase, perdait parfois conscience et parlait souvent de façon frénétique sous l’influence du daimôn, et cela, généralement en un langage inintelligible.

Puisque ceux qui consultaient l’oracle ne pouvaient pas comprendre le message tel qu’il était livré par la mantis (Le mot mantis en grec est à la fois masculin et féminin selon la personne qui s’exprime.), une deuxième personne devait être présente, à laquelle on donnait le titre de prophêtês (masculin) ou prophêtis (féminin) et qui était tenue d’interpréter l’oracle en un langage compréhensible. Le prophêtês était ainsi l’interprète du mantis. Le message qu’il livrait était formulé en une langue courante, normalement le grec, et souvent en vers.

Le faux prophète

Ce n’est pas seulement à Delphes, mais un peu partout, que l’on reconnaissait dans l’Antiquité ces deux sortes de prophètes. Mais remarquons à présent que le prophète de Dieu, le vrai, n’est jamais considéré comme étant un mantis. Le (ou la) mantis est une conception païenne, démoniaque. Le prophète biblique parle directement à son auditoire en une langue connue ; il n’y a rien de frénétique dans son comportement ; il est conscient de ce qu’il fait ; son message est lucide. Cela paraît encore plus clairement quand on étudie la vie et l’œuvre de tous les prophètes de la Bible.

Platon enseigne que le nom mantis, avec son verbe manteuomai (qui signifie parler ou prophétiser en tant que mantis) est lié à la même racine que mania (folie) et mainomai (être fou). Pour lui, le fonctionnement de la raison du mantis est laissé en suspens, son parler est irrationnel, alors que le prophêtês parle de façon intelligible et de ce fait, lui est supérieur (Voir l’analyse de R.C. Trench dans Synonymes du Nouveau Testament. C. Muguardt, éditeur, Bruxelles 1869, p. 22-26, qui fait autorité.). Cela jette une lumière pénétrante sur l’argument de l’apôtre Paul dans 1 Corinthiens 14 !

La prophétie du mantis n’était en fait autre chose que de la divination, une pratique occulte. Or, Dieu interdit dans la Bible toutes les formes possibles d’occultisme. Il est important de retenir que, dans la version grecque de l’Ancien Testament, le mantis est toujours un devin ou un faux prophète (Josué 13.22 ; 1 Samuel 6.2 ; Jérémie 29.8 ; Michée 3.7 ; Zacharie 10.2, plus encore 27 références où il est fait mention de formes analogues du mot. Voir en particulier : Deutéronome 18.10-14 ; 2 Rois 17.17 et Jérémie 14.14. Voir aussi Appendice IX). Ce mot, avec ses dérivés est employé sans exception dans un mauvais sens, car « prophétiser » de cette manière (manteuomai) est considéré comme une abomination ; Dieu rejette catégoriquement ce terme et tout ce qu’il implique. Cette conception ne trouve aucune place dans l’économie divine ; elle est diabolique.

En écoutant certains soi-disant prophètes de nos jours, je ne peux m’empêcher de faire la comparaison avec l’idée du mantis de l’Antiquité. Le Seigneur Jésus lui-même, comme Paul, Pierre et Jude, nous avertissent que dans les derniers jours il y aurait beaucoup de faux prophètes et de faux docteurs (Matthieu 24.11 ; Marc 13.22 ; 1 Timothée 4.1-2 ; 2 Timothée 4.3-4 ; 2 Pierre 2.1-22 ; Jude 4-19). Que Dieu nous en garde ! Au début de ce siècle, une « prophétesse », se disant chrétienne, a prédit que l’île de Sri Lanka (Ceylan) sombrerait prochainement dans la mer. La prophétesse est morte mais Sri Lanka est toujours là. Il y a quatre ans environ, on m’a appris qu’un « prophète » venait de prédire pour la Bretagne un sort identique ! (Voir Deutéronome 18.20-22) Ce genre de « prophétie » discrédite l’Évangile aux yeux du monde.

Où sont les vrais prophètes ?

Le prophète de l’Ancien Testament était un homme à part, souvent solitaire, un homme du désert, habitué à la souffrance, la plupart du temps rejeté par ses contemporains parce qu’il refusait de suivre la foule. On l’appelait fou, hérétique, traître, dangereux ; mais il prêchait fidèlement la vérité telle qu’il l’avait reçue de Dieu. Les faux prophètes au contraire, étaient souvent bien vus ; pourtant ils disaient « les visions de leur cœur et non ce qui venait de la bouche de l’Éternel »... ils disaient à ceux qui méprisent Dieu : « L’Éternel a dit : vous aurez la paix. »

« Je n’ai point envoyé ces prophètes, dit l’Éternel, car s’ils avaient assisté à mon conseil, ils auraient dû faire entendre mes paroles à mon peuple et les faire revenir de leur mauvaise voie. » (Jérémie 23.16-17, 21-22) « Ils prophétisent en mon nom le mensonge, disant : J’ai eu un songe, j’ai eu un songe !... ils prennent leur propre parole et la donnent pour ma parole... ils égarent mon peuple... et ils ne sont d’aucune utilité à ce peuple, dit l’Éternel... » (Jérémie 23.25, 31-32. Voir aussi tout le chapitre ainsi que Jérémie 14.13-18) « Malheur aux prophètes insensés, qui suivent leur propre esprit et ne voient rien... Leurs visions sont vaines et leurs oracles menteurs. Ils disent : L’Éternel a dit ! et l’Éternel ne les a point envoyés ; et ils font espérer que leur parole s’accomplira... ils égarent mon peuple en disant : Paix ! quand il n’y a point de paix. » (Ézéchiel 13.3, 6, 10. Voir aussi tout le chapitre).

Les « fils des prophètes » et les prophètes

La lecture des livres historiques de l’Ancien Testament nous fait également remarquer une distinction très nette entre les « fils des prophètes » et le prophète authentique. Il semble que Samuel ait institué les « écoles des prophètes », afin de susciter et de former des hommes capables de rappeler la Parole de Dieu à la nation apostate. Comme les écoles bibliques de nos jours, que Dieu a suscitées pour la même raison, elles ont servi pendant plusieurs générations ; elles ont contribué sans doute à la composition des livres historiques ; elles ont fourni des prédicateurs et peut-être même des savants au peuple de Dieu pendant le déclin de la nation, alors qu’elle était envahie par le culte de Baal et par une foule d’autres abominations sous les rois impies. Cependant, si l’on compare ces hommes avec les prophètes authentiques de la même période : Nathan, Achija de Silo (1 Rois 11.29-39 ; 14.5-16), Élie, Élisée, Jonas (1 Rois 14.25 et le livre de Jonas), Ésaïe, Jérémie, Ézéchiel, Daniel, pour n’en citer que quelques- uns... on ressent une immense différence ; on se trouve devant un élément indéfinissable, une qualité de vie, une autorité spirituelle qui sortent de l’ordinaire. On entend la voix de l’Esprit de Dieu. C’est Dieu qui parle (Nous devons aussi tenir compte du fait que certains prophètes (comme Samuel et Ézéchiel étaient eux-mêmes Lévites ou sacrificateurs.). Les « fils des prophètes » étaient, semble- t-il, plutôt des disciples qui recevaient leurs connaissances d’autrui alors que le message des « prophètes » venait d’une expérience personnelle de Dieu.

Nous avons besoin aujourd’hui que Dieu nous envoie des hommes imprégnés de sa Parole, des hommes qui vivent dans son intimité et qui voient clair, extrêmement clair : des hommes qui aient le courage de nous mettre au pied du mur, de nous reprocher notre péché, de nous avertir, de nous ouvrir les yeux, de nous montrer les raisons de notre faillite spirituelle et les moyens de nous en sortir ; des hommes qui nous ramènent dans la voie de Dieu, qui nous appellent à sa loi et à son alliance, qui nous donnent envie de connaître Dieu et de faire sa volonté ; des hommes qui rompent les portes d’airain et qui nous ouvrent les horizons de Dieu. L’avenir de l’œuvre de Dieu en dépend.

LE DOCTEUR.

Alors que le prophète possède le don de discerner le point saillant d’une question et de le mettre en relief, le docteur (en grec didaskalos = enseignant) reçoit de Dieu la faculté de voir une situation ou un thème biblique dans son ensemble. Son esprit sait coordonner les multiples passages bibliques de manière à présenter une conception « panoramique » d’un sujet ; il présente une vision explicite et intégrale d’une doctrine. Cela permet à l’assemblée de situer les détails d’un problème dans son contexte ; elle acquiert ainsi une connaissance équilibrée de la vérité. Il n’y a peut-être pas la fougue ou la réaction « intuitive » du prophète en temps de crise, mais l’envergure de son optique contribue grandement à la capacité de l’assemblée d’agir intelligemment et bibliquement. Il pose des fondements très solides pour le développement de la vie spirituelle de l’église.

J’illustre par une analogie : Nous sommes en voyage ! Nous avons besoin de savoir où nous allons et comment parvenir à destination. Le docteur est l’homme qui nous émerveille en dessinant une carte de la région, grâce à laquelle nous pouvons saisir rapidement la configuration du pays. Le prophète est l’homme qui nous émerveille tout autant en mettant son doigt sur la carte de manière à nous indiquer la route et la destination que nous cherchons.

Le travail du docteur et celui du prophète se complètent. L’église a infiniment besoin de tous les deux. Le don de chacun est inspiré de Dieu et ils sont tout aussi spirituels l’un que l’autre. Même si l’extériorisation de leur foi paraît différente, ils sont tous les deux qualifiés et animés par le même Esprit ou bien, ils devraient l’être !

Il s’agit de communiquer

Non seulement le docteur reçoit de Dieu des connaissances bibliques et spirituelles très étendues mais, ce qui est encore plus important, il sait les communiquer à ses frères. Il ne suffit pas, pour être « docteur », d’avoir de grandes connaissances ; cette conception est une erreur monumentale. Qui n’a pas connu des personnes extrêmement érudites mais incapables de transmettre leur savoir à autrui ? Quand ils se mettent à expliquer leurs idées, ils embrouillent tout le monde ; ou bien, ils ont un « dada », un sujet qui les obsède à tel point qu’ils ramènent toutes leurs discussions à cette même question... ou bien ils sont trop prolixes, ou trop compliqués, ou ils emploient un vocabulaire incompréhensible ! J’ai connu tant de ces « docteurs »... et tant de leurs livres aussi !

Le vrai enseignant est à la fois profond et simple. Il traite des sujets difficiles et les rend accessibles aux autres croyants. Il pénètre les mystères de Dieu, mais il parvient à les transmettre à ceux qui sont jeunes dans la foi. En plus de cela il sait adapter son message ; il discerne les besoins spirituels de l’église et son enseignement est en rapport avec ces besoins. La Parole qu’il communique est vivante, actuelle ; elle touche la conscience et le cœur de ceux à qui elle s’adresse, car le docteur présente les vérités sous l’optique du Dieu qu’il connaît de près.

Intellectuel ou spirituel ?

On entend dire parfois que le rôle du prophète est « spirituel » alors que celui du docteur serait « intellectuel ». Ce genre de remarque m’étonne ! Je suis peiné de voir un peu partout une ignorance concernant la véritable nature du don de docteur et des dons en général. On s’imagine que le docteur ne fait qu’un étalage de connaissances académiques comparable au discours d’un professeur, alors que le prophète parle en « inspiré ». Cette conception est fausse. J’ai connu des personnes d’origine très humble, sans grande instruction, qui étaient néanmoins de véritables docteurs de la Bible, doués par le Saint-Esprit. Elles auraient sans doute été incapables de discuter sur la date du retour d’Esdras à Jérusalem ou de l’origine de la civilisation hittite, mais elles connaissaient le Seigneur et sa Parole ; elles pouvaient édifier un auditoire en lui communiquant une nouvelle vision de Christ ou une compréhension toute fraîche, par exemple, de l’épître aux Hébreux. Leur don était authentique, et leur message venait directement du ciel. Et l’on apprenait...

Néanmoins, il est vrai que l’instruction est d’une grande utilité dans l’œuvre du Seigneur, mais à condition qu’elle soit « baptisée » ! ... comme celle de Moïse qui fut rejeté pendant quarante ans avant de pouvoir s’en servir ; ou, comme celle de Paul qui, ébloui par la face de Jésus dut passer une longue période seul à seul avec Dieu et face à l’éternité en Arabie (Galates 1.17-18). Les écoles bibliques fournissent une instruction extrêmement intéressante, mais ce n’est pas aux pieds des hommes que le docteur reçoit son « don ». S’il n’est pas intime avec Dieu, il n’a rien de valable à communiquer. Même le Seigneur Jésus dut passer quarante jours dans le jeûne, seul avec son Père et aux prises avec la puissance terrifiante de Satan, avant de commencer son ministère d’enseignement. Ce qui qualifie le plus un homme pour enseigner les mystères de Dieu, c’est une connaissance personnelle, authentique et bouleversante de Dieu et de sa Parole.

Le docteur dangereux !

Timothée était, semble-t-il, essentiellement docteur et pasteur ; pourtant, Paul lui dit : « Fais le travail d’un évangéliste ! » (2 Timothée 4.5) Le docteur qui n’évangélise pas devient un théoricien : c’est un homme dangereux. D’ailleurs, comment saura-t-il enseigner aux jeunes frères les secrets du combat s’il ne participe pas à la mêlée ? Même si le docteur n’est pas doué pour l’évangélisation, il doit quand même évangéliser ! Sans cela, il commence à dégénérer.

La formation par la souffrance...

Je crois aussi que la souffrance fait partie intégrante de la formation de l’homme de Dieu. Tous les hommes de Dieu dans la Bible ont souffert, profondément pour la plupart. Un homme qui n’a pas souffert ne comprend la vie qu’à moitié et, pis encore, il ne pourra comprendre Dieu que de façon imparfaite, car il ne saura pénétrer les mystères de la croix. Les souffrances de Christ sont le lot et le partage du serviteur de Christ (Colossiens 1.24).

C’est pourquoi je suis convaincu qu’un jeune homme doit s’engager dans une action « de première ligne » ; il a besoin de souffrir, de rencontrer l’adversaire face à face, d’être persécuté, ridiculisé, critiqué, d’être devant des impossibilités, de savoir lutter, battre le diable et lui arracher sa proie ; il a besoin « d’expérimenter Dieu », de « vivre Christ » avant de se mettre à enseigner les autres. Sans cela, sa dissertation risque d’être une lettre morte, le fruit d’un cerveau humain au lieu d’être la Parole vivante de Dieu, la voix du Saint-Esprit.

...et par la Parole

Comment le docteur peut-il enseigner les voies de Dieu s’il ne connaît pas à fond, de À à Z, la Parole de Dieu ? Son plus grand besoin est de connaître les Écritures : cela passe avant toute autre étude. La lecture et l’étude approfondies, persévérantes et systématiques de la révélation divine sont le premier devoir de l’homme de Dieu. Tu ne peux pas enseigner ce que tu ne connais pas ! Il ne suffit pas d’acquérir une connaissance au sujet de la Bible, il faut connaître la Bible elle-même.

Puisque Moïse a décrété que chaque membre de la nation devait entendre la loi entière au moins une fois tous les sept ans (Deutéronome 31.9-13), il me semble que l’Église de Christ doit se fixer un objectif non moins élevé que celui de l’ancienne alliance. Je crois personnellement que dans chaque communauté chrétienne, il est souhaitable que le ou les docteurs assurent un enseignement suffisamment systématique pour couvrir toutes les doctrines majeures de la foi au moins une fois par période de sept ans. Voilà une cible pour nos enseignants ! Les ennemis de l’Évangile, les marxistes, les soi- disant « Témoins de Jéhova », les Mormons, et je ne sais qui encore, nous en donnent l’exemple, par leurs études systématiques, alors que l’Église de Christ se contente très souvent d’une alimentation spirituelle fragmentaire et déséquilibrée, elle se nourrit de « miettes » au lieu de se revêtir de « toutes les armes de Dieu » (Éphésiens 6.10-18). Comment pouvons-nous ainsi gagner le monde pour Christ ? Où est notre vision ? Où est la discipline du disciple ? Pourquoi nous appeler « disciples » si nous n’apprenons pas avec sérieux tout ce que notre Maître veut nous dire ?

Quand un homme est jeune et amoureux, il ne se contente pas de posséder des connaissances même très exactes concernant la jeune fille avec laquelle il espère partager sa vie ; il a besoin de la connaître elle, face à face, personnellement et par l’expérience. Il en est de même des choses de Dieu. Une école, des cours et des études peuvent te donner des connaissances très intéressantes concernant Dieu et sa Parole ; mais ton besoin essentiel, urgent, suprême est l’acquisition d’une connaissance immédiate de Dieu en personne. Tu dois te familiariser avec la révélation divine dans toute son étendue, pour en avoir une appréciation de « première main ». Ce que les hommes peuvent t’apprendre sur Dieu est précieux ; mais ce que tu reçois de Dieu lui-même, dans l’intimité de sa présence, vaut tous les volumes réunis que les hommes ont écrits à son sujet... comme un baiser qu’aucun message transmis par un intermédiaire ne peut remplacer.

L’art divin de l’exposé biblique

Le travail du docteur consiste essentiellement à faire un exposé de la Parole de Dieu. Le verbe grec ektithêmi (= faire un exposé, étaler) se trouve trois fois dans les Actes ; chaque contexte nous éclaire.

Voilà comment le docteur doit faire son exposé :

L’Église a terriblement besoin de cet enseignement. À remarquer que, dans le dernier contexte, Paul fait son exposé aux inconvertis ! Cela ne devrait pas nous étonner. J’ai vu, moi-même, beaucoup plus de personnes se convertir dans des études bibliques que dans des réunions d’évangélisation ! La Parole de Dieu, appuyée par l’Esprit de Dieu, est comme une épée à deux tranchants. Voilà le vrai secret du docteur. Son travail ne consiste pas en un simple raisonnement autour d’un texte, un « baratin » plausible, mais en un emploi fulgurant de l’épée à deux tranchants qui sort de la bouche du Christ ressuscité. Rempli du Saint-Esprit, le docteur devient la main de Dieu qui manie cette épée.

LE BERGER.

Aucun passage du Nouveau Testament ne nous oblige à réduire à un seul le nombre de pasteurs dans l’église locale (Par exemple : Actes 20 :17, 28 ; Philippiens 1.1). Au contraire, une communauté à laquelle Dieu confère plusieurs bergers est d’autant plus bénie.

Un seul homme ne peut visiter et aider qu’un nombre bien limité de personnes et il est souvent débordé par ce travail. En plus, il est en général tenu d’exercer en même temps un ministère d’évangéliste, de docteur, de prophète, d’administrateur et de je ne sais quoi encore. Le fait de remettre à un seul homme les responsabilités que l’église tout entière devrait assumer empêche le Saint-Esprit de développer les dons spirituels des membres individuels.

Le berger (grec : poimên, traduit dans la plupart des versions : pasteur) est l’homme qui reçoit de Dieu des capacités particulières pour prendre soin de ses frères. Il n’est cependant pas nécessaire d’avoir ce don pour « faire un travail de berger ». C’est plutôt en se dévouant pour ses frères et en s’occupant d’eux qu’il peut espérer l’acquérir ! Les anciens se chargent normalement de la responsabilité des âmes, mais n’importe quel enfant de Dieu peut contribuer à cette œuvre bienfaisante et si nécessaire.

En quoi le don de berger consiste-t-il donc ?

Pierre, s’adressant aux anciens de l’église (1 Pierre 5.1-4), les exhorte à paître le troupeau de Dieu (verset 2) et en même temps à être des modèles pour donner l’exemple aux autres. Lorsque le Seigneur, après sa résurrection, confère à Pierre ses responsabilités, il le charge de paître (grec : poimanô) et de nourrir (grec : boskô) le troupeau (Jean 21.15-17, passage où les deux mots grecs sont malheureusement confondus dans certaines traductions). Cela signifie, d’une part : surveiller, protéger, diriger l’église ; et, d’autre part : pourvoir à son alimentation spirituelle. Voilà la double responsabilité de l’ancien.

Paul exhorte les anciens de l’église d’Éphèse : « Prenez garde à vous-mêmes et à tout le troupeau sur lequel le Saint-Esprit vous a établis évêques, pour paître (grec : poimanô) l’église du Seigneur » (Actes 20.28). Le mot « évêque » (en grec : épiskopos) signifie littéralement « surveillant ». Dans ce passage les « évêques » et les « anciens » sont les mêmes personnes (Paul les appelle « anciens » au verset 17 et « évêques » au verset 28). Le verbe épiskopéô signifie « examiner » : le verbe épiskeptomai signifie la même chose, mais aussi « visiter ». Il est donc évident qu’un aspect indispensable du travail de berger consiste à surveiller, à visiter, à suivre les membres du troupeau.

Aimer son prochain

On n’a pas besoin d’être un « ancien » pour participer à ce travail. Jeunes et vieux, hommes et femmes, nous sommes tous appelés à nous occuper de notre prochain. La loi de Moïse et les prophètes de l’Ancien Testament insistent beaucoup sur la nécessité de s’occuper surtout de la veuve, de l’orphelin, du pauvre et de l’étranger. Le Nouveau Testament ajoute à-ces quatre catégories de personnes affligées « les prisonniers », surtout ceux qui le sont à cause de leur foi. L’église a une obligation, un mandat du ciel envers les êtres humains défavorisés, d’autant plus lorsque ceux- ci sont des enfants de Dieu, des membres de l’église.

Or, le vrai berger spirituel a constamment à cœur le bien-être des faibles, des souffrants, des malades (spirituellement aussi bien que physiquement) ; il s’occupe tout spécialement des « agneaux » (Jean 21.15) des jeunes dans la foi. Si toute l’église partage des fardeaux, les hommes qualifiés pour enseigner et pour accomplir d’autres tâches spécialisées seront libérés pour les mener à bout au lieu d’être écrasés par les responsabilités qui leur incombent

Le faux et le vrai berger

Paul met Timothée en garde contre les faux bergers qui s’introduisent dans les maisons et qui ébranlent et séduisent les gens. Il reproche surtout à certaines jeunes femmes d’aller de maison en maison, étant oisives, causeuses et intrigantes : « Déjà quelques- unes, dit-il, se sont détournées pour suivre Satan » (1 Timothée 5.13-15). Ce genre de « visites » peut faire d’énormes dégâts dans une église. Il est vrai que tout enfant de Dieu peut faire le bien, visiter les malades, s’occuper des enfants, encourager les faibles ; mais s’il n’est pas dirigé et animé par le Saint-Esprit, il n’est certainement pas capable d’aider ses frères.

Si tu t’engages dans ce chemin, mets toujours la prière et la Parole de Dieu à la toute première place. Cinq minutes de prière avec quelqu’un font plus de bien que cinq heures de discussion. Et surtout, garde-toi de ce péché le plus satanique qui soit : la médisance. N’apporte pas la malédiction sur la maison que tu visites. Apporte Christ et tout le monde te bénira. Mais n’oublie pas que le Christ n’a pas seulement parlé, il a aussi lavé les pieds de ses disciples.

Le don de berger

À part le bien que peuvent faire tous les croyants en visitant et en entourant ceux qui en ont besoin, il existe aussi un ministère spécifique de berger. Seul le Saint-Esprit peut rendre un homme capable d’accomplir cette tâche et il le fait par le don d’une grâce toute spéciale. Combien l’église a besoin de tels hommes ! Il y a, ou il devrait y avoir, dans chaque église une ou plusieurs personnes qualifiées par le Saint-Esprit, et reconnues comme telles, pour assumer cette responsabilité. Comme dans un troupeau il peut y avoir des brebis malades et de tout petits agneaux à porter, ainsi, dans l’église, il y a souvent des âmes malades et de très jeunes croyants réclamant des soins spéciaux. On se trouve parfois devant des cas exceptionnellement difficiles, des problèmes spirituels, psychologiques et même sociaux, nécessitant l’intervention d’un « spécialiste ». Le vrai berger ou « pasteur » est celui que le Saint-Esprit utilise pour ramener ceux qui s’égarent, protéger les faibles, encourager les défaillants, assurer une nourriture spirituelle suffisante pour chacun et guérir ceux qui sont ébranlés ou sous l’emprise de l’adversaire. Il n’a pas forcément le don de docteur ou de prophète, mais il fait son possible pour que l’église soit instruite et exhortée d’une manière ou d’une autre.

La sanctification du foyer

Lorsque le berger est secondé par une épouse ayant la même vision, leur maison, leur table, leur famille deviennent une fontaine de vie et de bénédiction. D’ailleurs, je ne trouve nulle part dans la Bible de passage interdisant à la femme de faire le travail d’un « berger », pourvu qu’elle ne « prenne pas de l’autorité sur l’homme », et qu’elle ne se mette pas à « enseigner » l’église (1 Timothée 2.12. Noter que le mot grec hêsychia, plus loin dans ce même verset, ne signifie pas « silence », mais « calme », « tranquillité ». Ce même mot se trouve au verset 2 et encore dans 2 Thessaloniciens 3.12). Au contraire, Paul veut que les sœurs aînées « donnent de bonnes instructions... aux jeunes femmes. » Il y a tout un domaine dans la vie féminine que l’homme ne peut pénétrer impunément, mais dans lequel seule une femme peut apporter une aide. L’église a énormément besoin du ministère de femmes consacrées au Seigneur Nous n’avons qu’à penser à l’histoire de Débora pour nous rendre compte de la valeur d’un ministère féminin. Mais cette histoire nous apprend en même temps quelles en sont les limites, car, lorsqu’il s’agissait d’établir un chef sur l’assemblée de Dieu qui soit officiellement reconnu comme tel, elle a refusé de prendre cette position ; elle a obligé un homme, Barak, à prendre cette responsabilité, contre la volonté même de celui-ci. Débora a su garder sa féminité aux yeux de Dieu et des hommes.

La cure d’âme est un travail délicat ; elle exige une très grande patience. Celui qui l’accepte a souvent encore plus besoin d’écouter que de parler. Les âmes sont toutes différentes, leurs problèmes extrêmement divers. Il faut au vrai « pasteur » ou berger une sagesse divinement inspirée (Ce que Paul appelle la « parole de sagesse » dans 1 Corinthiens 12.8) et, par-dessus tout, un amour inépuisable pour ses frères et sœurs. L’une des qualités requises est la disponibilité et cela implique souvent le don de ses loisirs et de sa maison, le sacrifice de tout ce qui est le plus cher. Qui veut être berger ? Paul dit que c’est un ministère à rechercher (1 Timothée 3.1. Lis à ce propos les conseils de Paul dans Actes 20.17-35 et ses ordres dans 1 Timothée 3.1-7 et Tite 1.5-9. À cela, ajoutons les exhortations de Pierre dans 1 Pierre 5.1-4).

12

LE FONCTIONNEMENT ORGANIQUE DES DONS

L’objectif du don

Après sa quatrième « liste de dons », Paul décrit minutieusement le but des dons spirituels (Éphésiens 4.12-16). Ce texte est très important, car il est le plus développé à cet égard et doit servir de clef à l’interprétation de notre sujet. Paul a déjà dit aux Corinthiens que la manifestation de l’Esprit est donnée à chacun pour l’utilité commune (1 Corinthiens 12.7). Il dit ensuite aux Éphésiens (Éphésiens 4.12-16< (versets 12-15, traduction littérale ; verset 16, paraphrase).) que Christ a accordé des dons aux hommes « en vue du perfectionnement (littéralement : en vue de la mise au point !) des saints afin qu’ils aient la force (ou : les moyens) de servir (littéralement : pour « opérer le service »), afin d’édifier (c’est-à-dire, de bâtir) le corps de Christ, jusqu’à ce que nous parvenions tous à l’unité de la foi et de la connaissance (le mot grec signifie « connaissance approfondie ») du Fils de Dieu, à l’état d’homme fait, à une mesure de maturité (correspondant à) la plénitude de Christ » (versets 12-13).

« Tout cela pour que nous ne soyons plus de petits enfants (ou : bébés), agités et poussés dans tous les sens par chaque vent de doctrine (littéralement : d’enseignement) par la ruse des hommes, par une astuce qui cherche à tromper en offrant un « système » (verset 14}.

« Au contraire, c’est pour que nous grandissions dans tous les domaines et par notre attachement à la vérité, étant animés par l’amour, jusqu’à devenir intimes avec celui qui est le chef (grec : la tête) : le Christ. » (verset 15) Paul n’est pas toujours facile à traduire ! Cela est dû en partie à la fertilité de sa pensée, mais aussi à la flexibilité et à la richesse extraordinaires de la langue grecque. Je pense que nous sommes tous parfois un peu déconcertés par la complexité de sa syntaxe.

Continuons la lecture de ce passage magistral. Le dernier verset (verset 16) est en réalité clair et même frappant en grec, mais la traduction en mot à mot laisse à désirer. Aussi ai-je jugé bon d’emprunter ici la paraphrase d’Alfred Kuen qui rend d’une façon admirable le sens de l’original : « Car c’est de la tête que tout le corps tire cohésion et unité, c’est en restant dans sa dépendance que l’ensemble, bien lié et coordonné grâce aux différents muscles et ligaments, forme une structure harmonieuse — à condition que chaque organe remplisse son office suivant la fonction qui lui a été assignée et les forces et capacités qui lui ont été données pour suffire à ses besoins. De cette manière, tous les membres contribuent ensemble, dans un esprit d’amour, à la croissance organique du corps qui s’élève comme un édifice » (verset 16).

Le sens des dons spirituels est absolument évident : l’Esprit de Dieu se sert de chaque croyant de manière à contribuer à l’édification (c’est-à-dire, à la construction) de l’ensemble de l’église. Nous, les croyants, sommes les pierres vivantes qu’il taille et introduit dans la structure de l’édifice spirituel jusqu’à ce que le temple de Dieu soit achevé.

Pour changer d’image, nous sommes les branches, les tiges que la sève fait pousser sur l’arbre de vie. Nous sommes les organes, les membres du corps de Christ, que l’Esprit, selon son intelligence et sa volonté, en architecte de la vie, intègre dans l’organisme vivant de la vraie Église, chacun à sa place, de façon à présenter au monde un portrait convaincant de Christ.

Les ministères cachés

Paul parle dans ce passage, non seulement d’apôtres et de docteurs, mais aussi de « liens » ou « jointures ». En fait, on ne voit pas les artères, ni les ligaments, ni les nerfs quand on regarde un corps ; pourtant, le corps n’existerait pas sans le fonctionnement de ces « dons » discrets. De même, dans l’Église de Christ, il y a un très grand nombre de dons qui passent souvent inaperçus aux yeux des hommes et qui ne sont pas toujours appréciés ; pourtant ils sont indispensables au fonctionnement de l’ensemble. Aux yeux de Dieu, ils ne sont pas cachés ; au jour de Christ, tout œil en saisira l’importance. Je suis absolument convaincu que d’innombrables personnes, qui persévèrent à faire le bien, à exercer l’hospitalité, à intercéder, à visiter les malades, à accomplir les mille tâches humbles et ingrates sans lesquelles toute la communauté s’effondrerait, occuperont dans le royaume de Dieu une place supérieure à celle de bien des prédicateurs et hommes qui exercent un ministère spectaculaire. De cela, je n’ai aucun doute.

« Bien plutôt, dit Paul, les membres du corps qui paraissent être les plus faibles sont nécessaires... Dieu a disposé le corps de manière à donner plus d’honneur à ce qui en manquait, afin qu’il n’y ait pas de division dans le corps, mais que les membres aient également soin les uns des autres » (1 Corinthiens 12.22-26).

Courage, petite sœur !

On est tenté de croire que ceux qui font le plus de bruit et qui occupent la première place dans l’œuvre de Dieu sont les éléments les plus importants ; mais Dieu regarde le cœur, il mesure la croissance de la foi de chacun : la récompense dans la gloire correspondra à l’état de sa foi. Or, la foi agit souvent dans le secret, en silence. Mais en ce jour-là, dit Jésus, « les derniers seront les premiers et les premiers seront les derniers » (Matthieu 20.16). Car la pensée de Dieu n’est pas celle de l’homme.

Si donc tu as parfois l’impression que le peu d’importance que les hommes attachent à ton ministère est à la mesure de sa valeur, prends courage, car Jésus a dit : « Heureux les pauvres, les affligés, les débonnaires, les miséricordieux, ceux qui procurent la paix... ils hériteront la terre, ils verront Dieu... Mais malheur à vous... lorsque les hommes diront du bien de vous, car c’est ainsi qu’agissaient leurs pères à l’égard des faux prophètes ! » (Matthieu 5.3-12 ; Luc 6.20-26).

J’ai connu autrefois un « petit bout de femme » qui, à mon insu, priait pour moi continuellement. Lorsqu’elle est décédée, toute mon œuvre missionnaire a failli être détruite. J’ai appris alors ce qu’elle avait fait pour moi et j’ai pu mesurer la puissance de la prière secrète de cette seule femme. Il a fallu ensuite que je m’empare d’une foi renouvelée des promesses de Dieu pour mon œuvre et pour ma personne.

13

ET LES AUTRES DONS

Si l’apôtre Paul met au second plan les dons que nous allons examiner maintenant, cela ne signifie en aucun cas qu’ils soient inutiles. Au contraire, l’œuvre de Dieu ne peut avancer sans que chaque chrétien s’y engage. Toute contribution animée par le Saint-Esprit est infiniment précieuse et nécessaire.

Nous avons déjà examiné la majorité des dons mentionnés par Paul. À part les cinq « grands » (d’Éphésiens 4.11), nous avons étudié les dons de guérisons, d’œuvres de puissance (« miracles ») et de foi. Reste à voir les dons de service (Romains 12.7) ; d’exhortation, de libéralité, de présidence, de miséricorde (Romains 12.8) ; de sagesse, de connaissance (1 Corinthiens 12.8) ; de discernement des esprits (1  Corinthiens 12.10) ; de parler diverses langues (1 Corinthiens 12.10, 28) ; d’interprétation des langues (1 Corinthiens 12.10, 30) ; les dons de secourir et de gouverner (1 Corinthiens 12.28).

À première vue, ce résumé paraît assez long, mais en fait, plusieurs de ces dons semblent être intimement associés. Par exemple, le don d’exhortation est sans doute une forme de ce que la Bible appelle la « prophétie », car Paul dit que le prophète exhorte les hommes (1 Corinthiens 14.3). Le don de sagesse semble être également très proche des dons de discernement et de prophétie, tout comme le don de connaissance semble être en rapport avec l’enseignement. De même, le don de présider n’est certainement pas loin dans sa conception de celui de gouverner ; ni celui de secourir de celui d’exercer la miséricorde.

Ce que nous venons de dire couvrirait en grande partie les dons déjà examinés ; les seuls dons vraiment « nouveaux » que Paul mentionne ici sont la « présidence » et la « miséricorde » — deux en tout. Il faut tenir compte du fait que le vocabulaire de Paul est précis mais qu’il n’est pas « figé » ; il exprime les variations de sa pensée en modifiant la terminologie dans ses différentes lettres et à différents moments de sa vie.

Le service

« Le don de servir » que Segond traduit par « ministère » (Romains 12.7). Le mot grec diakonia, qui vient du verbe diakonein (« servir ») signifie tout simplement « service ». Ce terme est courant dans le Nouveau Testament. Dans nos versions, le nom diakonos est traduit par « diacre » dans 1 Timothée 3.8, 12, et dans Philippiens 1.1, mais partout ailleurs par « serviteur » ou « ministre » Aujourd’hui on dirait peut-être « employé » ou « ouvrier » ou même « domestique ». Il y a trente-six façons de servir Dieu ! Le « diaconat » biblique n’est pas du tout limité au sens que lui donnent la plupart des églises.

Jésus dit que celui qui désire être grand dans l’église doit être le diakonos de tous (Matthieu 20.26) ! Ceux qui puisaient l’eau aux noces de Cana sont appelés diakonoi (Jean 2.5, 9). Paul dit que le magistrat civil est le dîakonos de Dieu (Romains 13.4) ! Il affirme à plusieurs reprises que lui-même et Barnabas sont diakonoi de Dieu et de l’évangile (2 Corinthiens 3.6 ; 6.4 et ailleurs). Il désigne les faux apôtres comme étant les diakonoi de Satan (2 Corinthiens 11.15). Il appelle également diakonos « notre sœur Phœbé », la « diaconesse » de Romains 16.1. Ces exemples de l’emploi du mot doivent élargir notre conception du « diaconat » ! Il est cependant évident, selon l’épître à Timothée, que l’église apostolique reconnaissait d’une manière « officielle » comme diakonoi ou « serviteurs » ceux qui se consacraient au service de Dieu dans l’église. La nomination des « sept » dans Actes 6.1-6 semble nous en fournir un cas précis (bien que ces hommes ne soient pas appelés spécifiquement « diacres » dans le texte).

Notons que trois conditions s’attachaient au ministère des sept : il fallait qu’ils soient à la fois compétents et remplis du Saint-Esprit et que leur témoignage soit sans reproche (verset 3). Paul, en parlant d’un « don de service », avait presque certainement en vue la vocation de ces hommes, auxquels l’église avait confié le service des tables (versets 2-3) ; mais lui-même reconnaît dans ses épîtres d’autres manières de « rendre service » aux frères. En tout cas, nous avons terriblement besoin d’hommes et de femmes prêts à servir Jésus-Christ dans toutes sortes de capacités selon les directives de l’Esprit.

La libéralité et le secours

Voici encore un don, ou une catégorie de dons, que nous devons examiner : il s’agit du don de « donateur » (Romains 12.8).

Lorsque ma femme et moi étions missionnaires en Afrique du Nord, nous aurions succombé sous les souffrances si Dieu n’avait pas suscité des amis qui aient eu à cœur de nous aider. Dieu nous a « secourus » par toutes sortes de personnes et de bien des manières : c’est par ce moyen que Dieu m’a appris le sens du don de secourir !

Je pense surtout à un couple d’un certain âge qui habitait alors dans un pays lointain. Deux ou trois fois par an, ces chers chrétiens nous ont envoyé des sommes d’argent qui, à l’époque, nous paraissaient énormes. En réalité, elles n’étaient pas si importantes, mais pour nous, elles étaient miraculeuses ; sans cette aide, nous aurions été éliminés du combat spirituel.

Plus tard, j’ai pu rencontrer ce cher couple qui m’a confié le secret de sa libéralité. Le mari était entrepreneur dans la construction. Dans l’église, il n’avait pas de don spirituel spectaculaire, mais lui et sa femme priaient beaucoup. Cela l’a amené à créer une société anonyme ; il s’est fixé un salaire suffisant pour lui et sa famille, puis il a dit à Dieu : « Voilà, cette entreprise est maintenant à toi ! Tout le bénéfice que tu pourras en tirer te reviendra et je ne m’en servirai que pour ton œuvre et selon tes directives ! »

Dieu a béni l’entreprise de cet homme ; et sa femme et lui ont donné fidèlement à Dieu tout le revenu. Au lieu de se faire construire une plus belle maison, ils ont contribué très efficacement à la construction du corps de Christ. Grâce à ce cher couple, un nombre incalculable de personnes a pu entendre l’évangile pour la première fois. Je vois leur exemple comme une illustration parfaite du « don de donateur », du « don de libéralité ».

Un homme qui sert Dieu « à plein temps » et qui dépend uniquement de Dieu pour son soutien matériel connaît inévitablement la vie secrète de beaucoup de personnes. Je connais des chrétiens extraordinairement fidèles envers le Seigneur, qui sacrifient même de leur nécessaire, afin de faire progresser l’œuvre du royaume de Dieu. Il y en a d’autres, hélas ! qui se privent d’une très grande bénédiction parce qu’ils ne connaissent pas la signification de cette parole de Jésus : « Il y a plus de joie à donner qu’à recevoir. » (Actes 20.35) Si l’Église entière prenait au sérieux le Nouveau Testament, il serait possible d’achever l’évangélisation du monde en quelques années. Sais-tu que les communistes impriment quarante fois plus de propagande que les chrétiens ? En deux générations, ils ont pris bien plus de la moitié du monde. Et nous, nous piétinons. Pourquoi ? Parce que l’Église de Christ n’a pas la vision de la conquête : elle accepte le « statu quo ». Au fond, c’est de l’incrédulité.

Les églises qui ont pratiqué l’offrande de la « dîme » sont celles qui ont vu l’expansion de l’œuvre de Dieu la plus spectaculaire de ce siècle. Que Dieu suscite parmi son peuple des hommes et des femmes prêts à donner généreusement à Dieu ! « Vous me trompez quand vous retenez vos. dîmes et vos offrandes, vous êtes frappés de malédiction... Apportez toutes les dîmes au trésor du temple... Mettez-moi ainsi à l’épreuve, dit l’Éternel... Vous verrez si je ne vous ouvre pas les écluses des cieux et si je ne répands pas sur vous la bénédiction sans mesure. » (Malachie 3.8-10 version synodale).

14

L’ENSEIGNEMENT DE PIERRE SUR LES DONS SPIRITUELS

1 Pierre 4.10-11

Voici le quatrième et dernier passage néo-testamentaire concernant les dons spirituels. J’ai modifié la traduction de Louis Segond de manière à faire mieux ressortir le sens du grec original.

« Avant tout, dit l’apôtre Pierre, ayez les uns pour les autres un ardent amour (verset 8)... Comme de bons gérants de la grâce (grec : charis) infiniment variée de Dieu, que chacun mette au service des autres le don (grec : charisma) qu’il a reçu. Si quelqu’un parle, que ce soit comme annonçant les oracles de Dieu ; si quelqu’un sert (grec : diakonein) qu’il le fasse selon les forces que Dieu lui accorde, afin qu’en toutes choses Dieu soit glorifié par Jésus- Christ. »

Deux catégories de dons

Pierre n’ajoute pas au nombre des dons que nous avons étudiés dans les écrits de Paul ; il les voit plutôt tous divisés en deux catégories : les dons de la « parole » et ceux du « service ».

En fait, presque tout ce que nous pouvons communiquer de la grâce de Dieu à nos frères et aux âmes perdues est nécessairement exprimé par le moyen de notre bouche ou de nos mains.

C’est par la parole et par l’action que la vie d’un homme influe sur celle de son prochain. Dieu veut que tout ce potentiel soit utilisé, inspiré, sanctifié par son Esprit. Tu as un don (ou tu devrais en avoir un) : que ce soit lui qui s’en serve et non ta chair. Si ta langue et tes mains lui obéissent, Dieu se glorifiera par ta vie.

Pierre nous met en garde contre le danger de vouloir faire la volonté de Dieu par nos propres forces, simplement par nos capacités naturelles. Il nous rappelle que notre langue comme nos mains appartiennent à Dieu et sont les instruments du Saint-Esprit.

  1. « Si quelqu’un parle, insiste Pierre, que ce soit comme annonçant les oracles de Dieu. » Que ce soit le Saint-Esprit qui parle par ta bouche et non l’esprit d’une sagesse charnelle ; que ta parole s’inspire de la Parole de Dieu et la transmette autour de toi ! Ce ne sont pas tes arguments, tes raisonnements, tes sentiments qui convaincront les hommes ; seule la voix de l’Esprit saint peut apporter la vie et transformer les attitudes de ceux qui t’écoutent.
  2. « Si quelqu’un sert, dit Pierre, qu’il le fasse selon les forces que Dieu lui donne », en comptant sur le Saint-Esprit pour bénir et rendre fructueux son travail et ses actes de charité. Que ce soit l’Es- prit lui-même qui dirige tes mains, qui inspire tes actions avec l’amour et la pureté de Christ.

« Quoique vous fassiez, dit Paul, en parole ou en œuvre, faites tout au nom du Seigneur Jésus »(Colossiens 3.17). Tes mains deviennent ainsi les mains de Jésus-Christ qui rendent service aux autres ; ta langue devient sa langue pour communiquer le salut de Dieu aux nations ; par ton témoignage Dieu les appelle à la repentance et à la foi.

La grâce « multicolore » de Dieu

Comme Paul, Pierre nous enseigne que le don spirituel (charisma) est une expression de la grâce (charis) variée de Dieu (verset 10). L’adjectif grec poïkilos, que Segond traduit « diverses » et que A. Kuen traduit très heureusement « infiniment variée », signifie, littéralement : « multicolore », comme le spectre de la lumière. La grâce de Dieu est trop riche, trop vivante pour que les hommes la réduisent à une formule figée ; son Esprit refuse de se laisser couler dans un moule doctrinal humain. Ce serait comme si tu voulais contenir une explosion de dynamite dans une boîte d’allumettes... Ou bien, d’après l’illustration de Jésus, comme si tu mettais du vin nouveau, non fermenté, dans de vieilles outres : elles seraient complètement détruites. Hélas ! c’est précisément ce que les hommes persistent à vouloir faire ! Nous ne pouvons comprendre la grâce de Dieu que face à la croix de Christ. La grâce, c’est la générosité qui donne — et qui pardonne — au-delà de toute mesure. Le vrai don spirituel est une expression de la générosité de Dieu en Christ. « Exercer un don », sans te sacrifier pour les âmes et sans pardonner à tes frères, serait le comble de l’hypocrisie, car le vrai don est en fait l’expression de l’amour.

Non pour être servi, mais pour servir

Pierre, comme Paul, nous fait comprendre aussi que le don spirituel nous est confié « pour le bien des autres », pour que nous les servions par son moyen. Il nous est accordé pour édifier l’église ou pour convaincre le monde et non pour notre satisfaction personnelle : celle-ci ne provient pas de ce que nous faisons, sinon il y aurait place pour un certain orgueil ; elle vient de notre relation personnelle avec Dieu.

Il serait peut-être utile d’illustrer par un croquis la conception des dons que nous présentent Pierre et Paul.

DIEU
La grâce
infiniment
déversée sur




(charis)
variée de Dieu
les croyants
pour
communiquer
les dons
(charismata)

Les
les dons
(charismata)
pour
communiquer
Christ ◄═══════════════  croyants  ═══════════════► Christ
aux
nations
soit de la parole
soit du service
soit de la parole
soit du service
aux
frères


Explication

La ligne verticale représente l’action de l’Esprit en nous communiquant la grâce, la générosité de Dieu qui donne son Esprit au croyant.

Les lignes horizontales représentent cette même grâce de Dieu traduite en témoignage et en bonnes œuvres par la bouche et les mains du croyant. L’Esprit, par le moyen du croyant, cherche à communiquer cette grâce à autrui, soit aux frères, soit aux âmes perdues. Tout le sens du don spirituel consiste à donner. Comme le croyant reçoit le don de Dieu, ainsi il est tenu de donner à son tour aux autres ce qu’il a reçu. Il ne doit et ne peut le garder pour lui-même. Le croyant est un canal, un fil, une rivière qui transmet la vie ou les forces qu’il a reçues.

Supposer donc qu’il faut chercher un don pour son bien personnel, pour sa propre satisfaction, c’est arrêter l’action du Saint- Esprit à mi-chemin, c’est le priver de son objectif. Dieu nous communique ses grâces par plusieurs moyens : surtout par la prière, par les Écritures et par la communion fraternelle ; alors que le but des dons spirituels consiste à re-transmettre ces bénédictions. Un don spirituel est une capacité, une faculté que l’Esprit développe en nous pour que nous servions d’instrument pour atteindre d’autres personnes avec la Parole de Dieu.

Dans notre croquis, la ligne horizontale représente l’opération d’un « don » : ce n’est autre chose que le débordement de la plénitude de l’Esprit, du « trop-plein » de grâce que le croyant reçoit directement de Dieu par la ligne « verticale ».

*    *    *    *    *

Ainsi, nous complétons notre étude sur les quatre grands passages concernant les dons spirituels (Romains 12.1-8 ; 1 Corinthiens 12.7-11, 28-30 ; Éphésiens 4.7-16 ; 1 Pierre 4.10-11). Il est indéniable que tous présentent un enseignement uni, cohérent et parfaitement clair.






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Ces deux lignes qui se croisent, la verticale et l’horizontale, nous rappellent la croix : la véritable vie spirituelle est celle qui nous maintient en rapport avec Dieu et notre prochain à la fois ; c’est en fait « la croix », la vie crucifiée (L’épître de Pierre est remplie de cette idée. Voir 1 Pierre 1.6-7 ; 2.19-25, 3.8-18 ; 4.1, 13-19).

Mais la croix est en même temps le symbole mathématique de l’addition et signifie l’abondance. Le croyant qui puise sa sagesse et ses forces « directement » dans les ressources infinies de l’Esprit saint, dans l’intimité de Dieu, et qui exerce un véritable don qui lui permet de venir en aide à ses semblables, connaît la vie « + », la vie « extra ». La vie « plus » est la vie « donnée » : comme celle du Fils de l’homme qui est venu, non pour être servi, mais pour servir (Marc 10.45).

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Nous ne pouvons faire mieux que répéter l’enseignement de Pierre selon l’excellente paraphrase d’Alfred Kuen :

« Chacun de vous a reçu, de Dieu, un don particulier : qu’il l’utilise pour le bien des autres et le mette à leur service, comme il convient à de bons gérants de la grâce infiniment variée de Dieu. Avez-vous reçu le don de parler ? Annoncez le message de Dieu selon la Parole et transmettez aux autres ce qui vient de Dieu. Exercez-vous un ministère diaconal ? Accomplissez votre tâche avec la force que Dieu vous donne. Dans tous les cas, agissez de manière à ce que la gloire soit rendue à Dieu par Jésus-Christ, car à lui sont dues la gloire et la puissance aux siècles des siècles. Qu’il en soit ainsi ! » (1 Pierre 4.10-11 Parole vivante).

C’est cela, la plénitude de l’Esprit !

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