Genève, à la Salle de la Réformation, le jeudi 9 mars 1922.
C'est à cause de cela que je souffre ces choses ; je n'en ai point honte, car je connais celui en qui j'ai cru. II Tim. 1.12
Saint Paul dit : « je n'ai pas honte de souffrir pour Lui, car je connais celui en qui j'ai cru ». Il n'écrit pas : « je sais beaucoup de choses de Lui », mais : « Je Le connais, Lui, personnellement ». Il y a une grande différence entre savoir quelque chose de Christ et connaître Christ. Tant que saint Paul a connu Jésus-Christ par ouï-dire, il l'a persécuté, mais dès qu'il l'a connu personnellement, il a été lui-même persécuté pour Christ.
Il y a quelques années, j'étais un Hindou bigot, un ennemi du christianisme ; j'entendais parler de Jésus-Christ et je le haïssais, mais, dès que j'appris à le connaître intimement, je l'aimai. Voilà la différence entre connaître Christ et savoir quelque chose de Lui.
Des amis hindous, aux Indes, m'ont questionné sur les pays dits chrétiens. Eh bien, dans ces pays, on entend beaucoup parler de Jésus-Christ et quelques-uns le connaissent, lui obéissent, l'aiment et le servent. Ceux qui savent quelque chose de Lui, ne savent pas qui est Jésus-Christ. Nous ne pouvons pas lui obéir, l'aimer et le servir, avant de Le connaître. Nous pouvons, au contraire, savoir beaucoup de choses de Jésus-Christ sans Le connaître lui-même.
L'an dernier, voyageant dans les montagnes de l'Himalaya, je vis une plante, un tonique, appelé « solagi ». C'est un tonique des plus utiles et j'en avais beaucoup entendu parler. J'avais vu cette plante bien souvent, sans la reconnaître. Désirant savoir quelle plante c'était, je demandai à un homme : « Qu'est-ce que cette chose noire ? » « C'est du solagi », me dit-il. Ainsi, je le connaissais de réputation, mais je ne pouvais pas le reconnaître. Il y en a beaucoup qui rencontrent les fruits du christianisme sans savoir les reconnaître. Ils en ont entendu parler, mais n'en connaissent pas les effets. C'est très possible. Mais, si nous connaissons vraiment Christ, il ne sera pas nécessaire qu'on nous dise de l'aimer ; nous l'aimerons tout naturellement.
Aux Indes, il arrive que des étudiants disent : « Tel ou tel savant ne croyait pas en Jésus-Christ, comment pourrais-je, moi, croire en Lui ? » je réponds : « Il est possible d'être un savant sur certains sujets, sans avoir su apprécier l'action de Christ ».
A propos d'une peinture magnifique, on demanda à un savant : « Que pensez-vous de ce tableau ? » Il répondit : « C'est une bonne peinture. Elle vaut bien cinq roupies ». Les gens se dirent : « C'est un savant, son jugement doit être juste ! Le tableau ne vaut que cinq roupies ! » Alors, on demanda à un artiste : « Que pensez-vous de cette peinture ? » et il répondit : « Elle est magnifique, splendide ; elle vaut mille roupies ! » Le savant était très instruit dans certaines branches de la science, mais il était incapable d'apprécier les choses de l'art et son jugement n'avait aucune valeur. L'artiste, lui, était un spécialiste. Si nous voulons apprendre quelque chose de la religion, nous devons aller à ceux qui sont des spécialistes en matière religieuse et ont fait des expériences. Nous ne pouvons pas demander à un ingénieur de connaître la chirurgie, ni à un chirurgien de connaître la mécanique. Qu'est-ce que les dogmaticiens et les philosophes savent de la divinité de Jésus-Christ ? Allez auprès des « spécialistes » de la religion, les mystiques, les prophètes, les hommes de prière ; ceux-là savent ce qu'est la religion. Ma religion ne dépend pas de l'opinion de ce savant-ci ou de celui-là, ma religion dépend de Christ lui-même.
Pour connaître Jésus-Christ, nous devons vivre avec lui et c'est seulement par la prière que nous pouvons vivre avec lui. Quand nous vivons avec lui, alors nous savons qui est Jésus-Christ. Quelquefois, à cause du péché, de notre nature pécheresse, nous ne pouvons pas le reconnaître ; à cause du péché, l'atmosphère spirituelle est troublée. Il y a deux ans, lorsque je me rendais en Australie, je fus témoin d'un fait remarquable. Chaque matin, nous recevions un journal. Un jour, arrêt soudain, point de nouvelles ! Je voulus savoir ce qui se passait : « Pourquoi n'y a-t-il point de nouvelles aujourd'hui ? » « Nous ne recevons pas de nouvelles à cause de la tempête. Il y a, des perturbations atmosphériques et les messages de la télégraphie sans fil ne peuvent pas être envoyés. » C'était un trouble d'ordre physique qui nous privait de nouvelles.
La tempête du péché provoque aussi des perturbations dans l'atmosphère spirituelle et nous ne pouvons pas, alors, recevoir les messages de Dieu. Cette tempête doit être arrêtée et c'est Jésus seul qui peut la calmer ; il peut parler avec autorité au vent et à la mer et il y aura un grand calme. Quand tout est calme, nous entendons sa voix, nous sentons sa présence et nous savons qui est Jésus-Christ. Alors nous avons la joie de sa présence et sa présence même dans nos cœurs, c'est le Ciel sur la terre. Il est possible que nous ne le voyions pas des yeux de la chair, mais nous sentirons sa présence. Nous pouvons voir un fruit ; nous pouvons aussi voir notre langue : ce sont deux choses visibles ; mais la douceur du fruit et le sens du goût dans notre langue, nous ne pouvons les voir. Nous pouvons jouir de la douceur du fruit, mais nous ne pouvons dire quelle couleur elle a. Nous pouvons voir la langue, mais nous ne pouvons voir le goût, ni quelle couleur il a !
Ainsi nous pouvons voir notre corps et nous pouvons voir Dieu dans ses œuvres. L'œuvre de ses mains est visible, mais Dieu lui-même dans nos âmes est invisible. Quand nous passons du temps avec Lui dans la prière, nous jouissons de sa présence et nous avons la douceur de cette présence. Ceux qui réalisent cela peuvent être ses témoins et dire « Maintenant, je connais Celui en qui j'ai cru ». Il ne suffit pas d'avoir entendu parler de Lui ; cela ne nous aide en aucune façon ; c'est seulement quand nous Le connaissons, quand nous avons des rapports personnels avec Lui, qu'alors nous trouvons secours spirituel, joie et puissance.
Certaines personnes essaient de trouver la vérité dans la science, dans la lecture d'écrits philosophiques. J'ai rencontré de ces gens-là et leur ai demandé : « Avez-vous trouvé quelque chose ? » « Non ! » Ces gens sont comme l'enfant qui tenait un oignon dans sa main. Il commença à le peler et je lui demandai : « Que fais-tu ? » « J'enlève les pelures pour trouver ce qu'il y a dedans. » Il enleva toutes les pelures une à une et, lorsqu'il eut fini, il ne lui restait plus rien, car l'oignon est composé de pelures successives : il n'y a rien à l'intérieur. La science et les livres sont dans ce monde comme l'oignon. Nous les pelons continuellement, sans rien trouver. Je n'ai rien trouvé dans la philosophie hindoue, mais seulement en Jésus-Christ, que je haïssais autrefois. J'étais aveugle spirituellement, mais en lui j'ai trouvé ce que j'avais cherché si longtemps.
Je n'oublierai jamais ce jour du 16 décembre 1904 où j'avais brûlé la Bible et où mon père me dit : « Pourquoi fais-tu une chose aussi stupide ? » Je répondis : « La religion d'Occident est fausse, nous devons la détruire ». Ainsi je détruisais la Bible, pensant que j'avais fait mon devoir et trois jours après je vis la puissance du Christ vivant. Ce jour-là, j'allais me suicider, parce qu'il n'y avait point de paix dans mon cœur. Je m'éveillai de bonne heure le matin ; c'était en hiver et je pris un bain froid. Alors, je commençai à prier, mais non pas le Christ des chrétiens, car je haïssais les chrétiens. Je priais comme un athée, car j'avais perdu ma foi en Dieu. Je disais : « Si Dieu existe, qu'il me montre le chemin du salut et je Le servirai toute ma vie ; sinon, je me suiciderai ». De trois à quatre heures et demie du matin, je priai sans relâche. J'étais décidé à me suicider à cinq heures, au passage du train, en plaçant ma tête sur les rails, de sorte que je n'avais plus qu'une demi-heure. C'était ma dernière prière : « Si Dieu existe, qu'il me montre le chemin du salut ».
Alors arriva quelque chose que je n'aurais jamais attendu... La chambre se remplit d'une merveilleuse, d'une glorieuse lumière et je vis un homme resplendissant debout devant moi. Je crus que c'était Bouddha, Krishna ou un autre des saints que j'adorais, et j'étais tout prêt à me prosterner devant lui, lorsque, à ma profonde surprise, j'entendis ces mots : « Combien de temps encore me persécuteras-tu ? Je suis mort pour toi ; pour toi j 'ai donné ma vie ». Je ne pouvais pas comprendre, je ne pouvais pas dire un seul mot... alors, je vis les cicatrices du Christ vivant, de ce Christ auquel je pensais comme à un grand homme ayant vécu en Palestine et mort depuis longtemps... et je découvrais qu'il était vivant, le Christ vivant et non pas un Christ mort et disparu ! je n'étais pas préparé à l'adorer ; je vis son visage rayonnant d'amour. Bien que j'eusse brûlé la Bible deux jours auparavant, il n'était pas irrité. Je fus transformé, je connus là le Christ vivant, le Sauveur du monde et mon cœur fut rempli d'une paix et d'une joie que je ne puis décrire. Quand je me relevai, il avait disparu. J'allai tout dire à mon père qui ne put pas le croire. « Avant-hier tu brûlais la Bible ! Comment se peut-il que tu sois maintenant un chrétien ? » « Parce que j'ai vu Sa puissance. Il est le Christ vivant ! »
Tandis que l'hindouisme et le bouddhisme ne m'avaient rien donné, il m'a donné cette paix que le monde ne peut ôter. S'Il n'était pas le Christ vivant, je ne prêcherais pas l'Évangile. Ce n'est pas en imagination que je l'ai vu puisque, auparavant, je le haïssais et ne l'adorais pas. Si ç'avait été Bouddha, on pourrait dire que c'était un effet de mon imagination, car j'avais coutume de l'adorer. Ce n'était pas un rêve : quand on sort d'un bain froid, on ne rêve pas ! C'était une réalité, le Christ vivant. Il peut changer un ennemi de Christ en un prédicateur de l'Évangile. Il m'a donné sa paix, non pas seulement pour quelques jours, mais pendant seize ans, une paix merveilleuse, que je ne puis pas décrire, mais dont je puis rendre témoignage.
Lorsque je pense aux chrétiens de nom, je suis triste. Ils savent tant de choses sur Jésus-Christ et ils ne Le connaissent pas. S'ils Le connaissaient, ils l'aimeraient et Le suivraient. Il y en a beaucoup qui ne le connaissent que par la théologie ou à un point de vue historique ; ils n'ont pas de temps à passer avec Lui et ils ne Le connaissent pas. C'est pour cela qu'ils se mettent à nier sa divinité. Il leur est impossible de voir la divinité du Christ en Jésus. Demandez à ceux qui ont vécu avec lui qui est Jésus-Christ. Le Christ vivant a changé leur vie d'une façon si merveilleuse que sur la terre ils vivent déjà dans le Ciel. Il leur donne la paix, la vraie paix, parce qu'il est le Prince de la paix. Les hommes ont essayé d'amener la paix dans ce monde et de faire cesser la guerre.
La Ligue des Nations aussi a fait de grands efforts, mais la Ligue des Nations ne peut rien faire tant qu'il n'y a pas une ligue des cœurs et cette ligue n'est possible que si les cœurs se sont donnés à Celui qui est le Maître des cœurs. En Lui seul,nous trouvons une paix véritable. La difficulté, c'est que nous savons ce qui le concerne, mais nous ne Le connaissons pas. Quand nous Le connaîtrons, Il se révélera à nous, nous vivrons en Lui et nous vivrons pour les autres en son nom. Alors, nous verrons sa puissance, même dans les plus grandes difficultés et nous aurons la paix. J'en ai fait moi-même l'expérience.
Dans les montagnes de l'Himalaya, j'ai prêché l'Évangile dans un endroit où aucun missionnaire n'a la permission d'aller. J'étais sur le marché lorsqu'un gendarme m'arrêta et me conduisit devant le Raja. Celui-ci, voyant un Sâdhou, dit au gendarme de me laisser aller ; mais, dès qu'il comprit que j'étais un Sâdhou chrétien, il dit : « C'est bien, mettez-le en prison. Si vous aviez été un Sâdhou hindouiste, je vous aurais donné un palais tout Près d'ici ». Je savais qu'un Sâdhou hindouiste avait vécu dans ce palais ; mais il n'avait pas pu trouver la paix et s'était suicidé en se jetant dans la rivière. Je dis alors au Raja : « Vous m'offririez un palais si j'étais un hindouiste ? Mais l'hindouisme n'a rien pu faire pour moi, tandis que, depuis que je suis chrétien, le christianisme a tout fait pour moi ». Et je compare ce palais avec la prison où je fus conduit. Le Sâdhou hindouiste dans le palais, le Sâdhou chrétien dans la prison... et je rends grâces à Dieu pour cette prison. Je ne voudrais pas habiter un palais et n'avoir pas la paix... Jésus-Christ, le Christ vivant, a changé pour moi la prison en un Ciel sur la terre. Je n'ai pas honte de souffrir pour lui, parce que je connais Celui en qui j'ai cru.
Bien que mes mains et mes pieds fussent liés de chaînes, je possédais une paix si merveilleuse que c'était vraiment le Ciel sur la terre. Christ était avec moi, selon sa promesse : « je suis toujours avec vous » S'il n'avait été qu'un grand homme, il ne pourrait pas être toujours avec nous, il ne pourrait pas m'avoir donné cette paix magnifique ! Il est toujours avec nous et c'est notre faute si nous ne réalisons pas sa présence. Nous ne savons pas passer du temps avec lui, dans la prière, et nous ne comprenons pas qui est Jésus-Christ. Dieu veut nous accorder les bénédictions spirituelles, mais il faut que nous les demandions. Il nous donne toute sorte de bénédictions temporelles sans que nous les demandions, mais pas les grâces spirituelles. Nous ne les obtiendrons qu'en priant.
Dieu a donné à la mère du lait pour nourrir son enfant, mais le lait ne vient dans la bouche de l'enfant que si celui-ci le prend. Ainsi Dieu, notre mère spirituelle, a pour nous du lait spirituel qui ne nous sera accordé que si nous le demandons, si nous le prenons, c'est-à-dire si nous prions. Quand nous prenons ce lait spirituel, alors nous connaissons sa douceur, nous jouissons de la présence de Christ et, comme l'enfant, nous devenons plus forts de jour en jour. Alors aussi, par la prière, nous pouvons surmonter la tentation et vaincre Satan. Tout ce que j'ai trouvé, je l'ai obtenu uniquement par la prière. Nous négligeons la prière et c'est à cause de cela que nous ne comprenons pas ce qu'est Jésus-Christ. Si nous consacrons chaque jour du temps à la prière, Il se révélera à nous et nous saurons qui est Jésus-Christ ; nous l'aimerons et nous nous aimerons les uns les autres.
Aux Indes, on me dit souvent : « Vous appelez les pays d'Europe des pays chrétiens, mais Christ a dit : « Aimez-vous les uns les autres » et ils se sont fait la guerre les uns aux autres. Le christianisme a fait faillite en Europe ! » je réponds : « Je ne suis pas d'accord avec vous. Le christianisme n'a pas fait faillite, mais beaucoup de gens en Europe ont fait faillite quant à la compréhension du christianisme !
Ceux qui connaissent Christ le comprennent et s'aiment les uns les autres. Cette guerre n'est donc pas la faute de Dieu ! » Beaucoup de gens se nourrissent par le cerveau, alors que leur âme meurt de faim. Ils essaient de trouver leur force dans des livres, alors que la force se trouve en Christ seul.
Le monde est comme un océan. S'il est vrai que nous ne pouvons pas vivre sans eau, il est tout aussi vrai que nous ne pouvons pas vivre si nous enfonçons dans l'eau, car dans l'eau il y a la vie, mais il y a aussi la mort. Si nous nous servons de l'eau, nous y trouvons la vie, mais nous trouvons la mort si nous disparaissons dans l'eau. Nous devons nous servir des choses que Dieu nous donne, mais non pas nous y noyer. Lorsque nous nous noyons, nous mourons par suffocation. Beaucoup de gens sont déjà morts par suffocation, faute d'avoir eu la respiration de la prière ; ils sont morts dans leur matérialisme et n'ont pu saisir l'Esprit du Christ. Je n'en suis pas surpris le moins du monde, car ils se meurent d'étouffement. S'ils commencent à vivre avec Jésus-Christ, il se révélera lui-même à eux. Alors, ils le connaîtront tel qu'il est, ils seront ses témoins et lui rendront ce témoignage : « Maintenant, je connais celui en qui j'ai cru ». Que Dieu nous aide à le connaître Lui-même ; il ne suffit pas de savoir quelque chose de Lui.
En terminant, je vous remercie d'être venus et d'avoir écouté si attentivement. C'est très aimable de votre part ; mais il y a une requête que je voudrais vous adresser : de même que vous m'avez écouté avec tant de bienveillance, voulez-vous écouter la voix de Christ ? Vous avez écouté la mienne. Cela ne vous servira pas à grand-chose, à moins que vous ne l'écoutiez, Lui. Prenez le temps de prier dans quelque lieu tranquille. Que le Seigneur vous aide à passer du temps devant lui, afin que vous puissiez entendre Sa voix et jouir de Sa présence.