Les cieux et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront pas.
La parole est la manifestation extérieure de la pensée. C’est un état de l’âme matérialisé par des signes, pour le rendre sensible au dehors. C’est, si l’on veut, l’âme elle-même, toute mobile, active et flexible qu’elle est, figée tout à coup dans un de ses mouvements. Elle fait pour la partie spirituelle de l’homme ce que le statuaire fait pour ses formes et ses attitudes.
Mais la pensée de l’homme est mille fois plus changeante que les formes de son corps et les mouvements dont il peut les animer. Elle se transforme et se diversifie à l’infini, avec les circonstances, les besoins, les degrés de culture et les habitudes des individus et des peuples. Quand ces circonstances ne sont plus les mêmes, la parole, qu’elles avaient animée, n’est plus entendue ; elle perd sa force et son influence. L’homme a marché et l’a laissée. C’est un monument curieux d’une pensée qui n’est plus : c’est une ruine, une momie, une vieille armure, un ornement flétri ; ce n’est plus la vie et l’activité.
Après plusieurs générations, il est bien peu de paroles humaines qui soient encore vivantes au milieu des hommes : après plusieurs siècles, on peut dire qu’il n’en est plus.
Cette proposition est trop importante, et en même temps trop paradoxale, pour n’avoir pas besoin d’être plus amplement développée.
La manifestation de la pensée par la parole a généralement un de ces trois buts : ou de captiver l’imagination par ses formes, ou d’entraîner la volonté, ou d’instruire l’intelligence. Vivante, au moment où elle est proférée, sous l’un ou l’autre de ces trois rapports, elle vieillit bien vite, devient décrépite et surannée, est négligée comme inutile, méprisée comme radoteuse. Elle meurt à jamais ; et des paroles jeunes et vivantes occupent sa place, pour disparaître enfin à leur tour.
Parmi les produits de l’esprit humain, les formes sont ce qui conserve plus longtemps son intérêt et sa vie. Cela vient de ce qu’elles sont un produit pur de l’esprit, et que par conséquent rien n’est plus indépendant qu’elles des circonstances extérieures et des progrès de la science. Et pourtant elles changent et se renouvellent avec le cours des siècles et la marche des générations. Soit l’attrait de la nouveauté, soit des liaisons cachées entre les idées ou les habitudes les plus chères et les produits des beaux-arts, soit toute autre cause, les formes qui ont captivé les hommes ont changé comme les siècles ; et souvent celles qui, dans l’origine, leur avait inspiré le plus d’enthousiasme ont fini par leur inspirer le plus de dégoût. Au style égyptien, en architecture, a succédé le style grec ; à celui-ci le style gothique ; à celui-ci le style de Henri II ; puis celui de Louis XIV, puis le papillotage de Louis XV, puis le style nos jours. Il en est de même dans la peinture. Raphaël et Mignard, les Flamands et le Poussin, Boucher et David, ont eu des admirateurs exclusifs et passionnés. Ils ont fait prévaloir leurs formes de prédilection pendant des générations entières.
Mais, dans les arts de la parole, la forme étant plus étroitement combinée avec le fond de la vie intellectuelle, c’est-à-dire avec les opinions, les sentiments et les connaissances, elle change beaucoup plus vite ; ou, pour mieux dire, elle est beaucoup plus incapable de faire durer un ouvrage qui n’a qu’elle pour soutien. Dans les autres arts, la matière n’est rien, la forme est tout. Elle produit son effet instantanément, quel que soit le fond qu’elle couvre. La jouissance est intuitive et non discursive. Dans les arts de la parole, avant de contempler la forme, il faut dévorer la matière. Elle est surannée, triviale, fausse même ; n’importe ! vous ne pourrez arriver à la forme qui l’embellit qu’après l’avoir traversée, malgré le dégoût qu’elle vous inspire. Quoi de plus gracieux que les formes du Télémaque ? quoi de plus ennuyeux, de plus insupportable et de plus faux que les rêveries dont elles sont l’enveloppe ? Les formes de Platon sont plus gracieuses encore, mais le fond les emporte ; et qui les connaît, hormis les savants ? — Les formes elles-mêmes vieillissent indépendamment du fond. La forme épique a disparu, et rien n’a pu la ressusciter de nos jours. Les formes dramatiques qui transportaient les Grecs d’admiration causeraient aux spectateurs de nos jours un suprême ennui. Les essais tentés pour remettre en scène les pièces déjà vieillies n’auront jamais qu’un médiocre succès. Les auditeurs ne sont plus les mêmes, et les formes qui plaisaient aux uns inspireraient aux autres un insurmontable dégoût. Pour éprouver cet effet, il suffit de changer de ville ou seulement de quartier.
Mais, quand la parole doit agir sur les masses et remuer les volontés, elle vieillit bien plus vite encore. Cette puissance magique, si bienfaisante ou si redoutable, qui triomphe des préjugés, des intérêts et des passions, qui exalte les sentiments et réunit toutes les volontés en une seule, tient à tant de circonstances diverses, à tant d’associations fugitives, qu’elle n’a qu’un moment pour elle. Le moment passé, le charme cesse ; et la parole qui agitait les peuples, changeait la forme des empires et faisait couler des fleuves de sang, demeure sans force et sans vie. Les oreilles ne veulent plus l’entendre. C’est un monument pour l’antiquaire, à côté de la médaille qui constate les prodiges qu’elle opéra. Souvent une génération suffit pour amener un tel changement. Et de nos jours même, la Marseillaise, qui naguère valait des armées, n’est pas moins désenchantée que le drap rouge des croisés.
Mais c’est surtout lorsque la parole est destinée à enseigner qu’elle vieillit vite. L’intelligence humaine est dans un mouvement et un progrès continuels. Les découvertes faites par le génie trouvent à l’instant un nombre considérable d’hommes éclairés qui sont capables de les apprécier et de les comprendre. Elles sont débattues, soumises au creuset du raisonnement et de l’expérience, jugées par toutes sortes d’esprits, modifiées, étendues, limitées et finalement reçues dans le domaine utile de l’esprit humain, ou vouées à un oubli mérité. Si le temps en fait justice, il emporte avec lui la parole qui les enseigna. Si le temps les justifie et les conserve, il les développe et les perfectionne. C’est un germe qui s’étend sans mesure. Bientôt la découverte qui fut un pas énorme dans la science est comprise dans ses premiers éléments ; et la parole, le livre, qui le premier la révéla au monde, n’enseigne plus rien que les erreurs dont la mêlait encore celui qui eut le bonheur de la rencontrer. Il n’est donc point de livre destiné à l’enseignement, même parmi les plus originaux, qui ne soit dépassé et ne devienne inutile après une ou deux générations. Le sujet en devient trivial, le fond insuffisant, la forme surannée ; et le tout est mêlé d’une multitude de détails que l’on peut à peine comprendre, parce qu’ils se rapportent à des usages qui ne sont plus. Utile pour indiquer à l’archéologue les diverses phases de la science, il ne saurait plus servir à enseigner la science elle-même. Peut-être est-il vrai de dire que ce qui retarde le plus la dissémination des connaissances scientifiques, philosophiques et religieuses en France, c’est précisément l’habitude de les puiser dans de vieux livres.
Qu’elle soit uniquement destinée à plaire ; qu’elle doive entraîner la volonté, ou qu’elle se borne à instruire, la parole d’un homme n’est donc jamais longtemps puissante, active et vivante parmi les hommes. Elle passe. Bientôt il n’en reste qu’un écho ; bientôt elle laisse à peine un souvenir.
Les paroles de Jésus sont une exception à cette destinée commune de toutes les paroles sorties de la bouche des hommes. Après dix-huit siècles, leur forme est encore ce qu’il y a de plus populaire ; leur puissance sur les âmes ne s’est point encore affaiblie ; et l’homme le plus éclairé, en y appliquant son intelligence et son cœur, y trouve tous les jours de quoi étendre et perfectionner l’une et l’autre.
La popularité des paroles de Jésus est une chose trop claire pour que je doive m’arrêter longtemps à l’établir. Dans leur forme, elles ne réalisent pas sans doute ce que les rhéteurs entendent par le beau ; mais que de belles choses ont passé, tandis que celles-là demeurent ! Il y a du juif, il y a du local, il y a de l’occasionnel, autant et plus que dans aucun autre livre de la même époque ou d’une époque encore plus récente. Le peuple n’entend plus les autres et ne s’en soucie guère ; il entend parfaitement celui-là. C’est son livre, et il s’en soucie. Quand on ne le violente pas, quand on ne le fausse pas, il y revient sans cesse, avec un intérêt nouveau. Il y a de tels rapports entre les formes de cet enseignement et ses habitudes de pensée, entre le fond et tout son être moral, qu’il comprend, qu’il est intéressé, captivé, saisi, comme si les paroles lui arrivaient toutes vivantes de la bouche du Sauveur, dans une circonstance où lui-même fût intéressé. Il y a du juif, il y a de la Palestine, il y a du siècle de Tibère, mais tellement en sous-ordre, et l’humain pur, immuable, éternel, y est dans une telle prépondérance, qu’il suffit d’être homme pour comprendre ce que le Sauveur voulut enseigner, et pour être obligé de se dire : ceci me regarde ; cette parole est faite pour moi. Peut-être dira-t-on que le livre, ayant eu le singulier bonheur de fournir les bases d’une religion nouvelle et de devenir un livre sacré, a dû répandre lui-même les idées et former les habitudes qui l’ont ensuite rendu populaire. Les prêtres du christianisme l’ayant partout prôné l’ayant introduit dans les écoles, expliqué dans les chaires, défendu dans de nombreux écrits, il a dû pénétrer fort avant dans les pensées du peuple et se confondre, en quelque sorte, avec les premiers éléments de son intelligence. Mais pourquoi d’autres livres n’ont-ils pas eu le même bonheur ? pourquoi, reçus d’abord avec enthousiasme, ont-ils été si promptement négligés ? pourquoi la beauté des formes, le charme du style, l’intérêt des événements n’ont-ils pas pu les sauver ? Vous voulez m’expliquer la popularité de ce livre par les effets colossaux de cette popularité même : c’est une difficulté de plus que vous avez à combattre ; c’est une explication de plus qu’il faut me donner. S’il fallait exposer, à cet égard, toute ma pensée, je dirais que presque toujours, loin que les prêtres nous aident à comprendre le livre, c’est le livre qui sert à nous faire comprendre les prêtres. Et cela est vrai surtout des paroles de Jésus, que j’ai particulièrement en vue dans cet écrit. Ce sont elles que le peuple ne se lasse point d’entendre et de relire, parce que la forme en est pour lui toujours nouvelle et toujours vivante.
C’est une des raisons, mais non pas la seule, qui donne à ces paroles une grande puissance sur les âmes.
La puissance que la parole de Jésus exerce encore sur les âmes, après dix-huit siècles écoulés, ne saurait être contestée. Elle s’est parfois affaiblie, jamais éteinte ; et dans le temps même où des circonstances extraordinaires semblaient ravir les masses à son action, cette action n’était que plus puissante sur ceux qui s’y montraient encore soumis. Mais bientôt les idées et les paroles, qui, pour un temps, avaient entraîné les hommes, se désenchantent et se montrent dans toute leur vanité ; la parole de Jésus se relève ; le respect l’entoure en attendant l’obéissance, et l’obéissance elle-même gagne tous les jours du terrain. — La puissance de cette parole dans les annales du genre humain, est assurément un des phénomènes les plus étranges qu’elles présentent. Et je ne parle point ici de ces sacrifices éclatants inspirés par une conviction forte, de ces martyres encourus avec joie, de cet oubli de la vie et des affections qui sont plus qu’elle, pour la confesser ou pour la répandre. Je ne parle point de cette métamorphose bienfaisante qu’elle a opérée sur les mœurs, sur les lois, sur les habitudes, sur les lumières, sur les arts, sur la civilisation tout entière des peuples soumis à son empire. Je parle de cette puissance plus silencieuse et non moins extraordinaire qu’elle exerce sur les parties les plus intimes de l’âme ; de cette métamorphose non moins étonnante qu’elle opère sans éclat sur les affections, sur les espérances, sur la direction de la vie, en un mot sur l’homme moral tout entier. Jésus appelle cette métamorphose intérieure, accomplie par la puissance de sa parole, une nouvelle naissance. Et ce n’est pas trop dire ; car c’est passer dans un monde nouveau ; c’est devenir un être d’une nouvelle nature ; c’est abandonner la vie animale, qui nous attire et qui nous presse, pour la vie de l’esprit, qui se cache dans le fond de la conscience ; la vie de l’individu pour la vie de l’humanité ; le contentement de soi-même pour le sentiment de sa faiblesse ; la terre pour le ciel, et le plaisir pour la vertu. Mais, si l’on songe à tout ce qui, dans l’homme, s’oppose à un pareil triomphe, aux passions et aux erreurs du dedans, aux tentations et aux séductions du dehors ; quand on songe que la nature entière se soulève contre cette parole et lui fait sans relâche une guerre mortelle, il faut être étonné non qu’elle ne triomphe pas toujours, mais qu’elle triomphe quelquefois. La vie de l’esprit, la vie qu’on peut appeler céleste ; cette vie, que la parole de Jésus inspire, a quelque chose de si extraordinaire, dans une nature terrestre et mortelle, qu’on n’a pas su comment l’expliquer, même par cette parole, et qu’on en a fait quelque chose de surnaturel et de miraculeux. Au moins le surnaturel et le miraculeux se trouvent-ils toujours à l’origine de cette parole elle-même.
Mais, s’il est un point de vue sous lequel la durée des paroles de Jésus, comme paroles vivantes et toujours nouvelles, doive nous paraître étonnante, c’est surtout celui du fond même de l’enseignement. Les questions les plus hautes de la philosophie et de la religion, qui est elle-même la plus haute philosophie, y sont abordées et résolues avec une simplicité, avec une clarté, avec une profondeur qui sont tous les jours plus étonnantes et plus inexplicables. Le spiritualisme le plus pur et le moins mystique, la morale la plus élevée et la plus populaire, la religion la plus complète et la moins embarrassée, tout s’y trouve pour l’instruction des plus simples comme pour l’admiration des savants. Quand elle a paru dans le monde, cette doctrine était infiniment supérieure à tout ce que le monde avait pu créer et recevoir avant elle. Le pur et le complet s’y trouvaient pour la première fois réunis. Le monde en comprit ce qui était à sa portée : il en fut éclairé, dirigé et vivifié. Depuis, l’humanité a fait des conquêtes immenses. Le champ de la philosophie et celui de la nature visible furent exploités, fouillés, retournés en mille sens divers, jusqu’à une incroyable profondeur. Les méditations les plus fortes et les plus heureuses des génies les plus puissants ont été laissées en arrière, dans ce mouvement rapide et toujours nouveau. Les systèmes les plus brillants ont été démolis. A peine en est-il resté quelques matériaux employés à bâtir d’autres systèmes, qui furent démolis à leur tour. Les paroles de Jésus, si vulgaires en apparence et si peu profondes, ont toujours demeuré comme vraies. A mesure qu’on s’est enfoncé plus avant, qu’on a creusé plus bas dans les abîmes de la pensée, pour y chercher la nature, la destination, les devoirs et les vrais intérêts de l’homme, loin de laisser l’Évangile à la superficie, on l’a retrouvé dans ces régions reculées plein de force et de vie, et les plus sages ou les moins passionnés ont été forcés de reconnaître qu’il avait pénétré plus avant encore qu’eux. Un système de philosophie avait prévalu dans le siècle dernier, démolissant avec une ardeur incroyable. Il se trouve que l’Évangile avait démoli encore plus que lui. Un autre lui succède, reconstruisant l’homme et la religion sur une base qu’il croit nouvelle. Il se trouve que l’Évangile a proclamé les mêmes idées, sur l’homme, sur Dieu, sur la religion et sur la moralité, dix-huit siècles avant lui. C’est là le dernier état des choses. C’est là le triomphe le plus récent et le moins contesté. De tous les faits que j’ai posés dans le cours de ces réflexions rapides, c’est sans doute celui que chacun sent le mieux aujourd’hui, et les adeptes de la vieille école, qui se croient en avant de leur siècle et qui sont réellement en arrière, seraient probablement les seuls à me le disputer, si le titre même de cet opuscule n’en détournait pas leurs regards.
Voilà le privilège de la parole de Jésus. Je dis que, dans les annales de la pensée humaine, elle est seule à le posséder. Je ne pense pas que quelqu’un songe maintenant à contester cette assertion.
Je ne connais qu’une parole à laquelle on pût songer, pour l’opposer à la parole de Jésus. C’est celle de Mahomet. Mais la moindre réflexion suffit pour renverser ce fantôme.
La parole de Mahomet est arabe ; elle n’est point humaine. La parole de Mahomet a perdu sa puissance sur les hommes. Elle possède des sectateurs nominaux, par cette continuité d’action qui ne s’éteint dans les peuples que par une révolution violente ; mais de vie, de puissance sur les âmes, elle n’en a plus. Tant qu’elle en a possédé, elle a fait trembler le monde. Maintenant elle en est la risée. Elle agit comme un obstacle extérieur, comme une masse de plomb sur la poitrine, et non comme un principe de force, de développement et de vie. Elle est morte, mais elle tue.
Comme enseignement, est-il rien de plus étroit et de plus pauvre, de plus confus et de plus erroné, de plus stationnaire et de plus vieilli ? non seulement l’Alcoran n’apprend plus rien à ses sectateurs, mais il les empêche d’apprendre ; non seulement il est lui-même infiniment en arrière de tous les progrès de l’humanité, mais il est comme un mur d’airain, contre lequel il faut venir se casser la tête sans pouvoir rien reconnaître au delà. Omar, c’est le mahométisme personnifié.
Mais je m’arrête longtemps à réfuter une objection que peut-être on ne m’eût point faite.
Seul, le phénomène de la durée vivante de la parole de Jésus serait donc quelque chose de singulier et d’inexplicable. C’est un phénomène isolé dans les annales du genre humain. C’est à la fois le plus bienfaisant et le plus étonnant de tous. Il devient bien plus inexplicable encore quand on songe qu’il fut prédit et annoncé d’avance. Et dans quelles circonstances encore ! dans un pays ignorant et ignoré ; du sein de l’abandon et du mépris dans ce pays même ; en parlant à des pêcheurs et des péagers, à des mendiants et à des femmes, sous la perspective d’une mort honteuse et prochaine ! Le fait de la prédiction n’est pas douteux ; l’événement était contraire à toutes les prévisions raisonnables et à l’expérience de tous les siècles ; l’accomplissement, nous le voyons.
L’accomplissement de cette prédiction jusqu’à ce jour est le garant de son accomplissement ultérieur. Pourquoi la popularité, la puissance et la profondeur de cette parole, qui jusqu’à ce jour se sont maintenues avec un nouvel éclat, à travers toutes les révolutions des circonstances extérieures et de la pensée humaine, se démentiraient-elles dans les âges qui sont à venir ? Tout n’annonce-t-il pas, au contraire, une sorte de renouvellement et un retour d’énergie à cette parole éternelle ? Elle prend à la fois une action plus puissante et plus étendue. Elle pénètre plus avant dans les âmes qui l’ont reçue ; elle gagne des âmes nouvelles. Sans exagération, sans enthousiasme, par le seul aspect actuel des choses humaines, on peut prévoir le moment où elle couvrira, éclairera, embellira toute la face de la terre. Et cette prédiction faite aujourd’hui ne sera point un miracle.
Mais la prédiction de Jésus ne s’arrête pas là. Elle annonce encore une durée infinie, après que les cieux et la terre auront passé. L’accomplissement certain de la prédiction, dans l’étendue que nous avons sous les yeux, nous est encore un garant de son accomplissement dans cette nouvelle et immense sphère. Et cette parole qui doit servir à nous diriger dans notre existence transitoire, doit encore servir à nous juger et à nous classer dans notre existence éternelle. Elle contient les conditions et les bases non seulement de ce que nous sommes, mais encore de tout ce que nous pouvons devenir.