l’âme — O notre Père ! qui es dans les cieux, nous, tes enfants relégués sur la terre, bannis de ta présence, en proie à la douleur, nous crions à toi. Entre toi et nous, quel abîme ! Qui nous le fera franchir, qui nous ramènera sous le toit paternel, qui nous conduira à toi ?
Dieu — Le fils honore le père, et le serviteur son seigneur. Si donc je suis votre Père, où est l’honneur qui m’appartient ? Et si je suis votre Seigneur, où est la crainte qu’on a de moi ? C’est à cause de vous et par vous que mon nom est journellement blasphémé (Malachie 1.6 ; Ésaïe 52.5).
premier soupir de l’âme — O notre Père, nous ne pouvons nier notre péché, nous t’avouons notre faute. Sois miséricordieux et n’entre point en compte avec nous. Fais plutôt pour ta grâce, qu’à l’avenir nous ne vivions plus que pour sanctifier ton nom. Que toutes nos pensées, nos discours, nos actions, nos projets et nos entreprises ne tendent plus qu’à l’avancement de ta gloire ! Que désormais notre nom et notre honneur s’effacent devant l’éclat de ton nom adorable, devant la splendeur de ta souveraine majesté ! Donne-nous un cœur d’enfant, pour que nous t’aimions, te craignions et t’honorions, comme il convient à des enfants d’aimer, de craindre et d’honorer leur père.
Dieu — Comment mon nom serait-il sanctifié en vous ? vos cœurs sont enclins au mal, vos pensées sont captives sous l’empire du péché. On ne peut chanter mes cantiques dans une terre étrangère (Psaumes 137.4).
second soupir de l’âme — O notre Père, nous reconnaissons avec douleur que nos membres sont enclins au péché. Le monde, la chair, le diable cherchent à nous subjuguer et à te ravir la souveraineté, la gloire et le nom qui t’appartiennent. Aussi nous levons vers toi nos mains suppliantes. Seigneur, affranchis-nous de notre misère, brise les chaînes de notre péché, rends-nous véritablement pieux. Oh ! que ton règne vienne, que ton empire s’établisse dans nos cœurs, afin que tu puisses mettre en nous ton bon plaisir. Et que tout notre être, toutes les forces de notre corps et toutes les facultés de notre âme te soient soumis dans une parfaite obéissance.
Dieu — Je détruis qui je veux sauver, je mène par la mort à la vie. J’appauvris, je rejette, j’anéantis toute âme à qui j’ai destiné les richesses de ma grâce, ma gloire et ma félicité. Mais vous vous retirez en arrière et ne voulez point vous laisser conduire par ma main. Comment donc puis-je vous secourir, et que dois-je faire de plus que je ne vous ai fait (Psaumes 78.1-72 ; Ésaïe 5.1-30) ?
troisième soupir de l’âme — Nous gémissons de notre résistance à ta main salutaire. Aie pitié, ô notre Père, et nous dispose à souffrir que ta volonté se fasse. Ne t’arrête point à nos cris de douleurs : poursuis ton œuvre en nous ; châtie, brûle, coupe, déchire, pourvu qu’ainsi tes desseins s’accomplissent et non les nôtres. Non, Seigneur, ne permets pas que ce soient nos vues qui triomphent, que ce soient nos projets qui réussissent. Car nous savons que notre volonté est sans cesse opposée à la tienne, et pourtant la tienne seule est salutaire, lors même qu’elle nous paraît hostile ; la nôtre est pernicieuse, lors même qu’elle nous semble bonne.
Dieu — Ce n’est pas la première fois qu’on m’a fait beau semblant de la bouche, tandis que le cœur était éloigné de moi. Quand j’écoutais leurs cris pour faire mon œuvre en eux, ils se retiraient en arrière et par leur infidélité trompaient les intentions de ma miséricorde. Après avoir bien commencé et m’avoir engagé par leurs supplications à leur tendre une main secourable, ils se renversaient comme un arc qui trompe, ils retombaient dans le péché et me déshonoraient de plus belle (Psaumes 78.57).
quatrième soupir de l’âme — Hélas ! qui sommes-nous, ô notre Père, pour subsister devant toi, si tu ne nous consoles et ne nous fortifies ? Que la vue de notre faiblesse émeuve tes entrailles paternelles ! Saisis-nous par la main, accomplis ta volonté, établis ton règne en nous, à ta gloire et à la louange de ton nom. Mais comme nous sommes sans force, fortifie nous, ô notre Père, par ta bonne parole, donne-nous aujourd’hui notre pain quotidien, implante dans nos cœurs ton cher Fils Jésus-Christ, qui est le véritable pain du ciel, et qu’ainsi pleins de sa force, nous puissions endurer la crucifixion du vieil homme et l’accomplissement de la volonté. Accorde cette même grâce à toute la chrétienté, et envoie-nous des prêtres et des pasteurs fidèles, qui nous prêchent Jésus-Christ et son saint Évangile, et non point de vaines fables.
Dieu — Il ne convient pas de jeter aux chiens les choses saintes et le pain des enfants (Matthieu 7.6 ; 15.26). Vous péchez journellement ; et quand ma parole vous est donnée en abondance, vous la méprisez. Plus on vous prêche, moins vous obéissez.
cinquième soupir de l’âme — Aie compassion, ô notre Père, et que notre ingratitude ne t’empêche pas de nous donner le pain dont nous avons besoin. Nous sommes saisis de douleur à la pensée que nous ne satisfaisons pas à ta sainte parole ; mais nous te prions d’user de patience envers tes pauvres enfants, de nous quitter nos dettes et de ne point entrer en jugement avec nous, car nul homme vivant ne sera justifié devant toi. Considère la promesse que tu as faite à ceux qui quitteront les dettes à leurs débiteurs. Car quoique nous sachions que notre pardon, en lui-même, ne nous confère aucune espèce de droit, nous savons aussi que ta parole est vérité, et qu’à ceux qui pardonnent tu as promis ta grâce. C’est à ta parole que nous en appelions.
Dieu — Souvent je vous pardonne et je vous délivre, mais vous ne demeurez point dans la grâce que je vous octroie (Psaumes 78.8). Vous êtes d’une petite foi ; vous ne pouvez veiller une heure avec moi, sans cesse vous tombez dans la tentation (Matthieu 26.41).
sixième soupir de l’âme — Nous sommes faibles et malades, ô notre Père, le monde nous jette ses appas, la chair nous sollicite par ses convoitises, grandes et nombreuses sont les tentations qui nous environnent. Père miséricordieux, daigne nous soutenir, ne nous laisse point tomber dans la tentation, préserve-nous de pécher. Fais par ta grâce que nous restions debout et que nous combattions vaillamment jusqu’à la fin, car sans ta grâce et ton secours nous ne pouvons rien faire.
Dieu — Je suis juste et mes jugements sont droits : comment laisserais-je le péché impuni (Psaumes 11.7) ? Je ne puis vous épargner le mal. S’il en résulte des tentations, sachez que ce sont vos péchés qui m’obligent de punir et de réprimer.
septième soupir de l’âme — Si c’est le mal qui fait naître la tentation, délivre-nous donc du mal, ô notre Père, afin qu’étant affranchis, selon ta sainte volonté, de tout péché et de toute misère, nous te soyons un royaume soumis, pour te louer, te glorifier et te sanctifier éternellement. Amen. Et puisque c’est toi qui nous a appris et commandé de te prier ainsi avec promesse de nous exaucer, nous espérons, ô notre bon Père, et nous sommes certains que tu nous donneras dans ta grâce et ta miséricorde les choses que nous te demandons, à la gloire de ton nom et en l’honneur de ta vérité.
Finalement, quelqu’un pourrait dire : « Que faire, si je ne puis croire que je serai exaucé ? » Je réponds qu’il faut imiter l’exemple du père de ce démoniaque dont il est question dans l’Évangile (Marc 9.14-27). Jésus lui ayant dit : Peux-tu croire ? Toutes choses sont possibles au croyant ; il s’écria avec larmes : Je crois, Seigneur ! aide-moi dans mon incrédulité.