Genève, Salle de la Réformation, le dimanche 12 mars 1922, à 3 h. de l'après-midi.
Ce qui était dès le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché, concernant la Parole de vie... nous l'avons vu et nous en rendons témoignage. 1 Jean 1.1 et 2
Saint Jean a vécu avec notre Seigneur pendant plus de trois ans, aussi ce qu'il a écrit n'est pas une fiction, une nouvelle, mais ce sont des faits. C'est une inspiration qui a poussé les apôtres à écrire, et cette inspiration ne les a point trompés. Ils n'ont pas été avec le Seigneur pendant quelques jours ou quelques semaines, mais pendant trois ans entiers. Si, durant ces trois ans, ils avaient constaté chez le Maître un défaut, un péché quelconque, ils l'auraient dit. Ils vivaient tout le temps avec lui, jour et nuit. Ils l'observaient sans cesse et ils ont pu dire : « Nous l'avons contemplé, nous l'avons vu, nous l'avons entendu », puis : « Nous lui rendons témoignage et nous vous annonçons la vie éternelle ».
Très souvent je répète que je ne suis pas dans ce pays pour y prêcher, mais pour rendre témoignage de ce que le Seigneur a fait pour moi, de ce qu'Il a fait, non pas depuis quelques jours ou quelques mois, mais depuis seize ans. Il est la Parole de Vie, Il est mon Sauveur, à moi personnellement ; et le Sauveur du monde. Le salut ne s'obtient pas par la science, mais par la foi, en écoutant et en acceptant la Parole de Dieu.
Lorsqu'un homme a soif, qu'il soit savant ou ignorant, jeune ou vieux, ce qu'il demande pour apaiser sa soif, ce n'est pas de la science, c'est de l'eau ; et, avant de boire cette eau, il n'a nul besoin de savoir qu'elle contient de l'oxygène et de l'hydrogène. S'il attendait, pour boire son eau, de savoir ce que sont l'oxygène et l'hydrogène, il pourrait bien mourir de soif. Depuis les temps les plus reculés, les hommes ont étanché leur soif avec de l'eau, sans se soucier d'en connaître la composition. Nous de même, nous n'avons pas besoin d'être très instruits de ce qui concerne le dogme de la Trinité ou d'autres doctrines profondes pour recevoir l'eau vive que Jésus-Christ veut nous donner et qui peut satisfaire notre âme.
Beaucoup de gens ont des doutes, des difficultés spirituelles ; ils ne peuvent pas croire tout simplement que Jésus-Christ seul est le Sauveur. J'appelle ces doutes spirituels la souffrance de l'âme. A cause du péché et de l'attrait du péché, nos relations avec Dieu sont rompues et nous souffrons. La chose essentielle, c'est d'être en règle avec Dieu ; alors toutes les souffrances s'enfuiront. Les rationalistes et les intellectualistes disent : « Commencez par expliquer toutes les difficultés, alors nos doutes disparaîtront et nous pourrons accepter votre enseignement... » Il y a cinq ans, je me trouvais avec un docteur de mes amis, lorsque nous aperçûmes un pauvre homme, un simple villageois, qui pleurait à chaudes larmes. Le docteur lui demanda : « Qu'y a-t-il donc ? Pourquoi pleures-tu ainsi ? » « Je suis tombé et me suis cassé le bras cela me fait mal. » « Ne crains rien, dit le docteur dans une semaine tu seras guéri, et la douleur va disparaître dès que J'aurai remis l'os en place. » « Avant de le remettre, dit l'homme, commence par m'enlever la douleur ; après, tu feras tout ce que tu voudras. » « Insensé, comment le pourrais-je ? C'est l'os brisé qui cause la douleur. Quand il sera remis à sa place, tu n'auras plus mal. » On trouve beaucoup d'insensés pareils à cet homme. Nos doutes spirituels, la souffrance de notre âme sont causés par le péché ; enlevez le péché, il n'y aura plus de souffrance. Mettez-vous en règle avec Dieu par la repentance et la foi en Lui, alors la souffrance et le doute disparaîtront.
C'est l'expérience de beaucoup qui se sont repentis et ont trouvé la paix en Dieu. Et dès que le doute a disparu de leurs cœurs, ils sont dans une plénitude de joie et de paix. J'ai fait cette expérience. J'avais tant de doutes, j'étais misérable et sans repos, mais, dès que j'allai à Jésus-Christ, tous mes doutes disparurent. Et je rends témoignage à Celui qui a fait de si grandes choses pour moi.
Les prédicateurs de morale assurent qu'ils n'ont nul besoin d'un Sauveur. Ils disent : « Faites de bonnes œuvres, vous serez bons ». Mais il se peut que nous soyons si pécheurs et si faibles que nous ne puissions pas nous sauver nous-mêmes par nos propres efforts. Le pécheur est comme un poisson dans un filet : Le poisson peut regarder entre les mailles et se croire libre, mais sitôt qu'il commence à se débattre, il réalise qu'il n'est pas libre du tout, qu'il lui est impossible de sortir, car il est pris dans le filet. Les prêcheurs de morale peuvent voir assez loin par les yeux de leur idéal, mais dès qu'ils commencent à lutter, ils s'aperçoivent qu'ils sont pris dans l'esclavage de leur péché. Nous pouvons très bien prendre la résolution de ne plus pécher désormais, mais cela ne nous sauve pas du filet. Sans doute, le filet n'est pas la mort, mais il est l'instrument qui nous mène à la mort. La vie du poisson est dans l'eau ; quand il est dans le filet, il est séparé de l'eau. Le filet n'est pas lui-même la mort, mais le filet sépare le poisson de l'eau et c'est cette séparation qui est sa mort. Quand nous péchons, nous ne mourons pas tout de suite, mais le péché nous sépare de l'amour de Dieu et ainsi nous mourons. Jésus-Christ est venu pour nous affranchir de l'esclavage ou du filet, et quand nous sommes libérés, vivant dans l'océan de Son amour, nous prenons conscience des bénédictions reçues et nous devenons ses témoins.
Beaucoup d'intellectuels n'arrivent pas à voir la beauté et la gloire du christianisme, c'est-à-dire Christ lui-même. Nous ne pouvons pas comprendre ces choses spirituelles si nous ne passons pas du temps dans la prière et la méditation. Il peut y avoir de magnifiques oiseaux dans les airs et de brillantes étoiles au ciel, mais si vous voulez des perles, vous devez plonger dans les profondeurs de l'océan pour les trouver. Il y a beaucoup de belles choses dans le monde extérieur, mais les perles ne se trouvent qu'au fond de la mer. Si nous voulons les perles de l'esprit, nous devons plonger, c'est-à-dire nous devons prier et alors nous verrons les perles précieuses.
Mais les hommes sont trop occupés ; ils n'ont pas de temps à donner à la prière ! L'heure approche où ils devront mourir ; diront-ils aussi : « Nous n'avons pas le temps de mourir » ? La mort n'attendra pas qu'ils aient terminé leur travail. Ne vaut-il pas mieux prendre chaque jour le temps d'entrer dans l'intimité de Celui qui seul pourra nous aider après la mort ? Il se révélera à nous dans la prière ; nous connaîtrons sa grâce et nous serons sauvés, car ainsi que quelqu'un l'a dit : « Dans le profond silence de mon âme, je trouve mon Ciel et mon Dieu ». Dans la mesure où nous réaliserons cette intimité, nous trouverons la paix, la joie et le Ciel sur la terre. Cela ne signifie pourtant pas que nous puissions dire comme les panthéistes : « Maintenant, je suis Dieu ». Voyez l'éponge plongée dans l'eau : elle est dans l'eau et l'eau est dans l'éponge. Lorsque nous consacrons du temps à la prière, nous sommes en Dieu et Dieu est en nous, mais cela ne veut pas dire que nous soyons Dieu ou que Dieu soit nous. Nous nous rendons compte qu'Il est notre Créateur et que nous sommes ses créatures, qu'Il est notre Père et que nous sommes ses enfants. Unis ainsi intimement à lui, nous faisons l'expérience d'une joie impossible à décrire. Méditons et prions ; ne nous lassons pas de rester aux pieds du Sauveur.
A vrai dire, nous trouvons dans la Bible bien des choses que nous ne pouvons pas comprendre. Un jour que j'étais dans l'Himalaya, j'avais faim et soif, et rien à manger. J'aperçus un arbre, sur lequel je grimpai aussitôt pour en cueillir le fruit. L'ayant goûté, je lui trouvai une telle amertume que je le jetai loin de moi. En descendant de l'arbre, je vis un homme qui me dit : « Pourquoi jettes-tu ce fruit ? Ne le connais-tu pas ? » « Non, je sais seulement qu'il est affreusement amer. » « Il est très bon, au contraire me dit-il ; c'est une noix. » J'avais peine à le croire, mais lorsque j'eus enlevé l'enveloppe verte si amère, je trouvai une coque dure et, à l'intérieur, une amande délicieuse. Lorsque les gens regardent le christianisme de l'extérieur, ils voient la croix, et c'est là l'enveloppe amère : un chemin d'amertume qu'on n'aime pas à considérer de trop près. Puis il y a la dure écorce des difficultés et des doutes, et l'on rejette le tout loin de soi... mais la prière rend tout facile : elle nous permet d'arriver jusqu'à l'amande, d'en goûter la saveur et de constater que le fruit est une réalité. Mais ce n'est possible que par la prière. Tous ceux qui ont fait cette expérience spirituelle rendent témoignage à cette douceur.
Notre négligence et notre indifférence nous empêchent de faire l'expérience de la vérité du christianisme. Nous n'avons rien à dire à d'autres, aucune expérience spirituelle à leur communiquer pour les aider. Mais si nous vivons près de Christ, comme saint Jean a vécu pendant trois ans, alors nous Le connaîtrons tel qu'il est : La Parole de Vie, le Sauveur vivant.
Avant-hier, je parlais de mon entretien avec un homme très instruit, un psychologue, qui m'assurait que la paix merveilleuse dont j'ai fait l'expérience est un effet de mon imagination. Avant de lui répondre, je lui racontai l'histoire d'un aveugle-né qui refusait de croire à l'existence du soleil. On le fit asseoir dehors, au grand soleil, par une froide journée d'hiver et on lui demanda : « Comment te trouves-tu ? » Il dit : « J'ai bien chaud ». « C'est le soleil qui te réchauffe, même si tu ne l'as pas vu, tu en as éprouvé les effets ! » « Non, dit-il, C'est impossible. Cette chaleur vient de mon corps, de la circulation de mon sang. Vous ne me ferez pas croire qu'il y a dans le ciel, une boule de feu suspendue sans une colonne pour la soutenir ! » – « Eh bien, demandai-je au psychologue, que pensez-vous de cet aveugle ? » « C'était un fou, répondit-il. » « Et vous, lui dis-je, vous êtes un fou instruit. Vous prétendez que ma paix est un effet de mon imagination ; mais moi j'en ai fait l'expérience ».
Pendant longtemps, je me suis livré à la méditation, mais cette méditation ne me procura pas la paix. Par contre, quand j'ai commence à prier, j'ai senti la présence de Dieu et les rayons du Soleil de justice dont la chaleur détruit les germes du péché et donne la vie.
Nous ne comprenons pas Jésus-Christ, parce que nous n'avons jamais vécu avec Lui par la prière. Voici le témoignage d'un homme qui m'a parlé de ses expériences spirituelles : Pendant longtemps, il avait vécu dans une grotte, plongé dans la méditation des choses spirituelles, sans avoir rien trouvé qui pût l'aider dans les saints livres de l'hindouisme et du bouddhisme. « Je cherchais la vie, disait-il, et je trouvai beaucoup de choses bonnes, beaucoup de bons enseignements, mais point de vie. Et c'est de vie que j'ai besoin ! » On lui donna l'Évangile de Jean. Il le lut et, au bout de quelques jours, il fit chercher le missionnaire. Il lui dit que, dans sa grotte, il n'avait pas trouvé ce qu'il cherchait, mais que lorsqu'il était sorti de la grotte et avait lu l'Evangile, il avait trouvé la vie. « J'ai lu deux fois l'Evangile, dit-il, en n'y trouvant que de bons enseignements, des pensées admirables, mais la troisième fois Christ se révéla Lui-même à moi. Je ne le vis pas de mes yeux, mais je sentis Sa présence dans mon cœur ».
Cet homme voulut immédiatement rendre témoignage de ce qu'il avait trouvé en Christ. Les gens déclarèrent qu'il était resté si longtemps dans la grotte qu'il y avait perdu l'esprit et le prêtre demanda ce qu'il fallait faire : « Il a renoncé au bouddhisme et doit être lapidé, de peur que le peuple ne soit égaré et corrompu par lui ». On lui dit pourtant qu'il ne courrait aucun danger s'il voulait se taire. Il répondit : « Pendant sept ans et demi, je me suis tu, parce que je n'avais rien trouvé, mais maintenant que j'ai trouvé, comment pourrais-je me taire ? » On l'emmena à deux milles du village, a l'endroit où le martyr Kartar Singh avait été tué et on commença à le lapider. Tout d'abord, les pierres lui faisaient mal et il saignait, mais bientôt il put dire : « je vous remercie pour ces pierres ; elles me procurent tant de joie et de paix. Ce ne sont, en réalité, pas des pierres, mais des fleurs que vous me jetez ». Bien que tout son corps fut en sang, il ressentait une telle joie, une telle paix, que ses persécuteurs n'y comprenaient rien. L'un d'eux, qui cherchait la vérité, dit : « Il prie pour nous, qu'en pensez-vous ? » « Il est fou ! » répondit-on. « Si la folie peut procurer une paix pareille, alors je veux aussi devenir fou et je ne le désire pas pour moi seulement, mais pour le monde entier ».
De nos jours, les hommes en tout lieu cherchent la paix, mais ils veulent la trouver en dehors du Prince de la Paix, et ne l'obtiendront jamais. Nous vivons près du Royaume de Dieu, mais nous sommes pourtant dehors ; nous le désirons, mais à cause de notre ignorance nous sommes encore loin du Royaume de Dieu.
Avant de terminer, je vais vous raconter encore une histoire. Un homme du Népal, dans l'Himalaya, avait mendié pendant vingt et un ans. Il s'asseyait à une certaine place et là, il mendiait afin de devenir riche. Il mourut pauvre, et les gens s'imaginèrent qu'il avait peut-être caché son argent à l'endroit où il s'était installé pour mendier, et ils creusèrent. Ils trouvèrent un trésor qui avait appartenu à un roi mort depuis longtemps. Le mendiant, qui désirait être riche, ne savait pas qu'il était assis sur de telles richesses. C'est ainsi que les chrétiens de nom désirent le Royaume de Dieu et s'imaginent qu'en devenant riches ils seront satisfaits. Ils ne sont pas loin du Royaume, ils sont très près, mais, à cause de leur insouciance et de leur ignorance, ils sont en dehors. S'ils prient et creusent, ils trouveront de grandes richesses, le salut même. Il n'y a aucun reproche à faire à Dieu ; c'est notre propre faute ; nous ne sondons jamais les choses de l'esprit, nous ne savons pas prier. Les gens acquièrent une sorte d'apaisement, mais ce n'est pas la paix. Les choses de ce monde ne peuvent pas la remplacer...
Que Dieu nous aide à passer du temps à prier ; c'est la chose essentielle dans notre vie. Puissions-nous réaliser que la porte du Royaume est ouverte par la clef de la prière. Je ne suis pas le seul à avoir trouvé cette paix ; il y en a des milliers d'autres dans tous les pays. Saisissez cette occasion ; allez à Lui en silence, à Celui qui peut vous bénir et vous trouverez le ciel sur la terre.