Histoire de l'Église - Théodoret de Cyr

LIVRE I

CHAPITRE XI
LIBÉRALITÉ DE CONSTANTIN ENVERS L'ÉGLISE

Voilà ce que l'Empereur Constantin écrivit aux Évêques qui étaient absents. Pour les autres qui étaient à Nicée, et qui étaient au nombre de trois cent dix-huit, il les traita très-civilement, leur dit des paroles très-obligeantes, et leur fit des présents. Il commanda de dresser quantité de sièges couverts de tapis, fit à tous les Prélats de cette Assemblée un grand festin, mit les principaux à sa table. Ayant remarqué que quelques-uns avaient l'œil droit crevé, et ayant appris qu'ils l'avaient perdu pour l'intérêt de la foi, il baisa la plaie qui leur en restait, et crut qu'elle serait pour lui une source de bénédiction, et de grâce. Il leur fit encore d'autres présents après le repas. Il donna ordre aux Gouverneurs des Provinces de distribuer dans chaque Ville des pensions aux Filles, aux Veuves, et aux Ecclésiastiques, et en régla la somme non seulement selon leur besoin, mais selon sa magnificence. On en paye encore le tiers en ce temps-ci. Julien les avait retranchées absolument. Mais son successeur n'en a rétabli que le tiers, à cause de la disette qui était en ce temps-là. Que si la pension était trois fois plus forte au temps de Constantin qu'elle n'est aujourd'hui, on peut reconnaître par là la grandeur de la libéralité de ce Prince.

Je n'ai garde d'oublier de dire, que quelques personnes qui aimaient les querelles et les différends, ayant présenté à l'Empereur des Requêtes contre des Évêques, il en fit un paquet où il commanda de mettre son cachet. Lorsqu'il eût rétabli la bonne intelligence parmi eux, il brûla toutes les Requêtes en leur présence, et les assura avec serment qu'il ne les avait point lues. Il disait qu'il ne fallait pas publier les crimes des Évêques, de peur qu'ils ne fussent au peuple un sujet de scandale, et de chute. Il ajoutait que s'il avait surpris un Évêque dans un adultère, il aurait mis sa robe Impériale au devant, de peur que l'exemple de ce crime ne fût préjudiciable à ceux qui le verraient. Après avoir rendu ces honneurs aux Prélats, et leur avoir donné ces sages avis, il les exhorta à retourner à leurs Églises.

J'insérerai ici une Lettre d'Eusèbe Évêque de Césarée, pour faire voir l'extravagance, et la malice des Ariens, qui non contents de mépriser nos pères, renoncent aux leurs. Car bien qu'ils respectent Eusèbe comme un célèbre Écrivain, qui est dans leurs sentiments, ils ne laissent pas de trouver à redire à ses Ouvrages. Il a écrit la lettre dont je parle à quelques Ariens, qui l'accusaient d'avoir trahi leur parti. Ses paroles expliqueront mieux sa pensée, que les miennes ne le pourraient faire.

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