A défaut d’indications fournies par la tradition sur l’auteur, la patrie et la date de composition de cette homélie ancienne, il faut essayer de dégager du discours lui-même les données permettant de serrer un peu le problème de son origine.
Certains critiques ont été surtout frappés des analogies que présentait l’écrit avec le livre romain du Pasteur. D’autre part le rapprochement de l’homélie avec l’épître aux Corinthiens de Clément dans les manuscrits, favorise l’hypothèse d’une origine romaine pour l’homélie et M. Harnack est devenu le principal champion de cette hypothèse. Quand elle serait vraie, ce ne serait pas une raison pour identifier l’auteur avec un personnage du Pasteur dont il est question dans la deuxième vision (4.3) et qui porte le nom de Clément : « Rédige deux petits écrits, est-il dit au Pasteur ; envoie l’un d’eux à Clément et l’autre à Grapté. Clément l’expédiera aux villes étrangères, car tel est son office. »
En réalité, les ressemblances de l’homélie et du Pasteur (emploi du terme de sceau pour le baptême par exemple) sont celles des écrits d’une même époque. Les contrastes ne sont guère moins frappants que les analogies et il n’est même pas sûr que le personnage du Pasteur d’Hermas appelé Clément ne soit pas un être de rêve. Aussi d’autres critiques se sont-ils attachés à relever tel détail d’expression qui permet de construire une autre hypothèse. Au chapitre 7 de l’homélie, les chrétiens sont invités à combattre ; on leur rappelle qu’au combat périssable des jeux « bien des lutteurs accourent à force de voiles — καταπλέουσιν πολλοί » ; on les exhorte de même, à « courir dans la voie droite c, à « s’embarquer — καταλεύσωμεν — en grand nombre pour le combat ». De ces façons de parler absolument, sans indication plus précise de lieu, de port, où il faille se rendre pour prendre part aux jeux, l’on a conclu que l’auteur vivait à Corinthe même, où les simples allusions aux jeux isthmiques étaient naturellement saisies, sans qu’il fût besoin d’ajouter au verbe καταπλεῖν son complément εἰς ἰσθμόν ou εἰς Κορινθίους. Le lieu d’origine étant placé à Corinthe, on comprendrait assez naturellement que l’homélie, jugée d’ailleurs digne d’être lue à l’église, se soit trouvée de ce fait annexée dans certains manuscrits à l’épître de Clément aux Corinthiens. Peut-être même portait-elle une inscription, πρὸς Κορινθίους, rappelant à quel auditoire elle avait été primitivement adressée ; il a donc suffi d’une méprise de copiste complétant l’inscription par un Κλήμεντος β, pour amener l’attribution de l’homélie à Clément et la confusion d’un discours avec une épître. Cette hypothèse est admise par Lightfoot et par Funk.
D’autres critiques enfin ont inventé une hypothèse qui réunit les deux noms de Rome et de Corinthe, en émettant la supposition que notre IIa Clementis ne serait autre que la lettre écrite par le pape Soter aux Corinthiens et lue, nous le savons, dans les églises (Eusèbe, H. E., 4.23, 11). Cette nouvelle hypothèse est inutilement compliquée. Notre écrit n’est pas une lettre, même si l’on étend quelque peu la signification du terme ἐπιστολή. On ne saurait admettre, sans un commencement de preuve que le pape Soter faisait circuler dans les églises des fragments de ses prédications même un peu retouchées.
L’auteur, quel qu’il soit, de l’homélie est évidemment sorti de la gentilité ; le tableau qu’il fait de l’idolâtrie païenne (1.6), la façon dont il s’oppose avec sa communauté nombreuse aux Juifs de qui Dieu paraissait être le bien propre (2.3), ne permet guère de penser qu’il ait appartenu à la race d’Israël. Mais il est difficile de préciser davantage et de dire avec certitude s’il était né de parents déjà chrétiens ou s’il était lui-même un converti ; cette dernière éventualité paraît cependant plus probable.
Quant à la détermination de la date, elle varie suivant les hypothèses : Harnack avait d’abord tracé comme limites les années 130 à 160, et plus précisément les années 135-140 ; c’est à peu prés l’avis auquel se range H. von Schubert. Lightfoot rapporte l’homélie aux années 120 à 140. Les données fournies par le contenu doctrinal favorisent le sentiment qui place l’homélie dans la première moitié du iie siècle.