Or, étant ressuscité le premier jour de la semaine, au matin, il apparut premièrement à Marie-Magdelaine, de laquelle il avait chassé sept démons. Celle-ci s’en alla et l’annonça à ceux qui avaient été avec lui, et qui étaient dans le deuil et dans les larmes. Et eux, ayant ouï qu’il était vivant et qu’il avait été vu par elle, ne crurent point.
Mais après cela, il se manifesta sous une autre forme à deux d’entre eux, qui étaient en chemin, allant aux champs. Et ceux-ci s’en étant retournés, l’annoncèrent aux autres ; mais ils ne crurent pas ceux-là non plus.
Enfin, il se manifesta aux onze eux-mêmes, comme ils étaient à table ; et il leur reprocha leur incrédulité et la dureté de leur cœur, parce qu’ils n’avaient pas cru ceux qui l’avaient vu ressuscité. Et il leur dit : Allez dans tout le monde, prêchez l’Évangile à toute créature. Celui qui croira, et qui sera baptisé, sera sauvé ; mais celui qui n’aura pas cru, sera condamné.
« Pourquoi Jésus-Christ, après sa résurrection, ne s’est-il montré qu’à ses disciples ? Pourquoi par exemple, le dimanche matin, à l’ouverture du sépulcre, les anges qui roulèrent la pierre n’ont-ils pas entonné la trompette pour appeler, au sommet du Calvaire tous les habitants de Jérusalem à contempler sa résurrection ? Les plus incrédules se seraient rendus à une telle évidence et le peuple de la ville sainte aurait cru en Jésus-Christ. »
Qui de vous n’a pas entendu faire cette réflexion et qui de vous ne l’a pas faite lui-même ? – Eh bien, soit, je veux admettre que cette résurrection en présence de cette foule de spectateurs eût converti toute la ville de Jérusalem, voisine de Golgota ; mais qu’aurait prouvé ce miracle pour les Juifs habitant les points éloignés de la Palestine ? Cette foule de témoins oculaires aurait-elle suffi pour convaincre les absents ? « Nous l’avons vu », auraient-ils crié à leurs compatriotes : Nous en sommes certains ; nous étions là un million de témoins : croyez-en notre parole ; nous l’avons » vu, vous dis-je ! » – « Cela est possible, auraient répondu avec calme les autres villes, vous l’avez vu, mais non pas nous ; vous l’avez vu et vous pouvez le croire ; de même quand nous le verrons, nous le croirons aussi. » – Que répondre à cela ? Jésus n’était pas venu appeler à la foi seulement les Juifs de la capitale, mais tous ceux du royaume. Voilà donc la résurrection opérée en présence d’un million d’hommes, qui ne prouve pas plus pour la nation que la résurrection opérée devant quelques apôtres et quelques femmes. L’objection ne fait que changer de place, dira-t-on ; Jésus, après être sorti du tombeau, pouvait parcourir toute la Palestine, se montrer dans toutes les villes où il était connu ; à une telle apparition il n’y aurait eu rien à répondre, et la nation entière serait devenue chrétienne. – Soit. Mais cette apparition de Jésus dans l’étroite Palestine, qu’aurait-elle prouvé sur la vaste étendue de l’empire romain ? Toutes les villes, toutes les bourgades de Galilée et de Judée auraient crié d’une voix unanime : « Nous l’avons vu, nous en sommes certains, nous étions là dix millions de témoins », que les peuples d’Italie et de Grèce auraient répondu avec ironie : « Cela est possible, vous l’avez vu et vous devez le croire ; quand nous l’aurons vu nous-mêmes, nous le croirons aussi. » – Et vous, enfants d’Israël, qu’auriez-vous répondu ? Jésus n’était pas venu convertir seulement le peuple d’Abraham, il voulait appeler à lui toutes les nations de la terre, les Gentils comme les Juifs, les Scythes comme les Barbares ; voilà donc encore la résurrection, manifestée à toute une nation, ne prouvant pas plus pour le reste de l’univers qu’opérée en face d’une seule ville.
« Mais, dira encore un esprit opiniâtre, puisque Jésus était vraiment le Fils de Dieu, il devait, après sa résurrection, se montrer non seulement à quelques disciples, à une ville, à un peuple, mais au monde entier qu’il voulait convertir, quelques miracles de plus sur tous les points du globe ne lui eussent pas beaucoup coûté ; pourquoi n’en avoir pas opéré, durant son séjour sur la terre, à Athènes, à Rome, en Europe, en Asie ? pourquoi n’avoir pas employé un moyen si facile de convaincre les peuples et les rois, les simples et les savants de tous les points du globe ? » – Soit encore : voilà Jésus parcourant la terre dans toute son étendue ; il n’y aura pas un seul hameau qui ne soit témoin de quelques-uns de ses prodiges ; eh bien, qu’est-ce que cela prouve pour le siècle suivant ? La génération témoin du miracle passe ; une nouvelle lui succède et dit à ses pères : « Vous avez vu, croyez ; quand nous aurons vu, nous croirons aussi. » Et si Jésus opérait pour celle-ci le même prodige, une troisième pourrait encore réclamer à son tour ; en sorte que, pour satisfaire tous les siècles écoulés jusqu’à nous, Jésus aurait dû se montrer d’âge en âge ; et fût-il descendu sur la terre il y a cent ans, que nous, aujourd’hui, devrions nous refuser à croire. Qu’il vienne pour nous, cela ne suffira pas non plus ; il lui faudra revenir pour nos enfants, nos petits-enfants, jusqu’à la fin du monde ; car tous auront le même droit de dire : « Je croirai quand j’aurai vu. »
Pour satisfaire ceux qui regrettent que les apôtres aient été seuls témoins de sa résurrection, voici donc ce que Jésus aurait dû faire : se montrer à tout Jérusalem, à toute la Palestine, parcourir toutes les contrées de la terre, opérer partout de nouveaux miracles, et enfin dans chaque siècle redescendre sur la terre pour convaincre par ses prodiges les générations qui se succèdent ici-bas.
Je pourrais m’arrêter ici et faire sentir l’extravagance de pareilles prétentions ; mais non, je cède encore sur ce point et suppose que Dieu ait accompli ces prodiges dans toutes les contrées, dans tous les siècles ; qu’en serait-il résulté ? Pour cela toutes ces contrées et tous ces siècles se seraient-ils convertis ? Non. Tous les hommes verraient le Sauveur sortir de son tombeau qu’ils n’auraient pas plus de confiance en Jésus-Christ ; ce prodige ne prouverait rien que l’Évangile ne prouve déjà, et cette déclaration d’Abraham se vérifierait à la lettre : « S’ils n’écoutent pas Moïse et les Prophètes, ils ne seraient pas mieux persuadés quand même quelqu’un des morts ressusciterait, » Cette parole vous surprend-elle, et vous en faut-il la preuve ? Écoutez.
Les soldats qui virent l’ange rouler la pierre et le Sauveur sortir du sépulcre furent-ils convertis ? Non ; ils allèrent tremblants annoncer la résurrection aux sénateurs, et pour quelques pièces d’argent consentirent à répandre un mensonge ; malgré ce miracle ils ne crurent donc pas en Jésus-Christ. Les sénateurs qui apprirent de la bouche des gardes que Jésus était sorti miraculeusement du sépulcre ne nièrent pas le fait, puisqu’ils payèrent pour garder le secret ; ils étaient donc persuadés de la résurrection ; pour cela furent-ils convertis ? Non ; ils mentirent effrontément et répandirent le bruit que les disciples de Jésus étaient venus de nuit enlever le corps de leur maître ; malgré leur certitude ils ne crurent donc pas non plus en Jésus-Christ.
Mais, direz-vous peut-être, les gardes qui avaient insulté Jésus sur la croix, les sénateurs qui l’avaient condamné, tous avaient un intérêt à repousser la vérité, tandis que nous, étrangers à leurs crimes, nous ne demandons pas mieux que d’être persuadés, et pour cela la vue d’un miracle nous suffirait. Et moi je réponds d’après Jésus, à ceux qui forment ce souhait : Vous vous trompez vous-mêmes ; c’est précisément vous qui demandez des miracles qui par des miracles ne vous laisseriez pas persuader ; et vous en verriez un éclatant à cette heure que pour cela vous ne croiriez pas mieux en Jésus-Christ. Mon dire vous étonne ? Encore une fois écoutez.
Je suppose que, placés au milieu d’une plaine immense dont les limites iraient se confondre à l’horizon avec le ciel, vous voyiez tout à coup un livre, lancé de la voûte du firmament, venir tomber à vos pieds ; vous l’ouvrez ; c’est la Bible ! Le miracle n’est-il pas évident ? Concluriez-vous pour cela que le christianisme est divin, que vous lui devez obéissance ? Croiriez-vous en Jésus-Christ ? – Oui, je le pense, ce serait là votre premier mouvement. Mais attendez un instant, laissez l’imagination se calmer, la froide raison revendiquer ses droits. « Il est vrai, direz-vous, j’ai vu tomber ce livre mais suis-je bien assuré qu’il soit tombé du ciel ? Ne serait-ce pas une illusion ? Dans un siècle où le génie humain invente tant de merveilles, quand je vois quelques grains de salpêtre lancer une masse d’airain à une lieue de distance, qui me garantit qu’une nouvelle force découverte dans la nature n’a pas été entre les mains de l’homme l’instrument qui a lancé ce volume à mes pieds ? Puisque l’homme parvient à s’élever dans les airs et se dérobe par fois à mes regards dans les nuages, qui m’assure que ce n’est pas de lui que ce livre m’est venu ? Qui me dit… » Et vous ferez encore mille conjectures plus ou moins vraisemblables : le doute naîtra dans votre esprit, se développera lentement et finira par éteindre même l’évidence. Mais que dis-je ? mon assertion est-elle donc entièrement gratuite ? Non, je n’ai inventé que la forme, le fond est une vérité. Vous avez vu des miracles, vous en voyez tous les jours, et ils ne font pas sur vous la plus légère impression. Faut-il les remettre sous vos yeux ? Si un homme vous annonçait aujourd’hui un événement européen qui ne dût avoir lieu que dans dix ans, et que dix années plus tard l’histoire vérifiât l’exactitude de ses paroles, vous diriez, sans doute : C’est un miracle. Si, au lieu de placer à dix ans l’accomplissement de sa prophétie, cet homme le portait à dix siècles, le prodige serait encore plus évident à vos yeux ; si ensuite, au lieu de prédire un seul fait, il en annonçait deux, dix, vingt, et que tous fussent rigoureusement accomplis, pourrait-il vous rester le moindre doute ? Eh bien, Jésus a opéré pour vous, sous vos yeux, des prodiges encore plus éclatants : ce n’est pas un seul événement qu’il a prédit ; on peut vous en citer cinquante ; ce n’est pas après un siècle que ces prophéties se sont réalisées, c’est après deux mille ans ; les faits sont sous vos yeux, vous pouvez en juger : d’un côté voici l’Évangile qui renferme ces prédictions écrites il y a dix-huit siècles, de l’autre voici les événements qui les vérifient et qui se passent sous vos yeux :
L’Évangile a dit : « Une partie d’Israël est tombée dans l’endurcissement jusqu’à ce que la multitude des Gentils soit entrée dans l’Église. » Et aujourd’hui vous voyez les Juifs refuser obstinément de reconnaître Jésus-Christ pour le Messie, tandis que les idolâtres le reçoivent comme leur Sauveur.
L’Évangile en parlant des Gentils a dit : « Il en viendra d’Orient et d’Occident, du Septentrion et du Midi, qui entreront dans le royaume de Dieu. » Et aujourd’hui nos missionnaires amènent au royaume de Dieu les païens depuis la baie d’Hudson jusqu’à la Nouvelle-Zélande, depuis le cap de Bonne-Espérance jusqu’à la Tartarie.
La Bible a dit : « Je ferai courir la maison d’Israël parmi les nations comme le blé est remué dans un crible, sans qu’il en tombe un seul grain. » Et aujourd’hui il n’y a pas un seul peuple sur la surface de la terre, peut-être pas une seule ville en Europe qui ne renferme quelques Juifs dans son sein, et tandis que les Barbares du Nord, qui sont venus se répandre en Europe, se sont confondus avec les habitants de nos contrées à tel point qu’il serait impossible aujourd’hui de les distinguer, les Juifs restent au milieu des nations un peuple à part ; il semble qu’il soit écrit sur le front des enfants d’Israël : Voilà un Juif ; aussi la Bible avait-elle dit : « Ils courront parmi les nations sans qu’il en tombe un seul grain. »
Jésus a dit : « Jérusalem sera foulée aux pieds par les nations ; » or depuis huit siècles et de nos jours encore elle est au pouvoir des Musulmans.
Jésus a dit : « Il s’élèvera de faux Christs. » Et l’on a vu au milieu des Juifs répandus dans l’empire ottoman, en un seul siècle, quatorze faux Christs s’élever.
Jésus a dit : « Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point. » Et aujourd’hui la parole de Jésus-Christ est répandue sur tous les points du globe.
Jésus a dit : « Cet Évangile du royaume sera prêché sur toute la terre habitable. » Et aujourd’hui le christianisme est prêché dans les quatre parties du monde, et l’on compte trois cents millions de chrétiens.
Mais en vérité je me lasse de citer. Ces prédictions sont-elles claires ? – Se sont-elles accomplies ? – Avez-vous, oui ou non, lu la Bible qui les prononce ? – Avez-vous, oui ou non, vu les événements qui les vérifient ? – Direz-vous que le hasard peut faire concorder quelques paroles de Jésus avec un fait de notre histoire ? Mais il n’y en a pas un, je vous en cite dix, et j’aurais pu en ajouter vingt autres. – Direz-vous que les hommes peuvent ménager un accord entre les paroles d’un siècle et les actions d’un autre ? Mais ce n’est pas en un siècle que ces prédictions ont reçu leur accomplissement, c’est durant dix-huit siècles, et chaque jour y ajoute un nouveau trait ; ce ne sont pas de petites circonstances que l’homme puisse arranger à son gré : ce sont des faits qui tiennent à l’histoire du monde entier. – Direz-vous… Oui, vous direz encore bien des choses ; vous direz que tout cela n’est pas bien certain ; vous direz qu’il ne faut se rendre qu’à l’évidence, et c’est précisément là ce qui prouve la vérité de ce que je n’ai pas craint d’avancer : eussiez-vous vu le plus éclatant miracle, vous trouveriez encore un prétexte pour douter ; comme le dit Abraham, si vous n’écoutez-pas les Prophètes, alors même qu’un mort ressusciterait vous ne seriez pas persuadés, et Jésus, qui sortit du sépulcre à pareil jour, il y a dix-huit siècles, pourrait sortir à l’instant du sein de la terre, sous vos pieds, sans que pour cela vous crussiez mieux en Lui.
Non, la lumière ne manque pas sur la révélation ; mais nos passions soufflent sur la lumière, et comme nous avons déjà pressenti que les gardes ne se convertirent pas à Jésus-Christ ressuscité, parce que l’amour de l’argent leur ferme les yeux, comme nous avons déjà deviné que les sénateurs ne se convertirent pas parce que la peur d’être accusés de déicide leur ferma les yeux ; de même, s’il en est parmi vous aujourd’hui qui ne croient pas encore, qu’ils se le disent bien : c’est parce qu’ils portent dans un coin de leur cœur une passion qui ne veut pas en sortir pour faire place à la foi. Cela est si vrai que celui qui repousse la religion de Christ accepte la religion du monde. Pourquoi ? Serait-ce que les dogmes de celle-ci soient plus admissibles, plus faciles à croire ? Non ; car en admettant une vie à venir, la religion du monde suppose une résurrection générale ; or la résurrection future de tous les hommes n’est pas plus compréhensible que celle déjà accomplie de Jésus-Christ. La première repose sur une espérance de notre cœur ; la seconde sur des témoignages qu’on peut vérifier. Si ce n’est pas pour ses dogmes que l’incrédule préfère la religion mondaine à la religion chrétienne, c’est donc pour sa morale ? Oui, voilà le mot de l’énigme : l’incrédule préfère la morale du monde à la morale de Jésus-Christ, parce que la première proclame que charité bien ordonnée commence par soi-même, tandis que la seconde confond les intérêts de nos frères avec les nôtres, fait de leurs privations nos privations, de leurs souffrances nos souffrances ; et l’homme qui aime à faire le bien quand il ne lui en coûte rien, l’homme n’hésite pas à choisir entre ces deux morales celle qui fléchit le plus docilement devant ses penchants et ses goûts. Le Dieu du monde ne demande aux hommes que quelques rares pensées pour le Ciel et pour lui ; ils peuvent, dans cette vie, s’occuper surtout de cette vie ; quand ils seront dans l’autre ils auront le temps d’y songer ; ce Dieu est un Dieu indulgent, qui ne punira pas les hommes pour avoir cherché le bonheur où ils ont cru le trouver ; s’ils se sont trompés sur la terre, il les pardonnera dans le ciel. Mais le Dieu de la religion de Jésus-Christ est un Dieu qui rapporte tout à sa gloire, qui veut que l’homme l’aime de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa pensée ; il pardonne, dans cette vie, jusqu’à la dernière heure ; mais, après la mort il n’a plus de pardon ; et l’homme qui préfère les plaisirs de la terre, qu’il voit, aux délices du ciel, qu’il espère, croit au Dieu indulgent de ce monde, et nie le Dieu sévère et saint de l’Évangile. C’est donc parce que la religion du monde tolère l’égoïsme, pardonne l’oubli de Dieu, que l’homme la reconnaît pour vraie ; c’est donc parce que la religion de Jésus-Christ condamne l’égoïsme, exige une pensée constante de Dieu, que l’homme l’accuse d’être fausse. Oh ! si l’Évangile avait dit : Recherchez avant tout l’or, les plaisirs et la gloire humaine, et le royaume des cieux vous sera donné par-dessus, il n’y aurait pas tant d’incrédules ; les miracles de Jésus-Christ ne seraient pas si souvent mis en doute. Si l’Évangile avait dit : Que l’homme s’aime lui-même de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa pensée, car son amour n’ajouterait rien à la gloire de Dieu, cet Évangile n’aurait pas tant d’adversaires, ses dogmes ne paraîtraient plus obscurs, le monde le recevrait à bras ouverts, et, s’il y a aujourd’hui quelques croyants et des masses incrédules, il n’y aurait plus alors qu’un, petit nombre d’incrédules et des foules de croyants. Mais non, l’Évangile a dit le contraire, et dès lors l’Évangile a été repoussé. L’Évangile a dit : « Amassez-vous des trésors dans les cieux ; » mais l’homme qui aime les trésors de la terre, l’homme qui croit tout obtenir dans ce monde au prix de l’argent, qui ne voit de sécurité contre le besoin et la maladie que dans l’argent, de paix, de plaisir, de bonheur que dans l’argent, qui veut de l’argent pour le présent, qui veut de l’argent pour l’avenir, qui veut en amasser pour en jouir pendant sa vie et en laisser après sa mort ; dès lors, l’homme importuné par les préceptes de l’Évangile, condamnant son avarice, a repoussé ce livre et s’est fait incrédule. L’Évangile a dit : A Dieu seul la gloire, et à l’homme confusion de face ; il n’est que néant, qu’il se pare d’humilité ; mais l’homme qui veut qu’on lui croie des talents, des vertus, du génie, l’homme qui veut se montrer, alors même qu’il est assis au dernier rang, l’homme blessé d’être estimé si peu par l’Évangile, a repoussé ce livre et s’est fait incrédule. Parce que l’Évangile censurait ses désordres, le libertin a repoussé ce livre et s’est fait incrédule. Parce que l’Évangile condamnait ses rapines, l’homme sans probité a rejeté ce livre et s’est fait incrédule ; tous, par leur orgueil, leur libertinage, leurs injustices, ont montré jusqu’à la dernière évidence que la source de leur incrédulité est dans leur cœur, et que, s’ils n’aiment pas Jésus-Christ, c’est qu’ils aiment le péché.
Tenons-nous donc en garde contre ce cœur ami du mal ; au lieu de porter nos regards avec amour sur des tentations dans l’avenir, portons-les avec regret vers nos fautes passées ; ainsi, loin de réveiller la passion, nous ferons naître le repentir, et, pressés par le besoin d’un pardon, nous serons heureux de croire en Jésus-Christ, mort pour nos péchés, ressuscité pour notre justification.