« Celui qui parle en langues s'édifie lui-même ; celui qui prophétise édifie l'église ».
ὁ | λαλῶν | γλώσσῃ | ||
ho | lalôn | glôssêi | ||
« Celui qui parle | (dans) une langue | (littéralement : l'homme parlant une langue) » |
ἑαυτὸν | οἰκοδομεῖ | |
héauton | oïkodomei | |
(2) lui-même | (1) s'édifie (se construit, se bâtit) |
ὁ δὲ | προφητεύων | ἐκκλησίαν | οἰκοδομεῖ | |||
ho dé | prophêteuôn | ékklêsian | oïkodomei | |||
= alors que (ou : par contre, grec : dé) | celui qui prophétise | (2) l'église | (1) édifie (construit, bâtit) |
La signification du mot « édification »
Avant de commenter ce verset, nous avons besoin d'établir le sens du verbe grec oïkodomein que les versions traduisent généralement par le mot français « édifier ». Ce n’est pas difficile ! Le terme grec signifie tout simplement : construire une maison.
Édifier l'église, c'est construire, c'est bâtir la maison de Dieu. Comme le corps humain est bâti, cellule après cellule, par la croissance que provoque la force vitale, ainsi l'église est bâtie par le Saint-Esprit pour former le temple de Dieu. Chaque pierre vivante doit être taillée et mise en place ; chaque partie du corps, chaque cellule doit être intégrée dans l'ensemble, non de façon désordonnée, mais en suivant le dessein de la sagesse divine. « Édifier » l'église signifie faire un travail positif, utile, constructif et intelligent.
Il va sans dire que la construction de l'église se réalise surtout par le moyen des nouvelles naissances. Par la conversion des âmes, l'Esprit ajoute au corps de Christ les éléments indispensables pour compléter le nombre des rachetés. La meilleure façon « d'édifier » l'église consiste à maintenir un rythme de croissance numérique sans pour autant en diminuer la qualité spirituelle. Autrement dit, il est nécessaire d'établir un équilibre entre « naissances » et « éducation » des enfants ! En fait, il est nécessaire de pourvoir à la saine nourriture de chaque enfant de Dieu par un enseignement biblique progressif, par une ambiance de chaleur familiale, dans une atmosphère de véracité et d'honnêteté transparentes, et par un exercice et un travail adaptés à chacun.
Il est évident que ce processus exige l'épanouissement de tous les dons spirituels possibles : des évangélistes pour amener les âmes à Christ, des bergers pour les encadrer, des docteurs pour les enseigner, des prophètes pour les corriger et les encourager, sans parler des autres dons...
Paul cherche à faire comprendre aux chrétiens de Corinthe que le Saint-Esprit, en construisant la maison de Dieu, cherche à utiliser les éléments les plus solides. C'est pour cette raison que Paul les incite à rechercher les dons les meilleurs. Dieu ne veut pas bâtir avec du chaume et de la paille. Sa construction coûtera cher, elle nécessite donc des pierres et des métaux précieux, tous les matériaux de haute qualité.
Que chaque croyant prenne sérieusement conscience de cette vérité fondamentale : on ne construit pas l'église sans effort, sans discipline, sans peine. C'est un travail qui coûte, il exige le sacrifice de son temps et de ses moyens.
On imagine souvent que le rôle du prophète s'accomplit sans trop d'effort : sous le coup d’une inspiration divine soudaine, il ouvre la bouche et voilà une prophétie ! Il est vrai que l'inspiration divine vient souvent de façon brusque et imprévue ; mais la vie des prophètes d'Israël nous révèle que leur vocation était forgée dans la souffrance, parfois pendant des années de solitude et de prières ; ils ont sondé en profondeur les Écritures, dont ils appliquaient les principes aux circonstances de leur génération. Le message prophétique leur attirait le plus souvent le ridicule et même les outrages de leurs contemporains. L'exemple de Jérémie illustre bien cette vérité.
Or, si dans son épître aux Corinthiens, Paul fait la comparaison entre le travail d'un prophète et une expression en langue étrangère ou même inintelligible, c'est pour démontrer la vaste supériorité de la prophétie qui construit l'église comme Moïse a construit la nation d'Israël. Un discours incompréhensible, au contraire, n'apporte rien de constructif.
Paul dit textuellement (au verset 9) qu'un langage incompréhensible dans l'assemblée n'est qu'un « parler en l'air » et il le compare (au verset 11) à une voix barbare. Dans tout ce chapitre, l'apôtre vise la construction de l'église. L'Esprit de Dieu ne cherchera pas à achever cet objectif par des moyens inefficaces ou indignes de sa sagesse. C'est pourquoi, dit Paul, il faut viser les dons supérieurs, s'armer des qualités de service les plus réalistes, les plus dynamiques.
Édifier, c'est créer un édifice. Il s'agit de poser des fondements solides, de réaliser une architecture bien proportionnée, capable de résister à toutes les intempéries et digne d'être une demeure du Très-Haut.
Voila le sens du mot « édification ».
« Celui qui parle en langue s'édifie lui-même... »
Cette phrase est sans doute le passage le plus souvent cité actuellement pour justifier l'emploi de la glossolalie dans le culte personnel du croyant. C'est pourquoi, il mérite d'être examiné et commenté sérieusement, ce qui explique la place considérable qui lui est réservée dans ce commentaire.
Évidemment, si l'apôtre Paul ne nous avait laissé que cette seule phrase, nous aurions pu en conclure que le « parler en langue » était en effet un moyen que Dieu aurait conçu spécialement en vue de l'auto-édification de l'individu. Pourtant, il ne s'agit pas d'une phrase isolée, mais plutôt d'un demi-verset que nous devons nécessairement lire dans son contexte et en rapport avec le reste du chapitre et de l'épître. Comment ne pas voir dans cette phrase de Paul une certaine ironie ? Le but du verset, comme du passage tout entier, est de mettre en relief la supériorité du don de prophétie sur le don des langues.
Combien de fois ai-je entendu cette phrase de Paul citée hors de son contexte, dans le but de justifier une glossolalie « personnelle ».… Pourtant, je ne pense pas que Paul ait l'intention d'enseigner cela ; il a autre chose en vue. Rappelons-nous que, tout au long de ce chapitre, il parle de l'édification (c'est-à-dire de la construction spirituelle) de l'église et il ne pense ici qu'aux moyens, aux dons utiles à cette fin. Il met en contraste deux choses : la prophétie et le « parler en langue », précisément dans le but de nous faire comprendre à quel point, dans l'église, la prophétie est préférable aux langues. En replaçant cette phrase dans le contexte du chapitre tout entier, nous voyons l'optique de Paul ; ainsi, nous risquons beaucoup moins de déformer sa pensée.
En fait, cette phrase n'est qu'une de ces fameuses citations incomplètes qu'il faut lire avec sa contre-partie :
« Celui qui parle dans une langue [étrangère] s'édifie lui-même ; en revanche, celui qui prophétise édifie l'église ».
Nous pourrions mieux faire ressortir le sens de l'argument de Paul avec une petite paraphrase : « Celui qui parle en langue n'édifie que lui-même, alors que celui qui prophétise édifie toute l'église, tous ceux qui sont présents ». Qu'est-il préférable : une action égocentrique, ou une action qui apporte une aide à toute l'assemblée ?
Nous avons besoin de garder la perspective biblique, en nous rappelant l'enseignement complet de Paul sur les dons dans Romains 12, 1 Corinthiens 12-13 et Éphésiens 4.1-16, ainsi que celui de 1 Pierre 4.10-11.
Or, Paul enseigne de façon absolument claire (faut-il le répéter ?) que le but d'un don spirituel est l'édification d'autrui, celle de l'église et non de soi-même : il existe « pour l'utilité commune » 1 Corinthiens 12.7. L'argument de l’apôtre consiste précisément à détourner les regards des chrétiens de Corinthe du don des langues, pour les orienter vers ce qu'il appelle les dons supérieurs (et en particulier vers celui de prophétie) parce que ceux-ci sont plus utiles à l'assemblée.
On me répondra — je le sais car on me l'a souvent répété — que Paul dit tout de même : « Celui qui parle en langue s'édifie lui-même »... ce qui prouverait que le « parler en langue » est après tout utile à l'individu dans son culte personnel, même s'il n'est pas très utile dans l’église. Des amis pour lesquels j'ai une très grande estime et parmi lesquels je compte des hommes de Dieu, maintiennent ce point de vue et je ne peux que respecter leur opinion. C'est Dieu seul qui est le juge de tous les hommes, je ne me permets donc pas de juger mes frères qui pensent autrement que moi, surtout quand un verset de la Bible semble leur donner raison, et pour rien au monde je ne voudrais perdre leur amitié en Christ.
Pourtant, je trouve plus que fragile le fondement sur lequel est bâtie leur thèse. Un demi-verset, ou même plusieurs demi-versets sortis de leur contexte sont nettement insuffisants pour soutenir une proposition d'une telle envergure.
Il faut reconnaître, d'ailleurs, que la majorité de ceux qui maintiennent cette interprétation en font malheureusement un principe majeur qu'ils imposent presque obligatoirement à tout le monde. Ceux que je considère comme mes vrais amis n'en font pas un « cheval de bataille », ils sont discrets, équilibrés dans leur attitude ; ils respectent le point de vue de ceux qui voient les choses différemment ; mais c'est un fait que, pour un très grand nombre de personnes, la glossolalie est devenue une question prioritaire et même une raison de division... ce qui rend automatiquement suspectes les bases de leur croyance.
L'important consiste à déterminer le sens essentiel de l'argument de Paul. Cela n'est pas difficile car, comme nous l'avons déjà vu, il a déjà défini dans son chapitre 12, comme dans son épître aux Romains chapitre 12 également, la vrai nature et le but des dons spirituels. Si Dieu accord à un don à un homme, c'est pour que celui-ci puisse mieux servir ses frères et son prochain par son moyen. Puisqu'un don est la fonction organique d'un membre du corps de Christ qui contribue à l’action et au bien-être du corps entier, il serait complètement déplacé de le considérer comme existant essentiellement pour l'avantage du membre en question. Supposer que le don de « parler en langue » soit conçu pour l'édification personnelle de celui qui parle est une idée qui va à l'encontre de tout ce le Nouveau Testament enseigne sur les dons spirituels.
L'oreille n'entend pas pour elle-même, elle fonctionne pour le bien du corps entier ; il en est de même pour l'œil, la main, le pied... et la langue. Si Dieu nous accorde un don des langues, soyons sûrs que ce n'est pas pour nous-mêmes ; ce n'est pas pour notre satisfaction ou notre édification personnelle que nous le possédons, mais pour le bien et le salut de ceux qui nous entourent. Le don existe pour aider l'église à grandir. Si donc Dieu m'accorde un don des langues authentique, son Esprit s'en servira « pour l'utilité commune », 1 Corinthiens 12.7 « pour le perfectionnement des saints... afin que nous ne soyons plus des enfants, flottants et emportés à tout vent de doctrine » Éphésiens 4.12-14 et suivants. « Que chacun de vous mette au service des autres le don qu'il a reçu » 1 Pierre 4.10.
Or, le don des langues, comme le dit Paul lui-même, n’est pas conçu pour les croyants ; il est destiné précisément à convaincre les non-croyants, 1 Corinthiens 14.22 comme dans Actes 2. Car, comme nous l'avons dit, c'est surtout par la conversion des non-croyants que l'église est édifiée (ou : bâtie). Dans Actes 2, nous voyons que l'église primitive fut agrandie, ou « édifiée », ce jour-là, par l'intégration de trois mille nouveaux membres dans son sein. C'est là le véritable sens du don des langues ; Si vous croyez le posséder, allez plutôt dans la rue, sur la place publique, dans les tavernes d'un grand port ou d'un quartier populaire et polyglotte : et là, criez le nom et le message de Christ aux non-croyants afin qu'ils se repentent et qu'ils se convertissent. C'est là que vous découvrirez le sens et la valeur d'un vrai don des langues.
Paul écrit évidemment toute son épître aux Corinthiens, comme nous l'avons vu, pour mettre de l'ordre là où règne la confusion. Dans son chapitre 14, il ne les encourage pas à persister dans la voie qu'ils ont suivie jusqu'ici ; au contraire, il veut plutôt les orienter vers un objectif plus valable, plus spirituel.
Certes, la main ou l'œil qui travaille pour le corps est lui-même « édifié » ; mais il est édifié, c'est-à-dire bâti, parce que le corps, à cause de l'action de chaque organe, est ainsi maintenu en bonne santé ; l'organe participe alors à la santé de l'ensemble du corps. C'est dans la mesure où tous les membres contribuent à la nourriture du corps qu'ils sont eux-mêmes nourris ; mais il serait inconcevable que l'organe individuel ne travaille que pour lui-même et fonctionne en vue de sa seule satisfaction. Si la main ne travaille que pour elle-même au lieu de servir le corps, ni elle, ni le corps ne sera édifié.
Il est évident que le croyant est toujours édifié quand il obéit à Dieu. Lorsque je sors dans la rue avec un sac rempli d'évangiles à distribuer à la foule, même en me sentant petit et craintif, je suis chaque fois béni. Une fois l'action engagée, l'Esprit de Dieu me remplit d'une force et d'une joie intérieure inexplicables et, lorsque je rentre à la maison, je me sens merveilleusement édifié ! Or, si je suis édifié, c'est parce que j'ai mis mon don au service des autres, au lieu de vouloir l'utiliser pour moi-même.
Si l'Esprit de Dieu désire vraiment parler « en langue » par la bouche d'un croyant, ce sera évidemment dans le but d'aider quelqu'un d'autre, ce don servira essentiellement à témoigner de Christ à un non-croyant ; mais celui qui parle, du fait qu'il obéit à Dieu, est alors rempli de l'Esprit et sera spontanément béni, car il aura atteint la conscience de quelques inconvertis. Ainsi, c'est à cause de son obéissance, à cause de son témoignage qu'il est lui-même édifié. Il le sera tout autant en rendant n'importe quel autre service à son Maître et à son prochain. Il sera édifié en visitant un malade ou un prisonnier, en aidant une vieille personne, en enseignant aux enfants des versets de la Bible, en amenant une âme à Christ. L'obéissance à la voix de Dieu rend possible une action dynamique de l'Esprit et il en résulte un fruit durable. C'est le message que Moïse voulait faire comprendre à Israël Deutéronome 28.1-14. Il s'agit de l’obéissance de la foi Romains 1.5. Oui, dans un cas de « parler en langue » authentique, le croyant est lui-même édifié, c'est vrai. Mais il ne parle pas « en langues » dans le but de s'édifier » !
Celui, par contre, qui cherche délibérément à s'édifier lui-même en voulant utiliser un moyen exclusivement destiné à aider son prochain ressemble un peu à un homme qui essaie d'allumer le gaz avec une pelle ! À mon avis, ce n'est certainement pas la meilleure des méthodes.
Si le don de parler diverses langues ne trouve pas sa véritable place au sein de l'église, c'est tout simplement parce que l'on ne voit pas des non-croyants « dans l’église » ! Pour attraper les âmes, il faut que l'église aille dans la rue. On ne va pas à la pêche dans une baignoire ; la ligne n'y servirait pas à grand-chose, elle est conçue pour prendre le poisson dans la rivière ou dans la mer.
On pourrait comparer le don des langues à cette ligne que le pêcheur utilise pour attraper un poisson. Je vois difficilement, pourtant, ce même pêcheur utiliser sa ligne pour attraper le morceau de pain qu'il veut manger pour son souper !
Aux yeux de Paul, comme nous l'avons dit, le don des langues est conçu spécifiquement pour les non-croyants, c'est pourquoi il n’envisage pas normalement son utilisation dans le rassemblement des croyants. Puisque le but de ce don consiste à convaincre les incrédules, pourquoi vouloir s'adresser dans une langue inconnue à des fidèles qui sont déjà convaincus ? L'erreur des Corinthiens était de perdre de vue le sens du don lui-même.
« Cela me fait du bien ! »
J'ai souvent entendu dire : — Quand je parle « en langues », cela me fait du bien ! Je suis comme transporté au ciel ! Dieu me semble très proche, très précieux.
De nombreuses personnes affirment que la pratique de la glossolalie les remplit d'une sensation de bien-être et même d'extase, à laquelle d'ailleurs les psychiatres trouvent, à tort ou à raison, une explication psychologique. Un bon nombre de chrétiens croient découvrir dans la glossolalie une nouvelle dimension de communion avec Dieu et un renouveau de leur foi.
À cela je réponds :
Eh bien, mon frère ! Que Dieu vous bénisse ! Pourtant, le croyant peut connaître des transports tout aussi célestes, il peut sentir la présence de Dieu avec une intensité égale et bien plus grande encore, sans parler « en langues » ! Dieu a de meilleures méthodes que la glossolalie pour nous rapprocher de lui. Le témoignage d'innombrables hommes et femmes de Dieu au travers des siècles en est la preuve. Ce qui me surprend et me trouble, mon frère, c'est que je ne trouve pas votre « méthode » dans la Bible. Malgré tout ce qu'on a voulu faire dire à l'Écriture sur cette question, je ne vois pas un seul homme de Dieu, de l'Ancien ou du Nouveau Testament, qui ait employé un argument semblable. Actes 2 nous enseigne que ceux qui ont parlé « en langues » l'ont fait que pour d’autres hommes puissent entendre parler des merveilles de Dieu (Actes 2.11). La Bible ne raconte pas un seul cas d'homme ou femme de Dieu qui ait parlé « en langue » pour sa propre édification ».
À cela, on voudra peut-être me répondre que dans la Bible, il n'est pas non plus fait mention d'automobiles et de macaronis, ce qui n'empêche pas les unes d'être très utiles et les autres bons à manger !
Il est vrai que l'Esprit de Dieu fait beaucoup de choses qui ne sont pas précisées dans le texte de la Bible ; mais jamais son action ne va à l'encontre du sens de la Bible. Pourquoi chercher à utiliser un don spirituel pour votre bien personnel alors que le sens biblique du don est tout autre ? C'est inverser l'ordre logique, spirituel, biblique du fonctionnement du corps de Christ.
D'ailleurs, il ne faut pas confondre la sensation de bien-être spirituel que peut apporter la glossolalie avec « l'édification ». « Se sentir bien » quand on parle en langues, c'est une chose ; mais être édifié en est une autre. Lorsque Dieu nous « édifie », cela peut même peut nous faire extrêmement mal : comme à Joseph en prison, à Moïse dans le désert et à David, poursuivi par Saül. Quand on entend dire par quelqu'un qu'il est édifié par sa glossolalie, on peut se demander en quoi consiste cette édification !
….« Par contre, celui qui prophétise édifie l'église. »
Nous voyons dans cette deuxième phrase qui complète le verset, toute la force de l'argument de Paul. Il n'est pas contre le vrai « don de parler diverses langues », mais il vise ici l'édification de « l'église ». Il fait toujours la comparaison entre les deux dons : celui de parler dans une langue étrangère et celui de parler directement à l'église en langue connue. Laquelle de ces deux activités est la plus utile dans l'assemblée ? Voilà la question que Paul veut poser à ses frères de Corinthe. Et la réponse est évidente. Sans minimiser la valeur du premier don exercé à sa place et d'une manière biblique, Paul met tout l'accent sur la nécessité de rechercher et d'employer le dernier, celui de prophétiser.
Ainsi, lorsqu'il dit avec un peu d'ironie, que celui qui parle en langue s'édifie lui-même, il n'est pas en train d'encourager le « parler en langues », mais plutôt de démontrer qu'il y a mieux et qu'il faut chercher ce mieux. S'édifier soi-même, c'est bien ; mais édifier ses frères, voilà qui est bien plus intéressant... surtout dans l'assemblée ! L'amour cherche chaque fois le bien des autres : voilà le véritable sens des dons. Et, comme nous l'avons dit, Dieu a pourvu aux moyens nécessaires à notre édification personnelle, moyens bien supérieurs au don des langues, puisque de toute façon celui-ci n'est pas conçu dans ce but !
Explique-toi, frère Paul !
Voici en résumé, je crois, l'argument essentiel de Paul dans ce verset :
Tu dis, mon frère, que tu parles « en langues ». Tu es convaincu que c'est un don du Saint-Esprit que tu as reçu et que tu dois l'exercer. Tu dis que cela te fait du bien, que tu es béni quand tu parles en langues...
Très bien ! Pourtant, moi, Paul, je suis en ce moment à Éphèse, à quatre cents kilomètres de Corinthe. Je ne peux donc pas savoir exactement ce qui se passe là-bas, chez vous. Ne t'ayant pas entendu exercer ton don de mes propres oreilles, je ne suis guère en mesure de juger de son authenticité ou de sa valeur. Tu me dis qu'il est vrai, qu'il vient de Dieu : soit, mais on l'évaluera à ses fruits.
D'abord, comment se fait-il, si ton don est authentique, que tu cherches à t'adresser à l'église par son moyen, alors que ce don n'est pas un signe pour les croyants, mais qu'il est, au contraire, destiné aux incrédules ? Comment veux-tu que l'église soit édifiée par une telle procédure ? Pourquoi veux-tu parler « en langues » incompréhensibles dans l'église ?
Tu me réponds : — Ah ! mais je suis moi-même édifié par mon « parler en langues » ! — Et pourtant, mon frère, si tu agis d'une façon contraire à la volonté de l'Esprit telle qu'il la révèle dans l'ensemble du texte, si tu cherches à inverser le sens de ses dons tels que je viens de les définir, (Dans 1 Corinthiens 12) comment puis-je croire que c'est l'Esprit de Dieu qui t'anime ? Car il nous dit lui-même que ses dons nous sont accordés pour venir en aide aux autres, pour l’utilité commune 1 Corinthiens 12.7 et pour le service des autres 1 Pierre 5.10.
Voyons ! Tu dis que tu es quand même édifié quand tu parles « en langues ».. Pourtant, l'église n'est pas édifiée. Si tu veux édifier l'église, demande à Dieu de t'accorder le don de prophétiser, d'enseigner, ou d'évangéliser... afin que tu aies un ministère valable. Il y a quelque chose de bien plus important que ton édification personnelle : c'est l'édification de l'église. Même si tu te trouves « édifié » par ton action, l'église n'en est pas édifiée et c'est cela qui est important. Or, que tu sois toi-même édifié, c'est une chose, mais il faut comprendre, mon frère, que si l'Esprit de Dieu te fait un don, c'est pour qu'il édifie tes frères par son moyen ; sinon, ton attitude n'est-elle pas quelque peu enfantine ? (C'est ce que Paul dit textuellement au verset 20)
Une prophétie en langue ?
On entend dire parfois qu'une prophétie peut être donnée « en langue ».
À cela je réponds d'abord qu'une telle prophétie est une activité propre au mantis et non au prophêtês. La Bible ne reconnaît pas cette forme de prophétie chez les hommes de Dieu, car elle appartenait essentiellement aux faux prophètes des religions païennes qui, eux, livraient souvent leur message sous cette forme. Aucun prophète de la Bible n'a parlé au nom de Dieu en langue incompréhensible.
En second lieu, je veux rappeler à mon lecteur le fait que l'apôtre Paul écrit le chapitre 14 de son épître précisément pour mettre en contraste le don de prophétie et le don des langues. À ses yeux, ce sont deux choses complètement différentes ; il ne veut absolument pas qu'on les confonde. Il démontre la grande utilité de la prophétie véritable dans le cadre de l'assemblée et le peu d'utilité dans ce contexte du don des langues même authentique. Combien moins utile sera donc un faux don des langues dans le cadre de l'assemblée ! Paul emploie la plupart de son chapitre 14 à en démontrer l'absurdité. « Vous parlerez en l'air », dit-il.