Tout ce que vous demanderez en priant. Si vous croyez, vous le recevrez. Matth., XXI, 22.
Le culte étant le tribut d’adoration que les chrétiens rendent à leur Dieu Sauveur, la prière en est l’élément principal.
La prière est un élan spontané de l’âme vers Dieu par lequel le fidèle épanche ses douleurs, confesse ses fautes, exprime son amour et sa reconnaissance, et sollicite du Père des lumières des grâces nouvelles.
La prière ne s’adresse qu’à Dieu seul par la seule intercession de Jésus-Christ.
Pour être agréable à Dieu, il faut que la prière soit fervente, confiante et sincère, et accompagnée d’un esprit de sainte activité.
Les protestants n’imposent jamais la prière comme une tâche ou une punition : ils la considèrent comme un doux et précieux privilège, et croiraient offenser Celui à qui ils s’adressent s’ils en faisaient une occasion d’ennui et de douleur.
Toutefois, il n’est rien de plus solennel que la prière, et les protestants croiraient commettre un acte de profanation, soit en prononçant leurs prières dans des carrefours et au coin des rues, soit en usant de vaines redites que le Seigneur a condamnées. Ils pensent que nous devons prier, comme l’a si bien dit un chrétien éminent :
Avec la liberté d’un fils devant son père
Et le saint tremblement d’un pécheur devant Dieu.
Il résulte de ces principes que les oraisons récitées par les mendiants aux coins des rues, l’usage du chapelet, les prières en langues inconnues du peuple, les longues litanies, les supplications adressées aux images, à la croix et aux saints, sont des pratiques que les protestants ne sauraient approuver et auxquelles ils se gardent bien par conséquent de se joindre.
La prière individuelle pourrait à la rigueur ne s’exprimer par aucune parole, puisqu’elle est un mouvement de l’âme bien plus qu’un acte extérieur et cérémoniel. Mais dans notre état d’infirmité terrestre les paroles fixent nos idées, donnent une plus grande réalité à nos sentiments, et il est à craindre que celui qui ne prierait jamais que mentalement ne finisse bientôt par ne pas prier du tout.
La prière orale ou exprimée par des paroles peut être ou improvisée, c’est-à-dire émanant spontanément du cœur sans en avoir prémédité l’expression, ou être dirigée et soutenue par des paroles écrites qu’on lit ou qu’on récite de mémoire.
Comme il s’agit ici moins d’un principe que d’une méthode, on devra choisir celui de ces deux procédés qui facilite le plus les élans d’une piété sincère.
La prière spontanée ou improvisée est bien celle qui paraît la plus favorable à l’expression d’une vraie dévotion. De l’abondance de votre cœur laissez parler vos lèvres ; soyez assurés que l’expression naïve de votre foi et de votre douleur sera bien plus douce au cœur du Père que les phrases les plus sublimes que nous empruntons à la piété d’un autre. Il faut, avant tout, être simple, sincère, confiant, fervent. Les enfants, mieux que les docteurs, nous enseignent à prier.
Toutefois, rien ne nous autorise à exclure des moyens propres à nourrir la dévotion chrétienne l’usage des prières composées par des chrétiens éminents, ou que nous-mêmes nous aurions composées dans les moments les plus solennels de notre vie.
L’usage de ces prières, quand il est fait avec intelligence et avec cœur, ne doit pas être confondu avec un hypocrite formalisme qui consisterait à faire de ces prières ce que le Seigneur appelle de vaines redites. Nous pouvons, dans une certaine mesure, mettre nos sentiments à l’unisson des sentiments exprimés dans une liturgie chrétienne, et ce n’est pas sans raison que le Seigneur nous a donné l’Oraison dominicale et qu’il a consigné dans sa Parole les prières des Moïse, des David, des Daniel, et autres hommes éminents !
On verra plus tard que dans notre culte public nous avons admis une succession d’actes dont les uns sont arrêtés d’une manière liturgique, tandis que d’autres sont abandonnés à la discrétion du pasteur, combinant d’une manière heureuse, à notre avis, les deux méthodes indiquées plus haut.
Chez les protestants, la prière, comme tous les autres actes du culte, se dit en langue vulgaire. Nous réservons le chant pour les psaumes et les cantiques. La prière doit être prononcée d’une manière naturelle. La prière est dite indifféremment debout et à genoux. Cette dernière position est d’ordinaire réservée pour le culte de famille ou particulier ; nous n’attachons d’ailleurs qu’une importance très secondaire à ces formes extérieures.
Dans plusieurs de nos Églises, il est interdit de circuler pendant l’acte de la prière, afin de lui conserver toute sa solennité et de protéger l’édification de ceux qui prient.
Il n’y a point de règle qui détermine d’une manière absolue les heures qui doivent être consacrées à la prière particulière ; toutefois, nous enseignons à nos enfants à prier soir et matin ; il en est de même du culte de famille ; aux repas, le chef de la famille rend grâces à Dieu de ses bienfaits.
Nous avons appris de la Parole de Dieu qu’il lui est agréable de nous voir prier les uns pour les autres ; non à titre d’intercession, c’est-à-dire avec l’idée que nous ayons aucun mérite devant Dieu sur lequel nous puissions nous appuyer pour solliciter des grâces en faveur de nos frères, non avec la prétention de croire que nos prières valent mieux que celles des autres, Jésus-Christ seul étant notre intercesseur peut seul offrir les mérites infinis que réclame notre pardon, mais parce que les prières des chrétiens pour leurs frères sont des actes de charité et de sympathie qui plaisent au cœur du Père céleste.
Nous prions pour ceux qui nous gouvernent ; nous prions pour nos pasteurs, pour nos parents, pour nos chefs, pour tous les chrétiens, pour nos amis, même pour nos ennemis.
Nous ne prions pas pour les morts ; leur sort est immuablement fixé ; ils sont entre les mains du Seigneur, qui est leur juge. Entre l’éternel bonheur et l’éternelle mort, il y a un grand abîme que nul ne peut franchir.
Travaillons et prions « pendant qu’il fait jour. »
C’est ici la maison de Dieu, c’est ici la porte du ciel. Gen., XXVIII, 17.
Naguère nos pères adoraient Dieu au désert, c’est-à-dire au milieu des bois ou à l’ombre des rochers, à la lueur des torches ou sous l’ardeur du soleil brûlant. Dans ces lieux agrestes, il semble que la pensée des fidèles devait plus aisément s’élever vers le Dieu Sauveur, qui tantôt les délivrait, comme par miracle, des atteintes de l’ennemi, tantôt, dans des vues incompréhensibles, les abandonnait au feu de la persécution. Alors la vie chrétienne était agitée par toutes les vicissitudes et les dangers de l’apostolat ; le culte avait aussi revêtu un caractère particulier de solennelle rudesse et de pieuse exaltation ; mais nul doute qu’il était fréquemment distrait par l’inquiétude, la crainte des surprises, les dangers des temps et les intempéries des saisons. Dans ces assemblées tumultueuses, l’ordre et le silence étaient difficiles à obtenir, et le recueillement devait en souffrir beaucoup.
Aujourd’hui, grâces en soient rendues à Dieu, il nous est permis de l’adorer en toute sécurité dans des édifices convenablement disposés, où l’ordre, la propreté, la décence tiennent la place de plus riches ornements, et dans lesquels chacun de nous doit apporter de saintes dispositions à la prière et au recueillement.
Nous donnons habituellement le nom de Temples aux édifices consacrés au culte, et nous réservons le nom d’Église à l’assemblée chrétienne qui s’y réunit. Toutefois, ce langage n’est pas absolu.
Ceux qui sont étrangers à nos coutumes remarqueront dans nos temples l’absence de toute image peinte ou sculptée. Ce soin scrupuleux que nous avons d’exclure toute représentation des objets de la foi tient au principe spiritualiste chrétien et découle des ordres positifs que Dieu a donnés à son peuple.
Comment pourrions-nous, sans une flagrante inconséquence, pour ne pas dire une coupable infidélité, admettre les images dans nos temples et inscrire sur leurs murs ce second commandement de la loi : « Tu ne te feras aucune image taillée, ni aucune ressemblance des choses qui sont là-haut au ciel, ni ici-bas sur la terre, ni dans les eaux plus basses que la terre ; tu ne te prosterneras pas devant elles et ne les serviras pas (Exode, XX, 4, 5.). »
Que les fidèles, en franchissant le seuil sacré, se rappellent que le temple est une maison de prière, la maison de Dieu, où il reçoit ses enfants pour les nourrir des enseignements de sa Parole, et que ce lieu saint peut devenir, pour ceux qui y cherchent le Seigneur, la porte du ciel, en leur offrant l’occasion de se convertir pour être sauvés.
Le fidèle se rend à sa place accoutumée en gardant le plus profond silence, soigneux de ne point troubler le recueillement de ses frères déjà réunis ; il adresse, dans le fond de son âme, une prière à Dieu pour lui demander l’assistance de son esprit pendant le culte auquel il désire se livrer ; après cet acte, il s’assied et prête au service divin toute l’attention dont il est susceptible, sans oublier le précepte de l’Apôtre (1 Cor., XI) : « L’homme ne doit point tenir sa tête couverte, car celui qui couvre sa tête déshonore son chef, qui est Jésus-Christ. »
Le chant religieux, qui commence et entrecoupe les parties distinctes du service divin, tient aux coutumes les plus anciennes et les plus respectables. Dans tous les âges, les hommes ont éprouvé le besoin d’exprimer leur admiration pour le Créateur et pour ses œuvres par des chants solennels. Moïse entonna plusieurs fois les louanges de l’Éternel ; David descendait souvent de son trône pour saisir la harpe et chanter des hymnes qui, dans tous les âges, servirent d’interprètes aux âmes pieuses ; Jésus-Christ sanctionna cet usage en chantant le cantique ou grand Hallel[1], après avoir célébré la Pâque avec ses disciples.
[1] Le Hallel (hébreu : הלל « Louange [à Dieu] ») est une prière d’institution rabbinique, composée des psaumes 113 à 118. Il est récité lors de la plupart des fêtes juives d’origine biblique ainsi qu’aux jours de louange.
La traduction des psaumes bibliques qui composent notre recueil est due originairement à Clément Marot, l’un des premiers et des plus célèbres poètes français ; ils ont depuis été retouchés par Théodore de Bèze, et plus tard par les docteurs de l’Église de Lausanne.
Les airs sont dus à un musicien d’un grand mérite, nommé Goudimel, qui a été le maître de Palestrina et peut être considéré comme le père de la musique française ; à ces psaumes, empreints de grandeur et de gravité, on a ajouté des cantiques empruntés aux plus grands maîtres. Un bon recueil, composé de ces divers éléments, a été publié par une commission nommée dans ce but. Les fidèles doivent se pénétrer de l’esprit de recueillement et de sainte joie avec lesquels il faut chanter les louanges de Dieu ; cet acte équivaut à une prière, et, quoique nous n’en prenions point ici l’attitude, notre âme s’élève vers le Très-Haut pour exalter ses perfections, adorer ses voies, admirer ses œuvres, et implorer ses grâces les plus signalées.
Après l’invocation du saint nom de Dieu, le pasteur lit les commandements de Dieu. C’est la loi du Sinaï dans toute sa noble et terrible simplicité, sans commentaires, sans retranchements. Le peuple l’écoute, debout, dans l’attitude du respect, et comme en présence du Seigneur, qui la publia de sa montagne sainte avec tout l’appareil de sa gloire et de sa sainteté.
Chacun doit faire un sérieux retour sur lui-même pour sonder son cœur, interroger sa vie passée et ses sentiments de chaque jour, pour voir s’ils sont conformes à la sainte volonté de Dieu, exprimée dans cette loi : « Celui qui a violé le plus petit de ses commandements, dit Jésus, sera tenu le plus petit au royaume de Dieu ; et celui qui a violé la loi en un seul point, ajoute un apôtre, est coupable de toute la loi. » Ces déclarations et tant d’autres aussi clairement exprimées sont de nature à jeter l’âme du fidèle dans un état de trouble et de confusion tel, qu’il éprouvera le besoin de s’humilier profondément devant Dieu ; et c’est pour répondre à ce besoin que le pasteur prononce, au nom du peuple, la confession des péchés suivante :
« Seigneur Dieu, Père éternel et tout-puissant, nous reconnaissons et nous confessons, devant ta sainte majesté, que nous sommes de pauvres pécheurs, nés dans la corruption, enclins au mal, incapables par nous-mêmes de faire le bien, et qui transgressons tous les jours et en plusieurs manières tes saints commandements, ce qui fait que nous attirons sur nous, par ton juste jugement, la condamnation et la mort.
Mais, Seigneur, nous avons une vive douleur de t’avoir offensé, et nous nous condamnons, nous et nos vices, avec une sérieuse repentance, recourant humblement à ta grâce et te suppliant de subvenir à notre misère. Veuille donc avoir pitié de nous, Dieu très bon, Père de miséricorde, et nous pardonner nos péchés pour l’amour de ton Fils Jésus-Christ, notre Sauveur.
Accorde-nous aussi et nous augmente continuellement les grâces de ton Saint-Esprit, afin que, reconnaissant de plus en plus nos fautes et en étant vivement touchés, nous y renoncions de tout notre cœur, et que nous portions des fruits de sainteté et de justice qui te soient agréables par Jésus-Christ, notre Seigneur. Amen ! »
Cette belle prière est l’ouvrage de Théodore de Bèze. On pense qu’il la proféra pour la première fois au colloque de Poissy, alors que la cour de France appela en sa présence les docteurs de l’Église romaine et ceux de l’Église réformée pour les entendre discourir sur les sujets théologiques qui distinguaient leur croyance.
La conférence commençait, lorsque Théodore de Bèze rappela aux augustes assistants qu’il convenait d’ouvrir la séance par l’acte saint de la prière, et il prononça, dit-on, aussitôt l’invocation dont le texte a été conservé jusqu’à nos jours, et où l’on retrouve la substance, sinon presque toutes tes expressions, de la confession des péchés, telle qu’elle est en usage dans notre culte public.
Cette prière est, comme on l’a très bien dit, le recours de la misère de l’homme à la miséricorde de Dieu. Elle exprime le jugement que nous portons sur nous-mêmes, la description de notre nature déchue, l’aveu de nos fautes, de notre douleur et de notre repentir. Après s’être ainsi abaissé en présence de la sainteté redoutable de Dieu, le fidèle se jette dans les bras de sa miséricorde, appuyé sur les mérites de Jésus-Christ, notre seul Intercesseur et Sauveur auprès du Père ; il supplie enfin le Seigneur d’achever en lui sa bonne œuvre, en lui accordant les grâces de son Saint-Esprit, par lequel seul le chrétien peut offrir à son Dieu des fruits qui lui soient agréables.
Après le chant religieux et la lecture d’un ou deux chapitres de la Parole de Dieu, que l’on place, dans plusieurs Églises, au commencement du culte, le pasteur offre à Dieu une prière d’actions de grâces et de louange ; puis il prononce un sermon.
Un sermon est l’explication, le développement et l’application d’une portion de la Parole de Dieu que l’on appelle le texte. Le prédicateur expose, dans son discours, le résultat de ses études et de ses plus profondes méditations ; il exhorte, il censure, il conseille, il console, il instruit, il édifie ; à cet effet, il met en œuvre tout ce que Dieu lui a donné de talents, de savoir et d’éloquence.
Son but est de convaincre, de réveiller, de convertir et d’amener les âmes à Jésus-Christ, et il ne néglige aucun moyen pour y parvenir.
Les fidèles, à leur tour, écoutent avec attention et docilité, soigneux de s’appliquer à eux-mêmes, aux besoins de leur âme et aux exigences de leur position particulière les exhortations pastorales qui leur sont adressées. Ils doivent être plus désireux d’entendre d’utiles vérités que des paroles agréables ou émouvantes ; et ils sont appelés, par les intérêts même de la vérité, à imiter la conduite des fidèles de Bérée, qui consultaient soigneusement les Écritures pour s’assurer si les prédications qu’ils entendaient étaient conformes à leurs déclarations.
Dans la prière liturgique qui suit le sermon, les vœux du peuple de Dieu deviennent plus pressants encore ; il semble qu’à l’imitation du patriarche des anciens temps, il s’écrie : Seigneur ! Je ne te laisserai point aller que tu ne m’aies béni !
Conformément aux ordres de l’apôtre saint Paul, le pasteur prie pour le monarque, pour les magistrats chargés d’administrer la justice ; il prie pour les pasteurs, pour les Églises, pour les pauvres, les malades et les affligés, et pour le troupeau réuni au nom de Dieu. Et, comme les prières de l’homme sont imparfaites, le peuple de Dieu ajoute à celle que le pasteur lui dicte celle que Jésus Christ, notre souverain Docteur, nous a lui-même enseignée : modèle admirable qui exprime à la fois tous les besoins de notre faible nature et toutes les richesses de la grâce de Dieu.
Le Symbole des apôtres, qui suit l’Oraison dominicale, est la déclaration franche et positive des croyances qui sont communes aux chrétiens de tous les âges, et qui nous servent à nous-mêmes de point de ralliement. Cette déclaration est convenable ; car il faut que quiconque entre dans nos temples sache et que nous sachions bien nous-mêmes quels sont les principes qui nous unissent dans un sentiment unanime d’amour chrétien et de conviction religieuse. Le Symbole des apôtres date, comme le titre le porte, des temps apostoliques. Dans l’origine, il constatait uniquement la croyance des chrétiens au Père, au Fils et au Saint-Esprit. La fin est, dit-on, de date plus récente.
La bénédiction, que le pasteur ne donne pas, mais qu’il implore, est empruntée à l’ordre même que Dieu donna à Moïse, quand il lui dit : « Tu béniras le peuple, et tu diras : Que l’Éternel te bénisse et te garde ; que l’Éternel te regarde d’un œil favorable et te fasse grâce ; que l’Éternel tourne vers toi sa face et te donne sa paix. Et il arrivera alors que je bénirai mon peuple. »
À quoi serviraient et nos chants, et nos prières, et nos génuflexions, si Dieu ne les bénissait et ne les acceptait dans sa miséricorde et dans sa grâce ? Que le fidèle courbe donc humblement la tête, qu’il se recueille sérieusement, qu’il demande, et pour lui-même et pour ses frères assemblés, et pour le pasteur qui les édifie, la sainte bénédiction du Seigneur ; qu’il se retire en silence, soigneux de conserver en son cœur les salutaires émotions que Dieu y a produites.
À la porte du temple, un dernier acte l’attend, et c’est un acte de charité ; il entend la voix pieuse des diacres de l’Église qui s’écrient : Souvenez-vous des pauvres, au nom de Dieu ! Et chacun dépose dans le tronc une offrande proportionnée à la mesure de ses ressources et de sa charité, comme un premier témoignage que la foi crée, dans le cœur de l’homme, un principe d’amour abondant en toutes sortes de bonnes œuvres.
Voilà notre culte dans toute sa majestueuse simplicité. Il a ses défectuosités comme toute institution humaine ; il nous reste à en retirer le plus grand profit pour nos âmes en l’entourant de notre respect et en le pratiquant dans un esprit de sincérité, de recueillement et de foi évangélique, nous rappelant le précepte de l’Apôtre :
Que tout se fasse avec ordre et bienséance !
Toutes les fois que deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux. Matt., XVIII, 20.
On est convenu de nommer, chez nous, réunion religieuse une assemblée de chrétiens appelés par un sentiment commun de foi évangélique ; assemblée plus intime que le culte public, moins restreinte que le culte de famille. Les réunions religieuses sont nées du réveil spirituel qui signale nos temps modernes ; les progrès de la liberté en ont favorisé l’extension ; les obstacles que quelques membres de nos Églises, timorés ou indifférents, ont cru devoir leur opposer, loin de les détruire ou de les restreindre, en ont seulement fait ressortir la nécessité et les heureuses conséquences.
C’est surtout dans les réunions religieuses que s’est fait ressentir l’influence des laïques pieux et leur ministère évangélique ; ministère dont il ne faudrait pas exagérer l’étendue, mais dont il convient de reconnaître la légitimité et l’utile influence.
La manière dont les frères s’édifient dans les réunions religieuses ne saurait être déterminée par aucune forme liturgique ; car la spontanéité en fait, avec la ferveur, le charme principal ; d’ailleurs, il n’y a pas grand danger de s’égarer quant aux formes, quand tout l’appareil extérieur se réduit à la lecture de la Parole de Dieu, aux communications fraternelles, à la prière et au chant des louanges de Dieu.
Il convient que, dans ce culte, la Parole de Dieu domine, comme élément essentiel et prépondérant ;
Que les développements qu’on ajoutera à cette Parole sainte soient simples et donnés avec autant de discernement que d’onction ;
Que les prières soient courtes, intimes, sincères ; qu’elles consistent plutôt en demandes humbles et ferventes qu’en longues expositions et en vaines redites ;
Que le chant soit grave, pénétrant, choisi avec goût[2], exécuté avec soin.
[2] Plusieurs réunions emploient un recueil intitulé Chants chrétiens, que nous nous plaisons à désigner comme réunissant des paroles édifiantes et des airs très beaux.
Les réunions religieuses sont l’aliment d’une piété expansive et ardente ; elles pourraient servir de voile aux empiétements d’un esprit sectaire qui disparaîtra plus sûrement sous l’influence d’un mouvement religieux et consciencieux que sous les coups d’une exclusion mesquine ou d’une injuste persécution.
Loin de nous l’idée que les réunions religieuses nuiront à la célébration du culte public. Le culte public durera autant que le monde, parce qu’il y a une tendance constante et naturelle chez les hommes à apporter la sociabilité la plus grande et la plus pompeuse dans l’expression de l’adoration et de l’action de grâces.
L’observation a prouvé que les âmes qui recherchent avec avidité les émotions douces et salutaires que l’on puise dans le cercle étroit de quelques amis chrétiens, sont aussi celles qui se plaisent à grossir les assemblées solennelles, et à rendre ainsi à leur Dieu-Sauveur l’hommage le plus ostensible et le plus éclatant de leur amour et de leur reconnaissance.
Pour moi et ma maison nous servirons l’Éternel. Josué. XXIV. 15.
Il existe chez nous une pieuse et touchante coutume à la pratique de laquelle nous ne saurions apporter trop de soin, et qui, dans tous les âges, a été pour les membres de nos Églises une source de bénédictions et de progrès spirituels. Je veux parler du culte de famille.
Chaque jour le père de famille réunit ses enfants et ses serviteurs autour de la sainte Parole de Dieu, et cette petite Église, étroitement liée par le sang et l’affection, se présente devant le Seigneur pour lui rendre grâces de ses bienfaits et s’instruire de ses révélations célestes.
Ce culte, si simple et si touchant, est à la fois le symptôme et l’aliment d’un vrai développement de vie religieuse. Il fut la force et la consolation de nos pères pendant les mauvais jours : il sera un élément de progrès et de bénédiction pour nos enfants s’ils en conservent la précieuse tradition.
C’est encore ici un de ces actes qui demandent l’élan de la ferveur bien plus que le frein d’une forme liturgique ; néanmoins quelques précautions, dictées par l’expérience, peuvent lui imprimer un caractère précieux de durée et d’utilité pratique : choisir une heure qui contrarie le moins possible l’ordre habituel de la maison, afin qu’on ne soit point tenté par certains dérangements de suspendre le culte ou de ne le célébrer que d’une manière irrégulière.
— Se bien dire d’avance que de la même manière que, dans une maison bien réglée, les repas ne souffrent aucun retard, la prière de famille, repas substantiel des âmes, ne doit, en aucune manière, être interrompue ni contrariée.
— Considérant que ce n’est pas la multitude des paroles qui nourrit les âmes, mais l’excellence de ces paroles, la bénédiction d’en haut qui les accompagne et les dispositions morales avec lesquelles on les reçoit, il convient que le culte de famille soit fort court. Il peut consister dans la lecture d’un chapitre ou même d’une portion d’un chapitre de l’Ancien ou du Nouveau Testament, accompagné d’une prière dans laquelle le chef ou l’un des membres de la famille appelle sur les siens et sur lui-même la bénédiction de Dieu.
— Le dimanche soir on pourrait ajouter la lecture de quelques pages d’un livre d’édification, où les vérités de l’Évangile seraient exprimées d’une manière très simple et frappante. Il convient que la chambre où se réunit la famille soit disposée avec l’ordre et la propreté qui annoncent, de la part de ceux qui la changent momentanément en un temple saint, un profond respect pour l’acte religieux qui doit y être célébré.
Chrétiens, n’oubliez pas que Dieu accorde des bénédictions spéciales aux familles qui se réunissent pour le servir et l’adorer !…