O Dieu, aie pitié de moi selon ta gratuité ; selon la grandeur de tes compassions, efface mes forfaits.
D’entrée il faut avertir que quoique David fasse mention de Dieu, quand il dit : Ô Dieu, sans parler de Jésus-Christ, vous ne croyiez pas qu’il veuille parler de Dieu, comme un mahométan ou comme un païen le ferait ; savoir, de parler d’un Dieu vague, d’une divinité purement telle ; car David parle au Dieu de ses pères, qui s’était révélé dans ses promesses. Le peuple d’Israël n’avait pas un Dieu tel que nos moines, s’amusant dans leurs spéculations à méditer sur la divinité considérée en elle-même, l’ont créé ; c’est une telle idée de Dieu que chacun doit fuir, s’il ne veut point périr. Car la nature humaine, et un Dieu purement considéré en soi-même, sont ennemis irréconciliables ; et il ne se peut faire que cette divinité absolue n’opprime et n’accable l’homme de la vue de sa majesté, comme l’Écriture l’indique en plusieurs endroits.
Que personne donc, ne s’imagine que David parle avec un Dieu absolu, ou considéré purement comme Dieu ; mais il parle avec un Dieu revêtu et voilé de sa parole et de ses promesses, de sorte que du mot de Dieu, quand il dit : Ô Dieu, il n’en faut point exclure Jésus-Christ touchant lequel la promesse a été faite à Adam et aux patriarches ; c’est ce Dieu révélé et revêtu de ses promesses que nous devons embrasser si nous ne voulons pas tomber dans le désespoir.
C’est là une différence essentielle qu’il faut faire entre les prophètes et le peuple de Dieu, quand ils parlent de Dieu, et les autres nations qui ne connaissaient point Dieu en ses promesses ; car les nations parlaient d’un Dieu, sans rien savoir de sa parole, selon les pensées et les imaginations de leurs cœurs. Mais les prophètes parlent d’un Dieu revêtu de ses promesses et révélé dans sa parole. Un tel Dieu, voilé et caché ainsi sous de si douces promesses, peut être embrassé et envisagé avec joie et avec confiance ; au lieu que nous ne pouvons converser avec un Dieu purement tel, que comme un pot de terre qui se heurterait contre un mur d’airain contre lequel il se briserait. C’est pourquoi Satan tâche sans cesse de nous mettre devant les yeux et de nous représenter ce Dieu purement tel dans sa grandeur et dans sa majesté, afin qu’oubliant les douces promesses de grâce et d’amour que ce Dieu nous fait en Jésus-Christ, nous ne pensions et nous ne nous arrêtions qu’à cette idée de la divinité et à son jugement. Par là, nous tombons infailliblement dans le désespoir.