Aberdeen
Que la grâce, la miséricorde et l’amour soient avec vous. Vos lettres me sont un vrai rafraîchissement. Celui qui tient les issues de la mort a été plein de bonté envers son enfant.
A cause de vous, Madame, je sens la nécessité de la vigilance, car il en est plusieurs qui croient suffisant d’être avancé dans la sanctification pour ne plus agir, et qui répètent sans cesse : je suis malade, comme si c’était un moyen de guérison ; se plaindre leur semble un bon remède contre le péché. Quant à vous, Madame, j’espère que vous n’agissez point ainsi en ces temps de mort spirituelle où plusieurs n’ont plus de force ni d’ardeur pour le service de Christ. Tenez-vous dans une continuelle communion avec Christ. Plus vous serez près de Lui, plus vous serez. préservée du monde, mieux vous apprendrez à connaître son amour. Travaillez donc avec courage, occupez-vous de Lui chaque jour, le plus longtemps possible. Prisonnier, dans l’exil, à cause de Lui, je sens qu’Il a gémi sur moi comme sur un des siens (Jérémie 31.20 ; Ésaïe 45.11). Je ne sais que faire, tant je suis entouré et pressé par son amour. Mais que ce fardeau est léger ! qu’il est doux ! qu’il est précieux ! J’aime tellement mon Sauveur que s’Il n’était pas au ciel je ne voudrais pas y aller sans Lui. Qui saura raconter ce qu’est l’amour de Jésus ! … Nul, si ce n’est celui qui porte sa croix avec joie et résignation. Comment se peut-il qu’Il daigne le placer sur une si chétive créature ? Cet amour assurément ne me coûte rien, il est purement gratuit et il me serait impossible d’exprimer la douceur infinie qu’il y a de se sentir ainsi aimé.
Croyez-le, Madame, il est beaucoup d’hommes qui se jouent du christianisme et s’en débarrassent dès que cela leur convient. Moi aussi, j’avais cru que c’était chose facile d’être chrétien, et qu’il ne fallait que faire un pas loin du monde pour trouver Dieu. Mais combien il y a de tours et de détours, de hauts et de bas, et de sentiers divers avant d’atteindre le guet. Soir et matin, il me faut parlementer avec ma raison. Quand je me réveille, je trouve enfoncés dans mon cœur les traits de son amour. Pourquoi ne le glorifierais-je pas ? Qui unira sa voix à la mienne afin que nous chantions en chœur le grand amour dont il nous a aimés.
Quant aux amis, prenez-y garde ; la terre la mieux cultivée peut sécher sous leurs pas. Dieu veuille me faire la grâce d’agir avec le monde comme un maître habile avec un serviteur fripon. Je ne lui confierai rien, afin qu’il ne puisse jamais me tromper. Je prie Dieu afin que je ne place ma joie ni mon attente en ce monde, pour ne point ôter à Christ ce qui lui appartient. Selon ma faible expérience, je vous conseille, Madame, de remettre à Christ le sceau de vos affections, que ce soit Lui seul qui dirige votre bâtiment, rivez-le à la maison de David (Ésaïe 22.23). Oh ! puisse-t-Il être toujours mon souverain et unique tuteur ! Loin de moi ceux qui ne tiennent à rien et se jouent de tout. Si j’étais un d’eux, Jésus aurait beau jeu à me dire : « Tu as été averti, et cependant il faut que tu sois mis à l’épreuve une fois encore avant que tu mérites quelque confiance. »
Puisse la présence du grand Ange de l’alliance de grâce être avec vous et votre cher enfant.