La philosophie de Moïse se divise en quatre parties : la partie historique ; la partie légale proprement dite, toutes les deux du ressort de la morale ; la troisième, relative aux cérémonies religieuses et appartenant à la contemplation de la nature ; et enfin la quatrième, la partie théologique, celle qui concerne l’explication des saints mystères. Platon l’appelle la contemplation des mystères véritablement sublimes ; Aristote, la métaphysique. Et ce que Platon nomme la dialectique est, comme il le dit lui-même dans son Politique, une science au moyen de laquelle on trouve l’explication de ce qui est. Tout homme juste et sage doit l’acquérir, non pour dire ou faire rien de et qui se dit ou se fait chez les hommes, comme les dialecticiens d’aujourd’hui, qui se livrent à l’étude de la sophistique, mais afin de pouvoir faire ou dire ce qui est agréable à Dieu, le tout selon ses forces. La véritable dialectique, philosophie comme incorporée à la vérité, puisque c’est elle qui examine les choses, qui interroge les facultés et les forces de l’âme, s’élève vers la plus noble de toutes les essences, et ose même s’élancer jusqu’au trône du Dieu de l’univers ; ce n’est pas l’expérience des choses mortelles qu’elle professe, mais la science des choses divines et célestes, d’où dérive la manière dont il faut user des choses humaines, et dont nous devons agir et parler. C’est donc avec beaucoup de sagesse que l’Écriture nous invite à cette étude par ce conseil :
« Devenez des changeurs éprouvés, ne retenez que ce qui est de bon aloi, rejetez le reste. »
Car cette dialectique est la science d’établir des distinctions entre les diverses choses perceptibles à l’intelligence, et de prendre séparément les êtres pour les faire envisager l’un après l’autre sous leur caractère propre ; ou la faculté de diviser les choses par genres, et de descendre jusqu’aux espèces les moins subdivisibles, et de présenter chaque être individuellement, et tel qu’il est. C’est pourquoi elle seule nous conduit, comme par la main, vers la véritable sagesse, divine faculté de connaître les choses réelles en tant que réelles, parfaite qu’elle est, et libre de toute passion. Mais cela ne peut advenir sans l’assistance du Sauveur, qui, en écartant par sa divine lumière les nuages de l’ignorance, qu’une vie perverse, avait répandus sur les yeux de notre âme, les rend à leur primitive énergie, afin que nous puissions nettement distinguer s’il est Dieu ou homme. C’est lui qui nous montre, d’une manière positive, comment il faut connaître Dieu et nous-mêmes ; c’est lui qui révèle à qui bon lui semble, et, selon la mesure de l’intelligence humaine, le père de toutes choses. Nul ne connaît le Fils, si ce n’est le Père, et nul ne connaît le Père, si ce n’est le Fils, et celui à qui le Fils l’aura révélé. L’apôtre a donc eu raison de dire :
« C’est par révélation que j’ai reçu la connaissance de ce mystère, ainsi que je viens de vous l’écrire en peu de mots, afin que vous puissiez voir, par la lecture que vous en ferez, quelle est l’intelligence que j’ai du mystère de Jésus-Christ. »
Afin que vous puissiez, dit l’apôtre. Il savait que plusieurs n’avaient été nourris que de lait, et pas encore de viandes solides, que même le lait n’avait pas été leur simple aliment.
Il y a trois manières de comprendre l’Écriture ; ou elle représente quelque figure, ou elle établit quelque précepte de morale, ou elle prédit l’avenir. Je sais bien que l’intelligence de ces trois sens est le propre des hommes parfaits. Car l’Écriture, en ce qui touche son interprétation, n’est pas la ligne de Mycon, comme disent les gens à proverbes. Mais ceux qui veulent retirer des fruits de l’enseignement divin, ne doivent s’approcher de l’Écriture qu’après s’être fortifiés le plus possible dans la dialectique.