N’est-il pas étrange, Seigneur, que le monde entier retentisse du bruit de la sagesse, des victoires, des découvertes, des crimes même de tes créatures, et que ta propre gloire reste inaperçue de ces yeux si clairvoyants ? Comment se fait-il qu’il y ait tant d’éloges pour ceux qui déplacent quelques pelletés de terre, et un si profond silence pour Celui qui a créé l’univers ? Pourquoi cette admiration pour l’astronome qui découvre une étoile, et ce calme froid à la pensée de Dieu qui a tiré des étoiles innombrables du néant ? Pourquoi puis-je me faire écouter en parlant d’un génie que tu as créé, tandis que je fatigue si vite en parlant de toi, auteur de ce génie ? Quelle étrange répulsion pour le bienfaiteur ! Tous les matins, des êtres raisonnables voient surgir ton soleil ; tous les soirs, apparaître des milliers d’astres, et cela sans étonnement, sans pensée même pour celui qui les a lancés dans l’espace ! Oh ! quelle folie, si ce n’est pas de l’ingratitude ! quelle stupidité, si ce n’était du péché ! Oui, le mal a obscurci notre entendement ; nous ne te voyons pas parce que nous ne voulons pas te voir. Oh ! mon Dieu, donne-moi de te regarder face à face ; de te chercher dans toutes tes œuvres ; de voir partout les signes de ta puissance et de ta bonté. Donne-moi de les montrer à mes frères, de diriger vers toi leurs pensées, d’élever à toi leurs regards, à travers les globes infinis qui éblouissent l’univers. Et quand ils seront écrasés de ta grandeur, donne-moi de leur montrer alors ta miséricorde dans ton Évangile. Oh ! si j’étais plus pénétré de reconnaissance pour tes bienfaits, je saurais bien rappeler ton nom et ta gloire aux hommes qui les oublient. Mais, hélas ! je tombe moi-même dans les torts que je leur reproche. Je m’arrête souvent en admiration devant les œuvres humaines, au lieu de remonter à la source de l’humanité. Pardonne, Seigneur, et désormais donne-moi de m’élever, de la créature au Créateur ; de la matière à l’Esprit ; des œuvres chrétiennes même vers Celui qui les a inspirées !