Quand donc David, pécheur, prie et dit : Aie pitié de moi, il semble qu’il parle contre le décalogue, dans lequel Dieu nous défend d’être pécheurs, et menace ceux qui le seront, de sa colère ; quel rapport y a-t-il d’un pécheur avec un Dieu juste, saint, véritable, ennemi des pécheurs, qui, de sa nature, ne peut point souffrir de péchés ? Et pourtant ce David, qui, dans ce psaume s’avoue pécheur, et qui dit : Je connais mon péché, ce David, dis-je, invoque Dieu, et dit : Aie pitié de moi ; il semble que ce soient deux choses incompatibles. Ainsi David nous apprend ici dès le commencement, une excellente science et un art céleste que la loi ne sait point et n’apprend point, et que toute la raison et la sagesse humaine ne sauraient comprendre, mais que le Saint-Esprit enseigne seul.
Voici ce que toute la nature dit et établit : Je n’oserais lever les yeux au ciel, je suis épouvanté à la vue de ce Dieu, car je sais, et que je suis pécheur, et que Dieu est juste, pourquoi donc prier ? C’est ici que commence un combat extrêmement difficile ; car le cœur de l’homme sentant et voyant son péché, se résoudra ou d’attendre pour prier qu’il aie ou qu’il voie en lui quelque dignité, ou il se tournera vers les moyens humains, et cherchera des consolations chimériques : il voudra satisfaire et expier ses péchés afin qu’il puisse s’approcher de Dieu avec quelque confiance, en sa propre dignité, et qu’il puisse lui dire aie pitié de moi ; c’est l’inclination perpétuelle de la nature, mais inclination très pernicieuse et très dangereuse, car par là, le cœur s’élève dans la confiance en sa propre justice et croit que Dieu peut être apaisé par ses bonnes œuvres, ce qui est un blasphème contre le mérite et la satisfaction de Jésus ; d’ailleurs, nous sommes nés dans le péché, ainsi, si nous ne voulons prier que lorsque nous nous sentirons purs de tous péchés, nous ne prierons jamais.