Leurs salles de bains sont des appartements construits avec une artificieuse recherche, transparents, mobiles, à peine recouverts d’une toile fine et légère ; des sièges d’or et d’argent, des vases innombrables de ces mêmes métaux, les uns pour le service des tables, les autres pour l’usage du bain, y brillent de toutes parts ; les réchauds même qu’on place sur les charbons ardents y sont d’or et d’argent. Leur intempérance est montée à un tel excès, qu’elles mangent et s’enivrent dans le bain. Au milieu de cette profusion de richesses et de meubles précieux de toute espèce, dont elles s’environnent pour satisfaire une insupportable vanité, vous croiriez facilement qu’elles veulent se mettre à l’enchère. C’est l’orgueil qui les inspire et les pousse à tant d’insolence ; par-là, elles reprochent aux hommes de ne pouvoir égaler leur faste et d’être vaincus par les femmes ; par-là, elles affichent une excessive délicatesse à qui les jouissances ordinaires du bain ne peuvent suffire, si elles ne sont relevées par tout cet appareil fastueux ; par-là, elles méprisent la simplicité avec laquelle se baignent les femmes moins riches, et s’attirent mille malédictions ; par-là, enfin, elles enveloppent dans leurs filets les malheureux qui se laissent éblouir à l’éclat de l’or. Elles profitent de leur ignorance, de ce qui est bon et honnête, pour s’en faire des admirateurs et des amants, et n’épargnent aucun artifice pour se déguiser aux yeux de ces hommes, à qui bientôt elles se montreront toutes nues. Elles s’enveloppent devant leurs maris d’une affectation de fausse pudeur, et semblent craindre de se déshabiller devant eux ; mais tout étranger qui pénètre dans leur maison peut les voir, s’il le désire, et les contempler nues dans le bain. Elles les convient à ce spectacle, et leur montrent leur corps comme s’ils devaient l’acheter et le revendre. « Ne vous baignez pas dans un bain de femmes, disait autrefois le poète Hésiode ; » maintenant les mêmes bains sont communs aux deux sexes, qui se plongent ensemble et sans rougir dans ces eaux impudiques où les flammes impures de l’amour s’allument naturellement par la licence des regards, et où toute pudeur se noie et s’éteint. Les femmes que le sentiment de la pudeur n’a pas encore entièrement quittées excluent, il est vrai, les étrangers de leur présence ; mais elles se baignent devant leurs esclaves, se montrent toutes nues à leurs regards, et, se faisant frotter par leurs mains, permettent au moins à la volupté, que la crainte seule empêche peut-être d’aller plus loin, mille attouchements impudiques. Ces esclaves, introduits en présence de leurs maîtresses nues, se dépouillent comme elles de toute retenue, et s’accoutument à mesurer leur crainte sur l’audace de leurs désirs. Les anciens athlètes, rougissant de paraître nus en public, couvraient avec soin, avant de descendre dans la lice, les parties honteuses du corps que la voix de la nature nous crie de ne pas montrer ; mais ces femmes, dépouillant leur pudeur avec leur chemise, veulent à tout prix paraître belles, et proclament malgré elles leur impureté et leur corruption. Tout leur corps laisse voir le désordre de leur concupiscence, comme la peau d’un hydropique trahit les ravages de la maladie qui le dévore. Il suffit de les voir pour les juger. Il faut donc que les hommes donnent aux femmes de généreux exemples de modestie ; ils faut qu’ils rougissent de paraître nus devant elles ; il faut qu’ils évitent et fuient avec le plus grand soin ce spectacle lubrique et dangereux. « Celui qui regarde une femme avec trop de curiosité, nous dit l’Écriture, a déjà péché. » Les femmes doivent, dans leurs maisons, éprouver une pudique honte de leurs parents et de leurs domestiques ; dans les rues, des passants ; dans le bain, de leurs femmes ; dans la solitude, d’elles-mêmes ; partout enfin du Verbe, qui est partout, et sans qui rien n’a été fait. Car le plus sûr moyen de ne jamais tomber, c’est d’être fermement persuadés que Dieu nous voit toujours et partout.