Nous donnerons maintenant quelques exemples de cette inébranlable foi et de cette indomptable constance que l’Église avait pu invoquer de tout temps et que montrèrent, même à cette époque déjà dégénérée, plusieurs de ses enfants. L’historien répugne toujours à entrer dans le détail des barbaries atroces et des tortures révoltantes infligées aux persécutés. Mais, dans un temps comme le nôtre, où chacun goûte le repos et la sécurité, n’est-il pas juste de rappeler à quel prix, dans un lointain passé, nos pères en la foi ont conquis le riche héritage dont nous jouissons maintenant ?
L’une des plus anciennes scènes de persécution à laquelle nous puissions assister eut lieu à Abitina, ville de Numidie. Un certain nombre de chrétiens, parmi lesquels on mentionne un tout jeune enfant, avaient été arrêtés chez un lecteur de l’Église. Ils étaient réunis pour entendre la lecture de la parole de Dieu et prendre part à la communion. Conduits à Carthage, pour comparaître devant le proconsul, ils chantèrent des hymnes de louange tout le long de la route. Plusieurs d’entre eux furent mis à la torture pour provoquer les confessions des autres. Les exclamations et les phrases entrecoupées, que les tourments leur arrachèrent, nous ont été en partie conservées, et elles confirment la crédibilité du récit. Elles semblent aussi montrer une grande conformité spirituelle entre eux et nous.
Le sénateur Dativus est mis à la question le premier. « Quelle est ta condition ? lui demande le proconsul. Assistais-tu à cette réunion ? — Je suis chrétien, répond-il, et j’y assistais. — Où se tenait-elle et qui la présidait ? » demande encore le proconsul ; et, sans attendre la réponse, il ordonne de mettre Dativus sur le chevalet et de le déchirer avec des ongles de fer.
Mais à peine les bourreaux ont-ils ôté à Dativus ses vêtements et apporté les ongles pour procéder à leur horrible besogne, qu’un autre prisonnier, nommé Thélica, fend la foule en s’écriant : « Nous sommes tous chrétiens ; tous nous étions présents à cette assemblée. » Exaspéré par une pareille interruption et une aussi intrépide confession de foi, le proconsul le fait battre cruellement et ordonne de l’appliquer lui aussi sur le chevalet. Mais la torture ne put vaincre la patience et le courage de cet infortuné. Il faisait des remontrances à ses persécuteurs ou appelait Dieu et Christ, le Sauveur, à son aide. « Vous avez tort, malheureux que vous êtes, disait-il ; vous déchirez un innocent ; nous ne sommes ni des meurtriers, ni des voleurs. O Dieu ! aie pitié de moi ! Donne-moi la force de souffrir pour ton nom ! Je te rends grâces, et pourtant je suis incapable de le faire ! » Le proconsul, l’entendant crier, se met à l’outrager. « Tu commences maintenant, lui dit-il, à goûter les souffrances dues au crime. » Et Thélica, comme s’il eût déjà participé à la gloire future : « Ne dis pas : au crime, s’écrie-t-il, mais : à la gloire ! Je rends grâces au Roi des rois. Je le vois ce Royaume éternel, impérissable ! O Seigneur Jésus, nous sommes chrétiens ; nous sommes tes serviteurs ; tu es notre espérance ! O Dieu, le plus saint, le plus élevé, tout-puissant ! nous te louons pour l’amour de ton nom ! — Il te fallait obéir aux ordres de l’empereur, réplique le proconsul. — Je ne respecte aucune autre loi que la loi de Dieu », répond Thélica, le corps épuisé, mais l’âme ferme ; « c’est cette loi qui m’a été enseignée, que je veux garder, pour laquelle je saurai mourir. Cette loi me rendra parfait ; il n’y en a point d’autre ! »
Dativus, déchiré lui-même sur le chevalet, l’encourageait et priait. « O Christ, s’écriait-il, viens à mon aide ! Aie pitié de moi, je t’en conjure. Préserve mon âme de toute chute. Donne-moi la force de souffrir ! »
Lorsque le tour du lecteur fut arrivé, le proconsul lui dit : « Tu n’aurais pas dû les recevoir dans ta maison. » Le lecteur : « Je ne pouvais faire autrement que de recevoir mes frères. — Les ordres de l’empereur, dit le proconsul, devaient avoir plus d’autorité à tes yeux. — Dieu est plus grand que l’empereur. O Seigneur Jésus-Christ, donne-moi la patience ! — As-tu dans ta maison, demande le proconsul, quelques-uns de vos livres sacrés ? — Oui, j’en ai ; mais ils sont dans mon cœur. »
Parmi les prisonniers se trouve une jeune fille nommée Victoria, dont le père et le frère sont encore païens. Son frère vient au tribunal pour chercher à lui persuader de renoncer à sa religion, et pour obtenir, par conséquent, sa libération. Lorsqu’il l’entend déclarer d’une voix ferme qu’elle est chrétienne, il prétend qu’elle n’est pas dans son bon sens. — « Point du tout, répond-elle. Telle est ma conviction, et jamais elle n’a varié. » Le proconsul lui demande alors si elle ne veut pas s’en aller avec son frère. « Non, réplique-t-elle, parce que je suis chrétienne. Mes frères, ce sont ceux qui obéissent aux commandements de Dieu. »
Le proconsul pensait pouvoir au moins intimider le petit garçon. Mais la puissance de Dieu ne se montre pas moindre dans cet enfant : « Fais ce que tu voudras, répond-il au magistrat ; je suis chrétienk. »
k – Ruinart, Acta Sincera, 415-422.
Un autre confesseur du nord de l’Afrique, Félix, évêque de Tubzocal, résista à tous les efforts faits pour l’amener à livrer son exemplaire de la Bible. « Je possède nos livres sacrés, répondit-il, mais rien ne pourra me décider à les livrer. Il vaut mieux me brûler que brûler les Saintes Écritures. Il vaut mieux obéir à Dieu qu’aux hommes. »
l – Ainsi nommée dans les Acta. On suppose que c’est Thibaris.
Eusèbe nous a laissé une description des tourments subis par les martyrs d’Egypte et d’Orient. Elle est assez étendue et vraiment déchirante. Parfois il parle en témoin oculaire.
« J’ai assisté, dit-il, au massacre de plusieurs chrétiens à la fois. Les uns étaient brûlés vifs ; d’autres décapités et en tel nombre que le glaive de l’exécuteur s’émoussait et se brisait entre ses mains. Il était merveilleux de voir des hommes de haute naissance ou riches, des savants, des philosophes renommés, préférer à toutes choses le témoignage rendu à Jésus-Christ. » Mais, dans son admiration excessive pour le martyre, Eusèbe ne sait pas assez distinguer entre ceux qui se résignent patiemment à la mort et ceux qui par fanatisme la recherchent. Il y en avait, nous raconte-t-il, qui n’attendaient pas qu’on les saisit, mais couraient au tribunal, proclamaient qu’ils étaient chrétiens et se soumettaient à la sentence prononcée en chantant des hymnes de louange.
[H. E., liv. VIII. — M. de Pressensé voit dans cette conduite des chrétiens le signe de ses (de l’Église) progrès, mais aussi le symptôme d’une certaine altération du sentiment religieux. Hist. des trois premiers siècles, etc., 2e série, I, 290.]
On n’employait pas seulement contre les chrétiens les officiers de justice ; on les abandonnait à la fureur de la multitude. On les assaillait avec des massues, des bâtons, des fouets, des cordes. Les bourreaux s’ingéniaient à essayer de dompter l’énergie des martyrs, ou à prolonger leur agonie. On attachait solidement à de fortes branches d’arbre ployées les membres des victimes, puis on laissait aller ces branches, et les martyrs étaient déchirés en deux. D’autres étaient mis sur le chevalet, les mains liées sur le dos, et non seulement leurs membres étaient démesurément tendus, mais on leur déchirait tout le corps avec des pinces. D’autres étaient pendus par une main, d’autres crucifiés la tête en bas. D’autres, enfin, après avoir eu leurs pieds mis dans les ceps, aussi distants que possible, étaient battus jusqu’à la mort. Les patients étaient soutenus par la sympathie et l’admiration de la multitude. Des femmes se précipitaient en foule pour baiser le bord de leurs vêtements ; on ramassait et on gardait précieusement, pour alimenter la foi et la piété de ceux qui survivaient, leurs cendres jetées au vent ou leurs ossements restés sans sépulture.
La Palestine fournit, dans les récits qui nous ont été conservés, un contingent de martyrs particulièrement fort. Non que la persécution ait été plus violente là qu’ailleurs, mais parce que l’historien Eusèbe vivait à Césarée. La persécution commença dans cette ville, et plusieurs évêques des environs, qui y avaient cherché un refuge, montrèrent, par leur exemple, le pouvoir de la foi. L’un d’eux fut traîné à l’autel, on lui mit de force dans la main droite l’offrande impie, puis il fut renvoyé comme ayant sacrifié aux dieux. Un autre, auquel on infligeait le même traitement et qui protestait hautement contre une imputation aussi outrageante, fut réduit au silence par de nombreux coups sur la bouche et entraîné ensuite violemment loin de l’autel. On n’en inscrivit pas moins son nom parmi ceux des chrétiens qui avaient sacrifié aux dieux.
[Martyrs de Palestine, chap. 1. Pierre, évêque d’Alexandrie et martyr, raconte que des chrétiens furent jetés à terre et que, dans leurs bouches ouvertes de force et bâillonnées, on introduisit du vin et de la viande des sacrifices. A d’autres, on mettait des charbons ardents et de l’encens dans les mains, et on les forçait à les jeter sur l’autel. Êpître canonique, chap. 14.]
En Palestine, comme dans d’autres parties de la Syrie, on peut relever plusieurs actes d’un courage religieux non moins éclatant, mais plus raisonné que ce n’avait été parfois le cas en Egypte. Nous citerons, par exemple, Apphianus. C’était un jeune homme riche, de trente ans à peine, né en Lycie et qui avait étudié dans l’école de Béryte. Il quitta la maison paternelle pour pouvoir mener une vie chrétienne, et devint un disciple d’Eusèbe, à Césarée. On en était alors à la troisième année de la persécution. Les crieurs publics proclamaient que tous, hommes, femmes et enfants, devaient se rendre dans les temples. Les tribuns militaires appelaient les citoyens l’un après l’autre d’après leurs listes, et les païens se précipitaient de toutes parts aux autels. Profitant d’un moment où personne ne pouvait le voir, Apphianus quitte la maison d’Eusèbe et se rend au forum. Justement le proconsul Urbanus faisait une libation. Traversant sans bruit la garde qui l’environnait, Apphianus arrive près de lui et saisit sa main droite. Puis, d’un ton particulièrement sérieux, il l’exhorte à abandonner la voie erronée dans laquelle il marche, en ajoutant qu’il a grand tort d’abandonner, pour adorer des idoles et des démons, le culte du seul vrai Dieu. Il n’en peut dire davantage. Les soldats s’emparent de lui, il est accablé de coups et jeté en prison. Le lendemain, après avoir subi la torture pendant la nuit entière, il comparaît de nouveau, et les tourments les plus cruels sont employés pour le forcer à sacrifier. Enfin, le troisième jour, les bourreaux, dont tous les efforts n’ont pu triompher de sa constance, le jettent à la mer, où il est noyé.
Quelques chrétiens de la ville de Gaza s’étaient réunis pour lire la Bible. On les arrête et on les met à la torture. L’un d’eux, une femme, odieusement insultée et violentée, manifeste à haute voix son indignation contre l’empereur, qui confie à des magistrats aussi iniques l’administration de l’empire. Aussitôt on la soumet à de nouvelles tortures, et une femme de la foule en est si vivement impressionnée qu’elle s’écrie : « Combien de temps tourmenteras-tu encore ma sœur avec tant de cruauté ? » Dans sa rage, le magistrat ordonne de s’emparer d’elle et de la conduire de force à l’autel. Elle résiste si bien à tout effort pour l’amener à sacrifier, qu’elle renverse le feu et l’encens. Aussi les deux femmes sont-elles liées et brûlées ensemble.
Au même moment, un autre confesseur nommé Paulus était condamné et exécuté. Il supporta la mort avec un courage héroïque. Ayant prié le bourreau d’attendre quelques instants avant de frapper, il se mit à prier Dieu à haute et intelligible voix, intercédant en faveur de ses compagnons de martyre, et le suppliant d’accorder bientôt la paix et la liberté à l’Église ; il pria pour les Juifs et les Samaritains ; il pria pour que les païens, encore plongés dans l’ignorance et dans l’erreur, pussent apprendre à connaître le vrai Dieu. Il pria pour la multitude qui l’entourait. Enfin, « ô douceur merveilleuse ! » s’écrie l’historien, qui nous raconte ces faits, il pria pour le juge qui l’avait condamné à mort, pour les fonctionnaires de l’empire et pour son bourreau lui-même, demandant à Dieu de ne point leur imputer leur péché.
Romanus, diacre et exorciste de Césarée, était venu à Antioche lors de la démolition de l’église de la première de ces villes.
[A l’origine, le pouvoir d’exorciser était considéré, dans l’Église, comme un don spécial. « Un exorciste n’a pas besoin d’être ordonné, disent les Constitutions Apostoliques, liv. VIII, chap. 26, parce que le don qu’il a lui vient de Dieu, par Christ et par l’inspiration du Saint-Esprit. » — Plus tard, les exorcistes formèrent un des ordres inférieurs du clergé. Dict. Christ. Antiq. Art. Exorcisis.]
Voyant tant de personnes de tout sexe et de tout âge s’approcher en foule pour sacrifier aux idoles, il ne put s’empêcher de blâmer à haute voix leur conduite. Saisi aussitôt, il est condamné à être brûlé vif. On l’attache au poteau, et le bois est entassé autour de lui ; les exécuteurs attendent l’ordre de l’allumer. Romanus s’écrie alors : Où donc est le feu ? et, sur cette parole, on le condamne à avoir la langue coupée. Il supporte cette opération avec un courage indomptable, et ce n’est qu’après de longs jours de souffrance en prison, qu’il obtient enfin la couronne du martyrem.
m – Martyrs de Palestine, chap. 2.
Un jeune chrétien égyptien avait accompagné un certain nombre de confesseurs aux mines de Cilicie. Il en revenait avec quatre autres personnes, et traversait la Palestine, lorsque les gardes des portes de Césarée les arrêtèrent et les conduisirent devant le proconsul Firmilien. Celui-ci lui demande d’abord son nom. Mais le jeune Égyptien ne veut pas donner celui qu’il a reçu à sa naissance, en l’honneur d’une divinité païenne, et donne à la place le nom d’un des prophètes de l’Ancienne Alliance. Quelque peu surpris, le proconsul lui demande son lieu d’origine, et il est plus étonné que jamais en l’entendant répondre : Jérusalem. Il y avait près de deux cents ans, en effet, que la capitale juive se nommait Ælia Capitolinan. Après quelques instants de réflexion, le proconsul, plein de soupçons, ordonne de l’appliquer à la torture pour qu’il dise où Jérusalem est située. « C’est la cité des justes, répond le jeune chrétien, et personne n’y peut être admis, s’il n’est tel. Elle est située bien loin du côté de l’orient, vers le soleil levant. » Firmilien ne doute plus que les chrétiens ne se réunissent dans quelque ville de l’Orient, pour susciter une guerre civile. Il fait donc torturer de nouveau ce malheureux jeune homme pour essayer d’obtenir des aveux plus circonstanciés, et le condamne enfin à mort comme ennemi de l’État.
n – Ce ne fut qu’à l’époque de Constantin que Jérusalem reprit son ancien nom.
Théodosia, de Tyr, jeune fille de dix-huit ans, donna aussi l’exemple d’un courage et d’une fidélité étonnantes. Plusieurs confesseurs avaient été cités devant le tribunal. Elle s’approche d’eux pour les saluer et peut-être aussi, comme l’historien paraît le supposer, pour leur demander de se souvenir d’elle lorsqu’ils seraient en présence du Seigneur. Comme si elle eût commis le plus atroce des crimes, les soldats s’emparent d’elle et la conduisent devant le gouverneur, et celui-ci ordonne de lui déchirer les chairs jusqu’aux os avec des instruments de torture… On la jette enfin à la mer, respirant encore et conservant sur son visage l’expression de sa joie et de sa sérénité intérieures.
Les traitements infligés aux chrétiens du Pont furent plus odieux encore, s’il est possible, que ceux qu’avaient eu à subir leurs frères d’Egypte et de Palestine. Aux uns, on perça les doigts de toute leur longueur, à l’aide de roseaux acérés introduits sous leurs ongles. Aux autres, on versa dans le dos du plomb fondu et bouillant. Pour d’autres, enfin, on inventa des tortures qui, dit l’historien, défient toute description. « Mais à la fin, ajoute-t-il, les magistrats se découragèrent. Fatigués de commettre des meurtres, rassasiés de sang, il leur plut de transformer, comme ils disaient, leur sévérité en clémence. Ils se contentèrent donc, désormais, de mutiler les victimes, et il est impossible de compter tous ceux qui eurent l’œil droit arraché avec le glaive, ou brûlé avec un fer rouge, le pied gauche coupé, ou qui, enfin, furent envoyés dans les mines de cuivreo. »
o – H. E., l. VIII, ch. 12.
Parmi ceux qui perdirent la vie durant ces longues années de persécution, on compte beaucoup d’évêques et d’écrivains éminents. Ainsi Pierre, évêque d’Alexandrie, Lucien, prêtre d’Antioche, Méthodius, évêque de Tyr, Arnobe et Pamphile. Ces deux derniers méritent de nous arrêter quelques instants.
On croit que Pamphile était né à Béryte et qu’il appartenait à une famille phénicienne de distinction. Il fit ses études dans l’école chrétienne d’Alexandrie et fut ensuite ordonné prêtre à Césarée de Palestine. Jeté en prison en 307, sur l’ordre d’Urbanus, gouverneur de la province, il y resta jusqu’au moment de son martyre, en 309. Il y employa son temps à écrire une apologie pour Origène, accusé d’hérésie, et fut aidé dans ce travail par son disciple Eusèbe, qui l’entoura des soins les plus affectueux et prit plus tard, en souvenir de lui, le nom de Pamphile. Décapité avec douze autres personnes, leurs corps restèrent exposés aux bêtes des champs pendant quatre jours. Pamphile était un homme d’une érudition solide. Passionné pour l’étude de la Bible, il ne s’attachait pas moins à la répandre qu’à faire une étude critique de son texte. Il en donna de nombreuses copies, dont quelques-unes à des femmes pieuses, chez lesquelles il avait remarqué des dispositions à la lecture. Enfin, avec l’aide d’Eusèbe, il tira des Hexaples d’Origène une édition révisée de la version des Septantep.
p – Notice biograph. sur Pamphile, Ante-Nic. Library, vol. XIV, p. 447, 448. Neander, II, 496, 497. — Burton, Christian Church, 388, 389.
L’histoire de son esclave Porphyre nous montre toute l’influence qu’il exerçait sur son entourage. Porphyre était un jeune homme de dix-huit ans, qu’il avait élevé avec un soin tout paternel, et auquel il avait inspiré un ardent amour du Rédempteur. Lorsque Porphyre apprit que Pamphile était condamné à mort, il présenta une requête pour obtenir la permission d’ensevelir les restes de son maître bien-aimé. Cette requête n’eut d’autre effet que de provoquer les soupçons du fanatique préfet. Il fut questionné, avoua qu’il était chrétien et refusa énergiquement de sacrifier. Soumis aux plus cruelles tortures, il mourut à son tour sur le bûcher, après avoir été horriblement déchiré. Il supporta ces cruels traitements avec la plus admirable constance. Au moment où le feu l’atteignit, il cria seulement : Jésus, Fils de Dieu, aide-moiq !
q – Eusèbe, Martyrs de Palestine, chap. 11. — Neander, II, 497 n.
Deux traits, seulement, de la vie d’Arnobe nous sont connus. Le reste de sa vie est environné de la plus complète obscurité. Au moment où la persécution éclata, il était professeur de rhétorique à Siccar, en Afrique. Il y comptait de nombreux élèves, notamment Lactance. Arnobe professait le paganisme, et, bien que versé dans la connaissance des systèmes philosophiques, il n’en était pas moins plongé dans la plus superstitieuse idolâtrie. « Dernièrement encore, dit-il, ô aveuglement ! je vénérais des images sorties de la fournaise, des dieux faits sur l’enclume et fabriqués au marteau, des os d’éléphant, des peintures et des guirlandes suspendues aux vieux arbres. Et si, parfois, je rencontrais une pierre enduite d’huile… je lui rendais un culte et en sollicitais des bénédictions, comme si cette masse inerte avait eu quelque puissance en elle-même. » Il ne s’en tenait même pas là. Dans ses leçons, il attaquait constamment le christianisme. Mais les martyres qui suivirent l’édit de Nicomédie paraissent avoir touché son cœur, et l’avoir amené à quitter le dédale de l’erreur pour la route belle et droite de la vérité, dans laquelle il eut pour guide, dit-il, « le souverain docteur ». Il vint alors trouver les frères de l’Église de Sicca. Mais « tous le craignaient », comme les chrétiens de Jérusalem avaient craint Saul. Ils demandèrent donc à leur ennemi de la veille de donner des preuves de sa sincérité, et, pour se rendre à leur vœu, il composa sa savante apologie du christianisme, le Traité contre les Gentils. On ne sait rien sur sa mort ; il semble probable, toutefois, qu’il a fait partie de la « glorieuse armée des martyrs » victimes de cette grande persécutions.
r – Sicca Veneria, ville importante de la frontière de Numidie. — Comme son nom l’indique, c’était une de ces villes, où le culte méprisable de la déesse de l’Amour était célébré. La nation phénicienne y était, on le sait, tout particulièrement adonnée.
s – Introduction aux écrits d’Arnobe, A. N. L. — Dict. Christ. Biog.