Paul applique les principes qu’il a établis et défendus ; il exhorte les Galates à renoncer à la loi, à son joug, et à tenir à la liberté, car pour être chrétien il ne faut que la foi et la charité (5.1-6). Il reconnaît leur commencement de progrès dans cette nouvelle voie et se persuade que, puisque leur récente désobéissance à la vérité ne vient pas d’eux, ils sauront persister dans la bonne route et revenir à de meilleurs sentiments sur son compte (5.7-12).
1 Tenez-vous donc fermes et ne vous remettez pas sous le joug de la servitude ;
Le discours se tourne directement vers les Galates. — στήκετε rester debout, rester fermement ; se tenir ferme ; οὖν donc (Éphésiens 6.14) ; restez donc fermes. — ἐνέχεσθε se dit des choses qui sont tenues, retenues par des filets, par des jougs (Hérod., liv. 2, p. 121 ; Lucien, tom. ii p. 520 ; Dio. Cass. tom. i, p. 713. Plutarq. Sénèq.). Les écrivains grecs caractérisent aussi par ce mot les esprits des hommes qui n’ont pas leur libre arbitre, et qui obéissent soit à leurs passions soit aux lois. (Voyez Hébreux 2.15, une tournure équivalente), « Fixez-vous donc et ne soyez pas retenus de nouveau sous le joug de la servitude », c’est-à-dire, sous la loi mosaïque que Pierre appelle de ce nom (Actes 15.10).
2 Voici, je vous déclare, moi Paul, que si vous vous faites circoncire, Christ ne vous servira de rien.
« Voici, moi Paul » ; il pose son nom avec autorité contre ses adversaires (Éphésiens 3.1 ; 2 Corinthiens 10.1), et par sentiment paternel de la confiance que les Galates avaient pour lui. S’il attaque rudement les judaïsants, c’est à cause de leur exaltation dans l’orgueil. — La circoncision était le signe du joug mosaïque et une profession publique de judaïsme ; aussi m’est-il difficile de comprendre pourquoi l’on sépare habituellement ce verset du précédent ; la liaison est si naturelle et si simple entre joug de servitude et circoncision ! Ce motif joint à l’emploi de la deuxième personne du pluriel au premier verset, nous a fait clore les raisonnements de Paul au v. 31, et commencer l’application et les exhortations pratiques directes avec le ch. 5. — Χριστὸς ὑμᾶς etc. Les bienfaits mis à notre disposition par le Christ et qui découlent de la foi en Lui, ne seront pas votre partage, puisque vous ne vous reposez pas pleinement et sincèrement en Lui pour être sauvés. Placer le salut hors de Christ dans des cérémonies prétendues nécessaires, c’est non seulement douter de son œuvre rédemptrice mais encore c’est la nier ; elle ne peut donc servir de rien à ceux qui la rejettent ou la déclarent imparfaite.
3 Et je proteste encore à tout homme qui se circoncit qu’il est tenu de pratiquer toute la loi ;
παντὶ ἀνθρώπῳ, à tout homme. Chrys. et Théophyl. : « Afin que vous ne pensiez pas que je parle par haine, je ne m’adresse pas à vous seulement mais à tout homme circoncis ». Paul ne parle pas ici de la circoncision extérieure en soi et pour soi, mais de celle qui est unie à la conviction religieuse qu’elle exprime ; en d’autres termes, le païen qui se soumet à cet acte ne doit le faire que dans la conviction d’obtenir la justice par l’observation de la loi à laquelle il se lie publiquement, or cette prétention à se justifier soi-même est entièrement opposée aux tendances les plus caractéristiques d’une âme chrétienne, puisque loin de ne compter que sur elle, celle-ci ne s’appuie que sur son Sauveur pour participer à son équité. — ὀφειλέτης ἐστὶν, etc. (Romains 1.14 ; 8.2 ; 15.27), « est tenu » ; par ce signe extérieur, symbole et sanction de l’alliance des Hébreux, l’homme est obligé de réaliser toutes les lois qui sont prescrites par la législation de Moïse (Actes 11.5) ; faire les statuts, les observer, est le cachet juif par excellence. La circoncision entraînait immolation sanglante ; celle-ci, l’observation des jours et des lieux ; de là la nécessité d’ablutions diverses ; la loi mosaïque qui forme un tout bien lié, exigeait une satisfaction pleine, entière, soutenue, envers toutes ses parties (Lévitique 20.22 ; Deutéronome 15.5 ; Galates 3.10, 12). La conclusion de l’apôtre est très juste, observe Néander, car si un pagano-chrétien se fait circoncire, c’est qu’il croit pouvoir être justifié par les œuvres de la loi avec tous ses préceptes. — Jérome, Grotius, Galmet regardent comme probable la conjecture suivante : Il y a beaucoup d’apparence que les faux apôtres qui n’étaient pas eux-mêmes observateurs exacts de la loi (Galates 6.13), voulaient persuader aux Galates que la circoncision ne les engageait pas à toutes les cérémonies légales ; qu’ils ne seraient obligés ni aux sacrifices, ni aux purifications, ni aux petites pratiques, et qu’on ne demandait d’eux que la circoncision, l’observation du sabbat, la distinction des viandes, sans empêcher qu’ils ne fissent en même temps profession du christianisme, tout cela peut-être afin qu’étant confondus avec les Juifs on ne les inquiétât pas comme gens qui introduisaient de nouvelles religions dans l’empire, car la religion juive y était tolérée par les lois. Paul leur affirme qu’ils ne sont pas libres de prendre de la loi et d’en rejeter ce qu’ils veulent, car elle prononce des malédictions contre quiconque ne la garde pas dans toute sa plénitude (Deutéronome 27.26 ; Galates 3.13).
4 vous avez renoncé à Christ, vous qui vous justifiez dans la loi, vous êtes déchus de la grâce,
κατηργήθητε (Romains 7.2, 3, 6) cesser d’être de quelqu’un, de lui être soumis ; être séparé, délivré de : Vous cessez d’être de Christ, vous tous qui — δικαιοῦσθε, êtes justifiés, c’est-à-dire, avez la vaine opinion que la justification découle de la loi ; à moins qu’on ne voie dans ce mot une ironie, ce qui serait fort possible. — ἐν νόμῳ dans la loi, en ne vous mouvant spirituellement que dans le cercle et dans l’empire de la loi. — Vous êtes déchus de la grâce, cause efficiente du salut chez les chrétiens car elle le donne par la foi en Christ, opposée à la loi cause prétendue de la justification pour ceux qui sont ou se font juifs (Romains 3.24 ; Éphésiens 2.8). Ce verbe, l’excidere re des Latins, être renversé de son état (2 Pierre 3.17), est l’opposé de : rester debout dans la grâce (Romains 5.2).
5 car c’est de la foi que nous recevons spirituellement l’espérance de la justification.
Car, nous chrétiens, ἀπεκδεχόμεθα (Romains 8.19, 23, 25 ; 1 Corinthiens 1.7), attendre patiemment jusqu’à la fin (Hébreux 9.28) ; recevoir, embrasser : « Nous attendons avec patience » ou plutôt « nous recevons », parce que les chrétiens n’attendaient pas l’espérance d’être justifiés mais l’avaient de par la foi en Christ. — πνεύματι, l’esprit aidant ; (même datif 2 Corinthiens 1.15 ; 2 Pierre 1.21) ; ou : par l’esprit (de Dieu) comme source de la véritable confiance (Romains 8.15-16). —« L’espérance de la justification » (2 Timothée 4.8). L’une des oppositions qui existent entre l’état juif-légal et l’état chrétien-libre, est que dans le premier on croit posséder la justification comme quelque chose d’extérieurement percevable, d’apparent, de fini, sans avoir conscience de la différence qui existe entre l’idée et le fait, entre l’idéal et sa réalisation partielle dans l’espace et dans le temps ; tandis que dans le second, toutes les idées qui se rapportent à la dignité et à la félicité données par le christianisme ont une valeur intérieure, infinie, présente et future, et permettent dès lors une application diversement modifiée. La vie chrétienne toute de foi et d’amour est une création continue, une œuvre progressive qui pour se mûrir et se consommer a devant elle la perspective de l’éternité. Elle a un passé, un présent et un avenir, ce qui nous fait voir comment la justification peut être et est réellement un objet d’attente et d’espérance lorsque l’on compare sa réalisation imparfaite commencée ici-bas, avec son accomplissement parfait, consommé dans le sein de Dieu. Cela nous explique pourquoi le verbe justifier est employé au futur Romains 3.30 ; Galates 2.16 ; au prétérit Romains 5.1,9 ; 1 Corinthiens 6.11 ; au présent Galates 3.11, et nous fournit la raison de ce mot : les arrhes de l’esprit donné comme gage (2 Corinthiens 1.22 ; 5.5 ; Éphésiens 1.14). Sur la terre la foi et l’amour ont pour compagne inséparable l’espérance. — Enfin l’apôtre parle de l’espérance de la justification pour opposer la modestie du chrétien si bien peinte par le verbe « recevoir », à l’arrogance de ceux dont il avait dit au v. 4 qu’ils se justifiaient personnellement par la loi — ἐκ πίστεως de la foi, toujours signalée dans les écrits de Paul comme le germe de la régénération chrétienne, comme le principe déterminant et créateur de l’amour, de l’espérance et de la justification. Qui peut en effet espérer en Dieu sinon celui qui l’aime ? et qui peut l’aimer véritablement sinon celui qui par la foi est uni à l’amour incarné, au Fils de Dieu ?
6 puisqu’en Christ-Jésus ni la circoncision ni l’incirconcision ne servent, mais la foi féconde par la charité.
6. Car ; c’est ici un résumé de l’Évangile ; en Christ, dans la communion avec Lui, la circoncision et l’incirconcision n’ont aucune valeur (Colossiens 3.11 ; 1 Corinthiens 7.19) ; le principe unique, universel et seul valable à toujours, c’est la foi se montrant efficace par un amour mutuel (Romains 13.10 ; 15.30 ; 1 Corinthiens 13.1, ss.). L’amour est la puissance impulsive, animatrice et directrice des rapports que les chrétiens soutiennent avec Dieu et leurs semblables ; c’est l’âme pure et désintéressée, en action, ne se posant jamais elle-même à elle-même pour but, mais se proposant le bien des autres pour terme de son énergie. Essayons d’approfondir ce sujet. L’existence pour tout être est la permanence organique de sa substance et la vie est le mouvement harmonique et progressif de cette substance organisée, vers sa fin, selon ses lois. On sent de suite qu’il est de la nature de l’existence et de la vie d’agir, de produire, de se projeter en elles et hors d’elles, et si j’ose le dire, de se parler. (Le Fils unique du Père est la Parole éternelle de Dieu existence et vie absolues, et la création est le Langage du Verbe de Dieu.) Cette expansion vivante qui résulte de l’idée de l’Être est encore une nécessité providentielle dans l’économie de la création. Par cela seul qu’ils sont créés, tous les êtres sont entr’eux dans une dépendance réciproque ; ils se meuvent dans une chaîne de rapports indéfiniment multiples et variés qui rendent l’un indispensable à l’autre, et cet enchaînement mutuel, cette attraction commune et universelle fondent l’unité comme l’harmonie de l’univers. Ainsi en partant de l’idée de l’Être et puis de celle d’Être créé, on arrive par ces deux voies à cette même conclusion, savoir, que le caractère essentiel de la vie est l’expansion et la révélation d’elle-même. Si les étoiles se renvoient mutuellement leurs rayons comme une parole lumineuse qui unit les mondes, à combien plus forte raison doit-il en être ainsi des étoiles de l’univers spirituel ! Ne sont-elles pas plus appelées par leur nature, les âmes faites à l’image de Dieu, à se communiquer réciproquement les rayons de leur vie comme une vertu illuminante pour s’unir, pour se révéler les unes aux autres, pour reconnaître leur fraternité divine et se lier par une céleste amitié, pour s’embraser universellement de leurs feux et se pénétrer dans une éblouissante transparence ! Cette nature expansive des êtres libres dans le but d’une communion fraternelle et universelle nous l’appelons amour. L’âme qui au contraire se creuse au fond de son être un recoin où elle s’absorbe elle-même, où tout entre mais d’où rien ne sort, où la lumière devient ténèbres, la parole mutisme, et la vie mort ; l’âme qui retient ses rayons, son langage, qui se fait une demeure isolée dans l’ombre et une face nocturne, fait l’œuvre de l’égoïsme, œuvre anti-naturelle sous tous les rapports ; aussi l’empire du mal est-il appelé le royaume des ténèbres, et celui du bien le royaume de la lumière ! L’amour est donc l’ardeur sympathique et expansive, ferme, constante, passionnée qui porte une âme hors d’elle-même, vers ses sœurs, pour se pénétrer mutuellement de leur vie, et se transfigurer dans ce réciproque dévouement ; si toutes les âmes se livraient à cette révélation d’elles-mêmes et à cet esprit de sacrifice il en résulterait une spiritualisation individuelle, sociale et universelle, et une plénitude de vie qui seraient le prélude terrestre de la transfiguration céleste. L’amour est dans l’empire spirituel ce qu’est dans l’univers matériel la loi d’expansion, d’attraction et de gravitation, base de l’harmonie, et le fluide électrique comme élément excitateur et communicateur de la vie. L’amour est le sentiment. profond de l’unité, car on n’aime que celui avec lequel on se reconnaît et se sent un.
Mais pour arracher l’âme à sa ténébreuse improductivité et à sa muette consomption, il faut changer l’objet de ses affections et détrôner sa foi en elle par la foi à l’amour infini. Par cette transmutation radicale, par ce revirement de ses forces vers le souverain bien, l’âme sortie d’elle-même se revêt d’amour par le fait, se purifie et se rend diaphane au Soleil d’en haut ; plus son acceptation de Dieu ou sa foi est large et ardente, plus elle se transfigure en amour et se verse énergique, brûlante et fructifiante. La foi est inévitablement féconde par la charité. Mais qu’on ne s’y trompe point, nous n’entendons pas parler de cette foi qui consiste dans une adhésion intellectuelle à des formules de croyance, à des principes et à une métaphysique sans corps et sans âme, véritable momie, ombre de foi qui s’attache à une ombre de vie. Non, la foi telle que nous la comprenons et la sentons, la foi vive, intime, parlante, celle du cœur, éclair permanent de Dieu en nous, ne peut pas être emprisonnée abstraite et glacée, analysée et écourtée, dans des propositions et des formules syllogistiques, écho toujours très infidèle d’une harmonie profonde et insaisissable. Sans doute je conçois quelques grandes vérités fixées et nettement posées et affirmées comme fait dans leur majestueuse simplicité, devant l’intelligence et la vue de l’homme ; je conçois des dogmes comme expression intellectuelle et postérieure, d’une foi antérieure et d’une vie préexistante, comme reflet du cœur dans la tête ; mais que l’adhésion à certaines propositions bien disséquées par le scalpel de l’entendement, bien décomposées par le creuset chimique de la raison et puis péniblement rajustées et agrégées par la logique soient la base de la foi, c’est ce que je ne saurais concevoir. Il n’y a là ni mouvement, ni chaleur, ni vie ; il n’y a que des ossements et un bruit de vivre !
7 Vous couriez bien ! qui vous a arrêtés pour que vous n’obéissiez pas à la vérité ?
Ἐτρέχετε vous couriez, etc. Paul représente souvent la vie chrétienne sous l’image d’une course, d’une lutte, d’un combat, d’un bon combat, celui de la foi (Galates 2.2 ; Philippiens 2.16 ; Hébreux 12.1 ; 2 Timothée 4.7 ; 1 Corinthiens 9.24) ; c’est la lutte des affections spirituelles contre les passions charnelles ; de l’amour contre l’égoïsme ; de la sainteté contre la séduction des membres ; du nouvel homme contre l’homme vieux ; elle a pour arène, le monde ; pour juge, Christ ; pour témoin et distributeur des couronnes, Dieu ; pour armes, la justice, la vérité, les dispositions pacifiques, la foi, l’esprit ; pour issue, la victoire, et la vie éternelle pour triomphe. Cette existence chrétienne est éminemment celle du progrès, et même elle mérite seule ce nom parce que seule elle est une marche par la vérité et l’amour dans l’amour et la vérité. — καλῶς bien, conformément à l’Évangile, en mettant uniquement votre foi en Christ. — ἐνέκοψεν Si l’on acceptait la variante ἀνεκ. on aurait : Qui vous a retardés, empêchés ? car ce verbe signifie repousser ; Homère, Odys., 21, v. 47 ; Plutarque, Vie de Numa, chap. 9 ; puis arrêter, empêcher, retarder ; Théophraste, Caract. 1, 25, où il est question d’un pilote arrêtant la course d’un navire ; Sapien. xviii, 23, arrêter le courroux ; Philon, De monarch, p. 821 ; Josephe, Antiq. 2, 16, 2. Néanmoins la première leçon est plus probable ; elle signifie : Couper le chemin et puis retarder, mettre des obstacles ; ainsi cela revient au même, toutefois couper le chemin est mieux adapté au mot précédent « courir », et continue la figure (Actes 24.4 ; 1 Thessaloniciens 2.18 ; Romains 15.32 ; 5.2 ; 2 Corinthiens 11.12 ; 1 Pierre 3.17).
8 Cette suggestion ne vient pas de Celui qui vous appelle ;
Paul répond lui-même — πεισμονὴ ; il y a dans le passage de πείθεσθαι à ce mot, paronomasie ou liaison de mots à consonnance semblable. Les écrivains orientaux affectionnent beaucoup cette tournure qui se trouve fréquemment dans Paul avec le but, ce semble, de donner au discours plus de vivacité et aux pensées plus de force (1 Corinthiens 2.13 ; 2 Corinthiens 8.22 ; Luc 21.11, etc. Winer, Gram., 429). — Koppe, Borger, Flatt, Paulus traduisent ce mot qui ne se trouve que dans les Scholies d’Eustathius sur Homère et non dans les Septante, par : habileté à persuader ; sollicitations dont se servent les faux docteurs. « Cette habileté qu’ils emploient pour arrêter votre course ne provient pas de celui qui vous appelle ; elle est purement humaine et étrangère à l’esprit et à la volonté de Dieu qui vous invite à son règne (1.6) ». D’autres le rendent par : crédulité : facilité à accéder : (votre) persuasion. La syriaque, August., Ambros., quelques codes selon Jérome, Œcum., Schleussner, Morus, Winer, Matth, Stolz, de Wette : « Ce n’est ni Dieu ni son esprit qui vous ont inspiré cette envie de désobéir à la vérité, qui vous ont suggéré ces sentiments ; cette persuasion ne vient pas de Dieu comme la foi ». Il est clair que ce sens est préférable.
9 un peu de levain fait fermenter toute la pâte ;
C’était un proverbe parmi les Hébreux (1 Corinthiens 5.6-7) ; en voici un arabe : Peu d’amertume corrompt beaucoup de douceur. — ζύμη, levain. Les écrivains sacrés désignent par ce mot une fausse doctrine (Matthieu 16.6 ; 13.13 ; 1 Corinthiens 5.7 ; 15.33) ; (parallèle pour l’idée 2 Timothée 11.17). — ζυμοῦν, rendre acide par la fermentation (Matthieu 13.33. Septante. Exode 12.34, 39). Application de ce proverbe : « De vains docteurs quoique peu nombreux peuvent entraîner toute une société dans l’erreur et dans les vices ». En effet on ne peut guère entendre par levain une doctrine, car le mot un peu rapproché de doctrine ne signifie rien et ne correspond pas à coup sûr à la manière sévère dont Paul caractérise d’habitude les doctrines des faux docteurs (Galates 1.6-8 ; 3.1 ; 4.9,11,20 ; 5.2-4). L’apôtre n’a pas pu vouloir indiquer par là la circoncision, car celle-ci tenait à tant d’autres rites par un lien nécessaire que l’attribut petit ne peut pas mieux lui convenir qu’au mot « doctrine », comme l’ont pensé Chrys., Théophyl., Œcum., Calvin, Semler, Morus, Flatt, Matthies. Il est mieux d’expliquer par « le petit nombre de docteurs » ; le τίς du v. 7 et le perturbateur du v. 10 favorisent encore cette opinion. Quoique assez puissants pour troubler les Gala tes, ils étaient peu nombreux (Galates 1.7 ; 3.1).
10 j’espère de vous dans le Seigneur que vous n’aurez pas d’autres sentiments ; mais celui qui vous trouble sera puni quel qu’il soit.
πέποιθα. J’ai confiance relativement à vous, Dieu aidant ; ou : Je mets confiance en Dieu quant à vous (Philippiens 2.24), même construction 2 Thessaloniciens 3.4 — Que vous ne penserez (au futur, après avoir lu ma lettre) (Actes 28.22 ; Philippiens 3.15) rien autre chose que ce que je vous ai enseigné. — ὁ ταράσσων. Souvent le singulier est employé collectivement dans des phrases et dans des cas semblables à ceux-ci ; et d’ailleurs il est évident ici que l’apôtre, parle de plusieurs (1.7 ; 4.17 ; 5.12). C’est méconnaître, dit Winer, la nature du singulier que de vouloir toujours le pluriel lorsqu’il est question de plusieurs, car les Grecs aimaient à présenter d’une manière concrète ce que nous exprimons d’une façon abstraite et générale (2 Corinthiens 11.4 ; Jean 2.25). Ainsi : Ceux qui vous troublent. — βαστάσει τὸ κρίμα égal à λαμβαν. κρ., être puni, endurer punition (Matthieu 20.12 ; 23.14 ; Romains 13.2 ; Jacques 3.1 ; 1 Pierre 4.17 ; en hébreu Michée 7.9 ; Nombres 5.31 ; Ézéchiel 23.35). — « Quel qu’il soit ». Saint Jérome fait mention de quelques-uns qui disaient que l’apôtre voulait ici désigner saint Pierre, ou quelque personne élevée en dignité. Il n’y a rien de cela dans le grec. Quel qu’il soit, à quelque classe, à quelque position qu’il appartienne, en général.
11 Et quant à moi, Frères, si je prêche encore la circoncision pourquoi suis-je encore persécuté ? car alors le scandale de la croix n’existe plus.
Quant à moi et à ce qui me regarde ; quant à l’objection qu’on me fait, tirée de ma prédication. — Si je prêche encore la circoncision, s’il est vrai comme ils le disent, que je proclame sa nécessité ; τί ἕτι, etc., pourquoi donc suis-je encore persécuté ? pourquoi cette haine et ces vexations contre moi ? Cette objection est donc vaine puisqu’elle se réfute d’elle-même. — ἄρα donc, c’est-à-dire, si je prêche la circoncision, la compatibilité du judaïsme et du christianisme. — τὸ σκάνδαλον le scandale de la croix ; Paul désigne souvent par « la croix de Christ » la mort sanglante qui abroge la discipline judaïque ; ces mots « croix de Christ » sont encore expliqués par « la parole, l’enseignement de la croix », c’est-à-dire, la doctrine, la prédication de la mort de Christ (1 Corinthiens 1.17-18 ; Galates 6.12, 14 ; 3.13 ; Philippiens 3.18 ; Éphésiens 2.14 ; Colossiens 2.14). — Scandale, ce qui fait broncher, pierre d’achoppement (Matthieu 16.23 ; Romains 16.17). La mort de Christ était un scandale aux Juifs parce qu’ils voulaient être sauvés non par la foi en Christ crucifié, mais par les œuvres de la loi ; parce qu’attendant un libérateur triomphant, magnifique, puissant, leur orgueil ne voulait pas le reconnaître dans Jésus humilié, méprisé, crucifié ; parce qu’ils étaient offensés de voir les apôtres enseigner que Jésus cloué sur la croix était le Messie et l’abrogateur de toute la loi (Voyez l’emploi prophétique de ce mot appliqué à Jésus, Ésaïe 8.14 ; 28.16 ; Psaumes 118.22. comp. à Matthieu 21.42 ; Marc 12.10 ; Luc 20.17 ; Actes 4.11 ; Romains 9.32 ; 1 Pierre 2.6-7) : Donc le scandale est aboli, n’existe plus, et dès lors ils ne devraient plus me persécuter.
12 Et puissent-ils être plus que circoncis, ceux qui vous troublent !
καὶ a ici une force toute particulière : Plût à Dieu qu’ils fussent non seulement circoncis, ce dont ils se réjouissent tant v. 2, ss. — καὶ mais encore — ἀποκόψονται, qu’ils fussent amputés (Marc 9.43 ; Jean 18.10) ! Dans Deutéronome 23.1 ; dans Philon, De vict. off., p. 261, 22, dans Lucien, Eunuq., ch. 8, on emploie les mots ἀποκεκομμένοι, ἀποκοπτόμενοι pour désigner des êtres faits eunuques. ; aussi Hesychius les appelle-t-il ἀπόκοποι ! Quelques-uns ont entendu ce passage du retranchement ex ecclesia, de l’excommunication : Plût à Dieu qu’ils soient exclus de l’assemblée chrétienne ! ou bien encore : Plût à Dieu que l’espérance de vous corrompre leur soit enlevée ! mais l’opinion générale, celle de Théodoret, d’Ambros., d’August., de Chrys., de Jérôme, d’Œcum., de Théophyl., de Grotius, de Semler, de Cramer, de Wetstein, de Koppe, de de Wette, de Rosenmüller, de Rückert, de Matthies, l’explique de la mutilation réelle : Puissent ces faux docteurs qui ont tant envie de vous faire circoncire, être eux-mêmes plus que circoncis ! Cette interprétation qui n’est pas en opposition arec l’enchaînement des idées puisqu’il est parlé de circoncision dans tout ce paragraphe, et qui seule est philologique, nous montre dans ce verset une ironie acerbe qui pouvait bien échapper au caractère véhément de Paul. Pour l’absoudre dans ce qu’elle peut avoir de rude et de choquant aujourd’hui, il faut savoir se transporter dans les mœurs des temps antiques et surtout ne pas oublier que les Pères les plus recommandables et qui sont meilleurs juges des habitudes de cette époque que nous, ont partagé cette opinion généralement adoptée par les Anciens.