La sainteté de Dieu.—Il n’y a pas un terme aussi exclusivement scripturaire, aussi distinctement divin que le mot saint. En conséquence de cette origine divine qui est la sienne, ce terme a un sens inépuisable. Il n’y a pas un attribut de Dieu que les théologiens aient trouvé aussi difficile à définir ou sur lequel ils diffèrent davantage d’opinion. Un bref examen des différents points de vue exprimés pourront nous faire comprendre combien peu l’idée de la Sainteté Divine peut être comprise et épuisée par une définition humaine, et comment c’est seulement dans la vie de communion et d’adoration que la sainteté qui surpasse toute intelligence peut être saisie comme une réalité.
1. Le point de vue le plus rudimentaire, et où l’élément moral semble passer à l’arrière-plan, est celui où la notion de sainteté est associée à celle d’un Dieu séparé de sa création et élevé infiniment au-dessus de celle-ci. La sainteté ainsi conçue a été définie comme « la gloire incomparable de Dieu, Sa majesté infinie. Son titre à recevoir l’adoration de toutes ses créatures ». Quoique toutes ces pensées soient étroitement unies avec la Sainteté de Dieu, elles ne nous font saisir malgré tout que les effets de cette Sainteté et non celle-ci dans sa véritable essence.
2. Un autre point de vue nous amène à envisager la sainteté comme l’expression d’une relation entre Dieu et nous. Nous sommes appelés saints comme étant la propriété divine, mise à part pour Son service : donc Dieu qui Lui-même nous réclame pour être à Lui est Saint. Notre sainteté sert ici de point de départ pour nous amener à comprendre la Sainteté de Dieu. « Dieu est saint dans son essence, sainte est son alliance avec son peuple. Il est non seulement le Propriétaire, mais aussi le Bien suprême des siens, leur possession et la seule loi qui les gouverne » (Diestel) Il a déjà été fait mention de ce point de vue dans le présent volume (voir « Cinquième jour », notes).
3. Abordons maintenant les vues de ceux qui envisagent la sainteté en tant qu’attribut moral. La conception la plus répandue est celle qui s’arrête à l’idée de pureté, de libération à l’égard du péché. « La sainteté est un terme général pour désigner l’excellence morale de Dieu. Nul n’est saint que Dieu seul : nul autre que Dieu n’est parfaitement pur; rien ne saurait limiter la perfection morale de son être ». (Hodge). L’idée de sainteté implique ici celle de pureté infinie, de haine et d’horreur du péché : le point de vue négatif est surtout mis en évidence. On comprend la place importante qu’a pris cette conception par le fait que, dans notre état de péché, la première impression que puisse faire sur nous la Sainteté de Dieu est une impression de crainte. Mais elle ne nous dit pas en quoi réellement cette excellence morale ou cette perfection de Dieu consiste.
4. C’est un progrès sur le précédent point de vue que d’essayer de définir ce qu’est cette perfection divine. Une chose est parfaite lorsqu’elle est en tout point ce qu’elle doit être. Il est facile de définir ainsi la perfection, mais moins facile de définir ce qu’est la perfection de tel ou tel objet; ceci demande la connaissance de la nature de cet objet. Aussi nous devons nous contenter de termes très généraux qui définissent la sainteté de Dieu comme le bien essentiel et absolu. « La sainteté en Dieu, c’est l’affirmation libre, réfléchie, calme, immuable, de Lui-même qui est le bien, ou du bien qui est Lui-même ». (Godet, commentaire de Jean XVII, l1).
5. Très rapproché du précédent est le point de vue qui envisage la sainteté, non pas seulement comme un attribut Divin, mais comme l’ensemble de ce que nous sommes habitués à envisager et à nous représenter isolément comme les attributs de Dieu. C’est ainsi que Bengel envisageait la sainteté comme la nature Divine elle-même, dans laquelle tous les attributs sont contenus.
Dans le même ordre d’idée, Howe « voit dans la sainteté la Divine beauté, le produit parfait et harmonieux de tous les attributs divins ». La sainteté Divine est la beauté dans sa plus grande perfection et la mesure de toute autre beauté. La Sainteté Divine est cette parfaite et immortelle beauté qu’aucune langue ne peut traduire, qu’aucun œil ne peut contempler. La Sainteté pourrait être appelée l’attribut transcendantal de Dieu, qui se communique à tous les autres et jette sur chacun l’éclat de sa propre splendeur. « C’est l’attribut divin par excellence ». (Howe. Petit catéchisme de Whyte). Tel était l’aspect de la Sainteté Divine sur lequel Jonathan Edwards arrêtait sa pensée avec délices. « L’amour mutuel du Père et du Fils, dit-il, forme la troisième personne, le Saint-Esprit, ou la Sainteté de Dieu, qui est Sa beauté infinie». Par la communication de la Sainteté de Dieu, la créature a part à l’excellence morale de Dieu, à la beauté de la nature Divine, à sa perfection. « La sainteté comprend tout ce qui constitue la vraie excellence morale des êtres intelligents. Ainsi la Sainteté de Dieu n’est autre que l’excellence morale de la nature Divine, comprenant toutes Ses perfections, Sa justice, Sa fidélité, Sa bonté. Il y a deux sortes d’attributs en Dieu, en rapport avec notre manière de concevoir Ses perfections: Ses attributs moraux, qui tous se ramènent à Sa sainteté, et Ses attributs naturels, force, connaissance, etc., qui constituent Sa grandeur. Les personnes saintes, dans l’exercice de leur sainte affection aiment Dieu, tout d’abord à cause de la beauté de Sa Sainteté. La sainteté d’une créature intelligente est ce qui met le sceau d’une incomparable beauté sur toutes ses perfections naturelles. Ainsi en est-il en Dieu : la sainteté est d’une manière particulière la beauté de l’être Divin. Aussi l’Ecriture parle-t-elle à diverses reprises de la beauté de la sainteté. C’est elle qui rend tous les autres attributs divins glorieux et aimables.
6. En parlant de la Sainteté de Dieu comme de l’excellence absolue de Sa nature, certains appuient avec une force très spéciale sur le point de vue moral. Le bien en Dieu ne doit pas être le simple produit de sa propre nature, il doit être l’effet d’une libre volonté. Ce qui est naturellement bon n’est pas la vraie réalisation du bien. L’exercice d’une libre volonté doit aussi trouver sa place en Dieu, pour qu’il soit, véritablement l’auteur du bien : car seule la volonté qui consciemment se détermine elle-même est capable de faire le bien comme tel. Dieu est la puissance de Sainteté qui ne peut ni ne veut se renier elle-même. Il est le Bien dans l’expression de sa nécessité la plus sainte: c’est ainsi qu’il est le Saint. (Dorner).
7. On a fait remarquer que, dans les points de vues qui précèdent on n’a pas suffisamment tenu compte du fait que c’est spécialement comme Saint que Dieu est appelé le Rédempteur et qu’il accomplit l’œuvre de Son amour en vue d’élever ses créatures à la sainteté. On a été amené par là à cette conception que la sainteté et l’amour sont, sinon identiques, du moins en étroite corrélation. « Dieu est saint, digne de louanges au delà de toute expression, à cause de Sa grâce, et plein d’une infinie tendresse à l’égard de sa créature, dans laquelle il s’est plu à manifester la gloire de son amour». Dieu est saint en ceci que l’amour qui est en Lui triomphe de Sa juste colère {selon Os 11.9} et Ses jugements ne s’exercent qu’après que toute possibilité de faire miséricorde s’est montrée inefficace. Cette sainteté se dévoile dans le nom que Dieu porte dans le Nouveau Testament, nom qui parle à la fois de Sa suprême grandeur et de Son amour tendre et condescendant, le nom de Père ». (Stier, commentaire sur Jean 171).
8. Ce dernier point de vue qui renferme une précieuse vérité, se rencontre avec celui-ci, où sont mis en lumière les deux vrais aspects de la Sainteté de Dieu. On peut le définir comme étant l’harmonie établie entre l’élément de conservation et l’élément de communication qui sont en Dieu. (En tant que Dieu Saint, Dieu hait le péché et cherche à le détruire. En tant que Dieu Saint, Il communique Sa sainteté au pécheur et l’élève ainsi à la hauteur de Son amour. La sainteté est l’essence de la gloire Divine, dont l’amour et la justice sont les deux aspects.
« La sainteté est l’élément de conservation en Dieu, par lequel Il se soustrait à l’influence du monde extérieur et demeure conséquent avec Lui-même et fidèle à Sa propre Essence ; par lequel aussi Il se crée librement un organisme divin qui ne vit que pour Lui et qui est son Eglise. (Lange).
« La sainteté de Dieu est l’élément de conservation en Dieu, en vertu duquel Il demeure fidèle à Ses propres perfections, sans jamais sacrifier ce qui est Divin, ni admettre ce qui n’est pas Divin. Mais ceci n’est encore qu’un aspect. La sainteté de Dieu ne serait pas sainteté mais simple exclusivisme, si elle ne l’amenait à entrer dans de multiples relations avec ses créatures et ainsi à se révéler et à se communiquer à elles.