La cosmologie, telle qu’on la définit ici, traite de l’action divine s’exerçant dans l’ordre général de la nature et de l’histoire, préalablement aux déterminations particulières de l’œuvre de la Rédemption. Toutefois la dogmatique puise cette matière dans l’Ecriture ; et comme l’objet essentiel de la science théologique est la Rédemption accomplie en Jésus-Christ, les faits qui en constituent le fondement universel, et qui ont sur elle la priorité du temps, doivent être traités eux-mêmes par la dogmatique dans l’orientation de ce fait central, de profil et non pas de front. Il doit être entendu que, même lorsque nous traitons de l’action créatrice et de l’action sustentatrice de Dieu dans la nature extérieure, ce sont les assises de la doctrine du salut que nous posons ; car s’il en était autrement, notre science ne mériterait plus que le nom d’agrégat.
L’Ecriture nous donne d’ailleurs le modèle de cette marche dans les trois premiers chapitres de la Genèse, qui nous amènent si promptement de la scène de la création au tableau de la chute et à la première promesse du salut. C’est du récit biblique surtout qu’il est permis de dire : Festinat ad eventum.
Or, comme l’Ecriture attribue à Dieu trois activités cosmiques principales, antérieures à l’œuvre de la Rédemption, l’une éternelle et anté-historique ; la seconde, temporelle et historique ; la troisième, temporelle et continue, notre première partie ou cosmologie se subdivisera en trois sections traitant :
- De la conception éternelle du plan du monde ; ou de la prédestination divine ;
- De la création du monde ;
- De la sustentation du monde.
Nous éviterons de préférence le terme courant de prédestination, qui, à nous en tenir strictement à l’étymologie, répondrait à notre pensée ; mais il a pris dans le cours des siècles une acception particulière qui dès l’abord prêterait au malentendu. Le terme prothèse, traduction immédiate du terme paulinien πρόθεσις, a l’avantage de ne préjuger aucune définition.
L’existence d’un plan du monde conçu éternellement en Dieu même, et embrassant en même temps que la marche générale de l’histoire (Eph.1.9), les événements particuliers dont elle se compose (Actes.2.23 ; 4.28), est déjà le postulat primordial du théisme dans son opposition au panthéisme. Après l’affirmation de la personnalité divine, la première affirmation du théisme est celle de la catégorie de la finalité combinée avec la catégorie de la causalité, et la dominant dans la conception des origines et de l’existence du monde, tandis que la conception panthéiste du monde ne reconnaît que la seconde de ces catégories. Dieu étant tenu pour personnel, la raison ne saurait admettre qu’il ait tiré le monde du néant pour le livrer à des destinées de hasard, et l’ait jeté dans l’espace et dans le temps sans en avoir préordonné les fins générales et particulières.