Le nom de Dieu, c’est là une expression qui revient si souvent dans l’A. T. qu’on peut la considérer comme la manière la plus ordinaire de désigner Dieu quand il se révèle, et qu’il est extrêmement important d’en bien comprendre le sens.
Le fait qu’on donne un nom à quelqu’un suppose que cette personne est connue. Un être qui ne veut pas être connu, ne peut pas non plus être nommé. L’homme peut bien donner aux faux dieux des noms de son invention ; mais il ne peut connaître et, par conséquent, il ne peut nommer le vrai Dieu que pour autant qu’il se révèle à luik. Or Dieu ne se nomme ni ne se révèle aux hommes d’après la plénitude et l’ensemble de ses perfections, comme le pensait l’ancienne dogmatique ; mais seulement d’après un côté de son être. En deux mots, le nom de Dieu ne désigne pas ce que Dieu est en lui-même, mais ce qu’il est pour les hommes. C’est pour cela que, ainsi que nous l’avons déjà vu, tout degré particulier de révélation est aussitôt signalé par un nouveau nom donné à Dieu.
k – Le nom de Dieu est nomen editum avant que d’être nomen inditum. C’est pour cela que Elohim, qui d’après sa signification première désigne la Divinité en général, abstraction faite de ses révélations, n’est pas, à proprement parler, considéré dans l’A. T. comme un nom de Dieu.
[Le Dieu qui prouve à Agar qu’il n’abandonne aucun malheureux est immédiatement surnommé le Dieu qui voit (Genèse 16.13. Voyez § 112). La révélation patriarchale a un caractère particulier ; de la le nom particulier de El-Schaddai (Genèse 17.1. Voyez § 37), auquel correspond le changement du nom d’Abram en Abraham (Genèse 17.5). C’est au moment où Abram, âgé de cent ans. devient le père d’une multitude, que Dieu reçoit un nom qui rappelle qu’il peut forcer la nature à se plier aux exigences du plan du salut. — Les relations très particulières que Dieu a soutenues avec les patriarches, trouvent aussi, pour en perpétuer le souvenir, le nom nouveau de Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob (Exode 3.6, voyez § 25). Lors de la sortie d’Egypte, Dieu va accorder à son peuple une révélation nouvelle et entrer avec lui dans des rapports intimes : c’est dans ce moment aussi qu’il explique à Moïse le sens du nom de Jéhovah (§ 40). La théocratie est instituée ; immédiatement voici qu’apparaît la notion de la sainteté (§ 44). Le peuple rompt l’Alliance pour la première fois ; Dieu déploie sa grâce, sa miséricorde, sa longue patience ; aussitôt (Exode 34.6, § 29) Dieu se donne des noms qui répondent au jour nouveau sous lequel il vient de se montrer. Dans la Nouvelle Alliance, quand le Fils unique aura manifesté aux hommes le nom de Dieu et que le Saint-Esprit sera répandu sur toute chair (Jean 17.6), Dieu sera connu sous le nom de Père de notre Seigneur Jésus-Christ, ou de Père, Fils et Saint-Esprit.]
Cependant ceci n’épuise pas encore la notion de l’expression qui nous occupe. Le nom de Dieu n’est pas seulement un titre que Dieu prend en vertu des diverses relations dans lesquelles Il entre avec les hommes ; il désigne en même temps tout ce qui en Dieu peut se révéler, et, si nous pouvons nous exprimer ainsi, tout le côté de la Divinité qui est tourné vers l’homme. Qu’on nous comprenne bien ! Nous ne voulons pas dire qu’il soit parlé du nom de Dieu à propos de toutes les sortes de révélations qu’il peut plaire à Dieu d’accorder. Ainsi, lorsque Dieu déploie sa puissance dans la nature, c’est bien là une révélation de son grand pouvoir ; mais ce n’est pas encore le cas de parler du nom de Dieu, il faut réserver cette expression pour le Dieu de la Révélation dans le sens particulier de ce mot. L’Israélite, qui sait que Jéhovah est le Dieu particulier de l’alliance, et en même temps le créateur et le conservateur de l’univers, peut bien reconnaître son nom dans la nature et s’écrier avec le Psalmiste : « Jéhovah, que ton nom est magnifique par toute la terre ! » (Psaumes 8.1) Toutefois, le nom de Dieu nous transporte presque toujoursl dans la sphère de la théocratie. Quand il en est parlé, c’est à propos des lieux, des institutions, des faits, dans lesquels il plaît à Dieu de se révéler et de se donner personnellement à connaître à son peuple.
l – Et même, dans le Pentateuque, toujours.
Voici quelques passages capitaux à cet égard.
A propos de l’Ange de la face, il est dit que le nom de Dieu est en lui (Exode 23.21, § 59). La gloire de Dieu habite dans le sanctuaire (§ 62) et Dieu y fait sentir sa sainte présence ; aussi est-il dit en plusieurs endroits que son nom y habite (Deutéronome 12.5,11 ; 14.23 ; 1 Rois.8.29 ; Jérémie 3.17) ; et le culte qu’on y rend à l’Éternel est-il le culte de son nom (Deutéronome 18.5-7). — Dieu met son nom ou le fait habiter quelque part. Qu’est-ce que cela signifie ? Winer lui-même croit que le sens de cette expression remarquable est simplement que Dieu choisit un lieu dans lequel les hommes peuvent désormais lui rendre leur culte. Mais c’est confondre la conséquence du fait que Dieu habite quelque part, avec le fait lui-même.
La présence de l’Éternel dans le temple n’est point l’idée de cette présence ; cela serait indigne de l’A. T. ; voyez d’ailleurs les redoutables preuves que Dieu donne de sa présence dans le temple, à propos du péché de Nadab et d’Abihu (Lévitique 10.1).
Le nom de Dieu est partout où est sentie et éprouvée la présence du Dieu vivant. Il envoie sa parole, mais là où est son nom, il y est lui-même. Aussi dans Jérémie 14.9, ces mots : « Ton nom est réclamé sur nous, » ne sont-ils rien d’autre que l’explication de ceux qui précèdent immédiatement : « Tu es au milieu de nous, ô Jéhovah ! »
[Dans Deutéronome 28.9, il est dit que Jéhovah établit Israël pour Lui être un peuple saint, vivant dans sa présence et jouissant de sa révélation. Au v. suivant, comment celle même pensée est-elle exprimée ? « Le nom de Jéhovah est réclamé sur toi. » — Au Psaumes 111.9, c’est à propos de la rédemption du peuple et de l’établissement de l’Alliance que le psalmiste s’écrie : « Ton nom est saint et redoutable ! » Voyez encore Ésaïe 43.7 — Le peuple marche au nom de son Dieu à deux points de vue : 1o au point de vue objectif, en vertu de la force que lui communique le Dieu qui se révèle au milieu de lui ; et c’est pour cela que, dans Zacharie 10.12, l’Éternel commence par dire : Je le fortifierai, et ne dit qu’ensuite : Ils marcheront en mon nom ; puis 2o au point de vue subjectif, quand le peuple ainsi fortifié accomplit la loi et craint le nom de Dieu (Deutéronome 28.58). Ceci peut nous donner la clef d’un passage qui est souvent fort mal compris, Michée 4.5. Selon nous, en voici le vrai sens : Toutes les nations iront un jour en pèlerinage à Sion pour y recevoir la loi. Pourquoi cela ? Parce qu’Israël marche au nom de Jéhovah, c’est-à-dire qu’il vit dans la communion du vrai Dieu qu’il a le bonheur de connaître, tandis que les autres peuples, bien que le vrai Dieu soit réellement leur maître, — aussi longtemps qu’ils l’ignorent, ne jouissent que de la protection de leurs faux dieux, — Le but que Dieu poursuit en faveur des païens, c’est que son nom soit invoqué même sur eux (Amos 9.12 ; Malachie 1.11), qu’ils le reconnaissent pour roi (Zacharie 14.9) et qu’ils invoquent son nom (Sophonie 3.9).]
Le nom de Dieu est vraiment quelque chose ; c’est une réalité. « Le nom de l’Éternel vient de loin ; sa colère est ardente, » lisons-nous Ésaïe 30.25 ; 26.8. « Nous t’avons attendu, ô Éternel, dans le sentier de tes jugements, et c’est vers ton nom et vers ton souvenir que tend le désir de notre âme ! » « Délivre-moi par ton nom, » soupire le Psalmiste (Psaumes 54.3), et dans le second membre de phrase, le mot de puissance répond au nom de l’Éternel : « Fais-moi justice par ta puissance. » Lisez encore Jérémie 10.6 ; 1 Rois.8.42 ; Proverbes 18.10, où le nom de Jéhovah est appelé une forte tour.
[Nous pourrions citer encore Psaumes 20.2 ; 44.6 ; 124.8 ; 75.2 ; 115.1. Dieu glorifie ou sanctifie son nom quand il montre à tous, par des actes de toute-puissance, qu’il est le vrai Dieu. Quand au contraire on pourrait douter de la grandeur suprême de Dieu, lorsque, par exemple, il rejetterait son peuple pour toujours, son nom serait profané. Les hommes le profanent aussi quand ils méprisent les témoignages sans lesquels Dieu ne les laisse jamais, ou quand ils prononcent ce nom à la légère (Exode 20.7), ou encore quand par leurs œuvres ils montrent qu’ils ne craignent pas Dieu (Proverbes 30.9). Ils le sanctifient au contraire quand ils accordent à la révélation divine l’attention qu’elle mérite. — Dieu conduit les justes pour l’amour de son nom (Psaumes 23.3 ; 31.4) ; pour l’amour de son nom il leur vient en aide (Psaumes 109.21 ; 143.11) ; pour l’amour de son nom il pardonne (Psaumes 25.11 ; 103.1, etc.), car il ne peut pas se mettre en contradiction avec ce qu’il a fait connaître aux hommes de sa nature et de ses perfections. Voyez encore Michée 5.4, où « la magnificence (proprement la hauteur) du nom de l’Éternel » répond à « la force de l’Éternel » ; Deutéronome 18.19 ; Actes 4.7 ; 3.16. Ce dernier passage est surtout remarquable : c’est le nom de Jésus qui a guéri l’impotent de la Belle-Porte. Ἐν ποίῳ ὀνόματι répond à ἐν ποίᾳ δυνάμει.]