« Parmi les démons, comme parmi les autres êtres, il en est qui sont inférieurs aux autres. C’est ainsi que Pan est le serviteur de Bacchus, comme l’a déclaré Apollon dans les Branchides. Nous allons rapporter textuellement l’oracle. Neuf laboureurs furent trouvés morts dans un champ. Leurs voisins consultèrent sur ce funeste accident l’oracle d’Apollon, qui fit cette réponse :
Le dieu aux cornes dorées, Pan, le serviteur de Bacchus au regard terrible, errait à travers les montagnes couvertes de forêts : sa main vigoureuse pressait une verge : de l’autre il tenait un doux chalumeau, dont les sons mélodieux tenaient attentives les oreilles des nymphes. Puis tout à coup des sons aigus portèrent l’effroi dans l’âme des bûcherons de la forêt. La frayeur les saisit à la vue du dieu furieux, dont l’aspect terrible les glace d’épouvanté. Ils fussent aussitôt devenus tous les victimes de la Parque fatale, si le courroux de Diane, longtemps nourri dans son cœur, n’eût enfin cédé à la clémence, et si la déesse des campagnes n’eût retenu sa colère. Voilà celle qu’il vous faut fléchir, si vous voulez vous la rendre propice. »
Vous venez de voir la peinture du démon auquel il donne le titre de bon : vous voyez quelles formes, quelles habitudes Apollon lui donne dans les Branchides. Maintenant considérez les nobles vues qui ont fait échanger aux autres le séjour du ciel contre celui de la terre. En paraissant au milieu des hommes, ils devaient y apporter l’exemple de la sagesse et de la tempérance, s’y faire bénir par leurs bienfaits et leurs bons offices : eh bien ! Rien de tout cela. Écoutez plutôt celui qui a scruté leurs secrets les plus intimes, et qui a plus qu’aucun autre pénétré les profondeurs de ces mystères. D’abord il ne nie pas que quelques-uns des bons démons aient été asservis à la honteuse passion de la lubricité. Ensuite il avoue que d’autres faisaient leurs délices du bruit des tambours, du son des flûtes, des chants confus des femmes. Enfin il en est d’autres qui n’aimaient que la guerre et les combats, comme Diane, la chasse, Cérès, les fruits de la terre. Ainsi il reconnaît qu’Isis pleure encore aujourd’hui la mort d’Osiris ; qu’Apollon rend encore des oracles. Voyez-en la preuve dans le chapitre suivant.