Nous avons à nous occuper des différentes conditions de l’élocution dans le discours sacré. Or, le discours sacré n’en a pas une qui lui soit exclusivement propre. Et si nous devions nous en tenir à ce qui lui est propre, nous devrions nous contenter de jeter quelques notes décousues au bas des pages qui traitent de l’élocution oratoire dans la première rhétorique venue, nous reposant d’ailleurs sur ce que la rhétorique générale, c’est-à-dire sans application à un genre particulier d’éloquence, est déjà connue de nos auditeurs. Mais cela n’est possible ni profitable. Il faut donc repasser les principales matières d’un traité d’élocution oratoire, ou même d’élocution en général, en envisageant chaque règle dans son rapport particulier avec l’éloquence de la chaire.
Ce qui va suivre sera donc une énumération des différentes qualités du style, comme si nous traitions en général de l’art d’écrire, mais en envisageant chacune de ces parties dans son rapport avec l’objet du discours sacré. Nous commencerons par celles de ces qualités dont le style ne peut se passer en aucun genre ni en aucun cas, et sans lesquelles, du moins sans une certaine mesure desquelles, le style serait décidément mauvais.
Ces premières qualités, qui constituent l’écrivain irréprochable, comme l’obéissance aux lois constitue l’honnête homme, non l’homme vertueux, sont les suivantes : la clarté, la pureté, la correction, la propriété, la précision, l’ordre, le naturel, la convenance.
Après les qualités viendront les vertus, ou le style proprement dit, qui est le caractère imprimé au langage par le sujet ou par l’individualité de l’écrivain ; après la vérité, la beauté, autant du moins qu’on peut séparer ces deux choses, le beau étant la splendeur du vrai.
D’Alembert distingue entre la diction et le style :
L’élocution a deux parties, qu’il est nécessaire de distinguer, quoique souvent on les confonde : la diction et le style. La diction n’a proprement de rapport qu’aux qualités grammaticales du discours, la correction et la clarté ; le style, au contraire, renferme les qualités de l’élocution, plus particulières, plus difficiles et plus rares, qui marquent le génie ou le talent de celui qui écrit ou qui parle : telles sont la propriété des termes, la noblesse, l’harmonie, la facilité.
Nous remarquerons nous-même que quelques-unes des qualités que nous avons énumérées d’abord et qui vont nous occuper ne sont pas purement négatives, c’est-à-dire consistant dans l’absence d’un défaut ; la propriété, la précision, la clarté même peuvent, par le point où elles sont portées, devenir des vertus du style.