Il ne nous reste plus qu’à examiner brièvement une question qui, en comparaison de celle que nous venons d’étudier, paraît de bien peu d’importance : celle de la priorité de l’une ou de l’autre des deux épîtres expédiées à ce moment de la vie de l’apôtre par le même messager. Je ne puis croire avec Eichhorn, Credner, Hug, Anger, Mayerhoff, Reuss, Hofmann, etc., que l’épître aux Éphésiens ait été écrite la première. Il est plus naturel de penser, avec Néander, Harless, Olshausen, Meyer, Schenkel, Sabatier, etc., que des deux lettres complémentaires l’une de l’autre, celle qui a été provoquée par une demande positive et par un besoin déterminé, a précédé, et que l’autre, non pas plus générale, comme on le dit souvent à tort, mais consacrée à un sujet en rapport étroit avec celui de la première, a élé due à la préoccupation plus étendue qu’avait évoquée la composition de celle-ci. Il me paraît qu’en dehors de cette raison décisive, celles que l’on a données en faveur de l’une ou de l’autre manière de voir sont bien insoutenables. Les défenseurs de la priorité de la lettre aux Colossiens ne cessent d’alléguer le καὶ ὑμεῖς, vous aussi, de Éphésiens 6.21 (comme si Paul voulait dire : vous, aussi bien que les Colossiens auxquels je viens d’adresser une lettre) ; tandis que les partisans de l’opinion contraire allèguent Colossiens 4.16, en ce sens que la commission donnée aux Colossiens de faire venir de Laodicée l’épître arrivée à cette église (celle aux Éphésiens), prouve que celle-ci existait déjà. Ces deux raisons me paraissent aussi peu solides l’une que l’autre. La première tombe par le fait que l’allusion supposée à l’épître aux Colossiens est impossible, puisque les lecteurs ne pouvaient se douter sans explication de l’existence de cette lettre. Ce καὶ ὑμεῖς, vous aussi, devait, au contraire, être parfaitement compréhensible pour eux, dès qu’ils connaissaient la destination à un plus grand cercle d’églises de la lettre qu’ils avaient sous les yeux. La raison opposée, tirée de Colossiens 4.16, n’a pas plus de valeur ; car l’apôtre pouvait parfaitement parler à l’avance de cette lettre circulaire qu’il était sur le point d’écrire, ou bien il peut avoir ajouté cette commission dans la lettre aux Colossiens après que celle-ci était déjà rédigée. — Quant aux motifs tirés des passages parallèles pour l’une ou l’autre opinion, je me contente d’ajouter ce mot de Weiss : « Ils sont dénués de toute valeur, dès qu’on attribue les deux lettres au même auteur. »