« D’après les lois de la nature l’homme naît, se nourrit, croît, engendre, boit, mange, dort, vieillit et meurt : et cette condition n’est pas exclusivement celle de l’homme, elle est aussi celle des animaux dépourvus de raison. Mais les autres animaux n’ayant rien au-delà de la sensation physique, étant produits uniquement par un principe charnel, sont à peu près tous soumis à un penchant naturel et irrésistible. Le lion se nourrit de chair : si vous le blessez, il se venge : tous les lions se nourrissent de chair, et se vengent lorsqu’on les blesse. La brebis se nourrit d’herbe, et ne touche pas à la chair ; si vous la blessez, elle ne se défend pas : ces instincts sont communs à l’espèce entière des brebis. Le scorpion se nourrit de terre et perce d’un aiguillon venimeux ceux mêmes qui ne lui font pas de mal : tous les scorpions ont ce méchant instinct. La fourmi a reçu de la nature la faculté de pressentir l’hiver ; c’est pour cela qu’elle travaille tout l’été à amasser des provisions : nous voyons toutes les fourmis en faire autant. L’abeille compose le miel, et s’en nourrit : c’est le travail de toutes les abeilles. Je pourrais multiplier à l’infini les exemples d’animaux qui, ne pouvant pas s’écarter de leur instinct naturel nous offrent par là même un spectacle surprenant. Mais je crois que ces exemples pris chez les animaux les plus communs suffiront pour démontrer que tous les autres, tant ceux qui vivent en société, que ceux qui sont portés par leur instinct à vivre isolés, cèdent par nécessité quoique sans répugnance à l’impulsion de la nature. L’homme seul possède un attribut qui lui est propre et qui le distingue des autres animaux, je veux dire une âme et la raison dont elle est le siège : c’est par un besoin naturel qu’ils cherchent la société, comme je l’ai fait observer précédemment ; mais d’après leur propre choix et non d’après la force de la nature qu’ils se gouvernent. Ainsi, ils ne se nourrissent pas tous des mêmes aliments : les uns vivent à la manière des lions, les autres à la manière des brebis. Ils n’ont ni les mêmes habitudes, ni les mêmes mœurs, ni les mêmes lois civiles, ni les mêmes goûts pour les mêmes choses : mais chaque homme choisit à sa fantaisie son genre de vie, n’imitant celui de son voisin qu’autant qu’il lui plaît : car sa liberté consiste à n’être soumis à aucune servitude ; s’il se réduit lui-même à l’esclavage, c’est par son propre choix ; et cela même est de la liberté, de pouvoir ainsi se faire esclave quand on le veut. Combien d’hommes, par exemple chez les Alains, se nourrissent de chair crue et ne mangent pas de pain, non parce qu’ils n’en ont pas, mais parce qu’ils ne veulent pas en faire usage. D’autres, comme les animaux apprivoisés, ne mangent pas de chair ; d’autres ne vivent que de poissons, tandis qu’il y en a qui mourraient plutôt de faim que d’en manger. Les uns boivent de l’eau, d’autres du vin, d’autres de la bière. Enfin il y a dans les aliments des hommes une prodigieuse variété, qui se remarque jusque dans l’usage des légumes et des fruits. Il y a aussi des hommes qui, semblables aux scorpions et aux aspics, blessent ceux qui ne leur font point de mal : d’autres, semblables aux brutes, se contentent de se défendre quand on leur fait du mal. Il y en a qui sont ravisseurs comme des loups, voleurs comme des chats ; d’autres, comme des brebis et des chèvres se laissent vexer, sans rendre injure pour injure. Ainsi on peut distinguer parmi les hommes, les bons, les méchants et les justes. C’est ce qui démontre clairement que l’homme n’est pas en tout l’esclave d’une nécessité naturelle (quelle nature, en effet, pourrait-on lui assigner dans une telle variété de caractère ?). Il faut donc convenir qu’il est conduit en partie par la nature, en partie par sa volonté. Si donc il est digne de louange, de blâme, de châtiment, c’est seulement dans les choses qui dépendent de sa volonté : car dans celles qui dépendent de la nature il ne peut mériter aucun reproche : et ce jugement n’est point dicté par l’indulgence, mais par la raison. »
Ensuite l’auteur continue ainsi :
« Chaque pays a ses lois propres et différentes de celles des autres : les unes sont écrites, les autres ne le sont point. Je vais rapporter celles que je connais, et dont ma mémoire conserve le souvenir : je commencerai par les siècles les plus reculés. Chez les Sères une loi proscrit le meurtre, l’adultère, le vol et l’adoration des images. Ainsi dans cette vaste contrée, vous ne verrez ni temple, ni courtisane, ni femme adultère, ni voleur traduit en jugement, ni homicide, ni homme tué. L’étoile de Mars qui lance des flammes dans les régions célestes, n’a encore forcé le libre arbitre de personne à trancher la vie d’un homme avec le fer. Chez eux la conjonction de Vénus avec Mars n’a encore contraint personne à entretenir un commerce adultère avec la femme d’un autre, bien que tous les jours Mars suive son cours dans les cieux, et qu’à chaque heure des Sères viennent au monde. Chez les Indiens et les Bactriens il y a plusieurs milliers d’hommes qu’on appelle Brachmanes qui, d’après la tradition de leurs ancêtres et de leurs lois, ne commettent point de meurtre, n’adorent point d’images, ne mangent rien d’animé, ne s’enivrent jamais, ne boivent ni vin ni bière, ne participent à aucune action maligne, pleins de respects qu’ils sont pour la Divinité. Les autres Indiens sont meurtriers, fornicateurs, ivrognes, adorent les images et se laissent presque généralement en tout emporter par le destin ; il y a dans cette même contrée de l’Inde, une tribu d’hommes qui se saisissent des étrangers qui leur tombent entre les mains, les tuent et les mangent. Ainsi les astres bienfaisants ne les empêchent pas de commettre des meurtres et de contracter des unions illégitimes, et les astres malfaisants ne peuvent forcer les Brachmanes à se livrer au crime. En Perse, la loi permettait aux hommes d’épouser leurs filles et leurs mères. Ce n’était pas seulement dans ce pays ni sous un seul climat que les Perses contractaient ces unions infâmes, mais ceux qui s’expatrièrent et qu’on appelle Maguséens, pratiquent la même odieuse coutume, et transmettent par succession à leurs enfants les mêmes lois et les mêmes habitudes. On trouve encore aujourd’hui un grand nombre de ces Maguséens dans la Morée, dans l’Égypte, dans la Phrygie et dans la Galatie. Et très certainement l’on ne trouvera point qu’à la naissance de chaque individu, Vénus se soit trouvée placée dans les confins et la demeure de Saturne, de manière que Mars fût alors en station avec lui. C’est chez les Gélons une coutume que les femmes labourent la terre, construisent les maisons et se livrent à d’autres travaux du même genre. Elles peuvent avoir commerce avec qui bon leur semble, sans éprouver des reproches de la part de leurs maris, sans qu’on leur donne le nom de femmes adultères, parce que toutes se livrent au même commerce avec les premiers venus et particulièrement avec les étrangers. Les femmes gélones ne se parfument pas et ne portent point d’habits de couleur ; elles marchent toutes pieds nus, tandis que les hommes portent des vêtements précieux de différentes couleurs, sont chamarrés d’or et dégouttent de parfums. Ce n’est point par mollesse qu’ils agissent de la sorte, car il sont courageux, guerriers et fameux chasseurs. Toutes les femmes gélones ne sont point nées sous le signe du capricorne ou du verseau, pour éprouver la maligne influence de Vénus, et tous les hommes ne sont point nés lorsque Vénus était en conjonction avec Mars dans le bélier, pour être tout à la fois courageux et délicats, ainsi que l’assurent les sectateurs des Chaldéens. Chez les Bactriens, les femmes se parent de toutes sortes d’ornements, et font usage de toutes espèces de parfums, ayant pour les servir beaucoup plus de suivantes et de valets que les hommes. Quand elles sortent à cheval, elles déploient la plus grande magnificence : les harnais de leurs chevaux sont enrichis d’or et de pierres précieuses : elles poussent l’incontinence au point de s’abandonner indistinctement à leurs serviteurs et aux étrangers, n’éprouvent jamais de reproches de la part de leurs maris, qui sont pour ainsi dire leurs esclaves. Il n’est cependant point croyable qu’à la naissance de chaque Bactrienne, l’impudique Vénus se trouve au milieu du ciel et dans ses propres confins avec Jupiter et Mars. Au contraire, en Arabie et en Osroëne, non seulement les femmes adultères sont mises à mort, mais celles qui ne sont que soupçonnées n’échappent pas elles-mêmes au châtiment. Chez les Parthes et les Arméniens, les homicides sont punis de mort, quelquefois par les juges, quelquefois par les parents de la victime. Celui qui tue sa femme ou son frère sans enfant, ou sa sœur non mariée, ou son fils, ou sa fille, n’est accusé par personne ni condamné par aucune loi, tandis que chez les Grecs et chez les Romains, ceux qui tuent leurs parents et leurs proches sont exposés aux châtiments les plus rigoureux. Chez les Atres, celui qui a volé la valeur d’une obole est lapidé. Chez les Bactriens, celui qui n’a volé que des choses de peu de valeur est conspué ; chez les Romains il est battu de verges. Telles sont les lois : depuis l’Euphrate jusqu’à l’Océan, dans la direction orientale, un homme accusé de meurtre ou de vol n’est pas assujetti à une punition bien sévère ; mais celui qui est accusé de pédérastie se fait justice à lui-même et va jusqu’à se donner la mort ; tandis que chez les Grecs on ne fait pas le moindre reproche aux sages mêmes qui ont des amants. Dans ces mêmes contrées orientales, ceux qui ont violé, s’ils sont connus, sont mis à mort, soit par leurs frères, soit par leurs pères, soit par leurs autres parents, et ne sont pas jugés dignes des honneurs de la sépulture. Chez les Gaulois, les jeunes hommes épousent les jeunes hommes en toute liberté, ils ne regardent pas cela comme un crime, parce que c’est chez eux une coutume : supposera-t-on qu’à la naissance de chaque Gaulois qui se souille d’une pareille infamie, Vesper fût couché avec Mercure dans le séjour de Saturne et dans les limites de Mars ? Dans la Bretagne, plusieurs hommes n’ont qu’une seule femme ; dans le pays des Parthes, plusieurs femmes n’ont qu’un seul homme et se soumettent à ses désirs sans blesser la continence parce que la loi lui impose ce devoir. Les amazones n’ont pas d’hommes ; mais comme les bêtes brutes, chaque année vers l’équinoxe du printemps elles franchissent leurs limites, ont commerce avec les hommes des contrées voisines qui regardent comme une fête l’époque de cette cohabitation. Aussitôt qu’elles ont conçu, elles retournent dans leurs pays et accouchent toutes nécessairement dans le même temps selon les lois de la nature ; elles se débarrassent des enfants mâles et nourrissent les femelles ; elles sont belliqueuses et adonnées aux exercices gymnastiques. On prétend que Mercure en conjonction avec Vénus, si c’est dans le séjour de Mars, produit les statuaires, les peintres et les banquiers, et si c’est dans le séjour de Vénus, les parfumeurs, les musiciens et les comédiens. Or, chez les Saines, les Sarrazins, dans la Libye supérieure, chez les Maures, chez les Nomades qui habitent à l’embouchure de l’Océan, dans la Germanie extérieure, dans la Scythie et chez toutes les nations qui occupent les contrées septentrionales du Pont et dans toute l’Alanie, l’Abanie, l’Otène, la Saunie et la Chersonèse d’Or, vous ne trouverez ni banquier, ni statuaire, ni peintre, ni architecte, ni géomètre, ni musicien, ni comédien ; dans cette vaste portion de l’univers, la puissance de Mercure et de Vénus se trouve donc privée d’action. Tous les Mèdes jettent aux chiens qu’ils nourrissent soigneusement les corps des moribonds encore en vie ; et cependant ils ne sont pas nés tous sous terre pendant le jour au moment de la jonction de la lune et de Mars dans le signe du cancer. Les Indiens brûlent leurs morts avec lesquels ils brûlent aussi leurs femmes qui s’offrent volontairement : Et cependant toutes les femmes indiennes ainsi brûlées vives ne sont pas nées sous terre pendant la nuit, lorsque le soleil était en conjonction avec Mars dans le signe du lion, et dans les confins de Mars même. La plupart des Germains terminent leurs jours au moyen de la strangulation : Et cependant tous ces Germains ne sont pas nés au moment où la lune était interceptée par Saturne et Mars. En effet, les hommes naissent chez toutes les nations, chaque jour et de toute manière, et cependant chez la plupart des individus, les lois et les coutumes dominent en raison du libre arbitre de l’homme : ainsi ce n’est point la nativité qui pousse malgré eux les pères à commettre des homicides, les Brachmanes à manger de la viande, les Perses à s’abstenir d’unions incestueuses, les Indiens à fuir le bûcher, les Mèdes à éviter les dents des chiens, les Parthes à s’abstenir de la polygamie, les femmes de la Mésopotamie, à se livrer à l’intempérance, les Grecs à fuir les exercices gymnastiques, les Romains à ne point vouloir dominer, les Gaulois à ne point contracter de mariages, ni les autres nations barbares à ne point entretenir commerce avec ce que les Grecs appellent les muses. Mais comme je l’ait dit auparavant, chaque nation, chaque individu fait usage de sa liberté comme il le veut et quand il le veut ; quoique chacun soit l’esclave de sa nativité et de la nature par le corps dont elles l’ont revêtu et auquel il obéit quelquefois volontairement et quelquefois involontairement. Car partout et chez chaque nation, il y a des riches et des pauvres, des princes et des sujets, des hommes valides et des infirmes, selon le sort que la nativité a départi à chacun. Voilà, vous dis-je, Bardisanes, les raisons qui m’ont fortement persuadé ; ne me dites point avec certains astronomes que la terre est divisée en sept régions, et qu’à chacune d’elles préside l’une des sept planètes, que ce ne sont pas les hommes qui se sont imposé différentes lois, mais que c’est l’influence de chacune de ces planètes qui domine dans chaque région, influence à laquelle ceux qui y sont assujettis ont donné le nom de loi. Philippe, cette réponse ne me paraît point conforme à la vérité. Car en supposant que le globe terrestre soit divisé en sept régions, nous trouvons que dans chacune, les lois présentent de nombreuses différences. En effet, il n’y a pas sept lois comme il y a sept planètes, ni douze lois comme il y a douze signes du zodiaque, ni trente-six lois selon le nombre des doyens ; mais on en compte par milliers. Vous devez vous souvenir de ce que j’ai déjà dit, que dans une seule région, dans la seule contrée de l’Inde, il y a des Indiens anthropophages, et d’autres qui s’abstiennent de la chair des animaux. Ce n’est pas seulement en Perse que les Maguséens épousent leurs filles, mais en quelque autre pays qu’ils habitent, ils se montrent fidèles observateurs des lois, des mystères et des rites qui leur ont été transmis par leurs ancêtres. Nous avons aussi donné le recensement de plusieurs autres nations barbares qui existent au midi, au couchant, à l’orient et au septentrion, c’est-à-dire sous différents climats et qui sont tout à fait étrangères à la science d’Hermès. Combien, dites-moi, n’y a-t-il pas eu d’hommes sages qui ont changé des lois mauvaises ? Combien de lois ne sont-elles pas tombées par des circonstances extraordinaires ? Combien de rois n’ont-ils pas aboli les lois des nations vaincues et n’ont-ils pas substitué d’autres lois ? Cependant aucune planète ne s’est écartée de sa région. Il n’y a que quelques années que les Romains ayant subjugué l’Arabie, abrogèrent les lois des Barbares ; car la puissance suit la puissance. Mais je vais vous citer un trait capable de convaincre les plus incrédules. Tous les Juifs qui ont reçu la loi de Moïse, font à leurs enfants mâles le huitième jour de leur naissance, la sanglante opération de la circoncision, et en cela ils n’attendent pas la présence d’un astre, ne déclinent point la vertu d’un climat et ne se gouvernent point d’après la loi d’un autre pays. Ainsi qu’ils se trouvent en Syrie, ou dans la Gaule, ou en Italie, ou en Grèce, ou dans le pays des Parthes, ou enfin partout ailleurs, ils observent la même coutume. Ceci n’est point l’effet de la nativité, car tous les Juifs ne peuvent naître sous la même constellation ; partout où ils se trouvent le septième jour ils cessent tout ouvrage, ils ne se mettent pas en voyage et ne font pas même usage du feu. Ainsi, ce n’est point la nativité qui contraint les Juifs à ne point bâtir de maisons, à n’en point démolir, à ne pas travailler, à ne pas vendre, à ne pas acheter les jours du sabbat, et cependant ces mêmes jours, les Juifs engendrent et naissent, sont malades et meurent ; car tout cela ne dépend pas du libre arbitre. En Syrie et dans l’Osroëne, la plupart des habitants se mutilaient en l’honneur de Cybèle, lorsque tout à coup le roi Abgar, ordonna que l’on couperait aussi les mains à ceux qui se seraient coupé les parties génitales alors dans l’Osroëne, personne ne se mutile plus. Que dirons-nous de l’institution des chrétiens dont nous sommes les sectateurs ? Malgré notre grand nombre, quoique nous habitions divers climats, chez toutes les nations et dans tout pays, on nous appelle tous du même nom. En effet dans le pays des Parthes, les chrétiens qui sont Parthes, eux-mêmes, ne connaissent point l’usage de la polygamie ; dans la Médie ils ne jettent pas les cadavres aux chiens ; et en Perse quoiqu’ils soient Perses eux-mêmes, ils n’épousent pas leurs filles. Dans la Bactriane et la Gaule, ils ne flétrissent point la pureté du mariage : et en Égypte, il n’adorent ni Apis, ni le chien, ni le bouc, ni le chat : enfin en aucun pays, ils ne se laissent subjuguer par l’ascendant de mauvaises lois, de mauvaises coutumes ; et les astres qui président à leurs destins, ne les forcent point à commettre les mauvaises actions interdites par leur instituteur ; quoique d’un autre côté ils soient sujets aux maladies, à la pauvreté, à la douleur et à ce que l’on considère comme des outrages. De même que l’homme qui passe pour libre chez nous, n’est pas forcé de servir, ou s’il est forcé un instant, résiste à ceux qui lui font violence ; de même aussi l’homme qui nous paraît esclave ne peut facilement se soustraire à l’esclavage ; car si nous pouvions tout, nous serions tout, de même que si nous ne pouvions rien, nous serions comme je l’ai déjà dit les instruments des autres et nous cesserions de nous appartenir. Mais, lorsque Dieu le veut, tout est possible : aucun obstacle n’est insurmontable, car rien ne peut résister à sa volonté. Les choses qui paraissent résister, ne lui résistent effectivement qu’en tant que Dieu dans sa bienfaisance a accordé à la nature de chacun de nous une prérogative particulière et le libre arbitre de la volonté. »
Voilà ce que dit notre auteur syrien ; j’en citerai encore un, et je terminerai cette discussion. Car, puisque j’ai puisé assez d’exemples dans les ouvrages profanes et qu’il ne me reste plus que l’autorité des saintes Écritures, dont les exemples conviendront particulièrement à la préparation de la démonstration évangélique ; il me paraît juste d’apporter à cet examen une attention sérieuse afin que la solution du problème dont je m’occupe ne laisse rien à désirer. Je vais donc vous les exposer clairement, mais comme vous ne pourriez pas comprendre le texte pur de nos livres sacrés, parce qu’ils présentent une grande quantité de passages obscurs, je vous mettrai sous les yeux l’explication qu’en a donnée leur interprète. Cet interprète (loin de vous toute basse jalousie contre des talents supérieurs), vous le connaissez parfaitement, il figure encore aujourd’hui au milieu des assemblées chrétiennes au moyen des ouvrages qu’il a laissés après lui ; il n’est pas même inconnu chez les étrangers, à raison de son zèle à étudier leurs sciences. Voyez donc comment l’admirable Origène a discuté le sujet qui nous occupe, dans ses commentaires sur la Genèse et comment il a traité la matière du destin.