Qu’il faut peu de chose pour m’abattre et peu de chose pour me relever. Un nuage qui passe m’attriste, un rayon de soleil qui le perce me réjouit. De même, le plus petit échec me décourage, le plus faible succès exalte mes espérances ! Il semble que je sois le jouet de tous les souffles, de toutes les circonstances, et que je ne sois maître ni de mes actions, ni de mes pensées ! Si du moins une conduite lâche ou téméraire ne suivait pas cette imagination triste ou triomphante. Mais, hélas ! je n’ai pas plutôt conçu crainte ou espérance, que mon action se porte tour à tour aux deux extrêmes, qu’ensuite je déplorerai tous deux !
Ah ! Seigneur, si le mobile de ma vie était en toi, et non pas en moi-même, si je cherchais ta gloire et non la mienne, je ne serais pas si vite abattu, ni si promptement exalté. Résigné sous le sombre nuage, calme sous le soleil radieux, j’accepterais, toujours heureux, ces événements, comme l’expression de ta volonté. Je travaillerais à diriger ceux de l’avenir sans m’attrister sur ceux du passé. Mais non, je ne sais pas être simple, désintéressé, et jusque dans l’accomplissement de la loi, je cherche ma propre volonté. Mon Dieu, donne-moi donc un cœur droit qui regarde toujours en face, qui ne voie que le devoir ; un cœur qui songe à toi, non seulement après, mais encore avant l’événement ; un cœur dévoué, qui n’ait qu’une affection : toi ; qu’un but : l’éternité ; qu’une œuvre : ma sanctification. Alors je ne serai, ni triste comme le désespéré, ni triomphant comme l’insensé ; mais paisiblement joyeux au milieu de l’épreuve, comme au sein de la prospérité. Apprends-moi à voir, de haut, ce petit monde ; et de loin, ses mesquines agitations. Apprends-moi à trouver partout la place et le temps pour répéter tes paroles, accomplir tes ordres, sans m’inquiéter du résultat dans le présent, assuré que je suis du succès dans l’avenir.