« Qu’il ne puisse y avoir à la fois deux êtres incréés, c’est ce que vous comprendrez avec moi, si vous suivez ce raisonnement. Point de milieu : ou Dieu est séparé de la matière, ou Dieu est uni à la matière. Si vous prétendez que Dieu est uni à la matière, vous n’admettez qu’un être incréé ; car l’un est la partie de l’autre, et réciproquement. Or deux parties jointes l’une à l’autre ne sont pas deux êtres incréés ; de même qu’en disant que l’homme est un composé de diverses substances, nous n’entendons pas que ces diverses substances forment plusieurs êtres créés, mais un seul, ainsi que le dicte la raison ; de même si Dieu n’est point séparé de la matière, il est nécessaire de dire qu’il n’y a qu’un être incréé. Si vous prétendez que Dieu est séparé de la matière, il faut que tous vous admettiez un être intermédiaire qui serve comme de point de comparaison : car quand il s’agit de séparation, on ne peut distinguer une chose d’une autre chose sans une troisième qui en fasse comprendre la différence. Et ce raisonnement ne s’applique pas seulement à ce cas particulier, mais à une multitude d’autres. Au lieu de deux, supposez trois substances incréées, ce sont toujours les mêmes conséquences. Réunies, elles formeront un seul être ; séparées, elles nécessiteront une quatrième substance au moyen de laquelle on les distingue.
Peut-être me répondrez-vous : il n’en est point des choses innées comme des choses créées ; Dieu n’est ni séparé de la matière ni uni à la matière comme une partie à une autre partie, mais ou bien il est contenu dans la matière, comme dans un lieu, ou bien c’est la matière qui est contenue en lui. Fort bien ! Voyons ce qui s’ensuit. Dieu est contenu dans la matière ; donc il est dépendant de la matière, borné par la matière ; donc il éprouve toutes les vicissitudes de la matière ; il n’est plus immuable par son essence, emporté qu’il est dans le mouvement de la matière qui l’entoure. Donc il fut un temps où Dieu habitait le chaos ; car s’il a fait d’une matière informe et en désordre un monde élégant et régulier, n’était-il pas auparavant au milieu de ces éléments discordants ? De plus, Dieu remplissait-il toute la matière, ou seulement une partie de la matière ? S’il ne remplissait qu’une partie de la matière, donc il était beaucoup plus petit que la totalité de la matière, puisque une partie seule le contenait. S’il remplissait toute la matière, comment a-t-il pu la travailler ? Se repliait-il sur lui-même afin de laisser une partie vide qu’il travaillait ensuite, ou bien se travaillait-il lui-même avec la matière, n’ayant pas de lieu où se retirer ?
Dire que c’est Dieu qui contient la matière n’est pas moins absurde. En effet, comment la contiendrait-il ? Se fractionne-t-elle en une infinité de petites parties, de manière qu’il soit pénétré par elle comme l’air par les différentes espèces d’animaux ? ou bien y a-t-il en lui-même un espace vide, comme il y a dans la terre des cavités pour renfermer les eaux ? Dans le premier cas, il serait divisible, dans le second, il serait le réceptacle de la confusion et de toutes sortes de maux, puisqu’il renfermerait une matière confuse, irrégulière et portant le mal dans son sein : assertion aussi impie que dangereuse. Je sais bien que l’on rejette le mal sur la matière non sur Dieu, mais en définitive Dieu n’y serait point étranger, puisqu’il le renfermerait en lui-même.
Et certes, si d’après l’origine des choses créées, vous jugiez que la matière est incréée, je ne manquerais pas d’arguments pour prouver que cela est impossible ; mais, comme c’est plutôt d’après l’origine du mal que vous embrassez ce sentiment, je crois devoir m’appesantir sur ce sujet. Une fois que j’aurai démontré d’où vient le mal, et que Dieu n’en est pas l’auteur, par cela même qu’il a créé la matière, il me semble que j’aurai dissipé tous vos préjugés. Vous dites donc que la matière dont Dieu s’est servi pour créer le monde était sans aucune qualité sensible et coexistait avec lui ? Oui. Par conséquent, si la matière était dépourvue de qualités, si Dieu est l’auteur du monde, enfin s’il y a des qualités sensibles dans le monde, Dieu est l’auteur de ces qualités ? Oui encore. Mais, comme je vous ai précédemment entendu dire que de rien il était impossible qu’il se formât quelque chose, voudriez-vous répondre à ma question ? Vous pensez, si je ne me trompe, que les qualités du monde ne proviennent pas d’autres qualités qui en seraient le sujet, et qu’elles sont distinctes de la nature des choses. Vous avez raison. Si donc Dieu n’a point fait les qualités avec d’autres qualités, s’il ne les a pas non plus tirées des natures dont elles sont distinctes, ne doit-on pas conclure qu’il les a tirées du néant ? Et ne tombe-t-elle pas en poudre, votre objection, que Dieu n’a pu de rien faire quelque chose ?
Employons encore un autre raisonnement.
« Nous voyons quelquefois des hommes faire quelque chose avec rien, les architectes particulièrement, qui construisent des villes sans d’autres villes, des temples sans d’autres temples. Si, de ce qu’ils ont sous la main des matériaux, vous concluez qu’ils font quelque chose de quelque chose, vous êtes dans l’erreur. Ce ne sont point les matériaux qui font une ville ou un temple, mais l’art qui emploie ces matériaux. Or, cet art ne provient pas d’un art préexistant renfermé dans les matériaux, il provient d’un art qui leur est absolument étranger. Vous me répondrez sans doute que l’artisan reproduit dans les matériaux l’art qui est inné en lui : je répondrai à mon tour que chez l’homme même il n’est pas possible d’admettre un second art provenant d’un premier art, d’un art existant par lui-même, puisque l’art est un de ces accidents qui prennent l’être quand ils sont produits dans la substance. L’homme existe indépendamment de l’architecture, l’architecte, au contraire, suppose l’homme préexistant ; d’où il faut nécessairement conclure que chez les hommes, les arts ont été produits de rien. Et pour les hommes, vous ne pouvez pas ne pas l’admettre, pourquoi n’admettriez-vous pas que Dieu puisse faire de rien non seulement des qualités sensibles, mais encore des substances car la raison qui démontre que de rien il peut naître quelque chose, s’applique également aux substances. »
« Cependant, puisque vous désirez que je vous explique l’origine du mal, je vais le faire et je commence par vous adresser quelques questions. – Croyez-vous que les maux soient des substances ou des qualités de substances ? – Des qualités de substance, répondez-vous avec raison. – Mais la matière n’avait ni qualités ni formes, avons-nous dit au commencement de cette discussion : donc, si les maux sont des qualités de substances, et si la matière était primitivement sans qualités, comme vous avez avoué que Dieu est l’auteur de ces qualités, il faut que vous avouiez qu’il est également l’auteur du mal. Dans ce cas, à quoi bon lui adjoindre la matière ? Qu’avez-vous à répondre ? parlez. Si nous avions entamé cette question par amour pour la dispute, je me garderais bien d’entrer une seconde fois dans l’origine du mal ; mais, comme je suis conduit par l’amitié et le désir d’être utile au prochain, je reprends de plus haut. Je crois que mon sentiment vous est connu depuis longtemps ; l’objet que je me propose n’est pas de triompher du mensonge en employant des raisonnements plus ou moins probables, mais de mettre la vérité dans tout son jour en me livrant à un examen rigoureux ; je vous crois dans les mêmes dispositions : si donc vous avez un moyen de la découvrir, cette vérité, ne balancez pas à en faire usage. Si vous trouvez les meilleures preuves, vous vous rendrez utile non seulement à vous, mais encore à moi en éclairant mon ignorance.
Hé bien ! Que pensez-vous des maux ? Que ce sont des substances, puisqu’on ne les voit point en dehors des substances. Les maux, à votre avis, sont des substances ! Qu’est-ce qu’une substance ? Pensez-vous qu’une substance soit un composé de matière ? Je le pense. Ce composé de matière existe-t-il par lui-même sans avoir besoin d’un sujet dans lequel il prenne l’existence ? Il existe par lui-même. Et les maux vous paraissent-ils avoir une action propre ? Oui. Mais pour que cette action ait lieu, faut-il un agent ? Certainement. Alors, sans agent, il ne peut y avoir d’action ? Non. Donc, si d’un côté une substance est un composé de matière, et que ce composé n’ait point besoin d’un sujet pour exister ; si d’un autre côté les maux sont des actions et que ces actions aient besoin d’un sujet pour exister, les maux ne sont point des substances. Ainsi, le meurtre qui est un mal demande l’action d’un sujet et n’est pas une substance. Si vous voulez appeler substance tout ce qui a la faculté d’agir, je suis d’accord avec vous. L’homme meurtrier, en tant qu’homme, est une substance, mais le meurtre qu’il commet n’est pas une substance, il est seulement l’action d’une substance. A la vérité, nous disons quelquefois qu’un homme est méchant pour avoir commis un meurtre, nous disons aussi quelquefois qu’il est bon pour avoir exercé un bienfait ; mais ces dénominations sont données à la substance accidentellement, elles ne sont pas la substance même, car le meurtre, l’adultère et autres crimes semblables ne composent point des substances. De grammaire nous faisons dériver grammairien, de rhétorique rhéteur, de médecine médecin, quoique la médecine, la rhétorique, la grammaire, ne soient pas des substances. La substance prend le nom de ces accidents sans être elle-même rien de ces accidents : de même nous appelons le mal substance, quoiqu’une substance ne soit aucun mal c’est une licence du raisonnement que, lorsqu’on assigne une cause aux maux qui pèsent sur les hommes, on regarde cette cause comme mauvaise, par la raison qu’elle fait le mal ou pousse à le faire. Ainsi, on appelle méchant celui qui est l’auteur d’une mauvaise action, non pas que ses actes soient lui-même, mais seulement parce que l’on a en vue ses actes. En effet, si nous disions que les actes d’un homme sont la même chose que lui, il s’ensuivrait que les meurtres, les adultères, les vols, et autres crimes de cette espèce ne feraient qu’un avec lui. Et, si les crimes se confondent avec la personne, comme ils n’existent que lorsqu’on les commet, qu’ils cessent d’exister lorsqu’on cesse de les commettre, et que ce sont toujours des hommes qui en sont les auteurs, les hommes seront également les auteurs de leur existence et de leur non-existence. Au contraire, quand on dit que les maux sont l’acte de l’homme, on entend que l’homme est méchant par les choses qu’il fait, non par les choses qui composent sa substance, méchant par rapport aux accidents de sa substance, accidents qui, ne sont pas plus sa substance que le médecin n’est la médecine. Avec les actes de l’homme tout s’explique : l’être méchant a commencé ; les maux ont commencé : l’être méchant n’est point incréé ; les maux par là qu’ils procèdent de lui, ne sont point incréés. »
« Vous parlez admirablement, mon cher, c’est dommage que vous ayez réfuté un autre adversaire que moi. Je l’avoue, des principes que vous avez posés, vous tirez des conséquences rigoureuses ; si la matière est par sa nature dépourvue de toute qualité, si Dieu est l’auteur des qualités, si les qualités sont des maux, Dieu est nécessairement l’auteur des maux : seulement vos arguments ne vont pas à leur adresse, car pour moi je regarde comme une erreur de dire que la matière est sans qualités, aucune substance n’en est entièrement dépourvue et, quand on dit que la matière n’en a aucune, on indique par cela même qu’elle en a, puisqu’en expliquant ce que c’est que la matière, on suppose une sorte de qualité. Je vous prierai donc, si vous ne me trouvez pas importun, de répondre à la difficulté même que voici : la matière a de toute éternité des qualités ; il faut admettre que les maux sont un écoulement de la matière afin de ne pas attribuer à Dieu ce qui ne doit être attribué qu’à la matière. »
« Votre demande est juste, mon cher, et je ne puis que louer votre zèle à soutenir votre thèse. Quiconque veut s’instruire, ne donne pas un assentiment pur et simple à l’opinion des autres ; il pèse la force des raisons. De son côté, celui qui veut convaincre, ne doit pas chercher à éblouir par des arguments spécieux, autrement il manquerait son but, qu’il se serve seulement des arguments qui lui paraissent solides et il arrivera de deux choses l’une : ou bien il entraînera son adversaire dans son sentiment et lui rendra un service éminent, ou bien son adversaire lui démontrera à lui-même qu’il est dans l’erreur. Or, vous ne me paraissez pas avoir établi clairement que la matière a eu des qualités de toute éternité ; car si elle a toujours eu des qualités, de quoi Dieu sera-t-il l’auteur ? Des substances ? Vous avez dit qu’elles sont antérieures au monde. Des qualités ? Vous leur avez supposé la même antériorité. Les substances et les qualités existant par elles-mêmes, je ne vois plus aucun motif d’appeler Dieu créateur ; si vous en voyez un, vous, loin que je me retranche sur de vaines arguties, je vous en supplie, faites-le connaître. Dieu aurait-il changé la nature primitive des substances pour leur en substituer une autre ou bien, conservant leur nature, aurait il changé leurs qualités ? Ni l’une ni l’autre hypothèse ne me paraît admissible : on ne peut les soutenir sans absurdité. »
Je réponds qu’il y a eu dans les qualités un certain changement qui fait que j’appelle Dieu créateur. Prenons pour exemple une maison en pierres. Les pierres en devenant maison n’ont point dépouillé leur nature de pierre ; seulement il est évident que l’arrangement qui les a rendues maison a changé leurs qualités premières. De même Dieu, tout en conservant la nature de la matière, a changé toutes ses qualités et il est permis de lui attribuer la formation du monde.
Je vous comprends ; les qualités ont subi un certain changement. Permettez alors que je vous adresse quelques petites questions : Les maux sont-ils des qualités de substances ? Je le crois. Ces qualités existaient-elles primitivement dans la matière, ou bien ont-elles eu un commencement ? Elles existaient dans la matière sans avoir été créées. N’avez-vous pas avancé que Dieu a fait certains changements dans ces qualités ? Oui. Ces changements ont-ils eu lieu en mieux ou en pis ? En mieux. Mais si les maux sont des qualités et si Dieu a changé en mieux ces qualités, d’où viennent donc les maux ? car il n’y a que trois hypothèses possibles. La première, que toutes ces qualités mauvaises de leur nature sont restées telles qu’elles étaient naturellement. La seconde, que n’étant aucune primitivement mauvaise, elles le sont devenues par le changement que Dieu leur a fait subir, ce qui le rend l’auteur du mal. La troisième enfin, que les unes étaient mauvaises, les autres indifférentes et que Dieu, laissant les mauvaises sans les améliorer, a changé les indifférentes seules pour embellir le monde. C’est cette dernière opinion que j’ai toujours suivie. Et pourquoi Dieu a-t-il laissé les mauvaises qualités telles qu’elles étaient. Est-ce parce qu’il n’a pas voulu, est-ce parce qu’il n’a pas pu les changer ? S’il ne l’a point voulu, il faut nécessairement convenir qu’il est l’auteur des maux, puisque pouvant les rendre meilleures, il ne l’a pas fait, tout en travaillant la matière. A la vérité, on n’avait point touché à la matière, on ne pourrait lui imputer à crime de n’avoir pas touché aux qualités, mais il en a travaillé une portion, et il a laissé la portion mauvaise qu’il pouvait améliorer : n’est-on pas en droit de lui attribuer les effets désastreux de la portion restée mauvaise par sa faute sur la portion qu’il a travaillée ? Et n’a-t-il pas été bien injuste envers celle-ci en la plaçant dans la nécessité de supporter le poids de cette masse de maux ? Car à bien examiner les choses, la condition actuelle de la matière travaillée est bien pire que sa condition première. Avant d’être divisée en parties distinctes, elle n’avait pas le sentiment du mal, maintenant chacune de ses parties en reçoit l’impression funeste. L’homme, par exemple, avant que l’art du Créateur l’eût fait un animal vivant, n’était, par sa nature, susceptible de sentir aucun mal : depuis que Dieu l’a fait ce qu’il est, il ressent tous les maux qui fondent sur lui. Ainsi, ce que vous appelez un bienfait de Dieu envers la matière est le présent le plus funeste. Si vous croyez plus favorable à votre opinion de dire que Dieu n’a pas pu détruire les qualités mauvaises, vous convenez alors qu’il est impuissant. Et d’où vient cette impuissance ? Est-ce de la faiblesse de la nature ? Est-ce comme un vil esclave de la cruauté d’un être supérieur à lui ? Si vous osez le dire impuissant par la faiblesse de la nature, vous risquez évidemment votre salut. Si vous dites qu’il est impuissant par la cruauté d’un être supérieur, les maux seront plus puissants que lui et auront comprimé l’essor de sa volonté. Dans ce cas, il vaudrait mieux mettre les maux à la place de Dieu, puisque, selon vous, ils ont pu les vaincre et que par Dieu on entend l’être qui possède la toute-puissance.
Encore quelques questions : La matière est-elle simple ou composée ? La diversité des choses me force à engager cette nouvelle discussion. Si elle est simple et homogène, comment le monde est-il à la fois un composé et un mélange de substances de natures différentes, car un composé indique le mélange de plusieurs choses simples. Si elle est composée, elle ne peut l’être que de choses simples ; or, ces choses simples existaient par elles-mêmes, et pourtant la matière qui en est formée devient nécessairement créée. En effet, puisqu’elle est composée et que les composés sont une réunion de corps simples, il y eut un temps où la matière n’était pas, c’est-à-dire avant que les choses simples fussent rassemblées. Or, s’il y eut un temps où la matière n’existait point, et si l’incréé a toujours existé, donc la matière n’est point incréée. Concluons encore qu’il y aurait beaucoup de choses incréées, car si Dieu est incréé, si les corps simples qui constituent la matière sont incréés, il n’y aura pas que deux choses incréées.
Une dernière question. « Avouez-vous qu’il n’y a aucune chose qui soit contraire à elle-même ? Je l’avoue. L’eau est-elle contraire au feu ? Oui. Les ténèbres sont-elles contraires à la lumière, la chaleur au froid, l’humidité à la sécheresse ? Oui encore. Puis donc qu’aucune chose n’est contraire à elle-même, il n’y aura pas qu’une seule matière et tout ne sera pas formé d’une seule et unique nature. Cependant poussons notre raisonnement plus loin. Les parties sont-elles destructives les unes des autres ? Non. Le feu, l’eau et autres choses de ce genre sont-ils des parties de la matière ? A n’en pas douter. Est-ce que l’eau ne détruit pas le feu, les ténèbres la lumière et ainsi de plusieurs autres choses ? Je ne le conteste pas. Donc, si les parties ne se détruisent pas les unes les autres, ces choses ne sont point parties les unes des autres, et si elles ne sont point parties les unes des autres, elles ne sont pas non plus parties d’une matière unique ; elles ne sont pas même matières, aucune chose ne pouvant se détruire elle-même, comme détruire les contraires. En effet, un contraire n’a pas pour contraire soi-même, il a pour contraire une autre chose. Ainsi le blanc n’est pas contraire au blanc, mais au noir seulement : la lumière n’est pas contraire à la lumière, mais aux ténèbres : de même des autres choses ; par conséquent si la matière était une, elle ne serait pas contraire à elle-même : par conséquent, d’après la loi des contraires, une pareille matière n’existe point. »
Ainsi s’exprime cet illustre écrivain. Comme ce livre est déjà d’un volume suffisant, nous achèverons de traiter ce sujet dans le huitième livre de la Préparation évangélique, après que nous aurons imploré l’assistance divine.