17e siècle
Faites, ô mon Dieu ! que j’adore en silence l’ordre de votre providence adorable sur la conduite de ma vie ; que votre fléau me console ; et qu’ayant vécu dans l’amertume de mes péchés pendant la paix, je goûte les douceurs célestes de votre grâce durant les maux salutaires dont vous m’affligez. Mais je reconnais, mon Dieu, que mon cœur est tellement endurci et plein des idées, des soins, des inquiétudes et des attachements du monde, que la maladie non plus que la santé, ni les discours, ni les livres, ni vos Ecritures sacrées, ni votre Évangile, ni vos mystères, ni les saints, ni les aumônes, ni les jeûnes, ni les mortifications, ni les miracles, ni l’usage des sacrements, ni le sacrifice de votre corps, ni tous mes efforts, ni ceux de tout le monde ensemble ne peuvent rien du tout pour commencer ma conversion, si vous n’accompagnez toutes ces choses d’une assistance toute extraordinaire de votre grâce. C’est pourquoi, mon Dieu, je m’adresse à vous, Dieu tout-puissant, pour vous demandeur un don que toutes les créatures ensemble ne peuvent m’accorder. Je n’aurais pas la hardiesse de vous adresser mes cris, si quelque autre pouvait les exaucer. Mais, mon Dieu, comme la conversion de mon cœur que je vous demande est un ouvrage qui passe tous les efforts de la nature, je ne puis m’adresser qu’à l’auteur et au maître tout-puissant de la nature et de mon cœur. A qui crierais-je, Seigneur, à qui aurais-je recours, si ce n’est à vous ? Tout ce qui n’est pas Dieu ne peut pas remplir mon attente. C’est Dieu même que je demande et que je cherche ; et c’est à vous seul, mon Dieu, que je m’adresse pour vous obtenir. Ouvrez mon cœur, Seigneur, entrez dans, cette place rebelle que les vices ont occupée. Ils la tiennent sujette. Entrez-y comme dans la maison du fort ; mais liez auparavant le fort et puissant ennemi qui la maîtrise, et prenez ensuite les trésors qui y sont. Seigneur, prenez mes affections que le monde avait volées ; volez vous-même ce trésor ; ou plutôt reprenez-le, puisque c’est à vous qu’il appartient, comme un tribut que je vous dois, puisque votre image y est empreinte. L’idée du monde y est tellement gravée que la vôtre n’est plus connaissable. Vous seul avez pu créer mon âme ; vous seul pouvez la créer de nouveau, vous seul avez pu y former votre image, vous seul pouvez la réformer et y réimprimer votre portrait effacé, c’est-à-dire Jésus-Christ mon Sauveur, qui est votre image et le caractère de votre substance.