Nous avons expliqué dans les livres précédents les motifs qui portent Dieu à tolérer l’iniquité sur la terre, et nous avons démontré que tous les événements qui se passent dans le monde ont lieu pour le salut de l’homme ; car les souffrances auxquelles il se soumet volontairement, et le bon exercice qu’il fait de sa liberté et de sa volonté le mûrissent pour l’immortalité, et le préparent à la subordination dans laquelle il sera vis-à-vis de Dieu durant l’éternité. Voilà pourquoi toute la création se rapporte à l’homme ; en effet, ce n’est pas l’homme qui a été fait pour la création, mais c’est la création qui a été faite pour l’homme. Quant aux nations qui n’ont pas voulu lever les yeux vers le ciel, pour rendre des actions de grâces à leur créateur, qui ont refusé de recevoir la lumière de la vérité, et qui, semblables à des taupes aveugles, sont restées accroupies dans les ténèbres de leur ignorance, le prophète dit avec raison : « Ces nations sont devant lui comme une goutte d’eau dans un vase d’airain, un grain de sable dans une balance ; elles sont pour lui comme le vide et le néant. » Ces peuples sont seulement utiles aux justes en ce qu’ils les éprouvent ; ils leur servent comme la tige sert au froment dont elle facilite l’accroissement, comme la paille sert à l’ouvrier pour allumer le feu qui doit purifier l’or. L’Église aura dans ces derniers temps une terrible épreuve à subir : « Car la tribulation alors sera grande, telle qu’il n’y en a pas eu depuis le commencement du monde jusqu’à présent, et qu’il n’y en aura jamais. » En effet, ce sera là le dernier combat qu’auront à soutenir les justes, et qui donnera l’immortalité aux vainqueurs.
C’est qu’alors aussi la bête ramassera en elle tout ce qu’il y aura dans le monde d’iniquité et de méchanceté, afin que le venin de toute rébellion et de toute apostasie étant rassemblé dans elle soit jeté et dévoré dans la fournaise ardente. Le nombre de son nom sera donc de six cent soixante-six, parce que tel sera le nombre de toutes les souillures dont elle se sera rendue coupable, avec ses anges, dès avant le déluge. Le nombre des années de Noé était aussi de Six cents, lorsque le déluge vint purger la terre de l’iniquité, répandue sur toute sa surface. De même aussi l’idole offerte à l’adoration du peuple par Nabuchodonosor était de soixante-six coudées, soixante en hauteur et six en largeur, nombre qui représentait celui des idolâtries, des massacres de prophètes, des supplices soufferts par les justes dans les temps de l’ancienne loi. Ce fut pour avoir refusé leur adoration à cette statue, qu’Ananias, Azarias et Misaël, furent jetés vivants dans la fournaise, dont ils furent délivrés miraculeusement ; ils furent ainsi la prophétie figurative des traitements réservés aux justes lors du règne de l’antéchrist. Car l’histoire de cette statue de Nabuchodonosor est dans tous ses détails la prédiction figurée de l’antéchrist, qui voudra se faire adorer par tous les peuples de la terre. Ainsi les six cents ans de Noé, témoin du déluge causé par les iniquités de la terre, joints aux soixante-six coudées des dimensions de la statue de Nabuchodonosor, à l’occasion de laquelle des justes furent livrés au supplice du feu, font six cent soixante-six, qui est le nombre de la bête ; c’est elle qui représentera et rassemblera en elle toutes les apostasies, toutes les injustices, tous les crimes, soit ceux de fourberie, soit ceux de fausse prophétie, qui seront cause du déluge de feu que Dieu fera tomber sur la terre.