Histoire ecclésiastique - Eusèbe de Césarée

LIVRE VII

CHAPITRE X
VALÉRIEN ET SA PERSÉCUTION

[1] Le parti de Gallus n'avait pas possédé le pouvoir deux années entières, et il disparut ; Valérien et son fils Gallien lui succédèrent à l'empire. [2] Ce que dit Denys à ce sujet, on peut encore l'apprendre dans la lettre à Hermamon où il en parle ainsi : « A Jean aussi, cela a été pareillement révélé ; il lui a en effet été donné, dit-il, une bouche pour dire de grandes choses et un blasphème, puis il lui a été donné le pouvoir et quarante-deux mois. » [3] Il faut admirer l'un et l'autre en Valérien et mieux encore, il faut penser de quelle façon étaient les affaires avant lui ; comment lui-même était doux et bon pour les hommes de Dieu ; car aucun autre parmi les empereurs qui l'ont précédé n'a été disposé d'une façon aussi bienveillante et aimable à leur égard ; même ceux qu'on disait ouvertement être chrétiens ne les accueillaient pas d'une manière aussi manifestement sympathique et favorable que lui à son début ; toute sa maison était pleine d'hommes pieux ; elle était une église de Dieu. [4] Mais son maître qui était le chef des mages d'Égypte lui persuada de se débarrasser d'eux ; il l'engagea à faire mourir et à persécuter ces hommes purs et saints, comme étant des gens hostiles et des obstacles à ses incantations tout à fait honteuses et répugnantes ; (ils sont, en effet, et étaient capables, par leur présence et leur regard, ou même seulement par leur souffle et leur voix, de rompre les machinations des démons néfastes). Il suggéra, d'autre part, d'accomplir des rites impurs et des pratiques de sorcellerie détestables, et des cérémonies religieuses réprouvées par la divinité, d'égorger des enfants malheureux, de sacrifier ceux dont les pères étaient misérables, de déchirer les entrailles des nouveau-nés, de couper, d'éventrer les créatures de Dieu, comme s'ils devaient par là obtenir du bonheur. »

[5] Et il ajoute à cela : « Macrien offrit donc à ces démons de beaux témoignages de gratitude pour l'empire qu'il espérait ; tout d'abord lui qui était appelé l'intendant universel des comptes de l'empereur, il n'eut aucun dessein raisonnable ni universel, mais il tomba sous la malédiction du prophète qui dit : « Malheur à ceux qui prophétisent de leur propre cœur et qui ne regardent pas le bien de tous ». [6] Il ne faisait pas en effet attention à la Providence universelle et ne se méfiait pas du jugement de celui qui est avant tout, en tout et sur tout ; voilà pourquoi encore, il devint l'ennemi de son Église universelle, il se rendit étranger à la miséricorde de Dieu, rompit avec elle et le plus qu'il put, s'éloigna de son salut, réalisant en cela son propre nom. »

[7] Et Denys dit encore après autre chose : « Car Valérien poussé par lui à cela, fut abandonné aux insultes et aux railleries, selon la parole d'Isaïe : « Et ceux-ci ont choisi leurs voies et les abominations que leur âme a désirées et moi je choisirai pour eux les moqueries et je leur rendrai leurs péchés. » [8] Macrien, malgré son indignité, avait la manie de l'empire et comme il ne pouvait pas revêtir les insignes impériaux, à cause de son corps estropié, il mit en avant ses deux fils en qui était déjà la responsabilité des méfaits de leur père. En eux fut clairement réalisée la prophétie que Dieu a faite : « Rétribuant les fautes des pères dans les enfants jusqu'à la troisième et quatrième génération pour ceux qui me haïssent. » [9] Macrien accumula donc les mauvais désirs qu'il n'avait pas réalisés sur la tête de ses fils, il fit passer en eux sa malice et sa haine pour Dieu. »

Voilà ce que raconte Denys concernant Valérien.

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