Cet important chapitre se subdivisera en trois parties principales. Nous considérerons successivement le salut par rapport à Israël, par rapport aux Gentils, et en lui-même, c’est-à-dire dans la personne du Messie. Dans la première partie, nous verrons la délivrance du peuple et son rétablissement dans sa patrie ; la résurrection permettra à tous les justes d’avoir part à cette période de gloire. Dans la seconde partie, nous verrons entrer dans le royaume de Dieu ceux d’entre les Gentils qui auront échappé au jugement ; ce sont les Israélites qui les y introduiront.
Entendons-nous bien et ne nous lassons pas de le répéter : Dieu ne doit rien à son peuple ; Il n’est point tenu de le ramener dans sa patrie et de le bénir de nouveau. Ce rétablissement d’Israël, Dieu se le doit uniquement à lui-même ; Il le doit à sa sainteté, à sa fidélité. — Lorsque Jérusalem eut succombé, on put croire que c’en était fait du plan et du peuple de Dieu ; les Gentils et les Israélites que ne soutenait pas une foi assez robuste, le crurent réellement. Dieu lui-même n’est pas le souverain ; Il a donné des preuves manifestes de sa faiblesse ! Dieu a châtié Israël pour sauvegarder aux yeux du monde sa sainteté, et voilà que ce jugement l’a au contraire singulièrement compromis. « Comment donc », s’écrient les Gentils quand ils voient arriver dans leurs diverses contrées les Juifs chassés de leur patrie, — « ceux-ci sont le peuple de l’Éternel et ils sont sortis de son pays ? » (Ézéchiel 36.20) « C’est pourquoi, continue le prophète, v. 22, je ne le fais pas à cause de vous, ô maison d’Israël, mais je le fais à cause du nom de ma sainteté que vous avez profané, — je vous retirerai donc d’entre les nations. » Cela rappelle tout à fait Ésaïe 48.9 et sq. « C’est pour l’amour de moi, pour l’amour de moi que je le ferai, car comment mon nom serait-il profané ? » et Deutéronome 32.27. « Je dirais : Je veux les dissiper, éteindre leur mémoire parmi les hommes, — si je ne craignais l’insulte des ennemis, le mépris de leurs adversaires et leurs propos : C’est notre haute main, et non pas l’Éternel, qui a fait toutes ces choses ! »
Dans d’autres passages, ce sont plutôt les perfections divines elles-mêmes qui semblent nécessiter la réhabilitation des Israélites, indépendamment de ce que les hommes pourraient penser d’un Dieu qui laisserait à jamais son peuple dans l’abaissement et la souffrance. Dieu étant donné, Israël doit être relevé, car Dieu est immuable et le peuple avec lequel il est entré dans des relations uniques en leur genre, ne peut pas périr. « Parce que je suis l’Éternel, et que je n’ai pas changé, vous aussi, enfants de Jacob, vous n’avez pas été consumés ! » (Malachie 3.6) L’Éternel est le Dieu fidèle, précisément parce qu’il est Éternel. Les promesses qu’il a faites aux patriarches, qu’il aimait, ont une valeur éternelle. Tout passe ici-bas : les paroles de l’Éternel demeurent éternellement (Ésaïe 40.7-8). L’infidélité des hommes ne réussit pas à empêcher Dieu d’être fidèle. Ce n’est pas Lui (Ésaïe 50.1) qui a donné à Israël la lettre de divorce. C’est le péché qui a fait séparation entre l’Éternel et son peuple. Or, Il peut abolir le péché et Lui seul le peut : « Qui est le Dieu semblable à Toi, qui ôte l’iniquité et qui passe par dessus les péchés du reste de son héritage ? » (Michée 7.18) « C’est moi, c’est moi qui efface tes iniquités pour l’amour de moi, et je ne me souviendrai plus de tes péchés. » (Ésaïe 43.25) Et même, il arrive que le juste châtiment qu’il a infligé à sa maison, l’excite maintenant d’autant plus à déployer envers elle tout son amour. (Jérémie 31.2, 20 ; Osée 11.8 ; Ésaïe 49.14-15 ; 54.7-10 et sq.)
[« Ainsi a dit l’Éternel : Où est la lettre de divorce de votre mère que je lui aurais remise en la renvoyant ? Ou qui est celui de mes créanciers à qui je vous aie vendus ? Voilà, vous avez été vendus à cause de vos iniquités et votre mère a été renvoyée à cause de vos crimes ! » La première partie de ce verset fait allusion à Deutéronome 24.3. Jérémie (Jérémie 3.1) semble admettre que l’Éternel a envoyé à Israël sa lettre de divorce, ce qui est vrai dans ce sens qu’Israël est incapable par soi-même de renouveler avec son Dieu l’alliance qu’il a rompue. Mais Dieu peut renouer, car il n’a jamais, pour ce qui est de Lui, renoncé aux droits qu’il a sur Israël. Nous avons remarqué au § 29 que c’est au moment où Israël vient pour la première fois de rompre l’alliance, — que Dieu donne le plus clairement à connaître sa miséricorde et sa grâce (Exode 34.6 et sq.). Le peuple emporte dans son exil comme un trésor ces précieuse s paroles : « Je t’ai aimé d’un amour éternel ! Ephraïm est pour moi un enfant chéri… C’est pourquoi mes entrailles se sont émues à cause de lui et j’aurai certainement pitié de lui… Comment te traiterais-je comme Adma et Tséboïm ? Mon cœur est agité en moi et mes compassions se sont échauffées en même temps !… Il m’est impossible de te détruire entièrement !… Sion dit : L’Éternel m’a délaissée ! — Mais la femme peut-elle oublier son enfant qu’elle allaite et n’avoir pas pitié du fils de ses entrailles ? Eh bien, quand cela serait, encore ne t’oublierai-je pas, moi ! »]
Mais comment Dieu pourra-il sauver celui qu’il a si sévèrement puni ? Comment pourra-t-il, en fin de compte, tirer parti d’un peuple qui a si clairement montré qu’il n’était point à la hauteur de sa vocation ? Comment parviendra-t-il à réaliser ses desseins d’amour et à donner raison à son décret d’élection ? A cela, nous-répondrons en faisant observer d’abord que Dieu a jugé son peuple sévèrement, mais non pas cependant de telle sorte qu’il ne puisse plus être question pour Israël de rétablissement et de relèvement ; puis, que ce relèvement est de telle nature que l’Israël de l’avenir ne déjouera plus les admirables projets de l’amour divin. C’est ce que nous allons prouver.