Préparation évangélique

LIVRE XV

CHAPITRE XI
TIRÉ DE PORPHYRE SUR LE MÊME SUJET, DANS SON TRAITÉ DE L’ÂME CONTRE BOETHUS

« Nous demanderons à celui qui dit que l’âme est une Entéléchie, et qu’étant complètement immobile, elle est le principe du mouvement, d’où proviennent les extases dans l’animal, lorsqu’il ne comprend rien de ce qu’il voit, ni de ce qu’il dit, et que son âme se retournant sur elle-même, voit l’avenir et ce qui n’est pas encore présent ? D’où naissent dans la complexion de l’animal ces émanations comme nées de son âme, les délibérations, les réflexions, les volontés qui sont autant d’entraînements de l’âme et nullement du corps ? »

Plus loin, il reprend :

« Comparer l’âme à la pesanteur et aux autres qualités corporelles d’une uniformité et d’une invariabilité absolues, d’après lesquelles le sujet est ou mis en mouvement ou modifié d’une manière quelconque, cela ne peut venir que d’un homme qui, volontairement ou non, est déchu complètement de la dignité de l’âme, et qui n’a jamais réfléchi que c’est à la présence de l’âme que le corps de l’animal doit la vie, comme l’eau froide, par elle-même, emprunte sa chaleur au feu, sur lequel elle est placée, comme l’atmosphère doit au soleil levant la lumière qui l’inonde, et sans la splendeur de laquelle elle serait plongée dans les ténèbres. Mais de même que la chaleur de l’eau n’est pas celle du feu ni le feu lui-même, de même que la lumière atmosphérique n’est pas celle qui fait partie de l’essence du soleil ; de même l’animation du corps qui ressemble à la pesanteur et aux autres attributs du corps, n’est pas l’âme qui, classée dans le corps, y répand un certain souffle de vie. »

Plus bas, il ajoute encore :

« Tout ce que les autres ont dit sur l’âme me paraît humiliant. Comment n’y aurait-il pas honte dans la philosophie qui veut que l’âme soit l’Entéléchie (Aristote) d’un corps physiquement organisé ? Comment ne rougirait pas celui qui la définit comme un souffle (Anaximène) ou comme un feu intelligent qui s’allume par le refroidissement de l’air (Héraclite, les Stoïciens, Diogène d’Apommonie. V. Aristote, De Anima, l. 1, c. 2 et 4.) ou qui s’y durcit en s’y trempant ? Comment pourrait-il ne pas la dégrader, celui qui la forme de la réunion d’atomes (Démocrite et Épicure) ou enfin celui née entièrement du corps même (Dicéarque) ? » Langage qu’il a déclaré impie même dans les lois des impies. Toutes ces doctrines doivent couvrir de confusion ceux qui les professent ; il n’en sera pas de même, dit-il, pour ceux qui définissent l’âme, une substance qui se meut d’elle-même. »

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