Le servir dans sa présence

LES ŒUVRES MORTES

Combien plus le sang de Christ purifiera-t-il votre conscience des œuvres mortes, afin que vous serviez le Dieu vivant.

Hébreux 9.14

L’auteur de l’épître aux Hébreux s’adresse à des croyants découragés, sur le point de perdre pied (12.3), alors que, tout au début de leur vie chrétienne, ces Juifs se sont montrés ardents pour le Seigneur, prêts à tout donner pour le suivre : Souvenez-vous, leur dit-il, de ces premiers jours, où, après avoir été éclairés, vous avez soutenu un grand combat au milieu des souffrances, d’une part, exposés comme en spectacle aux opprobres et aux tribulations, et de l’autre, vous associant à ceux dont la position était la même… Vous avez accepté avec joie l’enlèvement de vos biens, sachant que vous avez des biens meilleurs et qui durent toujours (10.32-34). C’est donc à des chrétiens authentiques, désintéressés et courageux, qu’est destinée la parole citée en exergue et qu’il convient de relire attentivement : Combien plus le sang de Christ purifiera-t-il votre conscience des œuvres mortes, afin que vous serviez le Dieu vivant (Hébreux 9.14). Ce texte rappelle au moins deux vérités : la première, c’est qu’il est possible à l’enfant de Dieu, même le plus zélé, d’accomplir des œuvres mortes qui ne résisteront pas au jour du jugement ; et la deuxième vérité : c’est qu’on ne peut prétendre servir Dieu et lui offrir un culte qu’il agrée aussi longtemps que la conscience n’est pas purifiée de telles œuvres par le sang de Christ. Les apôtres en étaient conscients qui veillaient à avoir une bonne conscience devant Dieu tant ils tenaient à le bien servir (Actes 24.16 ; 1 Pierre 3.16 et Hébreux 13.18). Paul, le bouillant évangéliste, pouvait affirmer au gouverneur romain Félix : Je m’efforce d’avoir constamment une conscience sans reproche devant Dieu et devant les hommes (Actes 24.16).

La conscience est le jugement que nous portons intérieurement sur nos sentiments et notre conduite ; ce jugement n’est véritablement sûr que dans la lumière de Dieu, la conscience pouvant être plus ou moins éclairée, parfois même oblitérée par le péché (Tite 1.15), en tout cas incapable de discerner les œuvres mortes dont Dieu attend la confession et l’abandon (Hébreux 6.1).

« Avoir sa conscience pour soi », comme disent certains, ou conserver une « bonne conscience devant les hommes » ne suffisent pas pour être un serviteur accompli. Paul était plus exigeant qui s’efforçait d’avoir constamment une conscience sans reproche à la fois devant Dieu et devant les hommes. Je serai certainement heureux intérieurement et approuvé des hommes si je vide ma bourse pour secourir un voisin en difficulté ; ils loueront ma générosité et me citeront en exemple, ce qui me sera agréable, mais aurai-je servi le Seigneur pour autant ? Pas nécessairement : Quand je distribuerais tous mes biens pour la nourriture des pauvres (ce qui me donnera bonne conscience devant les hommes) si je n’ai pas l’amour, cela ne me sert de rien affirme l’apôtre (1 Corinthiens 13.3). Si inconcevable que cela paraisse, une œuvre jugée magnifique par nous-mêmes ou par l’entourage peut être qualifiée de « morte », semblable à de la paille ou du chaume que le feu consumera.

Que faut-il entendre par l’expression : « œuvres mortes » ?

Notons d’abord que l’Ecriture distingue trois sortes d’œuvres : Les œuvres mauvaises (Colossiens 1.21), les œuvres mortes (Hébreux 6.1 ; 9.14) et les œuvres bonnes (Ephésiens 2.10). Puisqu’elles ne sont pas qualifiées de mauvaises, nous pouvons affirmer que les « œuvres mortes » sont des œuvres sans doute excellentes aux yeux des hommes, chrétiens ou non (1), mais sans valeur, comme inexistantes (donc mortes) aux yeux du Seigneur et cela pour plusieurs motifs.

(1) Il va de soi que les B.A. (Bonnes Actions) de l’homme irrégénéré doivent être qualifiées de « mortes » ; elles ne lui permettent pas de s’approcher de Dieu pour lui rendre un culte qu’il puisse agréer. Il est des incrédules dont le dévouement force l’admiration de l’entourage et devrait faire honte à tant de chrétiens égoïstes et indifférents à la peine des autres : il n’empêche que le plus altruiste des incroyants ne peut que produire des œuvres mortes puisqu’il est « mort dans ses péchés ».

a) Ce sont les œuvres dont nous prenons l’initiative ; donc celles que Dieu ne nous demande pas d’accomplir et qu’on ne peut ranger parmi les œuvres bonnes qu’il a préparées d’avance pour que nous les pratiquions (Ephésiens 2.10). Même généreuses, elles n’en sont pas moins mauvaises puisqu’elles occupent notre temps et nous empêchent d’en réaliser de meilleures, celles que le Maître attend de nous. Que penseriez-vous d’un garçon qui, au lieu d’obéir à sa maman qui lui demande d’aller d’urgence à la poste déposer la lettre qu’elle vient d’écrire, croirait lui faire un plus grand plaisir en restant à la maison pour dessiner un superbe paysage qu’il lui offrira ensuite en la couvrant de baisers ? Le croquis, aussi beau soit-il, sera certainement jeté à la poubelle avec humeur par une maman déçue et irritée de savoir que sa lettre est demeurée « poche restante ».

Notre temps peut être encombré de choses excellentes mais réalisées hors du contrôle divin. Elles n’ont aucune valeur pour Dieu ; ce sont des œuvres mortes. Au cours d’une bataille, un bon soldat se garde de prendre des initiatives ; il obéit ponctuellement aux ordres de ses chefs. De même le « soldat de Jésus-Christ » (2 Timothée 2.3). En bon serviteur, il s’applique à réaliser de son mieux ce qu’exige le Maître ; il tient à être approuvé de lui et à le satisfaire dans tous ses faits et gestes. Selon le psaume 123 v. 2, il garde les yeux rivés sur la main de celui qu’il sert, autrement dit, il obéit « au doigt et à l’œil » aux ordres et aux directives de celui qui l’emploie.

« Le croyant n’est pas un agent d’affaires du bon Dieu. Il ne suffit pas d’accomplir beaucoup de choses, d’expédier bien des affaires et d’organiser d’innombrables bonnes œuvres. Il s’agit de faire ce que Dieu demande et cela dans un esprit de ferveur. L’activiste est partout, sauf, en général, là où Dieu et le prochain auraient besoin de lui. Au contraire, celui qui se laisse conduire par l’Esprit se conforme aux besoins du moment. Il est opportuniste dans le meilleur sens de ce terme. Il saisit les occasions que le Seigneur lui offre ; et cela lui permet d’aider le prochain avec à-propos, au lieu d’accomplir machinalement et en série des corvées qui ne profitent à personne. » (G. Deluz)

b) Les œuvres, fruit de l’orgueil, doivent être qualifiées de « mortes » même si elles nous paraissent excellentes. Dieu ne peut accepter une « belle » action qui a pour motif la recherche de soi, le désir de paraître et d’être applaudi… Quel prédicateur n’a pas été tenté de prêcher l’Evangile pour attirer les regards sur lui, soucieux d’être admiré pour son éloquence ou son érudition ? Ne vous arrive-t-il pas de vous montrer aimable, de rendre service au prochain pour être populaire et vous faire bien voir de l’entourage ? Nous n’avons pas de popularité à soigner. Notre réputation, comme tout le reste, est entre les mains de Dieu.

c) Dieu compte pour rien toute action bonne qui n’est pas inspirée par l’amour (1 Corinthiens 13.3). En effet, un chrétien peut se montrer aimable, généreux, serviable, se donner sans mesure à une œuvre de charité ou se dévouer auprès d’une personne en difficulté, sans l’aimer nécessairement de « l’amour du Seigneur ». C’est le cas, en particulier, s’il s’attend à l’approbation ou espère une faveur en retour. Selon le Christ lui-même, l’aumône faite en sonnant de la trompette pour susciter l’admiration perdra sa récompense dans l’au-delà ; c’est bien la preuve qu’il s’agit d’une œuvre morte.

Et puis, savez-vous qu’on ne peut à la fois aimer et détester ? Qui est dressé contre son voisin ou se querelle avec son conjoint ne peut – aussi étrange que cela paraisse – aimer son enfant de l’amour de Dieu ; pas plus qu’il ne peut aimer son frère ou le prochain qu’il assiste ou dépanne. Pourquoi donc ? Tout simplement parce que, de la même source ne peut sortir à la fois l’eau douce et l’eau amère, la bénédiction et la malédiction (Jacques 3.9-12). Autrement dit, l’amour et la haine ne peuvent cohabiter dans un cœur. C’est ou l’un, ou l’autre. Toute rancœur entretenue, tout refus de pardonner, toute médisance, en un mot : tout péché cultivé ou toléré, empêche d’aimer de l’amour de Dieu. Mes plus belles actions ne seront en vérité qu’œuvres mortes que le feu consumera si je ne suis pas purifié de ces choses. Il n’y a pas d’amour sans purification, pas de service sans amour. C’est pour cette raison que le Christ, le chef de l’Eglise, ordonne à l’assemblée d’Ephèse de se repentir, ses œuvres ne procédant pas de l’amour. Il l’invite à pratiquer ses premières œuvres, c’est-à-dire celles qui, comme autrefois, s’accomplissent dans le feu du « premier amour » (Apocalypse 2.4-5).

d) Toute œuvre légaliste, faite par devoir, donc sans amour, devrait être classée parmi les « mortes ». Il semble que les destinataires de l’épître aux Hébreux, chrétiens d’origine juive, sont troublés, se demandant s’ils ont eu raison d’abandonner la loi de Moïse pour suivre le Christ. Ne seraient-ils pas tentés maintenant de revenir en arrière, c’est-à-dire de s’éloigner du Christ pour observer les lois et les ordonnances relatives aux fêtes, aux sacrifices, à la nourriture, à la circoncision, au sacerdoce… De telles œuvres ne sont en vérité que des œuvres mortes si elles sont accomplies dans un esprit légaliste, pour « mériter » la faveur divine (Colossiens 2.16-23).

De même, glisser une pièce à un mendiant simplement parce qu’un chrétien se doit de secourir les pauvres, n’est pas une bonne œuvre selon Dieu. C’est un geste accompli « pour soi », pour soigner sa réputation ou peut-être pour avoir bonne conscience devant le malheureux (Matthieu 6.2). Mais que vaut cet acte de générosité si je n’ai pas un regard d’affection, une parole d’encouragement, une prière en faveur de celui qui tend la main ? C’est de la charité sans charité. Dieu en veut plus. Laissons le Saint-Esprit dénoncer chez nous ces tendances de l’homme naturel. Le vieil homme religieux, ce personnage ô combien encombrant, se recherche lui-même dans tout ce qu’il fait. Il est donc à regarder « comme mort ».

e) Les œuvres méritoires ne peuvent plaire à Dieu. Il faut les ranger parmi les « mortes ». Quel chrétien n’a eu la pensée d’agir avec une idée plus ou moins avouée de mérite, « pour être béni » et récolter quelque faveur du ciel alors que seuls, la reconnaissance et le souci de Sa gloire, devraient inspirer notre action ? Les œuvres « méritoires », quelles qu’elles soient, aussi excellentes soient-elles, nous éloignent de lui.

En résumé, toutes les bonnes actions accomplies par notre « MOI » religieux qui cherche, parfois avec beaucoup de zèle, à plaire au Seigneur, doivent être qualifiées « de mortes » ; car ceux qui vivent selon la chair ne sauraient plaire à Dieu (Romains 8.8). Il n’empêche que l’enfant de Dieu doit se montrer zélé pour de bonnes œuvres (Tite 2.14), chacune d’elle étant accomplie pour Sa gloire. C’est ce que déclare à sa façon l’apôtre dans Romains 12.11 : Ayez du zèle… Soyez fervents d’esprit. Conformez-vous aux besoins du moment. Cela suppose le souci constant de vivre dans l’intimité du Seigneur.

Si d’aventure, et alors que nous nous exposons à la lumière d’En Haut, le Seigneur nous révèle notre désir de paraître, notre zèle charnel ou notre éloignement de Sa personne. ne lui résistons pas. Humiliés, confions-nous en sa grâce et croyons à la valeur du sang qui purifie de tout péché… Puis, sans nous attarder sur nos chutes, assurés de son pardon, repartons plein de force et de confiance en notre Seigneur fermement résolus à bien le servir.

« Quand notre conscience est entièrement purifiée par le sang de Christ, elle voit se dissiper comme un nuage tout sentiment de culpabilité et de désapprobation. Elle est délivrée aussi de ce sentiment de duplicité, de manque de sincérité qui nous hantait et nous empêchait de nous approcher de Dieu avec assurance pour l’adorer et le servir. La face de Dieu resplendit sans voile sur notre conscience et par elle sur notre cœur… Lorsque la conscience est purifiée ou rendue parfaite, le cœur aussi est purifié et rendu parfait. » (Andrew Murray)

Gloire à Dieu !


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Parvenu à la fin de ce chapitre, un danger nous guette : celui de faire la chasse aux œuvres mortes en vivant dans la crainte d’en produire. Ce serait être semblable à un homme qui, par nuit noire, cherche des champignons un briquet allumé à la main. Il vaut mieux attendre la lumière du jour pour aller dans les bois.

Ayons donc plutôt la volonté d’accomplir des œuvres qui plaisent au Seigneur. Et que ce désir nous pousse vers lui. Dans sa compagnie, nous serons éclairés et gardés. Il est la lumière. Que notre préoccupation majeure soit de vivre en parfaite communion avec le Dieu de paix. Il promet de nous rendre capables de faire le bien sous toutes ses formes pour que nous accomplissions sa volonté. Il réalisera lui-même en nous, par Jésus-Christ, ce qui lui est agréable (Hébreux 13.21). Attendons-nous donc à lui ; faisons-lui confiance et Il agira

QUESTIONS

  1. Suis-je réellement désireux de servir le Seigneur et soucieux de lui plaire dans chacun de mes actes ? Etes-vous souvent alerté et repris par l’Esprit de Dieu ? Reconnaissez-vous vos péchés de chrétien pour les confesser et les abandonner à celui qui a versé son sang pour vous ?
  2. En vous laissant sonder par Dieu, avez-vous décelé des œuvres mortes dans votre service ? Lesquelles, par exemple, ou à quelle occasion ? Les avez-vous confessées ?
  3. Avez-vous l'assurance que vous êtes purifié de telles œuvres ? Avez-vous l’assurance du pardon de Dieu ? Comme Paul, êtes-vous de ceux qui s’efforcent d’avoir une conscience sans reproche devant le Seigneur ?

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