Les dons spirituels

11. Examen de quelques difficultés

L'expérience nous a montré que, lorsque les croyants possèdent des dons spirituels, il se présente certaines difficultés. Nous nous proposons de les examiner loyalement dans le présent chapitre.

Que le lecteur nous accorde son indulgence ! Il est légitime que tous ne soient pas ici du même avis. Nous voulons traiter ces matières selon la mesure de lumière que Dieu nous a accordée. Certes, nous essaierons de répondre à chaque question par le moyen des Ecritures ; l'autorité de la Parole de Dieu est notre recours suprême. Mettez la Bible de côté, inventez des théories : si plausibles qu'elles soient vous vous égarerez. Obéir aux Ecritures n'est jamais un esclavage ; et l'on n'a pas de vraie liberté quand on le rejette. L'expérience chrétienne, et l'histoire de l'Eglise illustrent ce principe d'une manière convaincante : « la Loi et au Témoignage ! ».

La plupart des difficultés pratiques qui naissent à l'usage des dons spirituels concernent les dons de prophétie, des langues, ou d'interprétation ; c'est une matière qui paraît tellement étrange à la plupart des chrétiens de nos jours. C'est avec regret que nous le constatons. Dieu veuille hâter le jour où nous serons aussi familiers avec ce choses que l'étaient les chrétiens du premier siècle.

Les questions que l'on nous pose le plus fréquemment sont les suivantes :

1. Baptème et langues

I Cor. 12.30 : « Tous parlent-ils en langues ? ». Comment conciliez-vous avec ce verset la doctrine selon laquelle tout croyant parle en langues quand il reçoit le baptême du Saint-Esprit ? [1].

Il n'est pas conforme à l'Ecriture de dire que tous les chrétiens remplis de l'Esprit doivent posséder le DON des langues. Paul enseigne clairement dans I Cor. 12 que les uns ont un don, les autres un autre.

Toutefois, l'Esprit peut produire, à l'occasion, chez un croyant baptisé de feu, une manifestation de n'importe quel genre, sans que celle-ci constitue un don permanent et reconnu comme tel. Ainsi Paul dit : « Vous pouvez tous prophétiser successivement » (14.31) cependant tous ne sont pas prophètes au sens officiel de Ephésiens 4.11. Tous les croyants peuvent se mettre au bénéfice de la parole : « Ils imposeront les mains aux malades, et les malades seront guéris » (Marc 16.18) ; cependant tous n'ont pas les dons de guérison. Il en est de même du don des langues.

De toute évidence, tous parlèrent en langues le jour de la Pentecôte (Actes 2.4) ; dans la maison de Corneille, TOUS parlèrent en langues lorsque l'Esprit descendit (Actes 10.44-46). Il ne s'agit pas ici du DON des langues, conféré d'une manière permanente à certains membres du corps de Christ (I Cor. 12.10, 30), mais d'une manifestation de l'Esprit qui laissait ainsi connaître qu'il était descendu sur ces croyants. Dans I Cor. 12.30, ne l'oublions pas, l'apôtre ne traite pas de l'expérience initiale du Baptême de l'Esprit, mais des dons conférés d'une manière permanente. La règle donnée dans I Cor. 14.27 ne s'applique certainement pas dans les circonstances que relatent Actes 2.4 ; 10.44 et 19.6.

[1] La réponse à cette première question est la traduction d'un texte inédit, que M. Donald Gee se propose de substituer dans les éditions anglaises ultérieures, à celui qu'on trouve dans la 2° édition.

2. Deux ou trois parlent…

I Cor. 14.27 : « Que deux ou trois au plus parlent ». S'agit-il du nombre de ceux qui peuvent parler ? ou du nombre de messages ? ou du nombre de parties qu'on peut distinguer dans un seul message en langues ?

Le contexte montre clairement qu'il s'agit du nombre de ceux qui peuvent parler dans une seule et même réunion. Dans la fin du verset, il est dit : « Qu'un seul interprète » (évidemment une seule PERSONNE) ; au v. 29, on lit : « pour ce qui est des prophètes, que deux ou trois parlent » (c'est-à-dire deux ou trois PERSONNES). Donc il est clair que « deux ou trois, et chacun à son tour », s'applique à des personnes ; sans quoi, on ne comprend plus ce passage.

Cette interprétation du verset 27 est aussi en accord avec le sens général du chapitre ; évidemment l'apôtre ne veut pas que l'on parle beaucoup en langues dans les réunions publiques de l'église. Toute autre explication, quelque savante et sincère qu'elle soit, provient, nous le craignons, du désir de favoriser l'excès du parler en langues.

Il est plus sûr de s'en tenir à l'Ecriture ; nous reconnaissons cependant que des réunions ont pu être puissantes et bénies bien qu'il y ait eu plus de trois messages en, langues. Peut-être le Seigneur insiste-t-il sur cette manifestation particulière de l'Esprit parce que nous sommes dans les derniers jours ? (I Cor. 14.21). Peut-être les messages donnés, en langues auraient-ils dû être donnés plutôt par prophétie pour celle-ci l'apôtre ne pose pas de limite (I Cor. 14.31). L'inspiration des messages viendrait vraiment du Seigneur, mais l'homme n'emploierait pas le don qu'il faut pour l'exprimer. Paul montre qu'il est possible de choisir le don que l'on emploiera dans telle circonstance donnée; (I Cor. 14.19). Les croyants feront bien de prêter attention à l'injonction du v. 39 : « Aspirez au don de prophétie ».

Nous ne croyons pas qu'il faille faire de la règle « trois au plus » un esclavage ; mais nous croyons d'autre part qu'il est dangereux de s'écarter des principes enseignés dans ce chapitre. Il est toujours plus sûr d'être scripturaire.

3. Est-il permis d'interrompre un prédicateur par un message en langues ?

Il y a des prédicateurs du mouvement de Pentecôte qui émaillent leurs sermons de messages en langues qu'ils interprètent au fur et à mesure, avec beaucoup de puissance et d'onction. Cela est scripturaire (I Cor. 14.5), et il en est résulté souvent, à notre connaissance, de grandes bénédictions. En fait ces prédicateurs sont inspirés tout le temps qu'ils parlent, et la plus grande partie de leur prédication est une manifestation du don de prophétie.

Nous comprenons qu'un membre de l'assemblée interrompe un tel prédicateur (d'après I Cor. 14.30) ; mais, sauf de rares exceptions, les interruptions ne sont pas de saison quand celui qui prêche possède la parole de sagesse ou la parole de connaissance. Une interruption en langues risque de briser l'élan du message, au détriment de l'orateur et des auditeurs.

Ceux qui interrompent le prédicateur rempli de l'Esprit, le font parce qu'ils reçoivent un « témoignage intérieur » qui accueille la Parole. Ce témoignage n est pas une raison suffisante pour interrompre. Loin de là. Ils craignent à tort d'éteindre l'Esprit en se taisant. Mais ils seraient plus utiles, s'ils s'employaient, sous l'action de l'Esprit qui agit en eux, à maintenir dans la réunion le sens de la puissance et de la présence de Dieu. La vapeur qui est dans la locomotive n'a pas pour but principal de faire fonctionner le sifflet, mais de faire avancer le convoi. « Que tout se fasse avec bienséance et avec ordre » (I Cor. 14.40) : ce principe s'applique ici. On ne peut pas prétendre que celui qui se met à interrompre un prédicateur réellement inspiré, obéit à cette règle. Nous avons remarqué, en pareil cas, que, une fois le message interprété, il ne dit rien de plus que ce que le prédicateur aurait dit lui-même dans le cours de son sermon, et il n'y a aucune raison de penser que les messages en langues soient plus inspirés que ceux qui Proviennent des autres dons. Parfois ils font plus d'impression ; c'est pourquoi, à certains moments, ils sont parfaitement à leur place.

Le seul exemple que présente le Nouveau Testament d'une interruption en langues, est celle qui se produisit au cours de la prédication de Pierre chez Corneille (Actes 10.44). Il ne s'agit pas ici du don des langues, pratiqué dans l'Eglise. Les auditeurs recevaient le baptême du Saint-Esprit, avec un signe : ils se mirent à parler en langues pour la première fois de leur vie. Le jour de la Pentecôte, le parler en langues prit fin avant la prédication de Pierre, et rien n'indique que ce dernier fût interrompu.

Dans les grandes réunions publiques, spécialement dans les réunions d'évangélisation, seuls des croyants très avancés peinent se servir d'un don spirituel, quel qu'il soit.. Le chapitre 14 de I Corinthiens montre quelles précautions toutes particulières doivent être prises quand des incroyants sont présents.

4. Peut-on parler en langues dans une réunion en plein air ?

« Les langues sont un signe pour les incroyants » (I Cor. 14.22) ; on a constaté des résultats merveilleux dans des réunions en plein air où la langue parlée par un inspiré a été reconnue par un auditeur. On nous a cité aussi des cas où des prédicateurs ont pu soudain parler en une langue inconnue d'eux jusqu'alors. Ces faits nous paraissent être plutôt des miracles que des manifestations ordinaires du don des langues.

Jamais le Nouveau Testament ne montre le don des langues servant à la prédication. Le jour de la Pentecôte, le parler en langues eut lieu dans la Chambre Haute, et il cessa avant le début de la prédication (Actes 2.14). Tous les textes tendent à montrer que le don des langues a deux applications essentielles : a) la communion personnelle avec Dieu, I Cor. 14.2 ; b) l'édification de l'Eglise, quand il y a interprétation (v. 5).

Donc à moins que le don ne soit transformé par l'Esprit en un signe (I Cor. 14.22), en règle générale, il n'a pas de place dans les réunions en plein air ou les réunions d'appel. Cette conclusion est, de plus, conforme au bon sens.

5. Peut-on, dans une réunion, prier en langues ?

S'agit-il d'une longue prière en une langue inconnue, les textes sont formels ; il faut répondre : non (I Cor. 14.14-17).

Il n'en serait pas de même toutefois pour une exclamation soudaine, jaillissant d'une plénitude de l'Esprit qui dépasse les facultés ordinaires d'expression. Il n'en serait pas de même non plus pour de petites réunions semi privées. L'apôtre a en vue les réunions où « les hommes du peuple » sont présents.

6. Comment intervenir quand des abus sont constatés ?

On donnera à l'église assemblée les enseignements appropriés (I Cor. 12.1) ; on aura des conversations particulières avec ceux qui ont erré ; on aura recours à la prière, et celui qui dirige l'assemblée devra garder un contact si vivant avec Dieu qu'il saura faire prévaloir une atmosphère de victoire ; enfin ceux qu'on reconnaît comme chefs devront donner l'exemple d'un bon emploi des dons spirituels.

Il ne faut recourir qu'en dernier ressort à une réprimande publique ; encore faut-il qu'il y ait urgence. Il faut ici le plus grand tact. On attriste et l'on éteint facilement l'Esprit ; une assemblée locale, ou une réunion plus générale[1] peuvent facilement être paralysées par des réprimandes qui ne sont pas absolument selon l'Esprit. Il faut, pour s'occuper de ces choses, des hommes d'expérience, ayant de l'habileté et de la sagesse. Quelquefois un peu de désordre accompagnant l'action du Seigneur vaut mieux que l'ordre du cimetière et de la mort.

[1] L'auteur pense aux grandes assemblées qui se concentrent périodiquement en des points donnés, et qui sont courantes en Angleterre sous le nom de « conventions ». (Trad.).

7. L'interprétation doit elle ressembler exactement au message en langues ?

Oui, en règle générale. Nous croyons à la réalité du don d'interprétation des langues, qui peut être contrôlé par n'importe quel assistant ayant une connaissance naturelle de la langue parlée.

Il y a certains dialectes barbares qui disposent de très peu de sons, du moins au jugement d'une oreille non accoutumée Il arrive donc que l'interprétation présente une plus grande richesse de sons que le message en langue.

Il ne faut pas oublier que l'interprétation est un don de l'Esprit ; elle n'est pas comparable en tous points à la traduction naturelle d'une langue étrangère. La révélation peut être donnée d'une façon plus complète à l'interprète ; dans ce cas le message de l'interprète pourra être plus plein et plus riche de toute manière, également plus long.

8. Faut-il chercher les directions divines par le moyen du don de prophétie ?

Non, car ce serait revenir en arrière vers l'Ancien Testament. Dans le Nouveau Testament, nous ne voyons pas un seul cas où les individus ou les églises aient cherché les directions divines, une révélation de la volonté d'En-haut en recourant à un prophète ou au don de prophétie. Cela est décisif.

Il arrive que le Seigneur décide de dévoiler l'avenir, ou de faire connaître sa volonté par une prophétie (exemple, Actes 11.28 ; 21.11) ; mais il n'y a rien là qui permette d'échafauder un système de direction divine par le moyen des prophètes. Jamais les prophètes du Nouveau Testament n'ont demandé ces révélations ; elles ont été données spontanément.

Si l'on interroge le Seigneur par l'intermédiaire des prophètes, on prive les croyants du privilège qui est le leur, dans l'économie présente, où les fils de Dieu sont personnellement conduits par l'Esprit de Dieu (Rom. 8.14). Point n'est besoin d'un prêtre ni d'un prophète entre le chrétien et Dieu. Nous soumettre à un tel système, ce serait vendre notre droit d'aînesse. Dieu nous en préserve ! Il est déplorable que de tels systèmes soient imposés aux personnes ignorantes, à qui on les présente comme des révélations plus complètes, etc. Toutes ces erreurs sont vite reconnues à la lumière de la Parole de Dieu.

Nous rejetons donc complètement les pratiques par lesquelles on chercherait auprès des prophètes des directions soi-disant divines, spécialement si on les incorpore dans un système de gouvernement ecclésiastique. Cependant nous devons laisser à Dieu toute liberté de nous guider comme il le veut ; et il n'y a pas de raison pour que la lumière ne vienne pas, de temps à autre, par le moyen des dons de l'Esprit. Il faut « éprouver » soigneusement les directions de cette nature (I Thess. 5.19-21), et les contrôler avant d'agir, par les autres moyens que nous avons de connaître la volonté divine. Faute de ces précautions, plusieurs ont commis de graves erreurs. Il est aisé de surajouter à un message authentique du Seigneur, une conclusion erronée qui ne vient que de nous-mêmes.

9. Y a-t-il une différence entre le don de prophétie et la charge de prophète ?

L'esprit de prophétie peut, de temps à autre, saisir une assemblée entière (Apoc. 19.10 ; I Cor. 14.24, 31), et tout croyant rempli de l'Esprit peut à l'occasion prophétiser (c'est-à-dire donner un message inspiré).

Mais tous sont-ils prophètes ? (I Cor. 12.29). Certainement non. Les prophètes constituaient un groupe défini (I Cor. 14.29-32) ; ils pratiquaient régulièrement le don spirituel de prophétie dans les assemblées (Rom 12.6 ; I Cor. 12.10). On parle des prophètes dans les passages suivants : Actes 11.28 ; 13.1 ; 15.32 ; 21.10. L'Eglise attachait un grand prix à leurs messages inspirés ; c'est pourquoi nous voyons la charge de prophète mentionnée tout de suite après celle d'apôtre (I Cor. 12.28 ; Ephés. 4.11).

Leur droit à une charge dans l'Eglise était de même nature que celui des autres personnes en charge : il avait pour fondement un ministère spécial donné par Dieu et reconnu par tous. En ce sens Dieu a établi (I Cor. 12.28) les différentes charges dans l'Eglise. Aujourd'hui nous n'avons pas l'habitude de donner le nom de prophètes à ceux qui se servent régulièrement du don de prophétie dans leur ministère ; aussi quelques personnes pensent-elles que nous n'avons plus de prophètes. C'est une erreur. Ce n'est pas le titre qui crée la charge et l'établit dans l'Eglise : c'est le ministère reçu de Dieu ; peu importent les noms donnés au ministre. La charge ne consiste pas dans le nom, mais dans la puissance.

Il n'est pas conforme à l'Ecriture d'appeler certaines personnes « prophètes établis » et de les distinguer des autres, qui cependant exercent régulièrement le même ministère dans les assemblées. Tous sont également « établis » et tous sont prophètes, du moment qu'ils exercent un ministère utile, de la part du Seigneur. La charge de « prophète établi » n'a aucun fondement dans le Nouveau Testament ; nous craignons que la création de telles charges ne provienne parfois d'une forme subtile de cléricalisme et du désir de dominer sur l'Eglise de Dieu. C'est le principe du papisme, et nous croyons devoir lui résister de toute notre force.

D'autres questions encore se posent, partout où Dieu répand son Esprit, comme une pluie de l'arrière-saison. Nous ne pouvons pas nous y étendre davantage ici. Beaucoup de questions se sont du reste trouvées résolues en passant, au cours de ces études.

La règle d'or, la règle unique, est d'examiner chaque problème à la lumière de la Parole écrite de Dieu, et de se soumettre à son verdict. Quelque attrayante que puisse paraître au premier abord une dérogation aux règles scripturaires, elle ne peut être que terriblement dangereuse. Pour aller de progrès en progrès, il faut garder sa fidèle Parole. Nous croyons que la Bible contient toute la lumière nécessaire à l'Eglise de tous les siècles, sur tous les sujets possibles ; si telle solution n'est pas directement énoncée, du moins elle se déduira des principes généraux de la Bible. Nous appliquons en particulier ces affirmations sans hésiter, en ce qui concerne les dons spirituels.

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