La Légende dorée

CLVIII
SAINT QUENTIN, MARTYR

(31 octobre)

Quentin était de famille noble et citoyen romain. Il était venu dans la ville d’Amiens et y opérait de nombreux miracles, lorsque, par ordre de Maximien, le préfet de la ville s’empara de lui, et le jeta en prison après l’avoir fait rouer de coups. Mais un ange délivra le prisonnier, qui s’empressa de retourner sur la grand’place pour y prêcher au peuple. Arrêté de nouveau, étendu sur un chevalet où ses veines se rompirent, cruellement frappé de nerfs de bœuf, brûlé avec de l’huile, de la poix et de la graisse bouillantes, il supportait tout, et raillait le préfet. Celui-ci, furieux, lui fit jeter au visage de la chaux, du vinaigre et de la moutarde. Puis, voyant que cela même ne l’émouvait point, il le fit transporter en un lieu du Vermandois ; et là, après lui avoir fait enfoncer deux grands clous dans la tête, et dix autres sous les ongles et dans la chair, il ordonna enfin de le décapiter.

Le corps du saint, jeté dans une rivière, y resta caché pendant cinquante-cinq ans. Il fut retrouvé par une dame noble de Rome, dans les conditions que voici. Cette dame qui était aveugle et très pieuse, fut avertie la nuit par un ange d’avoir à se rendre au camp de Vermandois, pour y retrouver le corps de saint Quentin et l’ensevelir. Elle se rendit donc au lieu dit, avec une nombreuse escorte, et, arrivée là, se mit en prière. Et aussitôt le corps de saint Quentin flotta, intact et parfumé, à la surface des eaux. La dame, qui en récompense de ses soins, avait recouvré la vue, s’occupa d’ensevelir le saint, ordonna de bâtir une église sur son tombeau, et, cela fait, s’en retourna à Rome.

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