Élans de l’âme vers Dieu

31. Adolphe Monod

19e siècle

Sauveur miséricordieux, qui es venu « prendre nos maladies et porter nos langueurs, » mon âme est bien plus malade que ne l’était le corps de tous les affligés auxquels tu rendis jadis, sur la terre, la santé et la vie. Pourquoi ne puis-je pas être guéri comme eux ? Pourquoi, tourmenté depuis tant d’années par cette lèpre de mon péché, ne puis-je parvenir à l’ineffable consolation de t’entendre dire enfin : « Je le veux ; sois nettoyé ! » Tu le sais, toi qui lis dans les cœurs ! Il y a telle pensée, tel désir vain et pernicieux, telle volonté propre enracinée dans le fond de mes entrailles, qui me poursuit, qui me travaille, qui me consume depuis des jours, des mois, des années, et que je ne puis réussir à vaincre ! car ce n’est pas vaincre devant un Dieu qui est esprit, que d’empêcher à grand’peine la convoitise de s’échapper au dehors, quand elle semble n’être enfermée au dedans que pour exercer plus de ravages. Ah ! sans doute, c’est que je n’ai pas la foi du lépreux, la foi du centenier, la foi de Pierre, la foi, sinon de ces possédés, du moins des amis qui les amenaient au Sauveur ! Ce n’est pas, ô mon Dieu, que je n’aie pas prié, prié sincèrement, pour être délivré. « Je crie de jour, mais tu ne réponds point ; de nuit, et il n’y à point de repos pour moi ! » — Mais il manque, je le sens bien, quelque chose à mes prières. Ce n’est pas cette simplicité du lépreux : « Seigneur, si tu le veux, tu peux me nettoyer ! » Ce n’est pas cette fermeté du centenier : « dis seulement une parole et mon serviteur sera guéri ! » Ce n’est pas leur foi, non, ce n’est pas leur foi. Je le sens bien ; « je doute ; je ressemble au flot de la mer agité et chassé çà et là par le vent ; » je suis cet homme dont il est écrit : « qu’il ne s’attende pas à rien recevoir du Seigneur ! » Quel est donc ce combat, ce déchirement de moi-même ? et comment se fait-il que je croie et que pourtant je ne croie pas ? Oh ! mon Sauveur ! je ne puis rien comprendre à la folie de mon cœur ; mais je sais où est le remède, en toi, en toi seul. Toi qui viens à moi les mains pleines de délivrance, commence par mettre en moi la foi nécessaire pour me fortifier ! afin que tout vienne de toi, depuis le commencement jusqu’à la fin, de toi de qui « nous recevons toute plénitude, et grâce pour grâce. » Me voici ; « je crois, Seigneur, subviens à mon incrédulité. Seigneur, augmente-moi la foi ! »

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