57 Le juste périt et personne ne s’en inquiète,
les hommes pieux sont moissonnés et nul n’y prend garde ;
oui, à cause de la perversité
le juste a été moissonné ;
2 il entrera dans la paix,
et ceux qui suiventx le droit chemin
trouveront le repos sur leur couche.
x « ceux qui suivent » conj. ; l’hébr. a le singulier mais le reste du v. (« trouveront » « leur couche ») est au pluriel.
3 Quant à vous, approchez ici, fils de la magicienne,
race adultère qui t’es prostituée.
y Cet oracle, comme le précédent, peut dater des derniers temps de la monarchie, où les pratiques idolâtriques étaient répandues à Jérusalem. Mais elles ont continué en Palestine pendant et après l’Exil, 66.3-4, 17. Le poème est dans le style vigoureux des prophètes du VIIe-VIe siècle (Jr 1.16 ; 7.8, etc. ; cf. Ez 8 ; 2.6-8). Certaines allusions à des rites idolâtriques particuliers restent obscures pour nous.
4 De qui vous moquez-vous ?
À qui faites-vous des grimacesz
et tirez-vous la langue ?
N’êtes-vous pas une engeance de révolte,
une race de mensonge ?
z Littéralement « À qui ouvrez-vous grand la bouche ? ». Le parallélisme fait songer à un signe de moquerie plutôt que de voracité.
5 Vous qui vous excitez près des térébinthes,
sous tout arbre verdoyant,
qui immolez des enfants dans les torrents,
sous les fissures des rochers.a
a Il n’est pas sûr que ces sacrifices d’enfants soient identiques aux sacrifices à Molek, sur lesquels cf. Lv 18.21.
6 Les pierres polies du torrent, voilà ton partage,
ce sont elles, elles qui sont ton lot.
C’est pour elles que tu as répandu des libations,
que tu as présenté ton offrande.
Puis-je y trouver l’apaisement ?
7 Sur une grande et haute montagne
tu as installé ta couche.
C’est là aussi que tu es montée
pour offrir le sacrifice.b
b Allusion à la prostitution sacrée des cultes naturistes de Canaan, Nb 25, dont la pratique s’introduisit parfois en Israël, 1 R 14.24 ; 22.47 ; 2 R 23.7 ; Os 4.14, en dépit des interdictions, Dt 23.18-19. Mais dans leurs invectives contre l’idolâtrie, les prophètes utilisent le vocabulaire de la prostitution aussi bien pour évoquer symboliquement l’infidélité d’Israël à son Dieu que pour décrire avec réalisme des actes des cultes païens.
8 Derrière la porte et le montant
tu as fixé ton mémorial.c
Oui, loin de moi tu t’es découverte,
tu es montée sur ta couche, tu en as profité largement.
Tu as pactisé à ton profit
avec ceux dont tu aimes la couche,
tout en contemplant le monument.
c Ce « mémorial » ou « monument » (fin du v.) doit être un symbole cultuel, mais le sens de tout le v. reste obscur.
9 Tu t’es approchée de Mèlèkd avec des présents d’huile,
tu as prodigué les parfums ;
tu as envoyé au loin tes messagers,
tu les as fait descendre jusqu’au shéol.
d « Le Roi », titre donné à de nombreuses divinités sémitiques. Ici, peut-être Melqart de Tyr, divinité du monde souterrain, cf. la fin du v.
10 À faire tant de chemin tu t’es fatiguée,
mais tu n’as pas dit : « C’est décourageant ! »
Tu as retrouvé la vigueur de ta main,
c’est pourquoi tu n’as pas faibli.
11 Qui as-tu craint et redouté,
pour mentir et ne plus te souvenir de moi,
pour ne plus te soucier de moi ?
N’étais-je pas silencieux et depuis longtemps ?
Aussi tu ne me craignais pas.
12 Mais je vais annoncer ta justice et tes œuvres,
dont tu ne tirais aucun profit.
13 Tu vas crier, qu’ils te délivrent,
ceux qui se serrent autour de toi !
Eux tous, le vent va les enlever, un souffle les emporter,
mais quiconque se confie en moi héritera du pays,
il possédera ma montagne sainte.
14 Et l’on dira : Nivelez, nivelez, frayez un chemin,
ôtez l’obstacle du chemin de mon peuple,
e Poème postérieur à l’Exil, qui montre Yahvé prenant soin des pauvres et des opprimés. Sur cette spiritualité des « pauvres de Yahvé », cf. So 2.3.
15 car ainsi parle celui qui est haut et élevé,
dont la demeure est éternelle
et dont le nom est saint.
« Je suis haut et saint dans ma demeure,
mais je suis avec l’homme humilié et désemparé,
pour ranimer les esprits désemparés,
pour ranimer les cœurs humiliés.
16 Car je ne veux pas accuser sans cesse
ni toujours me montrer irrité,
car devant moi faiblirait l’esprit
et ces âmes que j’ai créées.
17 Contre sa criminelle cupidité j’ai été irrité,
en me cachantf je l’ai frappé, dans mon irritation ;
et il s’en est allé, rebelle, selon sa fantaisie.
f C’est-à-dire, ou bien « en cachant ma face », expression de la disgrâce divine, ou bien « sans dévoiler mon intervention ».
18 J’ai vu sa conduite, mais je le guérirai,
je le conduirai, je lui prodiguerai le réconfort,
à lui et à ceux qui sont dans le deuil,
19 faisant naître la louange sur leurs lèvres :
« Paix ! paix à qui est loin et à qui est proche,g dit Yahvé,
et je le guérirai. »
g cf. Ep 2.17 où saint Paul applique ces paroles à Jésus et à la prédication de l’Évangile.
20 Mais les méchants sont comme la mer agitée
qui ne peut se calmer,
dont les eaux soulèvent la boue et la fange.
21 « Point de paix, dit Yahvé,h pour les méchants. »
h « Yahvé » 50 mss., cf. 48.22 ; « mon Dieu » TM.