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Bible de Jérusalem – Tobie 1

TOBIEa

Introduction au livre de Tobie

1 Histoire de Tobit,b fils de Tobiel, fils de Ananiel, fils d’Adouel, fils de Gabaël, de la lignée d’Asiel, de la tribu de Nephtali.

a Le texte de la Vulg. est souvent assez différent du texte grec suivi par la présente traduction (voir l’Introd., p. 659), ce qui entraîne de fréquentes discordances dans la numérotation des versets. Les notes signaleront les additions de la Vulg. les plus notables, et on trouvera en marge la numérotation de la Vulg., lorsqu’elle est différente du grec et que le texte de la Vulg. correspond, au moins substantiellement, à celui du grec.

b Le nom du père est en grec Tôbeith ou Tôbeit, ce qui se transcrit en français Tobit ; celui du fils, Tôbeias ou Tôbias, forme francisée Tobie. Les autres noms propres du livre varient beaucoup suivant les témoins. — Le Sinaïticus (S) allonge cette généalogie en ajoutant après « Gabaël » « fils de Raphäel, fils de Ragouël », omis par Alexandrinus (A) et Vaticanus (B).

2 Aux jours de Salmanasar,c roi d’Assyrie, il fut déporté de Tibé, qui se trouve au sud de Kédès-Nephtali, en Haute-Galilée, au-dessus de Hasor, à l’ouest, au soleil couchant, et au nord de Shephat.

c Le cadre historique a des raccourcis conventionnels, voir l’Introduction.

I. Le déporté

3 Moi, Tobit, j’ai marché sur des chemins de vérité et dans les bonnes œuvres tous les jours de ma vie.d J’ai fait beaucoup d’aumônes à mes frères et à mes compatriotes déportés avec moi à Ninive, au pays d’Assyrie.

d La piété de Tobit n’est pas tant faite de la méditation de la Loi, cf. Ps 119, etc., que de la pratique des bonnes œuvres qui l’accomplissent l’aumône, la sépulture donnée aux morts, les pèlerinages, l’acquittement de la dîme, etc.

4 Dans ma jeunesse, quand j’étais encore dans mon pays, la terre d’Israël, toute la tribu de Nephtali mon ancêtre se détacha de la maison de David et de Jérusalem. C’était pourtant la ville choisie parmi toutes les tribus d’Israël pour leurs sacrifices ; c’était là que le Temple où Dieu réside avait été bâti et dédié pour toutes les générations à venir. 5 Tous mes frères, et la maison de Nephtali, eux, sacrifiaient au veau qu’avait fait Jéroboam, roi d’Israël, à Dan, sur tous les monts de Galilée.

6 Bien des fois, j’étais absolument seul à venir en pèlerinage à Jérusalem, pour satisfaire à la loi qui oblige tout Israël à perpétuité. Je courais à Jérusalem, avec les prémices des fruits et des animaux, la dîme du bétail, et la première tonte des brebis. 7 Je les donnais aux prêtres, fils d’Aaron, pour l’autel. Aux lévites, alors en fonction à Jérusalem, je donnais la dîme du vin et du blé, des olives, des grenades et des autres fruits. Je prélevais en espèces la seconde dîme, six ans de suite, et j’allais la dépenser à Jérusalem chaque année. 8 Je donnais la troisièmee aux orphelins, aux veuves et aux étrangers qui vivent avec les Israélites ; je la leur apportais en présent tous les trois ans. Nous la mangions, fidèles à la fois aux prescriptions de la Loi mosaïque et aux recommandations de Debbora, mère de Ananiel, notre père ; parce que mon père était mort, en me laissant orphelin.

e « la troisième » syr. ; « celle de la troisième année » Vet. Lat. ; omis par S.

9 À l’âge d’homme, je pris une femme de notre parenté, qui s’appelait Anna ;f elle me donna un fils que je nommai Tobie.

f « qui s’appelait Anna » A, B, Vet. Lat. ; omis par S.

10 Lors de la déportation en Assyrie, quand je fus emmené, je vins à Ninive. Tous mes frères, et ceux de ma race, mangeaient les mets des païens ; 11 pour moi, je me gardai de manger les mets des païens.g

g Préparés sans tenir compte des interdits légaux, cf. Lv 11 ; Dt 14.

12 Comme j’avais été fidèle à mon Dieu de tout mon cœur, 13 le Très-Haut me donna la faveur de Salmanasar, dont je devins l’homme d’affaires. 14 Je voyageais en Médie, où je passai des marchés pour lui, jusqu’à sa mort ; et je déposai chez Gabaël, frère de Gabri, à Rhagès de Médie, des sacs d’argent pour dix talents.h

h Un talent d’argent, ou soixante mines, équivalait à un poids d’environ quarante-quatre kilos.

15 À la mort de Salmanasar, Sennachérib, son fils, lui succéda ; les routes de Médie se fermèrent, et je ne pus continuer à m’y rendre. 16 Aux jours de Salmanasar, j’avais fait souvent l’aumône à mes frères de race, 17 je donnais mon pain aux affamés, et des habits à ceux qui étaient nus ; et j’enterrais, quand j’en voyais, les cadavres de mes compatriotes, jetés par-dessus les remparts de Ninive. 18 J’enterrai de même ceux que tua Sennachérib. — Quand il revint en fuyard de Judée, après le châtiment du Roi du Ciel sur le blasphémateur, Sennachérib, dans sa colère, tua un grand nombre d’Israélites. — Alors, je dérobais leurs corps pour les ensevelir ; Sennachérib les cherchait et ne les trouvait plus. 19 Un Ninivite vint informer le roi que j’étais le fossoyeur clandestin. Quand je sus le roi renseigné sur mon compte, que je me vis recherché pour être mis à mort, j’eus peur, et je pris la fuite. 20 Tous mes biens furent saisis ; tout fut confisqué pour le trésor ; rien ne me resta, que ma femme Anna, et que mon fils Tobie.

21 Moins de quarante jours après, le roi fut assassiné par ses deux fils, qui s’enfuirent dans les monts Ararat. Asarhaddon, son fils, lui succéda. Ahikar,i fils de mon frère Anaël, fut chargé des comptes du royaume, et il avait la direction générale des affaires.

i La mention d’Ahikar, 1.22 ; 2.10 ; 11.18 ; 14.10 (cf. Jdt 5.5) rattache l’histoire de Tobit au Livre (ou Sagesse) d’Ahikar, ouvrage ancien connu sous diverses formes et en diverses langues. C’est un récit qui sert de cadre à deux recueils de sapience, dont l’écho se retrouve dans et dans Si. Le sage Ahikar, chancelier des rois d’Assyrie Sennachérib et Asarhaddon, a élevé son neveu Nadan, qu’il prépare pour lui succéder ; ce qui introduit une première série de maximes. Nadan, parvenu et ingrat, fait condamner à mort son bienfaiteur. Ahikar échappe à la mort par un subterfuge et reste caché. Asarhaddon, sommé par le Pharaon de lui présenter un sage capable de répondre à ses défis, regrette la disparition d’Ahikar. Celui-ci sort alors de sa cachette, tient tête à Pharaon et, réhabilité, châtie son neveu et lui adresse des reproches, qui constituent la seconde série de sentences.

22 Alors Ahikar intercéda pour moi, et je pus redescendre à Ninive. C’est que Ahikar, sous Sennachérib, roi d’Assyrie, avait été grand échanson, garde du sceau, administrateur et maître des comptes ; et Asarhaddon l’avait maintenu en fonctions. Il était de ma parenté, c’était mon neveu.

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