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Bible de Jérusalem

Luc 22.31-

Annonce du retour et du reniement de Pierre.

31 e « Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment ;

e Add. « Et le Seigneur dit. »

32 mais moi j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas. Toi donc, quand tu seras revenu, affermis tes frères. »f

f Cette parole confère à Pierre, à l’égard des autres apôtres, un rôle de direction dans la foi. Sa primauté au sein même du collège apostolique y est plus clairement affirmée qu’en Mt 16.17-19, où il pouvait passer simplement pour le porte-parole et le représentant des Douze. Voir aussi Jn 21.15-17, où les « agneaux » ou « brebis » qu’il doit paître semblent bien inclure « ceux-ci », ses compagnons apostoliques qu’il dépasse en amour.

33 Celui-ci lui dit : « Seigneur, je suis prêt à aller avec toi et en prison et à la mort. » 34 Mais il dit : « Je te le dis, Pierre, le coq ne chantera pas aujourd’hui que tu n’aies, par trois fois, nié me connaître. »

L’heure du combat décisif.

35 Puis il leur dit : « Quand je vous ai envoyés sans bourse, ni besace, ni sandales, avez-vous manqué de quelque chose ? » ­ « De rien », dirent-ils. 36 Et il leur dit : « Mais maintenant, que celui qui a une bourse la prenne, de même celui qui a une besace, et que celui qui n’en a pas vende son manteau pour acheter un glaive.g

g Une bourse pour acheter et une besace pour garder des vivres qui désormais ne seront plus donnés librement aux disciples ; un glaive pour se protéger dans un monde devenu hostile.

37 Car, je vous le dis, il faut que s’accomplisse en moi ceci qui est écrit : Il a été compté parmi les scélérats. Aussi bien, ce qui me concerne touche à sa fin. » ­ 38 « Seigneur, dirent-ils, il y a justement ici deux glaives. » Il leur répondit : « C’est bien assez ! »

Au mont des Oliviers.

39 Il sortit et se rendit, comme de coutume, au mont des Oliviers, et les disciples aussi le suivirent. 40 Parvenu en ce lieu, il leur dit : « Priez, pour ne pas entrer en tentation. »

41 Puis il s’éloigna d’eux d’environ un jet de pierre et, fléchissant les genoux,h il priait en disant :

h La prière se faisait normalement debout, cf. 1 R 8.22 ; Mt 6.5 ; 18.11, mais aussi à genoux quand elle devenait plus intense ou plus humble, cf. Ps 95.6 ; Isa 45.23 ; Dn 6.11 ; Ac 7.60 ; 9.40 ; 20.36 ; 21.5.

42 « Père, si tu veux, éloigne de moi cette coupe ! Cependant, que ce ne soit pas ma volonté, mais la tienne qui se fasse ! » 43 Alors lui apparut, venant du ciel, un ange qui le réconfortait. 44 Entré en agonie, il priait de façon plus instante, et sa sueur devint comme de grosses gouttes de sang qui tombaient à terre.i

i Bien qu’omis par quelques bons témoins, les vv. 43-44 sont à maintenir. Attestés dès le IIe siècle par de nombreux témoins, ils présentent le style et la manière de Luc. Leur omission s’explique par le souci d’éviter un abaissement de Jésus jugé trop humain.

45 Se relevant de sa prière, il vint vers les disciples qu’il trouva endormis de tristesse, 46 et il leur dit : « Qu’avez-vous à dormir ? Relevez-vous et priez, pour ne pas entrer en tentation. »

L’arrestation de Jésus.

47 Tandis qu’il parlait encore, voici une foule, et à sa tête marchait le nommé Judas, l’un des Douze, qui s’approcha de Jésus pour lui donner un baiser. 48 Mais Jésus lui dit : « Judas, c’est par un baiser que tu livres le Fils de l’homme ! »

49 Voyant ce qui allait arriver, ses compagnons lui dirent : « Seigneur, faut-il frapper du glaive ? » 50 Et l’un d’eux frappa le serviteur du grand prêtre et lui enleva l’oreille droite. 51 Mais Jésus prit la parole et dit : « Restez-en là. » Et, lui touchant l’oreille, il le guérit.

52 Puis Jésus dit à ceux qui s’étaient portés contre lui, grands prêtres, chefs des gardes du Temple et anciens : « Suis-je un brigand, que vous vous soyez mis en campagne avec des glaives et des bâtons ? 53 Alors que chaque jour j’étais avec vous dans le Temple, vous n’avez pas porté les mains sur moi. Mais c’est votre heure et le pouvoir des Ténèbres. »

Reniements de Pierre.

54 L’ayant donc saisi,j ils l’emmenèrent et l’introduisirent dans la maison du grand prêtre. Quant à Pierre, il suivait de loin.

j Dans Mt, la troupe met la main sur Jésus dès que Judas l’a embrassé ; suit l’épisode de l’oreille coupée ; le discours de Jésus vient en dernier lieu. De même dans Mc. L’ordre de Lc, où l’arrestation suit le discours de Jésus, souligne la maîtrise de Jésus sur l’événement. Cf. en ce sens Jn 10.18 ; 18.4-6.

55 Comme ils avaient allumé du feu au milieu de la cour et s’étaient assis autour, Pierre s’assit au milieu d’eux.

56 Une servante le vit assis près de la flambée et, fixant les yeux sur lui, elle dit : « Celui-là aussi était avec lui ! » 57 Mais lui nia en disant : « Femme, je ne le connais pas. » 58 Peu après, un autre, l’ayant vu, déclara : « Toi aussi, tu en es ! » Mais Pierre déclara : « Homme, je n’en suis pas. » 59 Environ une heure plus tard, un autre soutenait avec insistance : « Sûrement, celui-là aussi était avec lui, et d’ailleurs il est Galiléen ! » Mais Pierre dit : 60 « Homme, je ne sais ce que tu dis. » Et à l’instant même, comme il parlait encore, un coq chanta, 61 et le Seigneur, se retournant, fixa son regard sur Pierre. Et Pierre se ressouvint de la parole du Seigneur, qui lui avait dit : « Avant que le coq ait chanté aujourd’hui, tu m’auras renié trois fois. » 62 Et, sortant dehors, il pleura amèrement.

Premiers outrages.k.

63 Les hommes qui le gardaient le bafouaient et le battaient ;

k Se plaçant durant l’attente de la nuit, avant la séance du Sanhédrin et non après elle comme chez Mt Mc, les outrages chez sont le fait, non des sanhédrites, mais de la valetaille. De plus, à la différence encore de Mt 26.68 ; Mc 14.65 (voir les notes), Jésus a le visage voilé, si bien que les outrages deviennent chez un jeu de devinette, bien connu dans le monde ancien et même en tous les temps. Sur ces points le récit de a sans doute plus de vraisemblance que ceux de Mt et Mc.

64 ils lui voilaient le visage et l’interrogeaient en disant : « Fais le prophète ! Qui est-ce qui t’a frappé ? » 65 Et ils proféraient contre lui beaucoup d’autres injures.

Jésus devant le Sanhédrin.l

66 Et quand il fit jour, le conseil des Anciens du peuplem s’assembla, grands prêtres et scribes. Ils l’amenèrent dans leur Sanhédrinn

l Au lieu des deux comparutions de Mt et Mc, n’en a qu’une, au matin et sans doute dans le bâtiment du « Tribunal », près du Temple. Cf. Mt 26.57.

m « Anciens » ne désigne pas ici l’un des trois éléments du Sanhédrin (les anciens), mais le Sanhédrin tout entier, dont indique les deux éléments les plus importants (grands prêtres et scribes).

n Plutôt que les personnes qui composaient le Sanhédrin, ce terme doit désigner ici le local officiel de leurs réunions. Ce local se trouvait, au moins en partie, sur l’esplanade du Temple, dans sa région sud-ouest. Il n’ouvrait ses portes qu’au petit matin, comme le suppose le v. 66.

67 et dirent : « Si tu es le Christ, dis-le-nous. » Il leur dit : « Si je vous le dis, vous ne croirez pas, 68 et si je vous interroge, vous ne répondrez pas. 69 Mais désormais le Fils de l’homme siégera à la droiteo de la Puissance de Dieu ! »

o évite le « vous verrez » de Mt et de Mc, ainsi que l’allusion à Dn. Peut-être a-t-il voulu éviter l’attente d’une Parousie prochaine, à laquelle pouvait prêter cette parole mal comprise.

70 Tous dirent alors : « Tu es donc le Fils de Dieu ! »p Il leur déclara : « Vous le dites : je le suis. » 71 Et ils dirent : « Qu’avons-nous encore besoin de témoignage ? Car nous-mêmes l’avons entendu de sa bouche ! »q

p distingue mieux que Mt Mc les deux titres de « Christ », v. 67, et « Fils de Dieu », v. 70 ; comparer Jn 10.24-39.

q n’a ni faux témoignages (mais cf. Ac 6.11-14), ni sentence de mort explicite. Il semble bien dépendre d’une autre source que Mc Mt.