Nous avons dit, dans notre deuxième chapitre, que la foi, c’est croire. Hâtons-nous cependant de distinguer entre foi et foi.
On peut dire que l’on croit et ne pas être sauvé. On peut dire avoir la foi (Jacques 2.14), et vivre dans une tragique illusion.
Jésus, déjà, ne se fiait pas à ceux qui croyaient en Lui (Jean 2.25). La vraie foi n’est pas une profession intellectuelle, extérieure, mais une réalité intérieure, qui produit des fruits conformes à la vie de Dieu dans notre vie extérieure.
La foi qui repose sur le sentiment, la sentimentalité, n’est pas la vraie foi. Si les miracles de Jésus étaient pour ceux qui les voyaient une raison péremptoire de croire (Jean 8.38; 14.11) s’ils pouvaient produire la foi chez une minorité de gens sincères (Jean 4.53), le plus souvent ils produisent chez les hommes charnels la fausse foi, (Jean 6.2,14,15,30,41,66), et chez ceux qui ne sont pas sincères, l’incrédulité, (Jean 5.14-18; 9.13-34; 11.46-53; 12.37-41)."Heureux, disait Jésus, ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru" (Jean 20.29).
Beaucoup de ceux qui avaient été vivement touchés dans des réunions, sont retournés en arrière: Ils n’étaient pas réellement "nés de nouveau"; ils n’avaient pas reçu la vie éternelle. On peut éprouver des émotions, être même profondément ébranlé, sans que le cœur soit réellement changé. Les dons spirituels les plus grands ne sauraient remplacer le fruit de l’Esprit, (Galates 5.22). Une grande ardeur, une joie exubérante ne prouvent pas non plus que l’âme ait reçu la vie éternelle.
L’Écriture donne de solennels avertissements quant à la possibilité de recevoir "la grâce de Dieu en vain", de bien commencer, puis de déchoir de la grâce. (2 Corinthiens 6.1; Galates 5.4). Plus d’une fois, le Seigneur parle de ceux qui reçoivent la Parole avec joie, mais qui n’ont pas de racine en eux-mêmes. Ils ne croient que pour un temps (Luc 8.13). Ceci explique que des gens qu’on a pu prendre pour de vrais croyants sont tombés sans espoir de retour. Superficiels, ils n’ont pas persévéré dans la foi, (Actes 14.22), ils ne l’ont pas poursuivie, (2 Tim 2.22), et Satan, après les avoir illusionnés pour un temps sur leur état réel, s’est servi d’eux pour discréditer la vraie foi par leurs reniements. L’apôtre Pierre dans sa seconde épître leur applique ce proverbe: "Le chien est retourné à ce qu’il avait vomi lui-même, et la truie lavée, à se vautrer au bourbier" (2 Pierre 2.20-22). Leur cas est grave, car après avoir été une fois éclairés, et avoir goûté du don céleste, ils n’ont désormais plus l’excuse, en rejetant Christ, de ne pas savoir ce qu’ils font. Aussi, l’épître aux Hébreux nous déclare qu’il est impossible pour eux d’être "renouvelés encore à la repentance, crucifiant pour eux-mêmes le Fils de Dieu et l’exposant à l’opprobre" (Heb 6.4-6).
Après Jésus qui met en garde contre une profession de foi apparente, mais sans réalité profonde, l’apôtre Paul nous montre qu’on peut posséder une foi qui transporte les montagnes, et pourtant n’être rien, s’il nous manque l’amour (1 Corinthiens 13.2).
Pas plus que beaucoup de paroles pieuses (Matthieu 7.21), les actions extraordinaires ne sont preuves de la vraie foi. Celle-ci a sa source et sa manifestation dans l’amour de Dieu. La foi amène les hommes à être et non pas à paraître.
L’apôtre Jacques reprend également celui qui se glorifie de sa foi tout en menant une vie coupable. Il lui dit: "Tu crois que Dieu est un; tu fais bien, les démons aussi croient, et ils tremblent (Jacques 2.19).
Il ne suffit pas de proclamer que Jésus-Christ est le Fils de Dieu. Pierre l’a fait (Matthieu 16.16), mais les démons aussi. Écoutons plutôt: "Je connais qui tu es: Le Saint de Dieu" (Marc 1.24), ou encore: "Qu’y a-t-il entre moi et toi, Jésus Fils du Dieu Très-Haut"? (Marc 5.7). D’aucuns de nos lecteurs savent peut-être qui est le Christ. Peut-être même ont-ils une connaissance très orthodoxe de Sa personne et de Son œuvre. Seulement, qu’ils se souviennent que cette connaissance, à elle seule, ne peut les sauver. La connaissance de Dieu n’est pas une fin en soi, elle n’a pas de valeur en soi-même. Elle est un service qui n’a de prix que par son sujet, sa tâche, son but: Honorer Dieu (Colossiens 1.9-10). "La connaissance de Dieu n’est pas une connaissance qui nous laisse intacts, elle est une connaissance qui nous entraîne. Dieu nous prend à Son service, Il ne nous laisse pas rester nous-mêmes et "le connaître" avec indépendance. Il devient tout pour nous". (KAIU. BARTE. La Confession de Foi de l’Église, p. 9.)
Pierre et les démons ont confessé Christ avec des formules presque identiques. Mais Pierre, en le faisant, agissait sous l’inspiration divine, tandis que les démons obéissaient à la crainte. Voilà pourquoi le Seigneur, qui lit dans les cœurs, qui regarde à la source et à la nature d’une confession, peut proclamer Pierre "bienheureux". (Matthieu 16.17), alors qu’Il dit au démon: "Tais-toi" (Marc 1.25). Pierre croit et aime, parce qu’il a été aimé le premier (1 Jean 4.19); les démons savent, croient, mais ne connaissent pas l’amour qui bannit la crainte, (Jacques 2.19; 1 Jean 4.18).
Prenons garde à la froide et sèche connaissance biblique. On peut tout savoir sans posséder la foi. L’opération de la foi transforme des vérités connues en réalités dans nos vies. On ne sait plus, on ne croit plus, parce qu’on nous a dit, mais on sait et on croit pour avoir expérimenté l’amour du Seigneur (Jean 4.42).
Veillons donc à ne pas confondre la foi avec des sentiments religieux; la foi avec des actions spectaculaires; la foi avec des connaissances doctrinales étendues.
Comment donc pouvons-nous reconnaître les vrais croyants? A ce principe universel: "Vous les reconnaîtrez à leurs fruits" (Matthieu 7.20). Une preuve irrécusable que nous sommes enfants de Dieu, sera notre persévérance dans la sainteté et dans l’obéissance à la Parole de Dieu (Heb 12.14). Alors, le Saint-Esprit rendra témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu (Romains 8.16). Tel est le premier caractère de la vraie foi. Elle ne nous donne l’assurance de notre salut que dans une communion vivante avec le Sauveur Vivant et une marche dans la lumière, (1 Jean 1.6-7). Ceci ne veut pas dire que le croyant soit impeccable, car "nous faillissons tous à plusieurs égards" (Jacques 3.2). Ayant la foi, il nous sera impossible de vivre dans un état de péché, de pratiquer l’iniquité (1 Jean 3.4-12). Toutefois, si nous ne veillons pas constamment, si nos yeux ne sont pas fixés sans cesse sur Jésus, une chute, ou même plusieurs sont inévitables. Cependant cela ne peut être qu’un accident dont nous pouvons être restaurés, en confessant notre péché à Celui qui est fidèle et juste pour nous le pardonner et nous purifier de toute iniquité (1 Jean 1.9; Proverbes 28.13). Le péché rompant la communion avec Dieu, il est impossible pour celui qui l’a goutée de vivre sans elle, (lire Psaumes 32; 51).
Certes le Seigneur a dit de ses brebis: "Je leur donne la vie éternelle, et elles ne périront jamais; et personne ne les ravira de ma main", (Jean 10.28). Toutefois, d’après le contexte, ces paroles ne sauraient donner d’assurance qu’aux brebis qui écoutent la voix du Bon Berger et qui le suivent (Jean 10.27). Pour elles, oui, il y a une assurance totale, et avec l’apôtre Paul, s’appuyant uniquement sur Christ en qui elles se trouvent, et non sur leur fidélité, elles peuvent s’écrier au sein de toutes leurs misères et de leurs défaillances: "Il n’y a désormais aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus!... Car je suis assuré que ni mort, ni vie, ni anges, ni principautés, ni choses présentes, ni choses à venir, ni hauteur, ni profondeur, ni aucune autre créature, ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu, qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur", (Romains 8.1,38-39). Ce chant de triomphe est celui de la vraie foi!
Qu’il soit bien entendu que la foi véritable donne l’assurance pleine et entière du salut. Mais que périsse cette conception fausse et diabolique qui fait de la foi une police d’assurance contre les risques de peines éternelles. Personne ne reçoit l’assurance de son élection comme une charte d’immunité pour vivre ensuite comme bon lui semble!
La foi est dans le cœur du croyant une loi morale, et le germe d’une personnalité nouvelle (2 Corinthiens 5.17). Elle est loin d’entraîner au relâchement moral, mais produit nécessairement et spontanément des œuvres (Eph 2.10). En effet, elle est la mort au péché qui est tué dans sa racine par l’union du pécheur avec Christ mourant et ressuscité, (Romains 6).
Résumons maintenant les caractères de la vraie foi tels que nous les trouvons dépeints dans la Bible.
La foi qui sauve est celle du cœur (Romains 10.9-10). Dans les Écritures le cœur est le vase qui contient la pensée, les sentiments, la volonté (Marc 7.21-23). La foi du cœur est donc une foi qui gouverne la pensée, les sentiments et la volonté. Elle se manifeste à l’extérieur par l’accomplissement des œuvres que Dieu a préparées à l’avance afin que nous marchions en elles (Eph 2.10; Heb 11; Jacques 2.14-25).
Ainsi se concilient très bien la doctrine de Paul et celle de Jacques. Pour l’un et l’autre, la foi qui sauve est celle qui produit des œuvres, et les œuvres que Dieu agrée sont celles que produit la foi, (Romains 3.28; Jacques 2.18-26). La foi sans les œuvres est morte, or une foi morte n’est pas la foi!
La foi qui sauve est agissante par l’amour (Galates 5.6). La vraie foi est toujours unie à la charité. On peut avoir une foi sans l’amour, (1 Corinthiens 13), mais on ne peut avoir le vrai amour sans la foi. "On peut confesser que le Christ est venu et ne pas aimer le Christ, mais impossible d’aimer le Christ sans proclamer que le Christ est venu", (saint Augustin).
La foi qui sauve reçoit Christ qui se donne à nous comme Sauveur, comme Libérateur, comme Seigneur. Elle donne l’assurance du pardon de nos péchés en se fondant uniquement sur l’œuvre expiatoire de Christ, (Romains 3.24-25). Elle nous libère de la puissance du péché en nous apprenant à compter entièrement sur Christ (Jean 8.36; Romains 8.2-4). Enfin, elle soumet sans réserve notre esprit aux enseignements du Maître et notre vie à Son contrôle absolu.
Elle se confie uniquement en Christ. Elle est inébranlable, elle sait qui elle croit (2 Tim 1.12).
Elle invoque le nom du Seigneur (Romains 10.13-14). Elle ne recule pas devant la confession publique du nom de Jésus et n’a pas honte de le confesser. Elle accomplit son service malgré les dangers et les épreuves (Heb 10.38-39). Elle supporte l’épreuve qui l’épure et la fortifie à la louange, à l’honneur et à la gloire de Dieu (1 Pierre 1.7).
Dans le passage Heb 11.1, nous trouvons encore deux caractères de la foi: "Elle est l’assurance des choses qu’on espère, et la conviction de celles qu’on ne voit pas".
Elle perçoit l’invisible et saisit les réalités spirituelles. De même que nos sens nous mettent en relation avec le monde physique, la foi nous met en relation avec le monde spirituel. Ce qu’elle affirme dans le domaine spirituel a autant de valeur que ce qu’affirment les sens dans le domaine physique, ou la raison dans le domaine scientifique.
Si la foi qui sauve ne se repose pas sur l’évidence, elle n’est cependant ni la crédulité, ni la spéculation, car elle a ses motifs propres et ses méthodes de démonstration. Loin d’être aveugle ou de se complaire dans l’ignorance, elle sait en qui elle croit (2 Tim 1.12). Elle connaît (à sa manière) ce qui surpasse toute intelligence (Eph 3.8; Jean 6.69). Elle comprend ce que les saints seuls peuvent comprendre (Eph 3.18). En un mot, la foi a sa certitude indépendante de la logique, comme "le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas" (Pascal). On voit que des trois éléments de la foi: Une connaissance plus ou moins claire de son objet, c’est-à-dire de Dieu, la conviction que la Parole est vraie, et la confiance en Lui, c’est le dernier qui constitue essentiellement la foi religieuse. Pascal l’a définie: "Dieu sensible au cœur".
"Enfants, n’aimons pas de parole ni de langue, mais en action et en vérité. Et par ceci nous saurons que nous sommes dans la vérité, et nous assurerons nos cœurs devant Lui — que, si notre cœur nous condamne, Dieu est plus grand que notre cœur et Il sait toutes choses. Bien-aimés, si notre cœur ne nous condamne pas, nous avons de l’assurance envers Dieu; et quoi que nous demandions, nous le recevrons de Lui, parce que nous gardons Ses commandements et que nous pratiquons les choses qui sont agréables devant Lui", (1 Jean 3.18-23).