Qu'on ne se méprenne pas : les dons du Saint-Esprit ne peuvent pas être obtenus par un effort de l'homme ; quoi que nous puissions dire dans le présent chapitre, ils seront toujours DES DONS. Qu'on n'oublie pas non plus, en étudiant ce chapitre, toue ce qui a été dit dans le précédent.
Ce sont des dons au sens le plus réel et le plus ordinaire du mot ; le mot grec qui les désigne (charismata) vient de la même racine que le mot que nous traduisons grâce, faveur, bonté ; c'est le même mot qui revient dans l'expression : le DON de la vie éternelle. (Romains 6.23). Rien ici ne suggère l'idée d'acquisition, ou celle de mérite ; il s'agit de présents faits par amour, comme les présents d'Eliézer à Rébecca (Genèse 24.53). Cette image convient bien ici : tout comme ces dons d'un fiancé à sa fiancée, les dons de l'Esprit ne sont pour l'épouse du Christ qu'un gage, en attendant la plénitude de ses richesses, dont l'Eglise jouira plus tard. Combien précieux de pareils dons pour le croyant.
On demande si souvent : « Comment puis-je obtenir les dons ? » que nous prendrons la question telle qu'on la pose ; nous essaierons d'y répondre en étudiant les Ecritures.
Au point de départ, saisissons bien ce qu'implique la notion de dons de l'Esprit. Cela veut dire qu'ils sont en rapport direct avec le Saint-Esprit ; le Nouveau Testament ne nous les présente jamais chez des hommes qui ne seraient pas, et convertis à Jésus-Christ, et remplis du Saint-Esprit. Ils jaillissent de l'expérience personnelle du baptême de Pentecôte (Actes 2.4), ils sont la suite normale et une manifestation de cette expérience. Si nous suivons le Nouveau Testament, nous comprendrons qu'il y a une relation intime et essentielle entre le baptême du Saint-Esprit et les dons spirituels ; le baptême et les dons font partie de l'expérience chrétienne normale et authentique.
Quand le croyant a reçu un don, il peut et doit en désirer certains autres. Ainsi il est dit à celui qui a le don des langues de prier pour avoir le don d'interprétation (I Cor. 14.13). Des expressions plus fortes encore se lisent ici : « Aspirez au don de prophétie. » (14.39).
Il est donc clair que le Seigneur veut que nous possédions des dons spirituels, et que nous en désirions, parmi ceux que nous ne possédons pas encore. Un tel désir lui est parfaitement agréable. Ne pas désirer les dons spirituels, c'est mépriser une grâce, et c'est désobéir à la Parole.
On n'a pas le droit de s'excuser en disant, comme plusieurs le font, qu'on recherche l'amour, le plus grand des dons : car l'amour n'est pas le moins du monde un don spirituel, c'est un fruit de l'Esprit. Il nous est dit très distinctement de rechercher l'amour, et d'ASPIRER aussi aux dons spirituels. (I Cor. 14.1). Les deux choses ne se séparent pas, ni ne s'opposent ; elles résument à elles deux toute l'ambition du chrétien.
Dieu est parfaitement souverain dans l'attribution des dons. Le Saint-Esprit les répartit « COMME IL VEUT. » (I Cor. 12.11). Notez encore les expressions : « comme il a voulu » (v. 18) et « DIEU a établi » (v. 28).
Il n'y a donc place pour aucun sentiment de jalousie quand il s'agit des dons spirituels ; ils diffèrent « selon la grâce qui nous a été accordée (Romains 12.6) » ; ceux qui possèdent les dons les meilleurs ou les plus apparents ne doivent pas s'enorgueillir, mais se revêtir des sentiments modestes, selon la mesure de foi que DIEU a départie à chacun. » (v. 3). A lui seul la gloire.
S'il n'y a pas place pour l'orgueil, il y a place pour l'adoration ; car sur toute manifestation d'un vrai don de l'Esprit on pourrait écrire : « C'est ici le doigt de Dieu » ; la faiblesse et l'imperfection naturelles de l'homme n'en font que mieux ressortir la grâce souveraine du Donateur.
Il y a, notons-le maintenant, un moment où les hommes peuvent devenir les instruments, par lesquels s'exprime la souveraineté divine. C'est ce que montre le cas de Timothée ; deux fois Paul parle de son don spirituel comme ayant été conféré par l'imposition des mains (I Tim. 4.14 et II Tim. 1.6). Il rappelle à Timothée les circonstances solennelles dans lesquelles les anciens lui imposèrent les mains ; Paul était probablement du nombre, et il s'agit sans doute de sa consécration au ministère avant le départ de Lystre (Actes 16). On voit aussi que l'un des anciens dût recevoir une prophétie révélant par l'Esprit la nature du don qui était conféré au jeune homme.
Il n'y a là rien de contraire à la souveraineté de Dieu dans l'attribution des dons spirituels ; au contraire cela s'accorde avec l'ensemble de la Révélation, qui nous montre que le Tout-Puissant consent à travailler par le moyen des hommes, et en collaboration avec eux. Ne croyez jamais que par l'imposition des mains, les hommes ont en leur pouvoir, et au gré de leur volonté, l'attribution des dons. Ce rite si beau et si approprié n'a d'efficacité que dans la mesure où ceux qui le pratiquent sont dans la volonté de Dieu et remplis du Saint-Esprit. Mais ce rite est parfaitement conforme à l'Ecriture, et nous faisons bien de nous y soumettre, en nous adressant à des frères vraiment pieux lorsque nous recherchons des bénédictions ou des dons spirituels. Ayons confiance : le Seigneur fera honneur aux méthodes qu'il a lui-même instituées.
Dieu est souverain dans l'attribution des dons spirituels. Cette souveraineté s'exprime par la remise directe des dons sans intervention humaine, ou bien par leur remise au moyen de l'imposition des mains.
Nous voulons chercher maintenant s'il y a, de la part de l'homme, telle action ou telle attitude qui puisse concourir à la réalisation du plan de Dieu, ou au contraire l'entraver. Nous suggérons ce qui suit.
a) UNE VIE CONSACRÉE.
Par là nous entendons une soumission absolue à la volonté de Dieu, telle qu'elle s'affirme souverainement dans les paroles : « Comme il le veut. » Je dois être prêt à recevoir n'importe quel don, selon ce que le Seigneur le veut pour moi. Il est tout naturel, par exemple, de désirer les dons de guérison ; et nous avons souvent rencontré des croyants qui ne veulent absolument pas avoir le don des langues. En réalité il faut avoir une attitude de complète soumission. Dieu seul sait quel don chaque croyant est à même d'exercer pour la gloire de son nom ; et Dieu seul sait quel don est le mieux adapté à la situation spirituelle de chacun de ses enfants. Il est aisé de voir qu'il y a des dons qui feraient beaucoup de mal à l'individu et à l'Eglise, s'ils étaient donnés là où il n'y a pas un degré avancé de sanctification. Inversement la pratique même de certains dons peut contribuer à la sanctification du caractère ; ainsi la guérison peut développer la compassion, le discernement des esprits peut porter à la vigilance, le parler en langues peut rabaisser l'orgueil intellectuel.
b) LA PRIÈRE.
La souveraineté de Dieu n'enlève à la prière ni sa raison d'être ni sa puissance ; et, en ce qui concerne les dons spirituels, la Parole exhorte le croyant à les demander par la prière. Il est parfaitement légitime de désirer ardemment certains dons, pourvu que l'on garde une attitude de soumission.
Un tel désir nous est même recommandé en des termes très forts : « Aspirez aux dons spirituels », (I Cor. 14.1), c’est-à-dire : ayez une forte ambition... Aucune expression ne saurait être plus énergique. « Portez-vous de tout cœur au don de prophétie ». (I Cor. 14.39). « Celui qui parle en langues doit prier pour avoir le don d'interpréter » (I Cor. 14.13).
Toutes ces expressions montrent qu'il ne s'agit pas de rester assis les bras croisés, pour attendre vaguement ce qui pourrait se présenter. Il faut qu'il y ait un désir réel et profond qui vienne s'unir à la souveraineté divine. Ne refusons pas de nourrir dans notre vie chrétienne une ambition réellement sainte : c'est Dieu lui-même qui l'implante dans l'âme par sa grâce. Dieu ne se joue jamais d'un cœur sincère ; le désir même qu'il inspire est déjà comme une promesse qu'il réalisera pleinement un jour, comme et où il voudra.
c) LA FOI.
C'est la condition qu'on a tendance à ne pas comprendre quand on cherche, ou que l'on pratique les dons spirituels. Notre expérience nous porterait à dire que ce qui empêche, plus que tout le reste, les croyants de pratiquer les dons spirituels. c'est l'incrédulité.
Remarquez cependant le passage Romains 12.3-6. Paul dit que la pratique d'un don vient de la foi, et dépend de la mesure de la foi. En toutes choses, le Seigneur fait de ma foi la condition de la communication en moi d'e sa nie et de sa puissance divines. Rien ne disqualifie autant l'homme pour le service du Maître que l'incrédulité. Ce n'est pas la prière qui sauve le malade, c'est la prière de la foi (Jacques 5). Nul incident n'illustre mieux ce principe que Matthieu 14.28-30 : Pierre marchant sur les eaux. Les yeux fixés sur Jésus, il avançait ; quand il les détourna, il commença d'enfoncer. Ainsi en est-il pour les dons spirituels : si l'on fixe les yeux de l'esprit sur le Seigneur, on les pratique librement ; qu'on détourne les yeux, l'échec est là.
Quelle erreur de croire que dans l'exercice des dons spirituels, le croyant est contraint par le Saint-Esprit, en dépit de sa volonté ! Il n'en est jamais ainsi quand c'est Dieu qui inspire les paroles ou les actes. Il ne touche jamais à la liberté de la volonté humaine. La manifestation de l'Esprit peut être par nous « éteinte » ; inversement on peut céder si promptement et si intelligemment aux influences du Saint-Esprit qu'on assistera à la manifestation immédiate et très belle de n'importe quel don. Tel doit être notre but, et il montrera Dieu et l'homme s'unissant en un seul, non pas un esclave manœuvré par un maître.
Les dons spirituels peuvent résider dans le croyant, et cependant rester comme en sommeil, sans se manifester. Timothée courait ce danger. Paul l'exhorte à ne pas négliger le don qui était en lui (I Timothée 4.14) ; une autrefois il lui donne un ordre encore plus précis : « réveille » ou « ranime » le don (II Tim. 1.6).
Ces passages donnent à penser que beaucoup de croyants n'ont pas tant à prier pour recevoir des dons, qu'à veiller à la pratique de ceux qu'ils possèdent déjà. Dans ce cas, il ne sert à rien de rejeter la responsabilité sur le Seigneur, comme s'il n'avait pas accordé le don, ou comme s'iI l'avait retiré. C'est au croyant qu'il appartient de ranimer le don qui est en lui, chaque fois que le Saint-Esprit vient le visiter, et cherche à remettre en opération la manifestation trop négligée de sa présence. Avec quelle fermeté les conseils que Paul donne à Timothée mettent-ils en lumière la responsabilité de l'homme dans la pratique des dons de l'Esprit. Tout se passe comme si Dieu s'était réservé la souveraineté dans l'attribution des dons, et avait ensuite laissé l'homme souverain pour ce qui concerne la liberté et l'utilité de leur manifestation. Tout l'enseignement de I Cor. 14 présuppose le même principe.
Si le croyant acquiert la conviction qu'il n'est pas libre de se servir du don qu'il a reçu dans le passé, le remède est évidemment à chercher dans la repentance, dans un retour à la plénitude de la communion par le Saint-Esprit, et dans un effort de volonté pour ranimer le don négligé. Si on ne le fait pas, on s'appauvrit soi-même, on appauvrit l'Eglise, on voile pour sa part la gloire de Dieu.
Rien n'est plus important dans le rétablissement d'un christianisme conforme au Nouveau Testament que la réapparition de tous les dons surnaturels du Saint-Esprit.
Les restaurer en partie seulement, c'est se condamner à une constante faiblesse, nous dirons presque que c'est courir un danger. L'Eglise doit prier sans cesse et désirer ardemment la manifestation de tous les dons sans exception, et ceux des dons qui ont déjà été reçus doivent être jalousement conservés en pleine activité. Une croyance théorique ou doctrinale ne peut pas tenir lieu d'une opération réelle. Il faut que nous ayons LES DONS eux-mêmes.
Grâces à Dieu, la souveraineté divine s'accorde avec la bienveillance divine. Le Nouveau Testament nous fournit d'amples raisons de croire que le Seigneur est disposé à accorder TOUS les dons de son Esprit, comme au commencement, les distribuant à chacun en particulier comme il le veut. « Seigneur, nous croyons ! ».