C’est avec raison assurément que nous nous glorifions de nous être affranchis de toutes ces absurdités. C’est comme d’une maladie terrible et pernicieuse que nous prétendons être délivrés de cette antique erreur, qui a régné pendant tant de siècles. Et cette délivrance, nous la devons d’abord à la bonté et à la grâce du Dieu tout-puissant, ensuite à la vertu ineffable des enseignements évangéliques de notre Sauveur, enfin au sage raisonnement qui nous a fait comprendre tout ce qu’il y a d’impie et de criminel à prostituer l’auguste nom de la divinité à des hommes mortels dont il ne reste depuis longtemps que la poussière, à des hommes dont la mémoire est loin d’être sans tache, mais qui n’ont laissé à la postérité que le souvenir et l’exemple de tous les excès de l’intempérance, de la volupté, de la cruauté, de la démence. Ne serait-ce pas en effet le comble de la folie que de voir des hommes irréprochables dans les mœurs, se prosterner devant des débauchés et des dissolus ; des hommes intelligents et sensés rendre un culte religieux a des hommes qui ont perdu la raison ; des disciples de la justice et de la charité se constituer les adorateurs de monstres qui se sont imprimé la tache honteuse de la plus révoltante cruauté, en souillant leurs mains dans le sang de leurs parents ou de leurs enfants ? Prostituer le nom adorable du Dieu de toute sainteté, à ces parties du corps humain, que l’honnêteté même ne permet pas de nommer ou bien à des êtres sans raison ; se peut-il concevoir quelque chose au-delà d’une pareille impiété ? Diviniser des actions, qui sont la honte de l’humanité, au point que si des criminels en étaient convaincus devant les tribunaux de la justice humaine, les lois n’auraient pas de châtiments assez rigoureux à infliger à de tels crimes ! mais à quoi bon nous arrêter davantage à annoncer à tous les hommes, Grecs ou Barbares, leur délivrance de toutes ces horreurs ou bien à justifier aux yeux de tout le monde notre défection du culte de ces fausses divinités, lorsque déjà un grand nombre des plus zélés défenseurs de ces superstitions se sont éveillés comme d’un profond sommeil ; ils ont ouvert les yeux de l’intelligence sur les ténèbres au milieu desquelles ils avaient vécu jusque là, et ils ont vu la ridicule frivolité des fables de leurs pères. Revenus à eux-mêmes ils ont eu horreur de la voie dans laquelle ils avaient marché, et en ont embrassé une nouvelle. Les uns ont abjuré sur-le-champ les rêveries fabuleuses de leurs pères, devenues l’objet de leurs railleries ; les autres, voulant seulement décliner le reproche d’impiété, n’ont pas persévéré dans leur ancienne voie, sans cependant l’abandonner entièrement. Ceux-ci, dans le dessein d’ôter à leurs systèmes ce qu’ils ont d’absurde et de honteux, ont prétendu que les histoires réputées jusqu’alors véridiques sur les dieux reconnus par tout le monde, n’étaient qu’une invention des poètes, dans laquelle il fallait chercher des allégories physiques. Bien qu’ils ne puissent apporter la moindre preuve à l’appui de cette assertion, nous consentons cependant volontiers à exposer ce qu’ils ont de plus spécieux dans leurs doctrines afin de mettre dans tout leur jour les raisons qui nous les ont fait abandonner, avantage que nous devons uniquement aux heureux renseignements de notre Sauveur. Maintenant, donc, reprenons les choses de plus haut et examinons.